L'archer, le roi, la folie

De Cambyse à Guillaume Tell

Pierre Sauzeau Université Paul-Valéry/Montpellier 3

Au procès en termes de véracité et de mensonge, a succédé, chez les historiens concernés par Hérodote, un débat différent, quoique parfois confondu avec le premier : l'œuvre du père de l'histoire doit-elle être lue comme l'expression du regard grec sur le barbare, révélant essentiellement les structures de la pensée grecque ; ou bien, cette œuvre est-elle susceptible de nous informer sur les civilisations qu'il nous décrit ? Estelle un document historique crédible, non seulement sur la Grèce archaïque, mais aussi sur l'Egypte, la Perse, le monde scythe ?

Il n'est pas certain que ce second problème ait été mieux posé que le précédent. La position d'arbitre que se propose l'Enquêteur le conduit à se placer dans une position qui, dès l'Antiquité, l'a fait accuser de partialité pro-barbare - c'est le thème d'Hérodote philobarbaros - alors qu'on pouvait lui reprocher dans le même temps une partialité pro-athénienne. Rosalind Thomas1 replace Hérodote dans son contexte intellectuel et culturel; or ce contexte, considéré largement, comprend évidemment l'Empire Perse, si vaste, si différent, mais aussi si proche, spécialement pour un grec natif d'Halicarnasse. C'est cette position de go between culturel qui lui permet de développer, au livre ΙΠ de son Enquête, le thème de l'arc.

L'arc identitaire

Ce thème va nous permettre de nous glisser par la pensée d'Hérodote,

11, 2008, p.175-192. 175