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LES CAHIERS D'OUTRE-MER

Une géographie de l'inégalité

Intégrer la notion d'espace dans une représentation cartographique globale des indicateurs quantitatifs du développement les plus couramment admis, faire ressortir visuellement de la sorte les inégalités existant entre les divers pays de la planète, tel est le propos de Catherine Conrath1. Malgré la simplicité du principe, qui procède du constat, aux antipodes de la modélisation mathématique volontiers oublieuse du caractère contingent des statistiques utilisées, les écueils matériels d'une telle entreprise sont sérieux : discontinuité des séries, hétérogénéité des sources, schématisme inévita¬ ble des données moyennes masquant le détail de disparités internes souvent accusées, référence implicite au modèle de développement des pays industrialisées, rançon inévitable d'une interdépendance croissante. Mais ce parti pris confère sans doute une part notable de sa valeur à ce travail scrupuleux et clair, deux qualités qui se font rares dans le champ pourtant labouré des sciences sociales, où l'arbre du concept cache trop souvent la forêt des faits. Or c'est bien la classification de ces derniers qui demeure une étape majeure de toute démarche scientifique. «En essayant, rappelle Peter Gould2, de minimiser les différences à l'intérieur des groupes constitués (d'objets classés) ; en tentant de faire ressortir le plus nettement possible ce qui différencie ces groupes entre eux, toute démarche classificatoire substitue au chaos original des faits, des données et des observations, les notions d'ordre et de compréhension.»

A la classification justifiée de données brutes, puisées à un petit nombre de sources où dominent les recueils statistiques des organisations internationales, pour le même ensemble de 157 pays, l'ouvrage fait correspondre une cartographie simple, très visuelle, inspirée des principes de J. Bertin. On peut regretter au passage le caractère elliptique des justifications relatives à la représentation cartographique (p. 19). Si le format disponible imposait à l'évidence l'échelle retenue, le choix de la projection équivalente méritait quelques mots de plus.

La démarche analytique, choix et représentation séparée des indicateurs sélec¬ tionnés, constitue une partie importante de l'ouvrage. Un principe unique de figuré (du noir au blanc pour du pire au mieux, par référence au modèle de développement), facilite la comparaison des cartes. Des indicateurs successivement cartographiés, on retiendra l'intérêt du graphique-légende associé à la représentation des critères démographiques. Il complète celle-ci en induisant une typologie des situations directement utilisable. Les indicateurs économiques (les plus classiques, mais aussi parmi les plus trompeurs), intégrent avec raison le rapport à la population. La figuration de l'endettement s'avère à ce titre la plus aléatoire. Il est bien connu qu'on ne prête qu'aux riches et ce sont donc les NPI (Nouveaux Pays Industriels) et les pays producteurs de pétrole qui sont les plus endettés, puisqu'ils sont susceptibles de rembourser plus vite. Mais la logique de la représentation graphique conduit l'auteur à considérer cet endettement important comme un indice de dynamisme économique et à leur attribuer les figurés des situations les plus favorables (ou les moins défavorables) par rapport aux pays dont la dette par