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Sentiment de justice et orientation : croyance en la justice de l’école chez les lycéens professionnels

Belief in justice and guidance: Vocational students’ beliefs in a just school
Lyda Lannegrand-Willems
p. 249-269

Abstracts

The aim of this research was to study the links between career guidance after the eighth-grade – considered hierarchical and unequal – with the belief in a just school. This concept transposes onto the school context the concept of belief in a just world defined as the belief that people get what they deserve and deserve what they get (Rubin & Peplau, 1973) and as an important adaptative mechanism which allows individuals to accept their place within the social system (Dalbert, 1999). In the school world, we supposed that pupils guided towards less vocational studies and restricted in their vocational choices believed more than other pupils in a just school and in a just guidance system in order to accept their place within the school system. Moreover, self-positioning is a crucial question at this moment in adolescence. To believe in a just school also allows envisaging the future (future guidance for example) as being just and deserved. We could suppose that pupils who believe in a just school could be more undecided than others about their future vocational choices.
Participants were pupils on popular and less popular courses at vocational schools, who were restricted in their vocational choices to different degrees, and pupils from college. Results showed some effects of the school position, of the restricted guidance counselling and some effects of the future vocational choices on the belief in a just school.
The belief in a just school would therefore be an adaptative mechanism which is connected here to some stages of development in adolescence: accepting his/her place in the school world, the adolescent in search of self-identity, takes his/her place in the school system and more widely in the social system.

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Full text

Introduction

1Cette recherche porte sur les liens entre l’orientation post-troisième, en tant qu’elle est hiérarchisée et donc inégale (Dubet & Duru-Bellat, 2000 ; Dumora, 1998), et la croyance en la justice de l’école, déclinaison spécifique au contexte scolaire du concept de croyance en la justice du monde défini par la psychologie sociale. Selon cette perspective, la croyance en un monde juste prévaut, se traduit par la croyance que les gens obtiennent ce qu’ils méritent (Rubin & Peplau, 1973) et permet d’avoir une image stable du monde, avec l’idée que chaque individu est à sa place. Par transposition au monde scolaire, ce modèle théorique peut conduire à l’hypothèse que les élèves croient en la justice du système scolaire. Le système scolaire est d’ailleurs fortement marqué par les valeurs de mérite, de récompense, en ce sens que le travail scolaire est une condition de la réussite. Croire au mérite, au travail récompensé, c’est aussi croire en la justice du système scolaire, ce qui est un important pré-requis pour l’élaboration des perspectives futures des élèves : le travail, les efforts que les élèves fournissent doivent les conduire à une récompense future en termes de formation, de niveau, et de diplôme. Or, dans les faits, la sociologie de l’éducation a largement mis en évidence des inégalités dans l’orientation des élèves, inégalités dans un double sens.

  • Il existe une forte hiérarchie des filières, des sections, des formations, explicite ou implicite, c’est-à-dire des inégalités des voies d’orientation, à tous les niveaux du système scolaire mais notamment au premier palier de distribution des compétences qu’est la classe de troisième, préfiguration des divisions du monde du travail. Les hiérarchies scolaires s’organisent autour de la valorisation des filières scientifiques théoriques et d’une dévalorisation à différents degrés des filières professionnelles (Berthelot, 1993), car selon les sociologues Dubet et Duru-Bellat (2000), l’enseignement technique et professionnel « court » est d’emblée défini par ce qu’il n’est pas, c’est-à-dire un enseignement général « long ».

  • Cette hiérarchie scolaire s’avère dépendre, en partie bien sûr, de la hiérarchie sociale. Au collège notamment, l’orientation participe à l’accroissement des inégalités sociales de parcours : à niveau scolaire égal, le processus d’orientation scolaire renforce les inégalités sociales, en ce sens que les élèves de milieu défavorisé accèdent moins aux filières générales, et corrélativement accèdent davantage aux filières professionnelles (Duru-Bellat, 2002). Il existe différents mécanismes qui conduisent à cette situation. D’une part, les niveaux de réussite scolaire dépendent en grande partie des niveaux socio-culturels des familles, ce que la sociologie de l’éducation a mis en évidence (Bourdieu & Passeron, 1970, pour les premiers travaux). D’autre part, à niveau scolaire égal, se surajoutent deux types de mécanismes implicites dans les processus d’orientation. D’abord une plus grande « modestie » des enfants et des familles défavorisés pour l’orientation de leurs enfants (Berthelot, 1993). Ensuite, des mécanismes implicites aussi chez leurs interlocuteurs, c’est-à-dire dans les instances d’orientation tels que les conseils de classe, encore décideurs à certains paliers fondamentaux du système scolaire (3e et 2de) (Dumora & Lannegrand, 1996). En somme, la hiérarchie scolaire bénéficie aux élèves les plus favorisés, aux dépens des moins favorisés.

