REMARQUES SUR LES ASSISES SOCIALES,

LES FORMES D'ORGANISATION ET LA TERMINOLOGIE

DU COMMERCE MARITIME GREC A L'ÉPOQUE ARCHAÏQUE.

En étudiant la «lettre d'Achillodoros» trouvée récemment dans l'île de Berezaň, j'ai été amené à avancer certaines hypothèses concernant les assises sociales, les formes d'organisation et la terminologie du commerce maritime grec à l'époque archaïque : voir Dialogues d'histoire ancienne. I, 1974. p. 126- 132, 149-154, 163-169. Ces hypothèses peuvent être résumées comme suit :

a) Dans les cités grecques de l'époque archaïque, ce sont les grands propriétaires fonciers (les nobles riches) qui exportent et importent des marchandises.

b) Normalement, ce sont des esclaves des grands propriétaires fonciers ou des gens à leur dépendance - soit de condition «entre les libres et les esclaves», soit de condition libre, entre autres des nobles appauvris - qui effectuent matériellement ce commerce, en voyageant pour vendre et acheter. Autrement dit. les marchands sont normalement des agents (de condition servile ou libre ou «entre les libres et les esclaves») des grands propriétaires fonciers. Cependant il arrive parfois que les nobles riches voyagent eux-mêmes en faisant du commerce.

c) Plwrtêgos est, à cette époque, le terme propre qui sert à désigner le marchand faisant du commerce maritime. Il se peut cependant que ce terme n'ait jamais été couramment employé dans le dialecte attique.

d) Un navire marchand, à l'époque archaïque aussi bien que plus tard, transporte normalement plusieurs marchands, dont chacun s'occupe d'un lot de marchandises ; un lot de marchandises s'appelle, au temps de la «lettre ď Achillodoros» , pliortëgesio)}.

e) Parmi les membres de l'équipage d'un navire marchand, il peut y avoir un homme appelé diopos ou nauphylax ou (selon le témoignage de la «lettre d'Aehillodoros») neouros. Ce «dirigeant» ou «gardien de navire» est chargé «de veiller à la paix et à l'ordre à bord, de tenir les registres des quantités de marchandises que chacun des marchands naviguant sur le navire embarque et débarque aux divers ports, de faire en sorte qu'aucun des marchands à bord ne s'approprie une partie des marchandises appartenant à d'autres».

Sally С. Humphreys a bien voulu me communiquer dans une lettre des objections à certaines de ces hypothèses et à certaines des interprétations de textes contenues dans mon article, et m'indiquer sommairement sa conception - fort différente de la mienne - du commerce grec de l'époque archaïque. Cette critique, dont je lui suis très reconnaissant, m'a poussé à réexaminer la question dans son ensemble (1 )*.

A la suite de ce nouvel examen, je crois devoir «dialoguer» avec mon article du premier numéro de ces Dialogues, en le corrigeant ou précisant sur plusieurs points et en essayant d'aller plus loin.

Mon travail a beaucoup profité des nombreuses discussions que j'ai eues avec Ewa Wipszycka, de ses objections, de ses suggestions, de ses idées.

*Voir notes p. 51 .