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Dossier

Le baccalauréat professionnel de 1985 à nos jours : d’une singularité à l’autre

The vocational baccalaureate from 1985 to today: from one peculiarity to another
Fabienne Maillard
p. 11-22

Résumés

Diplôme professionnel particulier et baccalauréat hétérodoxe, le baccalauréat professionnel a été créé en 1985 dans le but proclamé de revaloriser et désenclaver la voie professionnelle, tout en proposant de nouveaux profils de main-d’œuvre au marché du travail. Malgré son ambivalence et les critiques qu’il a pu générer, son expansion a néanmoins été rapide, soutenue par une politique très volontariste dont l’un des objectifs était de conduire 80 % d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat. Vingt ans après son instauration, le baccalauréat professionnel occupait une place notable au sein de la voie professionnelle et du système éducatif, mais il était devancé par le BEP et se voyait contesté sur plusieurs fronts. Au nom de la « rénovation de la voie professionnelle » et de la mise à parité de ce diplôme avec les autres baccalauréats, un important programme de réforme a été engagé en 2007, qui a modifié le cursus et les finalités du diplôme. Celui-ci se prépare désormais en trois ans et affiche sa finalité de poursuite d’études. Est-il pour autant devenu un baccalauréat « ordinaire », équivalent aux autres baccalauréats et offrant les mêmes opportunités d’études ? En revenant sur les évolutions du bac pro, cet article met en valeur son passage d’une position à l’autre et les ambiguïtés de sa redéfinition comme de sa récente montée en puissance.

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Texte intégral

Introduction

  • 1 Mises en place en 1948, les CPC du ministère de l’Éducation nationale constituent des instances de (...)
  • 2 Promulguée en 1985 par le Premier ministre Laurent Fabius, cette politique a été inscrite dans la (...)

1Créé en 1985, le baccalauréat professionnel (bac pro par la suite) représentait alors une innovation notable au sein du système éducatif, tant par son appellation et sa définition peu conventionnelle de baccalauréat destiné à la vie active, que par son curriculum original. Il sanctionnait en outre un cursus de quatre ans, ce qui le distinguait d’autant plus des baccalauréats général et technologique, préparés en trois ans. Selon B. Bouyx (1996), qui fut l’un des promoteurs de ce diplôme en tant que Secrétaire général des Commissions professionnelles consultatives (CPC)1 au moment où le bac pro a vu le jour, ses concepteurs avaient fait un pari audacieux : décloisonner l’enseignement professionnel en le dotant d’un baccalauréat spécifique, offrir une voie de promotion scolaire et sociale à des jeunes auparavant orientés dans ce qui constituait « le second cycle court », et faire du nouveau diplôme un instrument de la politique visant à conduire 80 % d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat en 20002. Comme le signale A. Prost, le bac pro a été à la fois un vecteur de transformation de la voie professionnelle et l’un des éléments qui ont participé à « remodeler la morphologie du système scolaire français » (2002, p. 96).

2C’est néanmoins d’abord au nom des « besoins » des entreprises que ce diplôme a été mis en place. Présenté comme une réponse aux mutations du travail et du système d’emploi, il devait former aux nouveaux profils attendus sur le marché du travail : des ouvriers-techniciens et des employés très qualifiés, forts de compétences transversales susceptibles de garantir leur adaptabilité, leur sens de l’initiative et leur autonomie. Ce primat de sa dimension professionnelle sur ses prérogatives de baccalauréat a d’ailleurs suscité de nombreuses critiques, relatives à son caractère de « faux baccalauréat » (Zarifian, 1993 ; Figeat, 1996).

  • 3 Inscrit dans la Stratégie nationale pour l’Enseignement supérieur (STRANES), cet objectif a été pu (...)

3Soutenue par une politique très volontariste, la croissance du bac pro a été fulgurante dans ses premières années d’existence. Cependant, en raison des difficultés rencontrées par les bacheliers professionnels pour accéder aux emplois et aux salaires espérés ou poursuivre avec bonheur des études dans l’enseignement supérieur, le bilan du diplôme, après deux décennies, est apparu mitigé, au point de susciter une grande entreprise de réforme, sobrement intitulée « rénovation de la voie professionnelle ». Engagée mi-2007 par le nouveau ministre de l’Éducation nationale, Xavier Darcos, cette réforme a réduit à trois ans la durée de préparation au bac pro en supprimant le cursus de formation au BEP, et affirmé la double finalité du bac pro. Elle a ainsi supprimé certains éléments qui distinguaient ce diplôme des autres baccalauréats, au nom de leur « mise à parité ». Cette réorganisation a eu des effets puisque le nombre des bacheliers professionnels a doublé entre 2005 et 2012, passant de 93 000 à 191 000 (MEN, 2014). Depuis 2013, le bac pro occupe la deuxième place dans la trilogie des baccalauréats et fait l’objet de différentes initiatives ministérielles pour favoriser l’accueil de ses titulaires dans l’enseignement supérieur. Sa reconfiguration en a-t-elle fait pour autant un baccalauréat « ordinaire » impliqué, au même titre que les autres, dans l’objectif de conduire 60 % d’une classe d’âge à un diplôme de l’enseignement supérieur en 20253 ? Comment interpréter les évolutions qu’a connues le bac pro depuis trente ans, qui sont moins linéaires qu’elles ne le paraissent, sont marquées par des décisions peu unanimes et parfois contradictoires, et font de ce diplôme un objet permanent de controverses, aussi bien en tant que baccalauréat qu’en tant que diplôme professionnel ?

  • 4 Pour cette enquête, axée sur les spécialités du commerce et de l’hôtellerie-restauration, des entr (...)

4Pour répondre à ces questions, cet article repose sur l’accumulation de plusieurs recherches menées depuis 1991 sur les diplômes de la voie professionnelle et sur la politique qui y est menée (synthétisées dans Maillard, 2005a et 2005b), ainsi que sur une enquête portant sur les premiers effets de la rénovation de la voie professionnelle (Maillard, 2010)4, complétée par des entretiens menés en 2015 et en 2017 auprès de représentants de la Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO), au ministère de l’Éducation nationale. Fondés sur l’analyse des comptes rendus de CPC, des entretiens avec leurs membres et plusieurs acteurs de l’administration centrale, ces travaux mobilisent également des entretiens avec des chefs d’établissement et des enseignants. L’article n’en présente que les résultats susceptibles d’éclairer les logiques d’action à l’œuvre, bien plus ambiguës et sujettes à résistances que ce que supposent les analyses en termes de « domination scolaire » (Palheta, 2012) ou d’« émancipation scolaire » (Jellab, 2014). Il met en valeur la dimension instrumentale des diplômes professionnels, réélaborés sans cesse pour mieux servir les objectifs des politiques éducatives, malgré les dissensions que génèrent ces transformations et les problèmes qu’elles posent au sein du système éducatif comme sur le marché du travail.

