Les origines et la tradition de l’Epitome Sancti Galli
Régis Panisi
Université libre de Bruxelles
Le coeur de l’effort codificatoire romain du Bas-Empire et, au-delà, celui des royaumes successeurs résident dans le défi de la connaissance de la règle de droit dans un environnement juridique complexe et changeant (1). Si la dimension politique ne peut jamais être sous-estimée dans ce contexte, la volonté de produire un outil au service de la pratique est déterminante. Pour résoudre un problème, le juriste, y compris celui du Moyen Âge, doit en effet procéder à des opérations mentales et matérielles méthodiques dans un cadre normé. Lorsqu’en mars 429 Théodose ii (dates de règne : 408-450) charge une commission de spécialistes de la rédaction d’un code comprenant, d’une part, des leges, textes normatifs à portée générale édictés depuis Constantin ier (306-337) et, d’autre part, le Jus, oeuvres des jurisconsultes revêtues d’une autorité juridique, il tente de répondre officiellement à un besoin de connaissance du droit positif, dont l’empereur est la source principale, et s’inscrit dans la suite d’un mouvement de compilations privées dotées des mêmes ambitions (2). Les rois successeurs, régnant sur des populations variées adoptent une démarche similaire tant pour les normes romaines que
(1) Cet article est tiré d’un mémoire de Master en histoire présenté à l’Université libre de Bruxelles en 2012 sous la direction d’Alain Dierkens. Je tiens à remercier les relecteurs de cet article, Alain Dierkens, Alain Dubreucq et Adelheid Krah, qui m’ont prodigué conseils et encouragements. Je souhaite en particulier mettre à l’honneur Christian Lauranson-Rosaz, professeur à l’Université Lyon iii Jean Moulin, qui nous a quittés en 2016 dans des circonstances dramatiques. Christian m’a accompagné durant la rédaction de mon mémoire et m’a fait profiter de sa passion pour l’histoire du Droit. Ses compétences, sa bonne humeur et son amitié sincère nous manquent à tous… Éditions des sources latines et abréviations utilisées : Cap. Rem. : Capitula Remedii, éd. Elisabeth Meyer-Marthaler, Lex Romana Curiensis, Aarau, Verlag Sauerländer, 2. Auflage, 1966 (Die Rechtsquellen des Kantons Graubünden, Alträtisches Recht). – cla : Codices Latini Antiquiores, éd. Elias Lowe, Codices Latini Antiquiores. A Paleographical Guide to Latin Manuscripts Prior to the Ninth Century, Oxford, Clarendon Press, 1934-1966.– CTh : Code théodosien, ed. Theodor Momm sen & Paul Meyer, Theodosiani libri xvi cum constitutionibus Sirmondianis et leges novellae ad Theodosianum pertinentes, Berlin, Weidmann, 2 vol., 1905 – lrv Cth int. : Interpretationes du Code théodosien au Bréviaire, éd. Gustav Haenel, Lex Romana Visigothorum, Leipzig, 1849.– Ep. Jul. : Épitomé de Julien, éd. Gustav Haenel, Iuliani Epitome Latina Novellarum Iustiniani, Leipzig, 1873.– esg : Épitomé de Saint-Gall édité par Elisabeth Meyer-Marthaler (1959), éd. Elisabeth Meyer-Marthaler,
Lex Romana Curiensis, Aarau, Verlag Sauerländer, 2. Auflage, 1966 (Die Rechtsquellen des Kantons Graubünden, Alträtisches Recht). – esg (Canc) : Codex Haeneliani dans l’édition de Canciani (1789), éd. Paulo Canciani, «Lex Romana » , dans Barbarorum Leges Antiquae,
Venise, 1789, t. 4, p. 469-510. (2) CTh. 1.1.5. La partie relative au Jus ne verra finalement pas le jour. Nous pouvons citer les codes grégorien (vers 291) et hermogénien (vers 295).
Revue belge de Philologie et d’Histoire / Belgisch Tijdschrift voor Filologie en Geschiedenis, 95, 2017, p. 629-662
