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Le Rouleau de Norvège

[article]

Fait partie d'un numéro thématique : La désinvolture de l'art
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Page 359

Marjorie Caveribère

Le Rouleau de Norvège

Résumé

Dialogue entre un artiste contemporain et l’esprit de Monsieur Wittgenstein

Au coeur des ténèbres de la forêt norvégienne, déambulait, désorienté, glacé de terreur autant que de froid, un homme. C’était un artiste. Il faisait oeuvre d’art à une époque ou faire oeuvre tout court procédait déjà d’une intention maligne et inconsciente. Comment insérerait-il parmi les objets du monde son bon objet? Là était bien la moindre et la plus vive de ses questions. De telles perplexités restauraient le sommeil que ses relations conjugales lui avaient ôté. C’est pourquoi il y songeait aussi souvent que nécessaire et résolvait la question de l’oeuvre dans les termes mêmes de la discorde: elle échappait à la dialectique, elle était impénétrable et mystérieuse. Pour réduire cette affaire sans plus tarder il fallait la prendre d’une main sûre et néanmoins légère, sinon on s’exposait à la plus révoltante des couillonnades. Cet homme, habile et très manuel, portait le nom de Saverio Lucariello. Désireux de distendre le rapport objectal et de délacer sa contrepartie, il s’était exilé en Norvège. On se dira qu’il n’y a aucun rapport de conséquence, mais c’est dans l’absence d’un tel rapport que se loge le caractère probant de l’artiste. Son errance doublait le pas de Dante et de Sweeny. Il ne savait, entre la vision céleste du triangle et le repas de cresson, lequel des deux l’emporterait. Son honnêteté était remarquable et à elle seule aurait suffit à le distinguer. Aussi, avançait-il, d’un pas sans défaillance, sur un chemin crissant, l’oeil bordé de givre fixé sur des pensées opioïdes. À une bifurcation mentale, il hésita entre la voie de droite qui se devinait à sa droite par ce seul signe distinctif d’être à sa droite et celle de gauche qui se distinguait de la précédente pour n’être pas la voie de droite. Tout cela était fort difficile à extraire de l’espace touffu des épicéas gelés de part et d’autre. Il faillit pleurer. Mais le canal lacrymal, bouché par ce qu’on appelle un glaçon, ne lui permit pas de s’épancher. Il se mit à grelotter. Le claquement des dents s’ensuivit, et la parole émergea, dubitative et pleine de présupposés comme un iceberg. Elle flotta dans l’air et se condensa en boules ou 359

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