5Deux parties organisent le texte. La première commence à la création du diplôme et déroule le fil de ses principales évolutions jusqu’en 2007, date à laquelle il est reconfiguré. La seconde expose cette redéfinition autoritaire et ses effets pour interroger les nouvelles fonctions du diplôme, dont la vocation propédeutique ne cesse de faire débat, même au plus haut niveau de l’État.

Le bac pro de 1985 à 2007 : un diplôme professionnel et un baccalauréat spécifiques

  • 5 L’enseignement professionnel prépare en effet au CAP et au BEP, tandis que l’apprentissage se conc (...)

6Lorsqu’il crée le bac pro en 1985, le ministère de l’Éducation nationale affirme répondre aux besoins du marché du travail comme à ceux des jeunes orientés dans la voie professionnelle, confinée jusque-là au niveau V5. Bien qu’une passerelle vers le baccalauréat de technicien soit ouverte aux titulaires du BEP, son accès est restreint. Les perspectives offertes aux titulaires des diplômes professionnels s’avèrent d’autant plus limitées que le chômage juvénile prend de l’ampleur dès la fin des Trente Glorieuses en 1975. Il touche en premier lieu les jeunes non diplômés mais également les titulaires des CAP industriels qui rassemblent les plus gros flux d’élèves et s’avèrent peu corrélés à l’emploi (Mouy, 1983). Dans ce contexte, l’arrivée du bac pro est censée offrir de nouvelles opportunités aux élèves, tant scolaires que professionnelles. Elle doit également permettre à la voie professionnelle de rompre avec l’image de « relégation » qui lui est associée depuis son intégration en 1959 dans ce qui est devenu « le système scolaire » (Verdier, 1995). Les ambitions sont donc nombreuses, c’est pourquoi elles ont besoin de quelques impulsions pour prendre forme.

Une réponse à des « besoins » multiples

7Dans les premiers discours institutionnels qui accompagnent la création du bac pro, l’appel à l’emploi est permanent : la tertiarisation de l’économie, la diffusion des nouvelles technologies de l’information et de la communication et la demande croissante d’autonomie et de polyvalence formulée par les entreprises à l’intention des salariés rendent nécessaire une hausse du niveau de formation de la main-d’œuvre. Responsable du service des CPC au ministère de l’Éducation nationale de 1983 à 1998, B. Bouyx estime que ces évolutions justifiaient l’institution de ce nouveau diplôme, qu’il considère comme « le résultat d’une heureuse rencontre entre la demande du monde économique et la volonté de l’Éducation nationale de décloisonner (certains diront sortir du ghetto) les formations professionnelles de type CAP-BEP » (1996, p. 75). Cette conviction apparaissait d’autant plus solide que les prévisions économiques du Bureau d’information et de prévision économique (BIPE), mobilisées par le gouvernement, annonçaient le déclin des emplois non qualifiés ainsi qu’une croissance des cadres et des professions intermédiaires (BIPE, 1984).

  • 6 C’est Jean-Pierre Chevènement, ministre de l’Éducation nationale de juillet 1984 à mars 1986, qui (...)

8C’est à la mission École-Entreprises, confiée le 1er octobre 1984 à D. Bloch6 pour améliorer les relations entre le système éducatif et les entreprises, que revient l’idée de créer un nouveau baccalauréat. Dans un article où il revient sur l’influence de cette mission entre 1984 et 1988, D. Bloch rappelle que « la dénomination de baccalauréat “professionnel” fut difficile à faire admettre », mais également que la décision d’élever le niveau général d’éducation et de créer le bac pro s’inscrivait dans « un projet général de société rejetant l’idée qu’il puisse y avoir une école pour les enfants relevant de certaines catégories sociales, et une (autre) école pour les enfants des autres » (2005, p. 144). Aux objectifs économiques et professionnels s’ajoutaient ainsi des projets de démocratisation scolaire, qui n’envisageaient pas cependant de mettre en cause la hiérarchie scolaire ni les normes de réussite sur lesquelles elle reposait. Or, dans les réticences qu’ils manifestaient à l’égard du bac pro et de la politique institutionnelle, c’est bien la consécration de ce modèle scolaire que redoutaient certains membres de CPC interrogés au début des années 1990, lorsque le ministère voulait en finir avec les CAP de leurs filières (chaudronnerie, tertiaire administratif, mécanique et commerce) (Maillard, 2005a). Représentants des syndicats de salariés, des petites entreprises et des syndicats enseignants s’accordaient pour défendre la pluralité des diplômes professionnels, au nom de la diversité des emplois et des entreprises comme des profils juvéniles, et contre la domination d’un modèle scolaire unique.

9Fruit d’une décision régalienne, la mise en place du bac pro est loin d’avoir fait l’unanimité parmi les partenaires sociaux membres des CPC. Outre qu’aucune négociation n’a vraiment été entamée, sinon pour choisir les domaines professionnels pionniers, l’argument économique ne faisait pas consensus parmi les organisations patronales. Si G. Solaux (1990) estime que cette décision répondait à la demande exprimée par la puissante Union des industries métallurgiques et minières (UIMM), affirmation au cœur du « récit » constitué sur le bac pro, d’autres contestent une telle interprétation. À partir de l’analyse de la mise en place des premières spécialités de bac pro, M. Pillet (1995) et B. Fourcade (1997) soulignent par exemple les désaccords internes aux branches professionnelles, dissensions dont les représentants du ministère se sont servis pour faire passer leur point de vue. Par ailleurs, selon A. Prost (2002), ce n’est pas un bac pro que réclamait la métallurgie mais un diplôme capable de compenser l’absence sur le marché du travail des titulaires du baccalauréat de technicien, désireux de poursuivre leurs études dans l’enseignement supérieur. Il souligne un autre élément : la demande, par les personnels de direction des lycées d’enseignement professionnel, d’une terminale professionnelle pour permettre aux jeunes issus d’un BEP de prolonger leur cursus de formation. Pour cet historien, la décision de créer le bac pro relève du « primat du politique » et ne constitue pas une réponse à une demande économique (Prost, 2002, p. 108).

  • 7 Rapport commandité par le Secrétariat d’État à l’Enseignement technique, en raison de désaccords i (...)

