La pratique du discernement chez Marc Aurèle

Marc Aurèle pratiquait-il le discernement ? De cet empereur- philosophe nous est parvenue une œuvre intéressante, ses Pensées. Intéressante non seulement pour connaître le personnage mais, comme le dit P. Hadot ' « Les formules pessimestes de Marc Aurèle ne sont pas l'expression des vues personnelles d'un empereur désabusé, mais des exercices spirituels pratiqués selon des méthodes rigoureuses ». Ces exercices, fondés sur la raison, essaient de définir une représentation exacte de chaque objet ou de chaque événement et poussent le stoïcien à ne rechercher que la vertu. Ces exercices conduisent naturellement au discernement. Marc Aurèle invite son lecteur à cette démarche « A chacune de tes actions, demande-toi — De quelle sorte est-elle pour moi ? N'aurais-je pas à m'en donc repentir ? — Réfléchis donc »

(VIII, 1)2.

En étudiant cette œuvre de l'empereur on peut être frappé par l'insistance qu'il met à souligner quelques considérations devant aider les uns et les autres à aller vers la perfection. Si, pour Marc Aurèle, le but est clair, les chemins sont divers selon chacun et demandent beaucoup de renoncement, car, tout ce qui est habituellement considéré comme source de bonheur, c'est-à-dire les plaisirs temporels, est appelé à disparaître pour laisser la place à l'home raisonnable. Celui-ci doit vivre selon son « guide- intérieur » pour le mieux-être de la cité et de lui-même, tendu vers l'Intelligence universelle.

Les étapes pour parvenir à ce stade sont nombreuses : l'homme doit d'abord apprendre à être véritablement homme. Pour cela, il est obligé de choisir son mode de vie et devenir un être sociable qui pratique la vertu pour lui et pour les autres. Il doit surtout se pencher vers ce qui lui est intérieur, se mettre à l'écoute de ce « guide intérieur » qui lui apprendra à relativiser son existence, à comprendre sa place dans la nature, à aller vers la sagesse qui fait vivre en présence des dieux.