QUEL AMÉNAGEMENT PASTORAL POUR LE SAHEL?
par Alioune Sall*
Le quinquennium d'années déficitaires 1969- 1974 a renforcé l'idée qu'il y a urgence à changer les choses dans le Sahel, car il est apparu rétrospectivement qu'en bien des points, dans l'immense bande sahé- lienne, les limites de l'intolérable avaient été atteintes avant la rupture induite par la grande sécheresse.
Il est urgent d'agir. Encore faut-il pour agir disposer d'une photographie même floue de la réalité; or, de ce point de vue, beaucoup reste à faire, car jusqu'ici, à de rares exceptions près, les explications ont été sommaires ou entachées de présupposés sociaux évidents.
En effet, de nombreux exégètes de la grande sécheresse s'attachent encore à quelques caractéristiques écologiques du Sahel, hors de toute référence sérieuse au système socio-économique mis en place dans ce milieu sahélien. Cette approche conduit souvent à privilégier dans l'environnement l'aspect contraintes — renforcé par la difficulté d'établir une prévision sérieuse des cycles d'aridité du milieu — et à envisager le futur du Sahel principalement sous l'angle d'améliorations du cadre naturel. Quand une allusion est faite aux processus sociaux dans ces écrits, c'est pour accuser « l'homme » : agent de la dégradation du milieu, animal nuisible qui a demandé à cette zone marginalement utile qu'est le Sahel plus qu'elle ne peut fournir, qui n'a pu tenir compte assez amplement de la spécificité du milieu. La grande sécheresse serait donc la conséquence d'un mauvais « management » de ressources naturelles limitées en quantité et en qualité.
La tentation est grande, avec une telle approche, de formuler des hypothèses pour une utilisation des ressources en s'inspirant des progrès technologiques les plus poussés. A une telle perspective, on n'échappe
* Sociologue, chargé de recherche à I'enda.
Revue Tiers-Monde, t. XIX, n° 73, Janvier-Mars 78 тм — 6