10L’affirmation d’une réponse à des besoins économiques est également contredite par L. Tanguy, qui dénonce, dans son rapport sur la formation à concevoir pour les futurs ouvriers et employés en France7 (1991a), l’aveuglement de la politique de hausse du niveau d’éducation et ses effets d’invalidation sur la formation des ouvriers et des employés. Dans son ouvrage L’enseignement professionnel (1991b), elle déplore aussi l’abandon de la culture professionnelle des ouvriers produite par l’arrivée de nouveaux profils d’enseignants dans la voie professionnelle. Pour assurer les enseignements pratiques dans ce diplôme de niveau IV plus technique et transversal que le CAP, le ministère a en effet eu recours à des enseignants issus de l’enseignement supérieur court, dotés de BTS (brevet de technicien supérieur) ou de DUT (diplôme universitaire de technologie) mais souvent dépourvus d’expérience professionnelle ; autrement dit très éloignés des anciens ouvriers devenus professeurs. Coupure symbolique avec un monde social que les responsables politiques inscrivaient dans un passé révolu, le bac pro a également été accusé de produire des ruptures intra-familiales, les enfants d’ouvriers préparant ce diplôme voulant à tout prix échapper à une condition ouvrière discréditée (Beaud, 1996). Si de telles visions s’ancrent dans une conception ouvrière et masculine de la voie professionnelle qui ne rend pas compte de sa diversité, elles soulignent néanmoins la multiplicité des enjeux portés par le diplôme, ainsi que la vigueur des débats qu’il a pu générer.

Un nouveau type de baccalauréat et de diplôme professionnel

11Ces débats ont été immédiats. Le bac pro se distingue en effet des autres baccalauréats parce qu’il est avant tout dédié à l’insertion professionnelle, ce qui contredit la définition du baccalauréat comme premier grade de l’enseignement supérieur. Ce n’est pourtant pas le premier baccalauréat à mener officiellement à l’emploi puisque le baccalauréat de technicien y conduisait également, même si ses titulaires s’en sont plus souvent servi pour aller dans l’enseignement supérieur (Brucy, 2016). Mais c’est le premier à être déclaré « professionnel » et à ne pas avoir de liens avec l’enseignement supérieur. Il se démarque ainsi, par ses conditions d’accès et son curriculum, des autres baccalauréats.

  • 8 En 1990, 55 % des inscrits en 1re année de bac pro avaient 19 ans et plus (MEN, 1992).

12Pour convaincre les employeurs de sa qualité, le ministère lui impose un cursus plus long que celui des baccalauréats général et technologique : il se prépare en deux ans et l’accès à la formation requiert la détention d’un diplôme professionnel de niveau V, préparé lui aussi en deux années. On n’y entre pas non plus de droit. Dans les premières années suivant la création du diplôme, les candidats sont donc non seulement déjà professionnalisés mais également triés sur le volet. Ces exigences font des titulaires du diplôme des « vieux » bacheliers, d’autant plus âgés que beaucoup d’entre eux ont redoublé avant d’entrer dans la voie professionnelle, voire après8. Cet âge plus élevé les distingue de manière négative dans le système éducatif, en tant qu’il y est considéré comme un marqueur de l’échec scolaire, mais leur est plutôt favorable sur le marché du travail, où les très jeunes gens peinent à s’insérer.

  • 9 Les savoirs y occupent également une place notable, sous la forme de « savoirs associés » dans les (...)

13D’autres éléments caractérisent ce diplôme, comme le fait qu’il inaugure la généralisation des référentiels, l’alternance « sous statut scolaire » et le contrôle en cours de formation (CCF). C’est avec lui en effet que les référentiels se diffusent, introduisant dans la conception des diplômes une césure entre formation et certification, qui étaient auparavant intriquées. Pour chaque spécialité de bac pro est élaboré un référentiel d’activités professionnelles (RAP), qui présente les emplois visés par le diplôme, puis un référentiel de certification où sont présentés les objectifs du diplôme, déclinés en compétences et en indicateurs de performance. Ce nouveau mode d’élaboration des diplômes, qui rompt avec les pratiques qui avaient cours jusque-là, exclut toute référence à la formation et à ses publics. Un tel changement de paradigme prétend mieux prendre en compte la diversité des candidats aux diplômes, qui sont non seulement des élèves mais aussi des apprentis et des adultes, ainsi que la pluralité des voies d’accès aux parchemins : formation initiale, formation continue, enseignement à distance ou candidature libre (auxquels se sont ajoutées la validation des acquis professionnels en 1992 puis la validation des acquis de l’expérience en 2002). Une plus grande liberté est également a priori offerte aux enseignants, dans la mesure où les référentiels n’imposent aucune chronologie pré-établie et sont indifférents au calendrier scolaire. Mais c’est une tout autre interprétation que proposent F. Ropé et L. Tanguy (1994), qui voient dans l’intronisation de l’approche par les compétences et la mise à l’écart de la formation une subordination de la construction des diplômes aux injonctions du patronat, en pleine promotion du « modèle compétence ». Pour ces auteures, les référentiels répondent à une volonté des pouvoirs publics de mettre en adéquation système éducatif et système productif, ce qui revient selon elles à soumettre le premier aux exigences du second. Si l’examen de nombreux référentiels incite à limiter cette critique, tant les logiques de formation et les allusions au public scolaire y restent prégnantes9, le découpage des diplômes en compétences dissociées représente bien, néanmoins, un risque : celui de leur atomisation en petites certifications professionnelles ciblées sur quelques « compétences » et d’une exclusion des savoirs déclarés les moins « utiles » (Maillard, 2015).

  • 10 Le bilan du CCF, réclamé par les syndicats enseignants avant chacune de ses extensions, n’a cepend (...)

14Pour assurer une plus grande proximité entre le système éducatif et les entreprises, une autre mesure prend place avec le bac pro : « l’alternance sous statut scolaire », qui partage la formation et l’évaluation entre les enseignants et les tuteurs de stage en entreprise. Seize semaines de « périodes de formation en milieu professionnel » ont ainsi été imposées dans le curriculum du diplôme. Selon B. Bouyx, ces périodes soigneusement balisées avaient pour but de « rapprocher le monde de l’école et le monde de l’entreprise, en donnant aux jeunes la possibilité de rencontrer le travail réel et se constituer un début d’expérience professionnelle [et de] connaître qu’un certain nombre de compétences ne peuvent être acquises qu’en situation de travail » (1996, p. 75). Sachant que les syndicats enseignants étaient à l’époque très circonspects à l’égard de toute formation prise en charge par les entreprises et pouvaient même se monter hostiles à l’apprentissage, c’est encore une fois une décision impérative qui est prise, probablement destinée à mieux faire accepter le nouveau diplôme par les employeurs. Si aujourd’hui la répartition des tâches entre le lycée et l’entreprise reste un sujet sensible, sensibilité renforcée par la difficulté pour les élèves de trouver des entreprises d’accueil et surtout formatrices, les enseignants lui trouvent cependant divers avantages, dont celui de contribuer à réguler le comportement de jeunes pas toujours enclins à respecter les consignes scolaires (Maillard, 2010). Ils s’opposent plus souvent à une autre initiative lancée avec le bac pro : le contrôle en cours de formation (CCF), forme individualisée d’évaluation certificative que les syndicats enseignants dénoncent encore régulièrement par crainte de voir les diplômes nationaux se transformer en diplômes d’établissement10. Ces réticences n’ont pas empêché le CCF d’être étendu à l’ensemble des diplômes professionnels, jusqu’au BTS.