2Alors que le système scolaire est objectivement marqué par des inégalités, les élèves peuvent-ils avoir le sentiment qu’il est juste ? Qu’en est-il du sentiment de justice scolaire pour les élèves « orientés » dans les voies d’orientation les moins prestigieuses ? Qu’en est-il pour des élèves ayant été plus ou moins contraints de suivre des filières professionnelles post-troisième, ayant connu à des degrés divers la stigmatisation de l’élève en échec durant la scolarisation au collège ? Croient-ils en un système scolaire juste ? Cette recherche se propose ainsi d’étudier la croyance en la justice de l’école des élèves de lycée professionnel selon le degré de valorisation des filières, en adaptant le concept de croyance en un monde juste au monde scolaire. Elle a donc un double objectif.

  • L’objectif théorique de recherche consiste à appréhender le concept de croyance en la justice du monde à l’école, à un moment où les élèves font l’expérience de l’inégalité des parcours, c’est-à-dire au moment où s’effectue la répartition scolaire et sociale d’une classe d’âge à la fin de la classe de troisième, moment qui coïncide, en termes de développement psychologique, avec la construction à l’adolescence de l’idée même de justice distributive (Bideaud, 1980 ; Piaget, 1932). Il s’agit donc d’une problématique au carrefour de la psychologie sociale et de la psychologie de l’adolescence. La transposition du cadre théorique de la croyance en la justice du monde à la sphère scolaire fera l’objet de la première partie de cet article.

  • Le second objectif est pragmatique et heuristique puisqu’il s’agit d’étudier et de connaître le sentiment de justice et le positionnement des adolescents vis-à-vis du système scolaire, de l’orientation et de ses pratiques, notamment dans le cas des choix d’orientation contraints. L’étude réalisée sur la croyance en la justice de l’école de lycéens professionnels sera présentée ensuite dans les parties méthodologique et empirique.

Cadre théorique : la croyance en la justice du monde transposée au système scolaire

3Lerner (1980) a mis en évidence l’existence d’une croyance essentielle et constitutive de l’homme : la croyance en un monde juste. Elle est tellement marquée que, même dans les cas où l’on connaît la cause aléatoire de la récompense, on attribue malgré tout du mérite aux personnes impliquées. Par exemple, si deux personnes réalisent une tâche identique mais que l’une des deux est rémunérée après tirage au sort, on a tendance à dire que la personne rémunérée a mérité sa rétribution aux dépens de l’autre personne (Lerner, 1965). Cette croyance est envisagée comme la résultante d’une « motivation » selon laquelle les engagements et les investissements de chacun sont récompensés, et de façon réciproque, les récompenses ou issues positives sont méritées et non pas seulement dues au hasard ou à un avantage quelconque (Lerner, 1977).

4À partir des travaux initiés par Lerner et centrés sur les procédures cognitives qui « justifient » ce qui arrive de fâcheux dans le monde, la problématique de la croyance en la justice du monde a été déplacée dans certains travaux sur les degrés plus ou moins élevés de croyance générale en un monde juste. La croyance en la justice du monde se traduit alors selon Rubin et Peplau (1973) par la certitude que les gens obtiennent ce qu’ils méritent et qu’ils méritent ce qui leur arrive, certitude qui est plus ou moins forte selon les individus. Ces auteurs s’attachent d’ailleurs à identifier qui sont ceux qui croient en un monde juste.

