L'UNION DES DEUX NATURES

POLITIQUE ET MYSTIQUE DU PACTE DE LA SAINTE ALLIANCE

Plus d'un siècle et demi après sa signature, le pacte de la «Sainte Alliance» conclu, le 26 septembre 1815 entre le tsar, le roi de Prusse et l'empereur d'Autriche, intrigue encore par l'aspect mystique de son langage.

A l'époque de sa publication, en 1816, par le tsar, la cour de Vienne prétendit qu'il s'agissait d'un document à vocation purement morale. Le roi de France au contraire, en y donnant son adhésion, le 19 novembre 1815, lui attribuait la valeur d'une alliance politique à part entière i1).

On reconnaît aujourd'hui la portée politique de cet acte. On admet qu'Alexandre Ier en ait été véritablement l'auteur. Mais après l'avoir longtemps attribué à tort à l'influence de la baronne de Krudener, on y voit encore une éclatante manifestation de l'esprit mystique attribué au tsar Alexandre Ier, dont la personnalité intrigue par ses apparentes contradictions (2).

La raison principale en est sans doute que le langage mystique dans lequel fut rédigé l'acte du 26 septembre 1815 a su réunir les deux natures mystique et politique de la pensée du tsar Alexandre Ier. Car il semble bien, si l'on analyse l'évolution da sa pensée, qu'Alexandre Ier chercha constamment un équilibre moral entre son action politique et ses principes philosophiques.

Elevé à la cour de Catherine II dans l'esprit de la philosophie des lumières, à la fin du 18e siècle, il fut, en fait, un despote éclairé, à la fois libéral dans ses conceptions, et autocrate dans ses méthodes.

On a voulu voir en lui un Hamlet couronné, sans cesse poursuivi par les remords du parricide, parce qu'il dut son accession au trône, à l'âge de 23 ans, à un coup d'état qui coûta la vie à son père, Paul Ier, en 1801. Mais sa grand-mère Cathe-