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A LA RECHERCHE DU FUTUR La prise en compte du long terme par le droit de l'environnement ( * )
par
M. REMOND-GOUILLOUD
Professeur de droit privé
Introduction
1 . L'environnement, affaire de temps
Le temps commande la question de l'environnement. La plupart des enjeux s'y résolvent à des choix sur la durée. Face à un projet industriel, le parti écologique est celui qui refuse de sacrifier l'équilibre naturel à terme au bénéfice économique immédiat. La gestion écologiquement rationnelle postule la préservation de la ressource dans le temps. A côté de la durée, la fréquence, autre facette du temps, est également omniprésente dans les problèmes d'environnement : l'accident de pollution se caractérise moins par la modification du milieu qu'il engendre, que par la répétition, la soudaineté de l'atteinte, interdisant à la nature de la digérer, et de fabriquer ses résistances à l'agression. Tout est dans la nature fait de rythmes, de cycles et de leurs ruptures.
Les questions d'environnement nous confrontent encore au temps en ce qu'elles mettent sans cesse en rapport des durées incommensurables : ères géologiques, cycles économiques, éclosion d'une mouche, durée d'une vie (1). Des temps du biologiste, du géophysicien, de l'agronome, auquel s'arrêter ? Privées de repères fiables, prévision et décision cherchent leurs marques.
2. Enfin, surtout, l'environnement nous contraint
à prendre en compte dans nos choix d'aujourd'hui les échéances à long terme : c'est dans l'intérêt des générations futures que se trouvent désormais réglementées les substances mangeuses d'ozone (2) et qu'un impôt pourrait être institué pour remédier à l'effet de serre. Or, la longue durée est celle qui nous dépasse ; il s'agit « d'un avenir hors de portée » (3) sur lequel nous n'avons pas de prise. Les enjeux n'y sont qu'hypothèses et les choix simples paris.
(*) La présente étude a d'abord été préparée, aux fins de discussion, dans le cadre du séminaire ECLAT, organisé par le CIRED, sur la prise en compte du très long terme dans l'analyse des risques globaux d'environnement.
(1) Les échelles de temps auxquelles évoluent les différents écosystèmes, d'une part, les faits sociaux, d'autre part, sont diverses : J. Weber et D. Bailly, rapport au séminaire ECLAT, 4 mars 1991, dact., p. 1.
(2) Conv. de Vienne, 22 mars 1985 et son protocole d'application, Montréal, 16 septembre 1 987 ; adde accord de Londres, 29 juin 1 990.
(3) Suivant l'expression de F. Braudel.
R.J.E. 1-1992