5Il nous est apparu possible de transposer ce concept de croyance en la justice du monde à la question du sentiment de justice à l’école. L’école est un lieu de sélection, et l’orientation fonctionne comme un processus essentiel de différenciation des individus. Il existe des hiérarchies dans l’orientation dans le sens où l’espace des possibles apparaît structuré en filières valorisées et dévalorisées. L’orientation à la fin de la classe de troisième constitue pour les adolescents une des premières rencontres avec la sélection sur des critères de mérite : meilleurs sont les résultats scolaires, plus ouvert est l’éventail des possibilités d’orientation ; moins ils sont bons, plus il se voit réduit. « Toutes formations se situent le long d’une même hiérarchie correspondant, d’une part, au mérite tel que l’école le définit (la réussite dans les disciplines abstraites) et, d’autre part, à l’horizon des positions sociales qu’elles prédisposent à occuper » (Guichard & Huteau, 2001, p. 16). Les élèves se trouvent donc dans un espace plus ou moins contraint : en fin de troisième, les procédures d’orientation confrontent les adolescents à des adultes placés en situation d’autorité (professeur principal, chef d’établissement, équipe éducative, conseiller d’orientation-psychologue). Certes, comme le souligne Huteau (1997), l’autorité n’est pas affirmée de façon brutale, mais on essaie d’amener ceux à qui on propose une orientation dévalorisée à accepter ce que l’on souhaite qu’ils fassent. Il s’agit ici de la caractéristique essentielle de l’orientation contrariée en ce sens que la filière professionnelle que suivra l’élève ne correspond pas forcément à son premier choix d’orientation, et dans certains cas même à aucun de ses choix préalables. La sélection et les procédures d’orientation basées sur des critères de mérite conduisent dans certaines situations à contrarier les aspirations des élèves, à un moment de l’adolescence caractérisé par l’extension des perspectives temporelles et la projection de soi dans le futur (Rodriguez-Tomé & Bariaud, 1987). L’existence de ces orientations contrariées nous conduit à poser la question de la croyance par les élèves en la justice de l’école, dans ses procédures d’orientation et de sélection.

6Comment se construit la croyance en la justice du monde ? Trois hypothèses différentes, qu’on pourrait respectivement qualifier de culturelle, fonctionnaliste et structurale, ont été proposées pour tenter d’analyser son élaboration.

7En premier lieu, on peut concevoir le développement de la croyance en la justice du monde dans une perspective culturelle. Selon cette hypothèse, dans nos sociétés, les enfants grandissent avec l’idée que le monde est juste ; la vertu, le travail sont récompensés alors que les mauvais agissements sont punis, que ce soit dans l’éducation des parents, dans les contes populaires [Rubin et Peplau (1975) citent par exemple Cendrillon dont le dévouement est récompensé par un mariage avec le prince charmant, ou Pinocchio dont les mensonges sont punis systématiquement par l’allongement de son nez], ou dans le système scolaire (dans lequel les efforts scolaires sont un jour ou l’autre « payants »). Cette croyance résulterait d’un apprentissage social, basé sur l’internalisation de normes culturelles. Feather (1991) parle d’agents de socialisation par lesquels on apprend aux enfants que le monde est juste et qu’il est important de respecter l’autorité. Cette forme d’apprentissage social établirait des relations entre des croyances en un monde juste et des valeurs de conformité en termes de règles de conduite.

8Une deuxième hypothèse du développement de la croyance en un monde juste met plutôt l’accent sur les fonctions psychologiques de cette croyance dans le sens où les individus ont besoin de comprendre la signification motivationnelle de la croyance en la justice du monde (Lerner, 1974, 1980). Selon cette perspective, la croyance en un monde juste ne peut seulement résulter d’un apprentissage social et d’une intériorisation de normes culturelles dominantes. Son élaboration correspondrait au développement de la capacité de se désintéresser des récompenses immédiates pour atteindre des finalités ultérieures et supérieures. La croyance en un monde juste aurait ainsi un statut psychologique et peut s’inscrire dans les étapes du développement : pour passer du plaisir à la réalité, l’enfant apprend à différer les gratifications, avec l’idée que l’effort qu’il consent de faire sera récompensé plus tard. L’enfant a besoin de croire qu’il atteindra le but fixé qu’il mérite, et dans le même temps, il pense que les autres obtiennent ce qu’ils méritent. Une étude longitudinale met d’ailleurs en évidence que la disposition du jeune enfant à différer une gratification a des effets positifs sur l’ajustement de l’adolescent (Shoda, Mischel & Peake, 1990).

