L e moins que l’on puisse dire est que 2007 restera une année faste pour l’histoire de l’architecture aux Pays-Bas. Elle fut marquée par la publication de plusieurs ouvrages de référence, dont certains étaient attendus depuis longtemps et sont le résultat de projets de longue haleine. Le lecteur du
Bulletin monumental est sans doute peu familier de la littérature architecturale néerlandaise. Aussi nous a-t-il paru utile de présenter six ouvrages portant le même millésime, témoins de la vitalité de la discipline et de l’ampleur du champ de recherche, allant de la grande synthèse historique au manuel d’archéologie du bâti, de la monographie d’architecte du XIXe
siècle aux résultats d’un programme transfrontalier sur la renaissance et le baroque.
Koos Bosma, Aart Mekking, Koen Ottenheym & Auke Van Der Woud (dir.), Bouwen in Nederland 600-2000. Waanders, 2007, 688 p.
L’idée de cet ouvrage promu par le Fonds culturel Prince Bernhard remonte à 1990, mais sa réalisation accumula du retard en raison de l’ambition du projet. Il s’agissait d’élaborer une nouvelle synthèse de l’histoire de l’architecture sur le territoire correspondant aux Pays-Bas actuels, du haut Moyen Âge à la fin du
XXe siècle, en impliquant de nombreux spécialistes et en développant une approche qui ne serait plus une histoire des styles, mais une évolution chronologique et typologique. Sous la direction des professeurs Bosma (Amsterdam), Mekking (Leyde), Ottenheim (Utrecht) et van der Woud (Groningue), pas moins de vingtcinq auteurs ont contribué à ce panorama qui remplace avantageusement les deux synthèses existantes, dues à F. Vermeulen (1928-1941) et à E. Ter Kuile et S. Fockema Andreae (1948-1957). S’adressant à un large public, l’ouvrage est un exemple de vulgarisation scientifique, abondamment illustré, pourvu d’une bibliographie et de plusieurs index. Si la division en cinq parties correspondant aux fourchettes chronolo giques 600-1100, 1100-1500, 1500-1800, 1800-1900 et 1900-2000 est classique, l’histoire des typologiques s’enrichit à chaque période au gré des nouvelles fonctions apparues au cours du temps. Ainsi, aux typologies de base que sont l’église, la maison et le château, s’ajoutent successivement les halles, l’hôtel de ville, le musée, l’hôpital, la prison, les forti -fications, l’immeuble de bureaux, le complexe industriel, la gare, l’aéroport, les ponts et autres ouvrages hydrauliques, etc. La distinction entre typologies urbaines et rurales s’estompe à partir du XIXe siècle, pour disparaître complètement avec l’apparition des parcs urbains, des cités-jardins et des villas de banlieue. Chaque partie comprend un chapitre introductif dans lequel les typologies sont mises en relation avec les besoins et les souhaits spécifiques des commanditaires, avec les compétences artistiques, techniques et organisationnelles des archi -tectes, et avec les principes et les idéaux théoriques propres à chaque période. Ont ainsi successivement joué un rôle dirigeant : la noblesse et le haut clergé au Moyen Âge, puis les bourgeois dans les villes commer -çantes dès le début des Temps modernes, la cour des princes d’Orange à La Haye aux
XVIIe et XVIIIe siècles, les nouvelles élites de la société industrielle, les pouvoirs communaux avec leurs programmes économiques, hygiénistes et récréatifs à la fin du XIXe siècle, et enfin le pouvoir central, suite notamment à la loi de 1901 sur le logement ainsi que les grands programmes urbanistiques caractéristiques du modèle hollandais depuis un siècle. Les programmes nationaux de reconstruction après la Seconde Guerre mondiale affirmèrent le rôle prépondérant de l’État. La fonction des architectes suivit une évolution parallèle pour aboutir à une professionnalisation selon les normes actuelles, en réponse à des réglementations croissantes tant en matière de construction que de logements sociaux, d’aménagement 253 2007, UN GRAND MILLÉSIME POUR L’HISTOIRE DE L’ARCHITECTURE AUX PAYS-BAS
Thomas COOMANS
Bulletin Monumental Tome 166-3 • 2008 Mélanges
