Trois paradigmes
pour les recherches
en didactique
Jean-Pierre Astolfi
Quel que soit le type de recherche que l'on conduit, il est primordial de s'interroger sur la nature des résultats fiables qu'elle peut produire, sur le genre d'« objets trouvés » auxquels elle peut parvenir. La didactique n'échappe pas à cette question. Or, ce problème est trop souvent pensé sur le seul mode de l'administration de la preuve, ce qui conduit à des distorsions assez négatives. L'une d'elles consiste à « habiller » en ces termes des recherches qui n'en relèvent pas vraiment, pour tirer bénéfice de la légitimité que cela produit « spontanément ». Une variante conduit à un appui mutuel, pour les recherches participatives, entre recherche et formation : la recherche se trouverait validée par le fait qu'il donne lieu à expérimentation dans des classes réelles (comme
si c'était cela qui lui conférait sa valeur théorique), et symétriquement, une innovation ou une action de formation se trouverait légitimée par le seul fait d'être conduite dans un cadre de recherche (comme si c'était de cela que résultait son efficacité pratique).
Plutôt que de rechercher ainsi la légitimité d'un unique paradigme, mieux vaut examiner la diversité d'acceptions que peut recouvrir cette idée de résultats « fiables » de recherches. Au lieu de l'exigence implicite : « la preuve... sinon rien », il nous semble opportun, en effet, de multiplier les références disponibles et de rechercher une diversité de rigueurs, chacune adaptée au mieux à son objet spécifique.
Revue Française de Pédagogie, n° 103, avril-mai-juin 1993, 5-18