9Une troisième hypothèse relative à la construction de la croyance en un monde juste s’appuie sur la perspective cognitivo-développementale de Piaget et de Kohlberg. D’après les modèles d’analyse développementaux, trois stades de l’idée de justice peuvent être distingués. Au cours du premier stade, il n’y a pas de différenciation du juste et de l’injuste. Est juste ce qui est imposé par l’adulte et la sanction immanente est considérée comme l’expression même de la justice. Les arguments de justice immanente utilisés par des enfants âgés de 6 à 8 ans représenteraient d’ailleurs une première forme de croyance en la justice du monde (Jose, 1990). Durant le deuxième stade, l’autonomie et le primat de l’égalitarisme sur l’autorité se développent progressivement. La sanction par réciprocité tend à remplacer la sanction expiatoire. Enfin, le troisième stade conduit à une forme supérieure de réciprocité fondée sur l’équité et sur la justice distributive. Au cours du développement donc, l’immanence de la justice telle qu’elle est perçue par l’enfant va s’étioler. Selon cette hypothèse, la maturation, les expériences individuelles d’injustice conduisent à un affaiblissement de la croyance absolue en la justice. Cependant, les observations empiriques mettent en évidence que la croyance en la justice persiste à des degrés divers chez l’adulte : bien que Lerner (1980) fasse l’hypothèse que l’adulte doit accommoder son désir de justice au monde réel truffé d’injustices, ses recherches mettent bien en évidence que, au lieu d’accommoder sa perception, l’individu utilise diverses stratégies pour conserver et protéger sa croyance en un monde juste. Et ces observations sont en accord avec les travaux empiriques de la psychologie du développement qui utilisent la procédure de Kohlberg : en effet, ils mettent en évidence que peu d’individus parviennent au niveau « post-conventionnel » décrit par Kohlberg (1963), niveau qui permet de relativiser la référence aux normes collectives et plus largement l’idée de justice, la majorité des adolescents et des adultes étudiés ayant un développement moral de niveau conventionnel qui se traduit par une adhésion conformiste aux règles de la société et à la justice (pour une revue détaillée, cf. Lehalle, Aris, Buelga et Musitu dans ce numéro). L’hypothèse développementale est néanmoins valable en ce sens qu’on observe une évolution constante du premier stade pré-conventionnel au deuxième stade conventionnel (chacun d’eux comprenant deux sous-stades dans le modèle de Kohlberg).

10Rubin et Peplau (1975) proposent une perspective intégrative de ces trois hypothèses exposées parce qu’elles ne sont pas exclusives entre elles mais complémentaires. Prises ensemble, elles mettent en évidence que la croyance en la justice du monde a des fonctions à la fois individuelles et sociales ou collectives et qu’elle change avec l’âge. Les adultes enseignent aux enfants à croire en la justice du monde dans le but d’encourager les comportements normatifs, d’encourager les efforts et le respect des institutions et de l’autorité [la croyance en la justice du monde est d’ailleurs positivement liée à la déférence à l’autorité, à la conformité à des règles de groupes, aux institutions ou à la société (Feather, 1991 ; Furnham & Procter, 1989 ; Rubin & Peplau, 1975)]. Pour les enfants eux-mêmes, cette croyance peut être un important pré-requis pour reporter la recherche de plaisir dans une perspective future d’avenir. Le niveau de croyance en la justice du monde est d’ailleurs très élevé et très consensuel chez les enfants de huit à dix ans (Lecigne, in press). À l’adolescence, les caractéristiques de la croyance en la justice du monde vont correspondre, d’un point de vue développemental, au stade conventionnel tel qu’il est décrit par Kohlberg et à la formation de la réciprocité fondée sur l’équité et de la notion de justice distributive (Bideaud, 1980). Moins basé sur l’obéissance, plus relatif aux comportements, le sentiment de justice devient plus autonome au cours du développement. On peut alors penser que la croyance en la justice du monde, bien que généralement élevée, est moins forte, plus nuancée chez les adolescents que chez les enfants. Elle peut être alors plus dépendante des situations ou des caractéristiques des individus.

