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Un pastiche de Proust : "L'Affaire Lemoine dans les Mémoires de Saint-Simon"

[article]

Année 1977 5 pp. 17-22
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Un pastiche dans

de Proust : "L'affaire Lemoine les Mémoires de Saint-Simon "

En janvier 1908 éclata dans la presse parisienne une affaire judiciaire qui, pendant plusieurs mois, allait intriguer, passionner, voire inquiéter les lecteurs, avant de se terminer d'assez piteuse façon pour son héros. Ce fut l'Affaire des Diamants, où l'on vit inculper un prétendu ingénieur, nommé Lemoine, qui avait reçu du gouverneur de la compagnie De Beers une commandite de 1 671 000 francs de l'époque pour fabriquer industriellement des diamants (comme il l'avait déjà fait au cours d'expériences) et qui n'avait pas tenu sa promesse. On devait apprendre que l'escroc, car c'en était un, avait magistralement berné, au cours d'expériences truquées, tout un public de banquiers et de riches Anglais. Et l'Affaire, après avoir tenu en haleine les porteurs d'actions des compagnies diamantifères, suscité dans les académies et les cercles scientifiques de doctes controverses sur les possibilités de cristallisation en diamant du carbone porté à haute température, s'acheva au milieu des sarcasmes et des caricatures des journaux.

Or, l'un des lecteurs du Figaro de l'époque était Marcel Proust, écrivain jusque-là connu des seuls initiés pour un recueil d'essais symbolistes et mondains, Les Plaisirs et les Jours, et deux traductions d'ou¬ vrages de Ruskin. Mais ses ambitions étaient déjà autrement vastes, comme devaient le montrer par la suite un gros roman qu'il avait laissé inachevé, et plusieurs études d'esthétique littéraire et picturale. A ce moment, il se préoccupait des problèmes du style et de l'originalité des écrivains.

Un jeu littéraire particulièrement prisé alors était le pastiche, et le célèbre recueil A la manière de... de Reboux et Muller venait de paraître en 1907. Proust lui-même s'y était livré avec délices et abondance, et avait déjà pastiché Jules Lemaître, La Bruyère, Flaubert, Montesquieu, Mme de Sévigné, Balzac et le duc de Saint-Simon, ce dernier dans un article du Figaro du 18 janvier 1904, «Fête chez Montesquiou à Neuilly (Extrait des Mémoires du duc de Saint-Simon) ».

L'Affaire des Diamants suscita une fois de plus sa verve et, entre le 22 février et le 21 mars 1908, il fit paraître dans Le Figaro , sous le titre général «l'Affaire Lemoine », sept pastiches de Balzac, Faguet, Michelet, les iGoncourt, Flaubert, Sainte-Beuve, Renan. Un huitième, attardé, parut le 6 mars 1909 sur Henri de Régnier. D'autres, que l'on a en partie retrouvés, restèrent à l'état d'ébauches. Textes de diver¬ tissement, adaptés à un épisode plaisant de l'actualité, c'étaient aussi des tentatives de «critique en action », parallèles aux études de critique analytique que Proust menait en même temps sur les mêmes auteurs.

Il voulut publier ces articles en volume, et prit contact avec des éditeurs dès l'été de 1908. Mais en vain. Au début de 1909, il fit rechercher son ancien pastiche de Saint-Simon, bien qu'il ne fût pas consacré à l'affaire Lemoine, pour le réunir aux autres. Puis il cessa de s'en occuper, bientôt entièrement absorbé par l'important projet qui allait devenir peu à peu A la recherche du temps perdu. En 1913, quand parut Du côté de chez Swann , il parla de nouveau d'intégrer ses pastiches à un volume général d'articles conte¬ nant aussi de la critique. Puis ce fut encore le silence sur ce sujet, jusqu'à la fin de la guerre. Mais un silence actif puisque, pendant ces quatre années, Proust, tout en développant de façon considérable son roman, accumulait dans des carnets de nombreuses notes sur Saint-Simon, qui allaient lui servir, comme nous verrons, à une double fin. Dès l'été 1918, à l'approche de la paix, en même temps qu'il achevait A V ombre des jeunes filles en fleurs, il revint à l'annonce de son recueil, rechercha ses articles, adopta le titre d'ensemble de Pastiches et Mélanges, écrivit à ses correspondants qu'il avait repris, développé et adapté à l'Affaire Lemoine l'ancien pastiche de Saint-Simon. Ce texte parut enfin sous sa forme nouvelle dans les Pastiches et Mélanges, que Gallimard mit en vente le 23 juin 1919, au même moment que les Jeunes Filles.

Ce pastiche a donc une longue histoire, partiellement étrangère à Lemoine. Les principales étapes méritent d'en être parcourues, maintenant que nous le permet la connaissance des carnets d'esquisses et des cahiers de brouillon de l'écrivain .

«Fête chez Montesquiou à Neuilly », de 1904, se rattache d'abord au genre, si développé dans les jour¬ naux du début du siècle, de la chronique mondaine. Proust courtise alors depuis des années le poète Robert de Montesquiou, dans l'espoir d'être introduit par lui dans le monde aristocratique et littéraire où il évolue avec beaucoup de morgue. Il a déjà relaté en termes des plus flatteurs, dans Le Gaulois du 31 mai 1894

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