Une ABSENCE DE DISCERNEMENT POLITIQUE
Louis-David Delahaye et Christian Ruby
Le bilan des travaux des historiens — tel qu'il est établi dans les articles précédents — ne laisse pas de doute quant à la distinction nécessaire de la mémoire et de l'histoire. Ces chercheurs nous proposent aussi, il est vrai, quelques pistes destinées à faciliter la compréhension du poids dont pèsent lourdement dans notre société des options mémorielles figées. Il convient toutefois d'approfondir ces points et, nous semble-t-il, de travailler plus directement encore sur les impasses politiques et philosophiques de notre temps. Car, en définitive, ce sont elles qui alimentent, sou¬ tiennent et reproduisent les confusions portant sur l'identité mémoire-histoire, tout autant que sur l'idée d'une mémoire conçue comme réservoir de traces et d'une histoire renvoyant sacralement au passé.
En un mot, au lieu de nous plaindre de ces confusions habituelles, voire de leur institutionnalisation, tentons de leur faire barrage en ne leur laissant plus de place. C'est au sein même du politique et de la politique, du sein même du poli¬ tique et de la politique, que nous devons trouver des res¬ sources grâce auxquelles les déborder. Ce qui revient à affir¬ mer ceci : la politique contemporaine (ses modes, ses mœurs, ses actes) ne résulte pas d'une conception de la mémoire et de l'histoire erronée. C'est elle qui la produit, parce qu'en retour elle en a besoin pour se déployer. Si tel est bien le cas, on peut évidemment envisager de procéder autrement. Ten-
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