DU CONSULAT A LA SECONDE RESTAURATION : L'EXEMPLE D'UNE SOCIÉTÉ PROVINCIALE ENTRE GUERRE ET PAIX, LE DÉPARTEMENT DE LA LOIRE

Le point de départ de cette recherche était la question : comment un département, certes du Massif Central, mais sur sa marge orientale et déjà «industrialisé», pouvait-il avoir une aussi mauvaise réputation dans le domaine conscriptionnel du début du Consulat à la fin de l'Empire ? Car ici, comme l'écrit le premier préfet, Imbert, en 1803 (1) : « Les recrutements se sont toujours faits avec les plus grandes difficultés, celui de l'an VIII en a éprouvé d'insurmontables malgré l'emploi des garnisons militaires?» Certes, la Loire n'est pas le seul département a être signalé d'une manière aussi négative mais, de plus, il présente un double intérêt à l'époque qui nous intéresse. Géographiquement, il est fort loin des frontières de l'Empire et n'a donc pas une « culture de guerre », lui qui n'a pas connu d'invasion étrangère depuis des siècles. Socialement, il possède déjà des secteurs textiles et métallurgiques importants qui font de lui une des premières régions industrielles françaises. Si sa localisation pouvait expliquer la tiédeur des traditions militaires de ses habitants, sa dynamique économique - particulièrement l'armurerie - ne tendait-elle pas à l'unir au régime napoléonien ? Inversement, ses traditions religieuses et la structure encore largement paysanne de sa société n'ont-elles pas contribué à lui faire embrasser des choix politiques plus conservateurs ? Après tout, la Loire n'était admi- nistrativement que le résultat du dépiècement du Rhône-et-Loire révolté en 1793 contre la Convention...

Annales Historiques de la Révolution française - 1999 -N° 2 [365 à 371]