LIDIA MESCHY

La colline et le marais

La gestion des bassins versants au Burundi et au Rwanda

Le Rwanda et le Burundi, pays montagneux et verdoyants aux nombreuses sources, paraissent offrir à l'agriculture des conditions idéales. Les collines sont une mosaïque de champs-jardins, de bananeraies, de bois d'eucalyptus et de pâturages. A cet agencement inextricable de cultures pluviales, les bas-fonds opposent le dessin net des réseaux de billons irrigués ou drainés. Avant d'atteindre le niveau de production actuel, les terres basses ont longtemps été moins cultivées que les collines. Leur mise en valeur a progressé en même temps que se perfectionnaient les outils aratoires. Cependant, celle-ci ne s'explique pas par le seul facteur technique : elle apparaît aussi comme une adaptation aux projets conçus pour les vallées par le régime royal local - plus actif à cet égard au Rwanda qu'au Burundi - puis au système des cultures obligatoires imposé dans les deux pays par l'administration coloniale belge. Au début du XXe siècle, les marais devinrent un enjeu et le sujet d'un discours confus qui a durablement superposé à la réalité ses diverses projections. Qui se souvient qu'au XIXe siècle, déjà, les habitants de ces deux pays utilisaient les bas-fonds comme champs d'appoint et qu'ils connaissaient un système d'irrigation des pentes ? On admet aujourd'hui comme une évidence que l'aménagement des marais constitue une preuve de l'influence positive exercée par les fortes densités humaines sur le développement agricole [Boserup 1970], oubliant que ces terres n'ont

E. R., juH.-déc. 1989, 115-116 : 129-151.