LA VILLA ESCLAVAGISTE ?

1. Je voudrais faire le point sur une question naguère déjà bien débattue : la part de la main-d'œuvre servile et de la main-d'œuvre libre dans l'économie agraire, à la fin de la République et sous la Haut Empire.

1.1. Je ne considérerai que l'opposition libre/esclave, la summa diuisio ] et je ne recourrai pas au concept de dépendant, qui, pour l'époque envisagée, ne correspond à aucune catégorie du droit romain et qui, dans le domaine que j'étudierai, risquerait d'engendrer une confusion difficilement maîtrisable. On pourrait m'objecter que le terme de dépendant regroupe les esclaves et les affranchis, constituants de cette « classe servile » ainsi définie par certains historiens marxistes ; si les affranchis sont bien, en un sens, libres et citoyens de plein droit, d'amples développements juridiques, portant sur les officia et les operae qu'ils doivent à leur ancien maître, sur la dévolution totale ou partielle de leurs biens à celui-ci après leur mort, affirment le maintien d'un lien de dépendance de l'affranchi vis-à-vis de son patron. Certes, mais, premièrement, il conviendrait de circonscrire ce phénomène, dont on ne voit, d'ailleurs, pas trop quelles seraient les conséquences dans l'économie agricole 2 ; deuxièmement, les textes présentent plus ou moins comme une norme l'acquisition de la liberté par son rachat grâce au pécule. L'affranchi suis nummis 3 ne se fait normalement pas libérer directement par son maître, mais vendre avec une clause ut manumittatur 4 à un tiers, qui, maître d'un instant, sera théoriquement le patron sans pouvoir prétendre à rien. L'attitude typique de l'affranchi romain est, comme le veut Plaute, de