11La croyance en un monde juste a d’importantes fonctions : elle permet à l’individu de croire que son environnement social et physique est stable, prévisible, ordonné et contrôlable (Lerner & Miller, 1978). Sans cette croyance, il lui serait difficile de s’engager dans des objectifs à long terme ou même dans des comportements quotidiens socialement régulés. En tentant de comprendre ce qui lui arrive et ce qui arrive à autrui, l’individu donne un sens à la vie (Clayton, 1992 ; Lerner, 1980) : on tend à croire que, dans une situation heureuse, les individus ne peuvent pas ne pas mériter ce qui leur arrive d’heureux. Et inversement, en cas de malheur, on tend à penser que les gens à qui il arrive quelque chose de malheureux l’ont mérité, ou alors il s’agit d’une situation malheureuse qui précède un bonheur plus important. Ce qui s’applique à autrui s’applique aussi à soi : l’individu tend à croire qu’il mérite ce qui lui arrive d’heureux ou de fâcheux, mais que néanmoins l’événement fâcheux sera compensé par un événement futur heureux. Une croyance forte en un monde juste permet donc d’accepter la place que l’on occupe dans le système social. Par transposition au système scolaire, une croyance forte en la justice de l’école permettrait aux élèves d’accepter la place qu’ils occupent dans le système scolaire.

  • 1  Selon Dalbert, les termes de « monde » juste sont à nuancer dans la mesure où l’individu ne croit (...)

12La croyance en la justice du monde peut être d’ailleurs conçue comme une illusion positive (Dalbert, 1999 ; Lerner & Somers, 1992 ; Lipkus, Dalbert & Siegler, 1996), qui favorise le maintien d’un équilibre psychique positif (Epstein, 1990). Ainsi, des travaux ont montré que les personnes ayant une forte croyance en la justice du monde s’adaptent mieux aux événements difficiles de l’existence et sont plus satisfaits de leur vie que les autres (Lipkus et al., 1996), et, selon Dalbert (1999), la croyance en un monde juste contribuerait à une bonne santé mentale : tout en permettant de donner du sens au monde, elle accroît le sentiment de compétence et de contrôle, ce qui permet de maintenir un regard positif sur le futur, tout en reconstruisant une vision positive du passé. C’est aussi un pré-requis important pour l’action présente, puisqu’elle permet de penser que ce qui est entrepris sera justement récompensé. En ce sens, la croyance en la justice du monde sous-tend d’importantes fonctions adaptatives (Dalbert, 1997). L’individu tenterait donc de conserver sa croyance en un monde juste : confronté à des situations apparemment injustes, le sujet tend à les réinterpréter en termes justes, ce qui lui permet de préserver sa croyance. Par exemple, dans le domaine professionnel, une recherche a mis en évidence que la croyance en un monde juste va de pair avec la négation d’une discrimination sociale à l’encontre des femmes, discrimination pourtant avérée (Dalbert, Fisch & Montada, 1992). Il y a donc bien des ré-interprétations de situations sociales qui se comprennent comme un rétablissement ou un maintien de la croyance en un monde juste1.

13La question différentielle du niveau de croyance en la justice du monde en fonction des expériences d’injustice rencontrées et des positionnements sociaux reste encore à éclaircir. De façon intuitive, on pourrait s’attendre à une croyance moins élevée chez les femmes que chez les hommes, chez les individus socialement défavorisés comparés aux personnes socialement favorisées, ou ici à une croyance en la justice de l’école moins forte pour les adolescents orientés vers les filières scolaires les moins prestigieuses comparés à ceux qui s’orientent vers des filières valorisées. Or, les recherches menées sur cette question ne mettent pas en évidence de différence claire entre les hommes et les femmes (Rubin & Peplau, 1975), ni entre les différentes classes sociales (Rubin & Peplau, 1973, 1975 ; Smith & Green, 1984), ni entre les différents niveaux d’études (Smith & Green, 1984). D’après la synthèse de Rubin et Peplau (1975), Lerner et Elkinton (1970) parviennent même à des résultats inverses puisqu’ils observent que les personnes issues de classes sociales favorisées ont un niveau de croyance en la justice du monde plus faibles que les personnes issues de classes sociales défavorisées. Si on admet la fonction d’adaptation de la croyance en un monde juste telle qu’elle a été postulée par Dalbert (1997), on peut comprendre que croire en un monde juste permet aux personnes socialement défavorisées de mieux accepter leur place dans la société, acceptation qui elle-même repose sur l’idée d’une compensation future (Dalbert & Katona-Sallay, 1996). On pourrait s’attendre donc ici à ce que les adolescents orientés vers les filières les moins prestigieuses aient un niveau de croyance en la justice de l’école plus élevé que les autres.

