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Les gantés et les calleux

[article]

Année 2007 14 pp. 93-101
Fait partie d'un numéro thématique : Les Goncourt et la bohème
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Les gantés et les calleux

On connaît l'orientation donnée par Henri Murger à la « vie de bohème » dont il raconte des Scènes : sans s'acoquiner avec les filous, les assassins, les camelots et autres représentants des classes dangereuses, la bohème accueille « tout homme qui entre dans les arts, sans autre moyen d'existence que l'art lui- même ». L'associant à l'expansion d'une catégorie sociale de professionnels de l'art et de la littérature à une temporalité proprement artistique, Murger accorde ainsi à la bohème une valeur à la fois toujours frappée d'obsolescence et toujours reconduite : « la Bohème, c'est le stage de la vie artistique ; c'est la préface de l'Académie, de l'Hôtel-Dieu ou de la Morgue », c'est le temps, fait d'insouciance et de pauvreté, au cours duquel l'impétrant découvre et vit dans sa chair la condition d'artiste. Pour faire mieux encore la part des choses et des individus, la préface des Scènes de la vie de bohème distingue entre la Bohème des « amateurs » où pullulent ceux qui feignent la bohème, en adoptent la posture, sans en vivre véritablement la condition, la « Bohème ignorée » de ceux qui, parce qu'ils perdent la notion du temps et de la temporalité artistique, expérimentent la bohème jusqu'à la misère, sans parvenir à en sortir, et enfin la « Bohème officielle » qui rassemble des « appelés » et des « élus » de l'art, engagés ostensiblement, mais provisoirement, dans ce mode de conduite et ce statut social.

L'immense succès des Scènes de la vie de bohème, dans sa version romanesque, puis dans sa version théâtrale, puis enfin dans son adaptation à l'opéra par Puccini, a en quelque sorte fixé les composantes de cet ethos particulier, à la fois redouté et valorisé dans l'imaginaire collectif. L'interprétation à l'unisson qui s'en est suivi a fait valoir une « bohème enchantée », selon l'expression de Nathalie Heinich, et a en quelque sorte rejeté hors de la sphère de la critique toute voix dissonante. Or, la voix des Goncourt est de celle-là. A partir du retour de leur voyage en Italie, soit en mai 1856 et jusqu'à la fin de la décennie, le mot et

1. Cet article a été réalisé dans le cadre d'une recherche post-doctorale subventionnée par le Centre de recherche inter-universitaire sur la littérature et la culture québécoises et le projet de recherche Histoire de la vie littéraire au Québec. Cette recherche a également bénéficié du soutien de la bourse d'excellence Gaston-Miron.

2. Henry Murger, Scènes de la vie de bohème, Paris, Michel Lévy, 1869, p. 6.

3. Ibidem.

4. Ibid., p. \\.

5. Nathalie Heinich, L'Élite artiste. Excellence et singularité en régime démocratique, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des sciences humaines », 2005, p. 28.

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