15Comme le bac pro est avant tout un diplôme d’insertion, les enseignements généraux qui y sont dispensés ne sont pas non plus les mêmes que ceux des autres baccalauréats : il ne propose pas d’enseignement de philosophie, l’enseignement du français est beaucoup centré sur la langue (Lopez, 2010) et ses exigences en mathématiques sont également différentes (voir Sido dans ce dossier). Pour G. Solaux cependant, son curriculum est bien celui d’un « vrai » baccalauréat (1995), même s’il ne prépare pas à la poursuite d’études. Formulée dix ans après la création du diplôme, cette affirmation montre que sa légitimité au sein du système éducatif restait à conquérir.

Le développement du bac pro jusqu’en 2007 : vingt ans d’impulsions et de controverses

  • 11 Les chiffres mentionnés dans cet article proviennent de différentes éditions de Repères et référen (...)

16Entre 1985 et 1990, la croissance du bac pro est rapide : le nombre des inscrits passe de 1 300 à 94 00011. Cette augmentation ne tient toutefois pas seulement à l’engouement des élèves mais également à l’intervention du ministère, qui a décidé de promouvoir le BEP et le bac pro en éliminant le CAP des lycées professionnels et en le dédiant à l’apprentissage et à la formation continue. Né en 1911, le CAP est associé à la construction de la qualification ouvrière, ce qui, aux yeux des responsables politiques de l’époque, signale son obsolescence (Maillard, 2005a). Il est en outre associé à l’échec scolaire puisque les élèves en difficultés scolaires y sont orientés de manière privilégiée, même si dans les dizaines de spécialités en place coexistent des CAP difficiles d’accès, comme ceux des métiers d’art, des CAP artisanaux encore réclamés par les employeurs (restauration, BTP, bois, coiffure, métallurgie…), et d’autres dont les fonctions relèvent principalement de la scolarisation. Principal diplôme de la voie professionnelle en 1985, le CAP présente également le défaut de mener directement à la vie active, ce qui en fait un obstacle à la politique d’extension du baccalauréat. Le ministère met donc tout en œuvre pour que le BEP prenne sa place, en dotant ce diplôme d’une « double finalité » et en le présentant comme le socle du bac pro. Bien qu’elle génère beaucoup d’insatisfactions chez les représentants des petites entreprises, opposés au bac pro et attachés à leurs métiers, comme auprès des enseignants qui s’interrogent sur l’avenir des élèves que parvenait à « sauver » le CAP, cette mise à l’écart du plus vieux diplôme professionnel produit rapidement des résultats. Alors qu’en 1985 il rassemblait plus de 600 000 inscrits en formation initiale (dont un quart d’apprentis), il en regroupe moins de 350 000 en 1990 et seulement 260 000 en 2000 (dont deux tiers d’apprentis). Ce déclin profite d’abord au BEP, qui passe de 391 000 élèves en 1985 à 471 000 cinq ans plus tard et commence à prendre pied dans l’apprentissage. La baisse démographique interrompt toutefois cette croissance, au point qu’en 2000 les lycéens ne sont plus que 445 000 à préparer un BEP, pour 53 000 apprentis. Quant aux effectifs de bac pro, ils gonflent très rapidement jusqu’à regrouper 175 000 élèves et 33 000 apprentis en 2000. Ce développement est toutefois jugé insuffisant par les instances ministérielles, qui vont s’appliquer à trouver différents moyens pour attirer les élèves (Maillard, 2005b).

17La transformation du BEP en diplôme « propédeutique » (loi du 23 avril 2005) est l’un de ces moyens. Cette redéfinition est censée réduire le décalage repéré entre les inscrits en BEP et ceux qui préparent un bac pro. Vivier du bac pro, le BEP persiste à être utilisé par ses titulaires comme un diplôme de sortie du système éducatif, autrement dit comme un diplôme professionnel, usage qui s’intègre mal dans le programme de hausse du niveau d’éducation. Sa conservation pose dès lors question. Dans les CPC les débats sont vifs, car si un diplôme propédeutique a d’emblée peu de sens, ce que les partenaires sociaux s’évertuent à souligner, la suppression du BEP ne fait pas pour autant consensus. Les inspecteurs généraux s’opposent, de leur côté, à cette suppression comme à l’extension du bac pro en trois ans, cursus qui fait l’objet d’une expérimentation depuis 2001 (Maillard, 2010). Les projets de réforme vont bon train mais ils divisent. Malgré ces dissensions, le ministère gomme la finalité d’insertion du BEP pour mieux la confier au CAP, en pleine relance depuis 2002. Relance très pragmatique dans la mesure où, faute de CAP dans les lycées professionnels, la scolarisation des élèves en difficultés et la généralisation des sorties diplômées du système éducatif (objectif inscrit dans la loi d’orientation sur l’école de 1989) s’avéraient impossibles.

18Un tel revirement dans la politique institutionnelle met en valeur les multiples fonctions et usages des diplômes professionnels, souvent bien peu conformes à ce que proclame le ministère et à la vision adéquationniste qu’il promeut – et qu’on lui octroie parfois. Plutôt qu’un rapprochement de la voie professionnelle avec le système d’emploi, c’est un processus de scolarisation qui est à l’œuvre, masqué par l’appel récurrent aux « besoins » des entreprises et par l’existence d’un nombre élevé de diplômes, supposés répondre à des demandes spécifiques d’entreprises. Dans la pratique cependant, l’expansion du nombre de diplômes permet surtout celle de l’offre de formation.

