IX

DEUX GEOLOGUES DU SIECLE DERNIER : FALSAN ET DUMORTIER

par Louis Rulleau.

Two nineteenth century geologists : Faisan et Dumortier

Sans cesse accéléré depuis le XVIe siècle, le progrès des sciences a en¬ traîné la disparition de ces esprits universels qui, tels Rabelais, Erasme ou Léonard de Vinci, maîtrisaient un savoir encyclopédique. Deux cent cinquante ans plus tard quelques personnalités hors du commun comme Diderot, Goethe ou Linné dominaient encore de multiples sujets y compris les sciences de la Terre : il était d'ailleurs de bon ton au XVIIIe siècle, pour les gens cultivés, de constituer un «cabinet des sciences » comme le fit Goethe à Weimar.

Puis dans chacune des sciences, la somme des connaissances va devenir si importante que les chercheurs devront se spécialiser ; au XIXe siècle cependant le domaine des sciences naturelles reste assez ouvert et l'on trouve encore des savants aussi férus de géologie que de botanique, de zoologie ou de préhistoire ; à cette époque un seul homme, amateur de surcroît, peut encore maîtriser une discipline toute entière ce qui est tout à fait exclu aujourd'hui, on ne le constate pas sans une certaine nostalgie.

C'est de deux géologues du siècle dernier précisément que j'ai choisi de vous parler, de deux hommes dont j'aurais aimé partager les études et les recherches : Albert Falsan tout d'abord qui a su mieux que quiconque parler du Mont d'Or lyonnais, Eugène Dumortier ensuite dont l'œuvre paléontologique reste encore inégalée dans la description des faunes de notre région.

Sur la vie d'Albert Falsan je n'ai malheureusement pu recueillir que les quelques renseignements renfermés dans la notice nécrologique écrite en 1902 par son ami Ernest Chantre.

Né en 1833 il appartenait à une honorable famille de commerçants et était apparenté par sa mère à la lignée des Niepce. Peu attiré lui même par le commerce, il s'intéressa par contre dès sa jeunesse à l'histoire naturelle et assez éclectique dans ce domaine réunit très tôt les éléments d'un véritable musée. Dégagé, semble-t-il, de toute obligation professionnelle et de tout souci matériel, il suivit par plaisir, comme beaucoup d'hommes cultivés de son époque, les cours de la Faculté des Sciences de Lyon, en particulier ceux de Fournet qui eut une grosse influence sur lui et dirigea ses premiers travaux originaux ; Falsan lui rendra hommage en 1874 dans son discours de réception à l'Académie des sciences, belles lettres et arts de Lyon, discours

Bulletin mensuel de la Société Linnéenne de Lyon, tome 55, fascicule 8, octobre 1986 (ISSN 0566-1326)