14Pour mesurer la croyance en la justice du monde, Rubin et Peplau (1975) ont construit une échelle de 20 items de type Lickert appelée « Belief in a Just World Scale » (BJWS). Certains items sont relatifs à une croyance générale en un monde juste (« globalement, les gens méritent ce qu’ils ont »), d’autres sont centrés sur la récompense de la vertu, d’autres encore sur la punition de la méchanceté. D’autres items sont quant à eux relatifs à des injustices, telles que la punition de personnes innocentes ou l’inverse. Les items de l’échelle se réfèrent à différents domaines comme la santé, la famille, l’école, la justice pénale ou la politique. Malheureusement, les qualités psychométriques de cette échelle largement utilisée ne sont pas toujours convaincantes. Ainsi, certaines recherches ont mis en évidence le caractère non pas unidimensionnel mais multidimensionnel de l’échelle (Ambrosio & Sheehan, 1990 ; Hyland & Dann, 1987 ; Wathley, 1993) dont la structure factorielle est peu stable, avec des différences selon le sexe et l’appartenance culturelle des individus (Wathley, 1993). D’autres chercheurs encore ont tenté de construire de nouvelles échelles de croyance en la justice du monde. C’est le cas de Lipkus (1991) qui a élaboré deux échelles distinctes : une échelle globale et unidimensionnelle de croyance en la justice du monde comprenant 7 items, et une échelle multidimensionnelle de croyance en la justice du monde (30 items). L’échelle globale apparaît avoir de bonnes qualités psychométriques (Lipkus, 1991 ; O’Connor, Morrison & Morrison, 1996). C’est le cas aussi de Dalbert et al. (1992), qui ont élaboré une échelle globale de croyance en la justice du monde composée de 6 items. Poursuivant l’élaboration d’outils de mesure, Lipkus et Dalbert se sont associés et ont enrichi l’échelle globale de croyance en la justice du monde en distinguant huit items de justice pour soi et huit items de justice pour autrui (Lipkus et al., 1996). Nous présenterons plus en détail cette échelle dans la partie méthodologique de l’étude et l’adaptation que nous en avons faite à la sphère scolaire.

15En somme, les études menées dans le cadre de la croyance en la justice du monde apparaissent transposables au monde scolaire et permettraient de comprendre comment les adolescents perçoivent l’école et ses procédures d’orientation en fonction de leur positionnement scolaire. Ainsi, transposée au système scolaire, l’hypothèse principale de la recherche serait la suivante : le positionnement scolaire des élèves a un effet sur leur perception de la justice de l’école. Plus précisément, les élèves qui subissent les contraintes scolaires de l’orientation sont ceux qui croient le plus fortement en la justice de l’école. Le sens de cette hypothèse s’inscrit dans le cadre théorique développé selon lequel : percevoir ce qui arrive (ici les orientations) comme juste permet à l’individu d’accepter la situation (ici l’orientation plus ou moins valorisée) et la place qu’il occupe dans le monde (ici le système scolaire). Pour mettre à l’épreuve la première hypothèse, nous avons étudié la croyance en la justice de l’école selon le positionnement scolaire de élèves [élèves en seconde de lycée d’enseignement général, élèves de lycée professionnel (L.P.) scolarisés dans des filières valorisées et dévalorisées] et selon la réalisation des vœux d’orientation post-troisième des élèves de L.P. (ce qui permet d’opérationnaliser le degré de contrainte dans l’orientation).

  • 2  B.E.P. signifie Brevet d’Études Professionnelles.