19Pour favoriser l’essor du bac pro, un autre recours est ainsi mobilisé : la multiplication des spécialités. Leur nombre atteint rapidement la cinquantaine, chiffre qui contredit les ambitions de transversalité du diplôme. Des spécialités de métier à tout petits flux se mêlent à des spécialités au spectre plus large et aux flux particulièrement élevés, dont l’objectif de scolarisation et de gestion des flux peut primer sur la préparation à un emploi. C’est le cas de la bureautique, mise en place en 1987 pour donner des perspectives de formation aux dizaines de milliers d’élèves inscrits en BEP, diplôme qui les conduit souvent au chômage et à la précarité. Alors que le bac pro est à l’époque perçu par les chercheurs comme un diplôme ouvrier, ce sont les formations tertiaires qui accueillent les plus gros effectifs. Leur développement repose pour beaucoup sur leur faible coût, les équipements nécessaires pour la bureautique ou le commerce, qui dominent les effectifs, étant bien moins onéreux que ceux des formations industrielles ou de la restauration. Les effets de cette montée en puissance des bacs pros tertiaires ne se font pas attendre. H. Eckert (1995) montre que si l’insertion des sortants de bac pro se dégrade à partir de 1992, c’est non seulement en raison du revirement de la conjoncture économique mais aussi de l’expansion considérable des diplômés du tertiaire. Or, c’est dans ce secteur que les relations entre diplômes et emplois sont les plus lâches et que la concurrence entre les diplômés de niveaux différents, pour un même emploi, est la plus vive. Par ailleurs, contrairement à ce qu’avaient annoncé les prévisions économiques, le nombre des emplois non qualifiés repart à la hausse dans les années 1990, précisément dans le secteur tertiaire (Méda & Vennat, 2004). Cette situation fait que, dix ans après la création du bac pro, « l’espace de qualification » auquel il mène dans le système d’emploi est considéré comme « flou » (Campinos-Dubernet, 1995), alors même que les bacheliers professionnels affluent sur le marché du travail. Depuis, la mesure de leur « déclassement » est devenue l’un des leitmotivs des travaux portant sur leurs modes d’accès à l’emploi (Eckert, 1999 ; Céreq, 2014).

  • 12 Dont le coût est jugé trop élevé, ce que souligne par exemple le « Rapport sur la carte de l’ensei (...)

20En 1997, 59 % des lycéens professionnels sont inscrits dans une spécialité des services ; et parmi ces inscrits, 80 % le sont dans l’une des trois spécialités suivantes : comptabilité, secrétariat, commerce (MEN, 1998). Cette répartition est la même en 2007 (MEN, 2008), mais 80 spécialités sont désormais accessibles, dont une vingtaine rassemble moins de 100 inscrits en terminale (Floriani, Kirsch, Kogut-Kubiak et al, 2009). Si une approche succincte de cette offre de diplômes peut inviter à conclure à l’étroitesse de ces liens avec le marché du travail, les employés représentant en outre la catégorie socio-professionnelle la plus importante de la population active, une observation plus approfondie dément une telle interprétation. Cette offre répond en effet à plusieurs enjeux : scolariser massivement à faible coût ; participer à l’atteinte des objectifs de la politique éducative ; manifester un certain dynamisme corrélé a priori aux évolutions du marché du travail ; prendre en compte des activités professionnelles émergentes et concéder à certaines demandes émanant des organisations patronales, même lorsque celles-ci contredisent la politique affichée. Bien qu’elle déroge avec la définition initiale du bac pro (et avec les consignes de réduction budgétaire adressées à l’enseignement professionnel12), la mise en place de petites spécialités permet aux responsables institutionnels d’établir des compromis avec les branches professionnelles et de faire accepter des décisions politiques impopulaires. Tandis que la création d’un nouveau diplôme ou sa transformation relève du pouvoir central, les décisions qui s’appliquent aux spécialités des diplômes sont en effet discutées avec les partenaires sociaux, qui peuvent trouver là un espace de pouvoir. L’examen du fonctionnement des CPC et les entretiens menés avec des représentants de la DGESCO montrent que, si la demande de nouveaux bacs pros, pendant cette période, résulte de l’intérêt qu’éprouvent les employeurs à l’égard d’une formation juvénile plus longue et plus complète, elle a aussi des liens avec leurs doutes sur l’avenir des diplômes du niveau V. In fine, l’augmentation du nombre des bacs pros présente l’avantage de satisfaire les demandes des branches professionnelles tout en offrant des opportunités pour développer le niveau IV et atteindre l’objectif de conduire 80 % d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat.

21Parallèlement à ce développement, les critiques portées au bac pro par les chercheurs s’étendent. Après avoir porté sur sa faible légitimité académique, économique et professionnelle, mis en cause ses performances insuffisantes sur le marché du travail, elles pointent le cadre trop restrictif des contenus d’enseignement, peu propices à la réflexivité et à l’autonomie (Chatel, 2006), ainsi que ses limites en tant que premier grade de l’enseignement supérieur. S’il donne accès de droit à l’enseignement supérieur, il ne garantit ni l’entrée dans les formations sélectives, où les autres bacheliers sont privilégiés, ni la réussite. Or, malgré les tentatives du ministère pour restreindre à 20 % le taux de poursuite d’études des bacheliers professionnels et ne pas « dénaturer » le diplôme (Bouyx, 1996, p. 76), ses titulaires se révèlent de plus en plus nombreux à vouloir prolonger leur scolarité. La poursuite d’études des bacheliers professionnels devient par conséquent un objet d’inquiétude, aussi bien pour l’administration centrale que pour les acteurs de l’enseignement supérieur. Mal préparés aux exigences de l’enseignement supérieur, les bacheliers professionnels sont en effet nombreux à y échouer, ce qui incite à mettre en cause leur présence dans cet enseignement (Blöss & Erlich, 2000) et à considérer leur diplôme comme « une impasse » (Beaud & Pialoux, 2001).

22Face à cette situation, le nouveau gouvernement mis en place en avril 2007 entreprend une grande réforme pour « valoriser le lycée professionnel » et « initier une profonde refondation de l’offre de diplômes et de la certification » (note du cabinet du ministre du 9 juillet 2007). Dans ce projet, le bac pro occupe une place majeure.

La rénovation de la voie professionnelle : vers un nouveau bac pro ?

23Engagée par Xavier Darcos peu après sa nomination à la tête du ministère de l’Éducation nationale, la « rénovation de la voie professionnelle » modifie le statut et les finalités des diplômes, qui s’avèrent d’autant plus plastiques qu’ils suscitent peu l’intérêt des médias et des fédérations de parents d’élèves. Les oppositions n’ont pourtant pas manqué, comme les questions restées en suspens.

