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L'économie de la drogue : des modes d'organisation aux espaces de trafic

[article]

Année 1998 78 pp. 114-124
Fait partie d'un numéro thématique : Echanges / Surfaces
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L'économie de la drogue : des modes

D'ORGANISATION AUX ESPACES DE TRAFIC

a assisté ces dernières années à une transformation tant des représentations que des pra¬ tiques sociales liées au trafic de stupéfiants1. Aujourd'hui, c'est sur les quartiers populaires situés à la périphérie des grandes villes que s'opère la focalisation de l'attention publique. A en croire le discours social, ils seraient deve¬ nus un véritable «supermarché de la drogue ». L'écono¬ mie de la drogue serait en passe de suppléer aux ressources de l'économie légale, de faire vivre des familles voire des cités entières, mais aussi de tracer d'autres perspectives de réussite sociale que celles dessi¬ nées par l'École, en particulier pour les jeunes issus de l'immigration. De là à conclure que s'instaurent dans les quartiers dits «sensibles » des logiques mafieuses sur les décombres du modèle républicain, il n'y a qu'un pas que certains franchissent allègrement.

Or une telle vision des choses -si symptomatique qu'elle soit d'un déplacement de la question sociale -est éminemment réductrice. Elle participe d'un effet de méconnaissance de la réalité des pratiques de trafic, à commencer par le fait qu'il n'existe pas de distribution homogène pour les différents produits (cannabis, héroïne, cocaïne, crack, ecstasy...), qui obéissent à des logiques et à des fonctionnements spécifiques. Une enquête comparative récente (Duprez, Kokoreff, Wein¬ berger, Joubert, 1997) a mis en évidence l'existence d'une corrélation forte entre le cumul des handicaps sociaux, économiques et culturels, mesurables à partir des données concernant les conditions de vie, et l'im¬ plantation d'une économie informelle (licite et illicite), manifeste à travers un faisceau d'indicateurs (interpel¬ lations, saisies, mouvements de consommateurs, répu¬ tations...). Mais elle souligne aussi la diversité des situations locales, la multiplicité et la précarité des posi¬ tions occupées, le caractère incertain des trajectoires qui s'inscrivent dans un système de débrouillardise composé de multiples manières de «faire du business ». Enfin, et surtout, ces travaux montrent bien que les espaces du trafic sont loin de se cantonner à l'univers des cités qui n'en constituent que la face la plus visible socialement.

Pour comprendre le paradoxe que représente la cir¬ culation de richesses au cœur des quartiers pauvres, il faudrait reprendre la chronologie des événements, repé¬ rer selon quelles modalités et dans quel contexte cette

Michel Kokoreff

question a fait irruption sur le devant de la scène sociale (et médiatique), quels déplacements se sont opérés récemment de la thématique du «deal de cité » à celle, plus large mais aussi plus ancienne, de 1'«éco¬ nomie informelle », en quoi elles participent, tout en les renouvelant, aux représentations des lieux de marges. Plus fondamentalement, il conviendrait de mettre à jour les conditions socio-historiques qui ont rendu possible l'émergence des trafics de stupéfiants dans les «banlieues ».

Certes, la hantise suscitée par les faubourgs et les milieux populaires ne date pas d'aujourd'hui ; et il n'est pas absurde de repérer dans la situation présente un phénomène récurrent. Mais il convient de souligner la singularité du processus auquel on assiste par rapport aux constats établis par des travaux antérieurs qui met¬ taient l'accent sur les ruptures générationnelles et sociétales (Castel et al, 1992).

L'économie informelle : un secteur aux milles visages

Au début de la décennie, un état des lieux sur les mar¬ chés illégaux adoptant une perspective comparative entre les pays notait que, des quatre pays étudiés (Pays-Bas, Italie, Grande-Bretagne, France), ce dernier était proba¬ blement celui qui offrait «la connaissance la moins approfondie des marchés des stupéfiants. » (Schiray et al,

1 . Cet article s'appuie sur une recherche menée durant deux ans sur divers ter¬ rains de la région parisienne. (M. Kokoreff, De la défonce à l'économie infor¬ melle -Processus pénal, carrières déviantes et actions de prévention liés à l'usage de drogues dans les quartiers réputés «sensibles », Clersé-lfresi/Minis-tère de la recherche-MILDT, décembre 1997, 394 p.). Il s'agissait de prendre pour objet la construction sociale des problèmes de drogue dans les quartiers pauvres en privilégiant une double entrée : institutionnelle, avec le choix d'une entrée par le processus pénal, à travers l'analyse d'un corpus significatif d'affaires judiciaires complétée par des entretiens avec les principaux acteurs de la police et de la justice ; territoriale, avec une approche ethnographique associant observations sur le «terrain » (quartiers et cités diversement stig¬ matisés et/ou impliqués dans le trafic) et entretiens menés en termes de «car¬ rières » auprès de personnes diversement impliquées dans le milieu de l'illicite. Dans ce contexte, on a pris en compte l'émergence de nouvelles formes d'in¬ tervention en matière de prévention dans l'espace local.

Les Annales de Im Recherche Urbaine n° 7, H. 0IH0-V.Í0-III-9X/7H/1 14/1 1 © METL

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