16De plus, conformément aux travaux de recherche cités (notamment ceux de Dalbert), la croyance en la justice du monde suppose la ré-interprétation d’événements passés (ici la situation de l’orientation contrainte), et permet également de maintenir un regard positif sur le futur, et d’espérer des situations futures justes (ce qui serait, dans notre cadre de recherche, des décisions d’orientation futures justes). Les élèves qui croient fortement en la justice de l’école pourraient donc envisager les propositions d’orientation passées et à venir émanant de l’institution comme justes et méritées. Dans ce cas, si les élèves s’attendent à des propositions ou à des conseils d’orientation justes, il ne leur est pas nécessaire d’envisager précisément une orientation future. Ainsi, on peut penser que l’indécision des élèves va de pair avec la croyance en la justice du système scolaire, en ce sens qu’une croyance élevée en la justice du monde peut supporter l’indécision dans les perspectives futures. En d’autres termes, nous formulons la deuxième hypothèse suivante : les élèves n’ayant pas de perspectives d’orientation scolaire précises croient davantage en la justice de l’école que ceux ayant un projet déterminé, leur croyance leur permettant de penser qu’ils obtiendront finalement la place – et donc l’orientation – qu’ils méritent dans le système scolaire. En termes opératoires, la perspective d’orientation post-B.E.P.2 des élèves de L.P. a été retenue afin d’observer l’intensité de la croyance en une école juste des élèves sans perspective d’avenir précise comparée à celle des élèves ayant des perspectives d’avenir définies.

Méthodologie de la recherche

Mesures

Définitions opérationnelles des variables indépendantes ou de groupe

17La première variable retenue dans cette recherche concerne le positionnement scolaire des lycéens. Elle se décline en 3 modalités : lycéens en filières professionnelles dévalorisées, lycéens en filières professionnelles valorisées, et lycéens en lycée d’enseignement général. La valorisation de la filière de lycée professionnel est opérationnalisée par le taux d’attractivité de la filière. Ce taux correspond au rapport entre le nombre de demandes d’inscription dans la filière et le nombre de places disponibles. Plus le taux est élevé, et plus la filière est attractive. Nous avons pu ainsi distinguer deux types de filières d’enseignement professionnel : des filières attractives (hôtellerie, électronique, optique, vente action marchande, transports routiers, maintenance automobile) et des filières peu attractives (métiers du bâtiment, comptabilité, secrétariat, productique, structures métalliques, métiers de la mode, bioservices).

18Les deux variables suivantes ne concernent que les lycéens professionnels :

  • La satisfaction des vœux d’orientation en lycée professionnel de l’élève : au cours de la classe de troisième, l’institution scolaire demande aux élèves de prononcer trois vœux d’orientation. Pour chaque élève de notre échantillon, nous avons relevé le rang de l’orientation obtenue : 1er vœu, 2e vœu ou 3e vœu formulés par l’élève au cours de la classe de troisième, ou enfin aucun vœu d’orientation obtenu par l’élève. Ces quatre possibilités constituent les modalités de cette variable.

  • Enfin, nous avons demandé à chaque élève de L.P. d’exprimer son souhait d’orientation après son diplôme de B.E.P. Ce souhait se décline en trois possibilités : continuer les études, notamment vers un baccalauréat professionnel / entrer dans la vie active / ne sais pas.

  • Nous avons étudié l’impact de ces trois variables sur la croyance en la justice scolaire, qui représente donc ici la variable dépendante de notre étude.

Définition opérationnelle de la croyance en la justice scolaire

19Pour mesurer la croyance en la justice scolaire, nous avons adapté le questionnaire de croyance en la justice du monde de Lipkus et al. (1996) qui se présente sous la forme d’une échelle d’attitude de 16 items : 8 items permettent de mesurer la croyance en la justice du monde pour soi et les 8 autres la croyance en la justice du monde pour autrui (chaque item est formulé de façon générale et de façon personnelle, c’est-à-dire qu’il y a une correspondance terme à terme entre la croyance en la justice pour soi et pour autrui). Les deux facettes de la croyance en la justice pour soi et pour autrui sont complémentaires dans le sens où il s’agit de combiner une approche générale et personnelle (Lerner & Miller, 1978), car il peut y avoir des asymétries dans la façon de percevoir ce qui est juste ou injuste pour soi et pour autrui (Dalbert, 1999 ; Lipkus et al., 1996). En effet, plus une expérience d’injustice se rapproche de la sphère personnelle, plus elle est minimisée. Ainsi, les injustices et discriminations sont davantage niées quand elles concernent le groupe d’appartenance comparé à l’exogroupe (Dalbert & Yamauchi, 1994), et les discriminations personnelles sont plus niées que celles envers le groupe d’appartenance (Taylor, Wright, Moghaddam & Lalonde, 1990). Dans cette recherche, nous avons pris le parti de ne pas distinguer méthodologiquement les deux facettes de la croyance pour soi et pour autrui, notre objectif n’étant pas de comparer les différences de croyance en la justice personnelle et générale.