Une nouvelle position pour le bac pro…

24En quelques mois, plusieurs mesures interviennent, qui métamorphosent l’architecture de la voie professionnelle. Le cursus de formation au BEP est supprimé afin de généraliser le bac pro en trois ans et de réduire les coûts de l’enseignement professionnel. Le BEP est néanmoins conservé au titre de « certification intermédiaire », passée pendant la préparation du bac pro. Mis en cause avant la réforme, ce diplôme doit sa survie aux opportunités qu’il offre pour limiter le nombre des sortants sans diplôme. Et pour compenser la disparition de son cursus, le CAP est à nouveau relancé. La voie professionnelle repose par conséquent sur deux piliers : le CAP, destiné aux élèves en très grandes difficultés scolaires et dont le regain peine à voir le jour, malgré toutes les mesures prises en sa faveur (Maillard, 2012) ; le bac pro, dont la fonction propédeutique est affirmée et semble mise à égalité avec sa fonction d’insertion. Un nouveau déploiement est prévu pour ce diplôme, qui doit contribuer plus nettement à l’objectif de conduire 80 % d’une génération au niveau du baccalauréat. Or ce taux stagne à 70 %. Une fois encore, c’est dans une politique scolaire que s’inscrit un tel projet, qui s’intéresse peu aux principes qui régissent le marché du travail malgré les discours qui l’accompagnent, et prend forme sans requérir l’avis des organisations professionnelles qui participent aux CPC.

  • 13 Si des désaccords se sont exprimés dans l’ensemble des CPC, les branches les plus farouchement hos (...)

25Si le substrat de cette réforme n’est pas vraiment inédit tant les mises en cause de la voie professionnelle étaient devenues nombreuses, ses décisions génèrent néanmoins des réactions plutôt vives (Maillard, 2010). Même lorsqu’ils approuvent l’extension du bac pro en trois ans, les enseignants et les partenaires sociaux critiquent en même temps la méthode imposée par le ministre, qui s’est passé de toute concertation, la généralisation du nouveau cursus et sa réalisation à très court terme. La disparition de la formation au BEP suscite par ailleurs l’opposition virulente des syndicats enseignants et celle de plusieurs branches professionnelles. Les premiers s’attendent à une diminution des postes d’enseignants et à des conditions de travail plus difficiles, tandis que les secondes fustigent la scolarisation de la voie professionnelle et une hausse du niveau d’éducation indifférente au contenu des activités professionnelles et aux carrières qui vont avec13. Quant à la désignation du BEP comme « certification intermédiaire », elle est unanimement désavouée.

26Les résistances se situent au sein même de la DGESCO, dont certains responsables s’étaient jusque-là efforcés de défendre le BEP. L’inspection générale n’est pas en reste. Dédié à un premier bilan de la réforme, un rapport publié en 2009 dénonce « un grand malaise » chez les équipes éducatives (Doriath & Cuisinier, 2009, p. 22), en raison d’une « communication insuffisante », de « décisions mal programmées », de l’incompréhension générée par la transformation du BEP en « certification intermédiaire » et d’« un ensemble de dispositifs porteurs de diversification » (Doriath & Cuisinier, 2009, p. 38). Ses auteurs mettent également en garde contre le principe d’égale dignité entre les filières brandi par la réforme, en ce qu’il « renvoie à un modèle unique de réussite scolaire, celui d’une poursuite d’études aussi longue que possible » (Doriath & Cuisinier, 2009, p. 43), sans tenir compte de la spécificité de la voie professionnelle.

27Ces désaccords ne ralentissent pas le rythme de la réforme. Le BEP disparaît rapidement de l’offre de formation pour ne plus être qu’un parchemin destiné à équiper les élèves tentés d’interrompre leur scolarité. S’ils condamnent cette décision, qui vide le diplôme de sa substance et conçoit un nouveau profil de diplôme professionnel, les représentants des organisations professionnelles redoutent plus généralement une déprofessionnalisation des diplômes et le déclassement des bacheliers professionnels sur le marché du travail. Au nom du Medef, P. de Navacelle affirme, lors de la séance du Comité interprofessionnel consultatif du 8 décembre 2008 consacrée aux avancées de la réforme, qu’il trouve « parfaitement intéressante l’action envisagée pour hausser le niveau de qualification des jeunes et pour diminuer les sorties du système éducatif sans qualification » mais que « cette action ne peut pas intervenir sans que soient pris en compte les besoins du monde professionnel ». Il ajoute que « pousser massivement les jeunes à obtenir un diplôme de niveau IV risque de les exposer à de fortes déconvenues lors de leur insertion dans le monde professionnel ». Dans son contenu, la réforme élude en effet les questions relatives à l’emploi.

…dont la finalité de poursuite d’études est mise en avant

  • 14 En 2005 des mentions au bac pro ont par exemple été créées, contre l’avis des partenaires sociaux, (...)

28La double finalité du bac pro est également un objet de discussion. De plus en plus admise par le ministère au début des années 2000, sous l’effet du nombre croissant des bacheliers professionnels inscrits dans l’enseignement supérieur14, elle semble entérinée par la mise à parité des trois baccalauréats. A. Jellab parle ainsi de « l’alignement symbolique du bac pro sur les autres baccalauréats » (2015, p. 85). Le ministère se montre pourtant ambigu sur ce point. Dans une note de service, signée par le directeur de la DGESCO le 25 septembre 2009, il est écrit que « sauf cas particulier de rénovation, les référentiels de bac pro ne sont pas modifiés » tout en signalant l’apparition « de nouveaux programmes d’enseignement général » applicables dès la rentrée 2009. Le décret qui réglemente le diplôme n’a en effet pas été révisé, c’est pourquoi le code de l’éducation peut encore présenter le bac pro comme « un diplôme à finalité professionnelle ». Cette ambivalence conduit les enseignants à proposer différentes interprétations. Parmi les enseignants interrogés peu après le lancement de la rénovation de la voie professionnelle (Maillard, 2010), une enseignante de commerce affirme par exemple :

On va vers deux bacs : le bac général et le bac pro. Le bac pro n’est plus un diplôme pour l’emploi, c’est un diplôme de poursuite d’études. Il n’y aura plus de bac techno, le bac pro mènera au BTS (LP public, Île-de-France).

29Une autre enseignante précise, à propos des enseignements de lettres-histoire dont elle a la charge :

Le programme nouvelle version est vraiment différent. Mais attention, maintenant, par rapport au bac général, il faut être honnête, dans ma discipline le bac pro en trois ans en est loin. […] Entre le programme de seconde et celui de terminale, j’ai l’impression qu’il y a quatre marches qu’on nous demande de faire en trois pas ! […] Ils [les élèves] ont du mal à situer leur date de naissance par rapport par exemple à la chute du mur de Berlin et on ne parle que de ça dans l’année… Qu’est-ce que vous allez leur parler d’Érasme, c’est à des années-lumière ! C’est là où on voit que les programmes ont été faits par des gens dans les bureaux, au ministère, et ce sont des gens qui n’ont pas d’enfants en lycée professionnel ou ils ne savent pas ce qu’est un élève de lycée professionnel (LP public, Hauts-de-France).

