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En relisant Une journée d'Ivan Denissovitch trente ans après

[article]

Année 1993 65-3 pp. 499-509
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EN RELISANT UNE JOURNÉE D'IVAN DENISSOVITCH TRENTE ANS APRÈS

PAR MARIE SÉMON

За горами, за лесами, за широкими морями...

Il y a trente ans, nous lisions Une journée d'Ivan Denissovitch pour la première fois. Nous en recevions le choc. Nul ne pouvait le nier ni chercher à « ne pas désespérer Billancourt » : les camps de travaux forcés existaient bien. Jusque-là, et malgré les témoignages qui nous parvenaient, nombre d'Occidentaux étaient restés sourds et aveugles au cancer de la Russie. Le récit fit l'effet d'une bombe. Non pas celle du terroriste qui tue, mais celle d'une œuvre d'art qui, en révélant le Mal du régime totalitaire communiste, rend la vie aux enterrés vivants, fait parvenir leurs voix jusqu'à nos oreilles.

Mais l'intérêt politique d'un ouvrage, si vif soit-il, ne fait pas l'œuvre d'art. Notre émotion, alors, n'était-elle pas plus politique qu'esthétique ? Or actualité et politique ne sont pas génératrices d'immortalité. Pourtant, si les révélations de Solženicyn sont parvenues jusqu'à un large public, si elles ont résonné haut et fort, si aujourd'hui encore nous lisons ce récit, c'est sans doute qu'au-delà de la politique il y a autre chose.

Qu'est-ce qui fait qu'une œuvre — tableau, musique, texte... — entre dans le domaine étrange, universel et immortel de l'art ? Qu'est-ce qui fait d'une œuvre un chef-d'œuvre ? On ne saura jamais l'expliquer jusqu'au bout. Mais le temps, s'il ne détruit pas un ouvrage, n'en laissant subsister au mieux que quelques traces d'intérêt historique, peut au contraire le faire apparaître dans toute sa splendeur. Une œuvre d'art évolue dans le temps. Au chef-d'œuvre les années confèrent la noblesse et la vraie beauté. Nous ne lisons plus Une journée... comme il y a trente ans. L'effet de la bombe lancée par le petit David contre le géant Goliath du stalinisme s'est atténué pour laisser plus de place à l'émotion esthétique.

Au reste, n'étions-nous pas au plus haut point décontenancés par ce contact avec un univers totalement étranger, le goulag ? Notre première lecture n'était- elle pas lourdement entravée par le tissu de discours divers, incompréhensibles pour nous, tout autant que la monstruosité inouïe du phénomène qu'ils exprimaient ? Jargon grossier du camp, argot, idiolecte des truands... dont n'auraient

Rev. Étud. slaves, Paris, LXV/3, 1993, p. 499-509.

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