LES DIFFICULTES D'INTEGRATION DES IMMIGRES TURCS EN RFA

Faruk ŞEN

I. Trente ans d'immigration

1991 marque le trentième anniversaire de la présence des Turcs en RFA. Il est vrai que, au lendemain de la fondation de la République turque en 1923, des membres de l'élite turque sont venus étudier en Allemagne et que, en 1957, des stagiaires ont répondu à une invitation lancée de Kiel par l'Institut du commerce mondial pour y recevoir une formation de contremaître en vue d'un emploi dans des complexes industriels allemands implantés en Turquie. Mais on ne peut vraiment parler d'émigration qu'à partir de 1961. Cette date marque en effet l'entrée en vigueur de la nouvelle Constitution turque dont l'article 18 accorde à tout citoyen la liberté de voyager à l'étranger.

Par la suite, cette émigration ne cessa de croître. Outre le facteur constitutionnel qui vient d'être évoqué, il faut en voir les raisons dans l'insatisfaction de nombreux Turcs vis-à-vis de leurs conditions de travail ou de leur maigre salaire, ainsi que le prestige que les Turcs partis travailler à l'étranger tiraient des objets qu'ils rapportaient lorsqu'ils revenaient passer les vacances dans leur pays. Enfin, il faut mentionner la politique des deux Etats, qui favorisa ce mouvement migratoire et qui finit par s'incarner dans deux accords bilatéraux de recrutement entre la RFA et la Turquie (30 octobre 1961 et 30 septembre 1964).

L'immigration des premiers Turcs en RFA à partir de 1961 était pleinement approuvée par les employeurs et les hommes politiques allemands à cette époque, il y avait un demi-million de postes vacants pour 180 000 demandes d'emploi.

Les premiers salariés turcs se rendaient en RFA dans l'intention de rentrer en Turquie après un séjour relativement court (quatre à six ans), avec toutes leurs économies et parfois avec un bagage technique ou professionnel leur permettant de s'installer à leur compte dans de meilleures conditions. Il s'agissait alors avant tout d'investissements personnels petites entreprises artisanales, cafés, taxis, épiceries ont été leurs premiers investissements. D'autres ont consisté dans l'acquisition de logements et de terrains dans les