30Ces propos montrent à quel point il est difficile, pour les enseignants, de situer le bac pro dans sa nouvelle version. Ceux qui estiment que la réforme accorde au diplôme la légitimité qui lui manquait l’associent à la poursuite d’études, en rayant sa finalité d’insertion. D’autres se disent plus sceptiques, parfois en raison du public accueilli dans la voie professionnelle, qui reste marqué par ses écarts à l’égard de la norme scolaire, d’autres fois au nom du marché du travail et de la part élevée qu’y occupent les emplois d’exécution. Pour eux, l’insertion prime. La singularité de la voie professionnelle et de ses diplômes peut également être défendue, contre la totalisation de la forme scolaire (Vincent, 1994). Pour la plupart des enseignants rencontrés, réduire la durée du cursus de formation en assurant à la fois une professionnalisation complète et la préparation à l’enseignement supérieur relève d’un défi intenable. Ils estiment dès lors qu’il leur faut choisir. Pour les acteurs de la DGESCO qui travaillent avec les CPC en revanche, le choix n’existe pas : l’entrée dans la vie active est la première finalité du bac pro.

Des ambiguïtés persistantes

31Si cette position de principe apparaît cohérente, elle est néanmoins contredite par l’arrivée de nouvelles spécialités de bac pro consécutives à la réforme, sans correspondance avec des emplois identifiés. C’est le cas du bac pro Accompagnement soins et services à la personne, que la DGESCO a mis en place pour remplacer le BEP Carrières sanitaires et sociales et permettre la scolarisation au niveau IV de milliers de jeunes filles, alors que les emplois disponibles réclament principalement des diplômes de niveau V (entretien avec trois représentants de la DGESCO du 7 juillet 2017). Il existe aujourd’hui une centaine de bacs pros, aux cibles professionnelles inégalement cernées. Par ailleurs, trois domaines de spécialités concentrent la moitié des effectifs : commerce-vente, tertiaire administratif et domaine sanitaire et social, qui ne sont pas non plus ceux où la reconnaissance du diplôme est la mieux assurée sur le marché du travail (Céreq, 2014).

32L’affirmation de la prévalence professionnelle du bac pro s’intègre également assez mal dans la politique dite « De bac moins 3 à bac plus 3 » (circulaire MEN-MESR no 2013-0012 du 18 juin 2013), à l’œuvre depuis 2013 pour conduire 50 % puis 60 % d’une classe d’âge à un diplôme de l’enseignement supérieur. Quelle place peut en effet y occuper un « bac d’insertion » ? Cette question est d’autant plus vive que, sur dix bacheliers, trois sont désormais titulaires d’un bac pro, face à deux bacheliers technologiques et cinq bacheliers généraux. Sur le plan quantitatif, la réforme a en effet abouti et permis à la France d’atteindre en 2013 l’objectif de conduire 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat (et non pas au seul niveau du baccalauréat comme c’était initialement prévu). Même si le nombre de ses candidats diminue, le bac pro a rassemblé 216 000 candidats sur un total de 729 000 en 2017 (MEN, 2017). Leur taux de réussite plafonne cependant à 80 % au lieu de 90 % dans les autres baccalauréats, en dépit de l’évaluation individualisée qu’autorise le CCF. Si, comme l’affirment P.-Y. Bernard et V. Troger (2012), la reconfiguration du diplôme a permis d’attirer de nouveaux profils d’élèves, d’un meilleur niveau scolaire et à l’orientation plus souvent choisie, ce n’est guère sensible dans leurs résultats.

  • 15 Discours du 11 avril 2016, annonçant la création de 2 000 places en BTS chaque année pendant cinq (...)

33Une autre ambiguïté concerne la dimension propédeutique du bac pro. Celle-ci est non seulement discrète dans le curriculum du diplôme mais également cantonnée au BTS dans les textes officiels. Dans la « carte des diplômes professionnels » de 2016, le ministère de l’Éducation nationale annonce que le bac pro « permet aussi des poursuites d’études dans l’enseignement supérieur court, en particulier en BTS », ce qui circonscrit le champ des possibles. Pour favoriser ces poursuites dans des formations sélectives où on les attend peu, la loi du 22 juillet 2013 sur l’enseignement supérieur a prévu de réserver des quotas de places en STS (sections de technicien supérieur) aux bacheliers professionnels, sur proposition du recteur. Des mesures de discrimination positive ont ainsi été mises en place pour accueillir plus largement ces diplômés particuliers. Elles ont produit des effets puisqu’ils représentent 30,6 % des effectifs de STS, contre 10 % en 1999 (MEN, 2016). Si leur taux de réussite reste beaucoup plus faible que celui des candidats issus d’un baccalauréat général (85 %) ou d’un baccalauréat technologique (75 %), il a progressé et s’approche des 60 % (MEN, 2016). Les BTS vont néanmoins manquer pour accueillir l’ensemble des aspirants potentiels, car ils n’ont jamais été conçus en fonction des bacs pros. Aux différentes promesses faites par les responsables politiques de multiplier les places en STS (10 000 pour l’ex-Premier ministre Manuel Valls15), qui passent allègrement au-dessus des prérogatives des conseils régionaux en matière d’offre de formation, devrait par conséquent s’ajouter celle de créer de nouvelles spécialités de BTS, avec ou sans l’aval des CPC.

34Dans les discours des responsables politiques, les raisons à l’origine de ces dispositions tiennent à la fluidité des parcours de formation et aux chances qu’ont les bacheliers professionnels d’y réussir. On peut cependant y voir aussi une volonté de massifier l’accès à l’enseignement supérieur en préservant la segmentation des filières et des publics, dans le cadre d’une démocratisation « ségrégative » (Merle, 2002). L’éventualité d’une propagation des bacheliers professionnels au sein de l’université continue en effet d’effrayer les acteurs de l’enseignement supérieur et les responsables politiques, qui s’expriment volontiers sur les dangers qu’ils courent dans les cursus où ils ne sont pas à leur place. La réforme a amplifié ces craintes en donnant une nouvelle importance au bac pro. De nouveaux diplômes et cursus sont donc envisagés, tels qu’un brevet professionnel supérieur en 2013, accessible aux seuls bacheliers professionnels mais qui n’a pas vu le jour, ou « un diplôme de qualification à bac + 1 » plus récemment. Si ces projets sont plus souvent annoncés que mis en forme, ils signalent néanmoins que l’emploi n’est pas leur ligne de mire et que l’égalité entre les baccalauréats est inconcevable. L’invasion de l’université par les bacheliers professionnels semble pourtant peu probable puisque les titulaires d’un bac pro représentent seulement 8,6 % des nouveaux entrants en L1 et 3,1 % des étudiants qui obtiennent une licence en 3 ans (Maetz, 2016).

