L'INQUIETUDE

IDENTITAIRE

ET LA REDÉFINITION

DES FRONTIÈRES

Jean-Paul Willaime

La question de l'identité est de retour tant dans la sphère socio-politique que dans la sphère religieuse. Elle ne se pose pas seulement à propos des identités collectives — lesquelles sont, de toutes façons, toujours portées par des sujets — , mais aussi à propos de l'identité individuelle : qui suis-je, parmi mes semblables, en tant qu'individu singulier ? Qui suis-je aussi en tant qu'homme ou en tant que femme, en tant qu'individu appartenant à une aire culturelle donnée, à une collectivité nationale, à une région, à un milieu professionnel, à un monde religieux ? Le « qui suis-je » se transforme, dans les différents mondes sociaux auxquels appartient le sujet, en « qui sommes-nous ? ». La difficulté à répondre, dans l'un ou l'autre de ses registres, à cette question sur l'identité collective peut renforcer l'inquiétude sur son identité individuelle : la référence à deux mondes culturels, c'est-à-dire à deux façons de symboliser son existence, peut, on le sait, se traduire par des difficultés psychologiques (surtout si ces deux mondes entrent en tensions sur différents points). Comme cette référence à deux mondes culturels peut aussi être riche de potentialités, favoriser la créativité et engendrer une dynamique identitaire nouvelle.

Le simple fait que la question de l'identité se pose traduit une inquiétude, surtout si la question devient lancinante et rebondit sans cesse. Comme une personne peut voir ses capacités sociales réduites (son action, ses relations) si elle est submergée par le souci de son identité,