PIERRE BIDART
Pouvoir et propriété collective
dans une communauté basque
au XVIIIe siècle
Toute communauté possède des biens privés et des biens collectifs, suivant des rapports variables, toujours historiquement déterminés. Et toute constitution de communauté par sédentarisation donne lieu à une appropriation privée réduite du sol (maison d'habitation, champs), d'instruments de travail, de denrées alimentaires, etc.
Au cours de son développement, la communauté améliore ses capacités de production et organise le contrôle de la propriété collective en instaurant un système de démocratie directe. Lorsque la communauté décline, on remarque tout à la fois un amenuisement de l'espace collectif au profit de la propriété privée, la manipulation des organes politiques locaux par une minorité sociale puis leur destruction, l'accentuation de l'individualisme au détriment de l'esprit communautaire, la formation de classes sociales au sein du groupe communautaire. Voilà donc, en schématisant à l'excès, le tracé historique des groupes communautaires, tel qu'on peut le constater au moins dans l'espace européen.
A titre d'exemple, nous nous proposons de présenter le cas d'une communauté basque de montagne, installée dans la vallée de Baïgorry — proche de la frontière franco-espagnole, étroitement encaissée et orientée dans le sens nord-sud — en mettant en évidence les rapports entre la propriété collective et le pouvoir politique au cours du XVIIIe siècle. Pour la compréhension de l'exposé, il convient d'évoquer rapidement le mode d'organisation spatiale et sociale de cette communauté1.
« Etxe », relations de voisinage, propriété collective
La communauté représentait un ensemble déterminé d'unités socio- spatiales, les hameaux, qui comprenaient un groupe d'efcce ou de maisons,
1. Cette étude est extraite d'une thèse de troisième cycle sur « Le pouvoir politique dans le village basque : le cas de Saint-Étienne-de-Baïgorry », préparée sous la direction de M. I. Chiva et soutenue à l'Université de Paris-I en 1975 (à paraître prochainement).
Éludes rurales, 1976, 63-64, juiî.-dêc, pp. 83-92.