Conclusion

35Malgré l’importance qu’il a prise dans le système éducatif, le bac pro reste en quête de légitimité scolaire. Depuis sa récente expansion, de nouvelles réformes sont annoncées, qui ne sont pas pure coïncidence : du baccalauréat et de la licence. La sélection à l’entrée à l’université fait également partie des projets en cours, sous la forme d’« attendus » spécifiques à chaque filière. La mise à parité des baccalauréats apparaît par conséquent loin d’être acquise. Marquée par une certaine imprévisibilité, en raison de ses retournements et d’une instrumentalisation des diplômes professionnels aux effets délétères sur le marché du travail, la politique menée dans la voie professionnelle depuis une trentaine d’années l’est aussi par ses paradoxes, quel que soit le gouvernement en place. Alors qu’elle mobilise cette voie de formation pour élever le niveau général d’éducation et affirme la nécessité de mettre en adéquation les diplômes avec l’emploi, cette politique s’applique à la scolariser sans la valoriser et à produire différentes définitions de ce peut être un « diplôme professionnel », contre l’avis des partenaires sociaux. Après trente ans de bac pro et de réformes incessantes, le processus de scolarisation de la voie professionnelle la rapproche moins de la voie générale et technologique qu’il ne la désigne par une singularité négative, tout en affaiblissant ses liens avec l’emploi et la qualification.

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Notes

1 Mises en place en 1948, les CPC du ministère de l’Éducation nationale constituent des instances de dialogue social aux fins de création, rénovation et suppression des diplômes professionnels. Au nombre de quatorze aujourd’hui, elles rassemblent des représentants des pouvoirs publics, des organisations syndicales patronales et salariées, ainsi que des personnes qualifiées. Si leur avis est obligatoire pour chaque décision concernant un diplôme, cette décision revient toujours in fine au ministre.

2 Promulguée en 1985 par le Premier ministre Laurent Fabius, cette politique a été inscrite dans la loi d’orientation sur l’école de 1989.

3 Inscrit dans la Stratégie nationale pour l’Enseignement supérieur (STRANES), cet objectif a été publiquement annoncé par le président de la République, François Hollande, le 17 septembre 2015.

4 Pour cette enquête, axée sur les spécialités du commerce et de l’hôtellerie-restauration, des entretiens semi-directifs ont été conduits avec des représentants des deux CPC concernées (responsables administratifs, inspecteurs généraux, membres des organisations professionnelles), 59 enseignants et 21 personnels de direction de 15 établissements de formation situés dans deux régions, l’Île-de-France et les Hauts-de-France (alors la Picardie).

5 L’enseignement professionnel prépare en effet au CAP et au BEP, tandis que l’apprentissage se concentre sur le CAP. Malgré leurs durées inégales de préparation et leurs publics distincts, le BEP formant en 2 ans des jeunes issus de troisième tandis que le CAP accueille des sortants de cinquième qu’il professionnalise en 3 ans, ces deux diplômes mènent aux mêmes catégories d’emplois : ouvriers et employés qualifiés. Le Brevet professionnel, diplôme de niveau IV, est alors réservé à la formation continue. Il s’ouvrira aux apprentis après 1992 mais pas aux lycéens, sa préparation requérant la signature d’un contrat de travail.

6 C’est Jean-Pierre Chevènement, ministre de l’Éducation nationale de juillet 1984 à mars 1986, qui lui a dévolu cette mission, alors qu’il était président de l’Institut national polytechnique de Grenoble.

7 Rapport commandité par le Secrétariat d’État à l’Enseignement technique, en raison de désaccords internes au gouvernement sur la politique de généralisation du baccalauréat.

8 En 1990, 55 % des inscrits en 1re année de bac pro avaient 19 ans et plus (MEN, 1992).

9 Les savoirs y occupent également une place notable, sous la forme de « savoirs associés » dans les référentiels de certification, et comme savoirs disciplinaires dans les référentiels des enseignements généraux, auxquels ne participent pas les CPC.

10 Le bilan du CCF, réclamé par les syndicats enseignants avant chacune de ses extensions, n’a cependant jamais été réalisé. C’est par ailleurs seulement en 1997 qu’une note de service définit cette modalité d’évaluation.

11 Les chiffres mentionnés dans cet article proviennent de différentes éditions de Repères et références statistiques, ils rassemblent le public et le privé et concernent la France métropolitaine jusqu’en 1990.

12 Dont le coût est jugé trop élevé, ce que souligne par exemple le « Rapport sur la carte de l’enseignement professionnel » rédigé en décembre 2006 par l’Inspection générale des finances, l’Inspection générale de l’administration de l’Éducation nationale et l’Inspection générale de l’Éducation nationale, dans le cadre d’une mission d’audit de modernisation.

13 Si des désaccords se sont exprimés dans l’ensemble des CPC, les branches les plus farouchement hostiles ont été celles du bois, du bâtiment et de l’hôtellerie-restauration.

14 En 2005 des mentions au bac pro ont par exemple été créées, contre l’avis des partenaires sociaux, afin que les titulaires des mentions très bien et bien puissent bénéficier d’une place de droit dans une classe de BTS. Avant la réforme, 40 % des bacheliers professionnels prolongeaient leur formation dans l’enseignement supérieur.

15 Discours du 11 avril 2016, annonçant la création de 2 000 places en BTS chaque année pendant cinq ans, afin d’y accueillir les bacheliers professionnels.

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Pour citer cet article

Référence papier

Fabienne Maillard, « Le baccalauréat professionnel de 1985 à nos jours : d’une singularité à l’autre »Revue française de pédagogie, 198 | 2017, 11-22.

Référence électronique

Fabienne Maillard, « Le baccalauréat professionnel de 1985 à nos jours : d’une singularité à l’autre »Revue française de pédagogie [En ligne], 198 | 2017, mis en ligne le 31 mars 2020, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/rfp/5228 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rfp.5228

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Auteur

Fabienne Maillard

Université Paris 8-Vincennes-Saint-Denis, CIRCEFT-ESCOL

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