Ce numéro devait apporter la suite de l'étude de G. Crespy sur les théologiens de la mort de Dieu. Des difficultés de méthode ont retardé l'achèvement de ce travail que nous publierons ultérieurement. Nous espérons que nos lecteurs accepteront cette attente prolongée, comme un signe du sérieux de la recherche de notre ami qui a bien voulu nous confier, à la place, la suite de /’Introduction à l’éthique dont il a publié un premier article dans le n° 2 de 1967, auquel nos lecteurs voudront bien se reporter.
INTRODUCTION A L’ÉTHIQUE
2. Éthique de situation et éthique en situation
Si l’Éthique est, comme nous l’avons vu, un effort pour discerner l’homme que Dieu veut dans une situation toujours déjà donnée, cette situation devient, du coup, déterminante pour la recherche éthique, d’autant plus déterminante que cette recherche sera concrète, humble, localisée. Il faut alors réfléchir sur ce que signifie, pour la construction de l’Éthique, le fait que la «situation » lui donne son horizon et oriente ses problèmes.
A vrai dire, cette réflexion n’est pas nouvelle. L’éthique post-scolastique soulignait justement que la valeur d’un acte ne saurait être appréciée abso¬ lument, car elle varie avec la situation de cet acte. Ainsi, voler un pain quand on a faim n’est pas identique à voler de l’argent pour acheter un transistor ou un bijou, tuer pour défendre sa vie n’est pas identique à tuer par vengeance, etc. Ces variations invitent à distinguer entre un acte absolu et un acte pris dans les circonstances, qui atténuent ou augmentent sa «gravité ». Tel est l’A.B.C. de la discipline pénitentielle.
La casuistique, dont nous trouvons les premières manifestations dans la théologie rabbinique, et qui s’est développée à partir du second siècle (Tertullien) et, plus encore, dans la théologie médiévale, à propos, préci¬ sément, de la discipline du sacrement de pénitence, a constitué un effort remarquable pour nuancer l’application du jugement moral selon les circons¬ tances où il avait à s’exercer. Elle s’est construite comme une tentative d’appréciation, aussi «objective » que possible, des modifications que la «situation » imposait à la valeur des actes, et, de ce point de vue, elle est du côté de l’existence concrète, on peut la considérer comme une huma¬ nisation de la loi. Parlant d’elle, K. Barth écrit : «On serait tenté de dire que nous avons là la solution idéale du problème que doit résoudre une éthique spéciale... Avec une objectivité souveraine, elle tire immédiatement d’embarras les consciences hésitantes. Elle donne des renseignements
