PALEORIENT, vol. 18/1 - 1992

LE PEUPLEMENT ANCIEN DU KECH-MAKRAN. TRAVAUX RÉCENTS

R. BESENVAL

Introduction

Le Makran.

Le Makran est la partie méridionale du Baluchistan, la pointe la plus au Sud du plateau iranien (Jiwani, sur la côte, effleure le 25e parallèle). Façade maritime des confins indo-iraniens, il forme approximativement un rectangle de 800 km sur 200 km orienté Est-Ouest et partagé actuellement entre l'Iran et le Pakistan. La partie pakistanaise est constituée de chaînes montagneuses parallèles, de faible altitude, et qui délimitent d'étroites vallées s'orientant Est-Ouest dans sa partie centrale. Cette configuration fait de ces dernières des axes de circulation entre l'extrême Sud-Est iranien, spécialement la dépression du Jaz-e Murian, et la plaine de l'Indus.

La partie pakistanaise du Makran, ou Kech-Makran, qui est l'objet de nos recherches, est représentée par les districts administratifs de Turbat et de Gwadar (150 km du Nord au Sud; 250-300 km d'Est en Ouest).

La composante géographique essentielle du Kech-Makran est l'axe Est-Ouest formé par les rivières Kech et Nihing. Le réseau hydrographique de la région, la plupart du temps à sec, est caractérisé par des crues très violentes par la rapidité de leur apparition. C'est lors d'une de ces crues qu'Alexandre aurait perdu une bonne partie de son armée.

Cette région présente trois types de contexte environnemental :

1/ Des vallées où l'on trouve des oasis irriguées (dérivation à partir des rivières, qanat et puits) : Economie agricole (surtout les dattes) avec un peu d'élevage.

2/ Quelques vastes plaines sédimentaires, comme celle de la Dasht et de Kulanch, où l'irrigation est impossible (culture pluviale très aléatoire).

3/ La plaine côtière, très aride, avec la pêche comme unique ressource.

La première description géographique du Makran, sous le nom de Gédrosie, est celle des historiens grecs narrant le retour d'Alexandre et de Néarque, en particulier celle d'Arrien, dans Indica et l'Anabase d'Alexandre.

C'est la première mention du peuplement autochtone de la région et de son environnement, tant sur la côte que dans l'intérieur.

Région isolée tout au long de son histoire, zone de passage vers le grand foyer de peuplement qu'est la riche plaine de l'Indus à l'Est, cet isolement s'est maintenu jusque dans son histoire récente.

Dès 1875 la présence de vestiges anciens dans le Kech-Makran fut signalée par le Major E. Mo- ckler(l), alors «Political Assistant» à Gwadar. Il découvrit, entre autres, le site de Sutkagen-Dor. Mais c'est la prospection qu'Aurel Stein(2) effectua dans la région durant les mois de janvier-février 1928 qui révéla son riche potentiel archéologique.

Après l'indépendance du Pakistan, exceptée une brève visite de H. Field (3) et F.A. Khan (4) en 1955, la seule mission dans la région fut celle conduite par G. Dales (5), et son équipe en octobre-novembre 1960 (travaux à Sutkagen-Dor et découverte de Sot- ka-Koh(6)). Mais pour diverses raisons cette mission est restée unique.

Or, dès les années 50, dans les régions limitrophes, tant au Pakistan (Baluchistan oriental et du Nord-Est, plaine de l'Indus..) que dans les autres pays (Iran oriental, Afghanistan, Arabie orientale..)

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