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APERÇU COMPARATIF

Dans le domaine des transmissions entre générations il ne semble, à première vue, exister qu'une seule règle: la diversité. On est toujours frappé, sitôt que l'on se penche sur les anciens Coutumiers ou sur l'exégèse des pratiques dévolutives, par la multiplicité des règles et par celle, plus grande encore, des pratiques coutumières qui se situent parfois à la limite de la légalité (quand elles ne l'ont pas largement dépassée). Cette véritable profusion de normes et d'usages se manifeste tout d'abord comme un défi à toute tentative de comparaison et l'on est vite porté à abandonner le sujet à l'historien. On suppose, en effet, que lui seul possède les clefs permettant d'ouvrir les innombrables boîtes à Archives qui enferment le secret de tous les facteurs ayant influencé, en un lieu donné, le devenir des dévolutions: plutôt que des mécanismes dont il s'agirait de rechercher la logique, on y voit alors des effets dont il conviendrait de rechercher les causes multiples. L'agencement de ces dernières serait sans doute à chaque fois particulier.

Pourtant, si l'on prend un peu de distance, c'est-à-dire si l'on tente de ramener les diverses composantes à quelques éléments simpJes, on ne manque pas d'être frappé par un fait dont l'évidence s'impose de manière surprenante: les mécanismes de dévolution jouent un rôle décisif dans la construction des destins individuels! Il ne s'agit donc pas d'un objet anodin dont la nature serait indifférente (ce qui pourrait expliquer l'apparent désordre des règles), mais, bien au contraire, d'un ensemble de règles et de pratiques dont l'enjeu est décisif. Il convient même d'ajouter que cet enjeu n'est pas important que pour l'individu seulement, mais aussi pour la société tout entière car ce que gouvernent les mécanismes de dévolution entre générations, ce sont tout à la fois des destinées individuelles et des devenirs collectifs.

Dès lors, une démarche paraît s'imposer d'elle-même, celle qui vise à comprendre comment un même ensemble de règles peut tout à la fois remplir ces deux tâches: présider à la perpétuation d'une entité sociale (une maisonnée par exemple) et garantir la survie des individus. Si l'on suit cette voie, il semble qu'il y ait tout lieu de supposer que, dans leur diversité, les règles dévolutives soient néanmoins susceptibles de s'organiser autour de deux grands axes nécessairement complémentaires: celui de la succession (transmission de l'autorité ou, plus largement de la faculté de représenter le groupe domestique) et celui de l'héritage (dévolution des biens proprement dite). Dès lors tout système particulier peut être caractérisé par une certaine articulation des règles touchant à la succession et à l'héritage.

Il est possible de faire un pas de plus en acceptant l'idée selon laquelle des enjeux aussi considérables que le modelage des destinées individuelles et du devenir collectif ne sauraient être simplement le résultat de contraintes diverses aussi pesantes fussent-elles. Si l'on admet que les normes et pratiques liées à ces enjeux ne sauraient être simplement le jouet de la nécessité, alors il faut convenir qu'ils gravitent certainement autour de ce que Max Weber nommait des principes de légitimité. Dans le domaine qui nous occupe ces principes s'organisent nécessairement autour des représentations que l'on se fait de ce qu'est