DOM DESCHAMPS ET LA FIN DU POLITIQUE

Quelques aspects théoriques du dépassement de la politique retiendront notre attention; la discussion sur la fin de la poli¬ tique sera limitée à Dom Deschamps. Les indications qui suivent feront appel à un complexe d'idées que nous illustrerons par quelques citations prises dans Rousseau, Kant et notre auteur, sans référence à la littérature secondaire. Il s'agit plutôt de poser une hypothèse que de proposer une démonstration en règle que nous ferons ailleurs.

Pour simplifier, nous partirons de l'idée que la philosophie politique «éclairée » tente de saisir la réalité politique à partir d'un modèle théorique et idéalisé contrairement à une attitude qui analyserait le phénomène politique comme tel. Une entre¬ prise de ce type voudra justifier le but visé par l'archétype de la société parfaite, et falsifier la société imparfaite dans laquelle nous vivons. Si le problème est correctement posé ainsi, on verra qu'il est insoluble, étant donné que la société parfaite et la poli¬ tique idéale sont deux inconnues que l'on essaie d'accorder et de se faire soutenir mutuellement.

Une des constantes de la réflexion politique de l'époque est l'idée que la politique repose sur une origine conventionnelle. Dom Deschamps croit que ce n'est qu'«un vice d'origine qui ait pu nous amener à l'État »; car :

il est incontestable que le mal moral a sa cause seconde dans l'inéga¬ lité morale et la propriété, sources toujours existantes de nos passions factices; et qu'il sera sur la terre, tant que ces vices fondamentaux de notre état social subsisteront, tant que les appétits de la nature, dépouillés de tout le factice que nous y avons mis par un effet de nos passions factices, ne seront pas nos seules passions... Il est incontestable que les vices d'inégalité morale et de propriété sont nés de notre ignorance