20L’adaptation que nous avons réalisée a consisté à traduire les items de cette échelle et à les transposer au monde scolaire (exemple d’items de croyance personnelle en la justice scolaire : 3.Je pense que j’obtiens les notes que je mérite / exemple d’items de croyance générale en la justice scolaire : 4.J’ai le sentiment que les efforts scolaires de chaque élève sont remarqués et récompensés). Il était demandé aux élèves de donner leur avis pour chaque item grâce à une échelle en 6 points : de 1 = pas du tout d’accord à 6 = tout à fait d’accord.

21Une analyse factorielle en composantes principales réalisée sur les 16 items de l’échelle de croyance en la justice scolaire a permis de dégager un facteur général de croyance avec 39,3 % de variance totale expliquée (les saturations varient de .48 à .73), et l’analyse de la fiabilité met en évidence une bonne homogénéité des items (alpha de Cronbach = .89). Nous avons donc pu calculer un score total de croyance en la justice scolaire ramené à un score maximum de 6. Dans notre échantillon total, la moyenne de croyance en la justice scolaire est de 3,91 (écart-type 0,89) avec un minimum de 1,3 et un maximum de 6.

Échantillons de participants

22Notre population principale se compose de 670 élèves de lycée professionnel dont 292 garçons et 378 filles. La moyenne d’âge est de 17,4 ans avec un écart-type de 1,17.

23Le tableau 1 présente les caractéristiques des élèves de lycée professionnel de notre étude. Trois cent cinquante cinq élèves sont scolarisés dans des filières professionnelles attractives, soit 53 % de l’échantillon, et 315 (soit 47 %) dans des filières non ou peu attractives. De façon globale, 446 élèves, soit 67,2 %, déclarent avoir choisi leur filière, 84 élèves – soit 12,7 % – disent avoir obtenu leur second vœu, 10,4 % des lycéens leur troisième vœu, et enfin, 9,8 % des élèves (c’est-à-dire 65 élèves de l’échantillon) ont obtenu une orientation non souhaitée. En ce qui concerne leur avenir scolaire et professionnel, 75,6 % des élèves de L.P. ici souhaitent poursuivre leurs études vers un baccalauréat professionnel ou technologique à l’issue de leur B.E.P., alors que 17,7 % d’entre eux souhaitent entrer dans la vie active, et que 6,7 % des élèves sont encore indécis.

Tableau 1/Table 1

Tableau 1/Table 1

Caractéristiques de l’échantillon de lycéens professionnels : répartition selon l’obtention du vœu post-troisième, le projet post-B.E.P. et l’attractivité de la filière (effectifs et % en lignes pour les filières attractives et non attractives)
Characteristics of the sample of the vocational students : distribution according to admission onto the chosen course, vocational project after obtaining diploma and the popularity of the course

24Notons d’abord que, dans l’enseignement professionnel, une grande majorité des élèves obtiennent une orientation conforme à leur premier souhait. Bien évidemment, on retrouve dans les filières attractives une large majorité d’élèves ayant obtenu leur premier choix d’orientation (69,3 % des élèves ayant obtenu leur premier vœu sont dans une filière attractive), alors que les élèves ayant obtenu leur deuxième vœu, leur troisième vœu ou aucun de leurs vœux se retrouvent majoritairement dans des filières non attractives (respectivement 61,9 % – 91,3 % et 87,7 %). On observe également que les élèves ayant un projet post-B.E.P. sont plus nombreux dans les filières professionnelles attractives (51,9 % de ceux qui veulent poursuivre leurs études sont dans une filière attractive et 63,2 % de ceux qui souhaitent entrer dans la vie active) alors que les élèves indécis quant à leur avenir sont majoritaires (68,2 %) dans les filières non attractives.

  • 3  La répartition des garçons et des filles est sensiblement différente chez les lycéens généraux com (...)

25Afin d’introduire une modalité supplémentaire à la variable relative au positionnement scolaire, un échantillon d’élèves de lycée d’enseignement général a été constitué. Il se compose de 62 élèves scolarisés en classe de seconde en lycée d’enseignement général (19 garçons et 43 filles3) et demandant une orientation dans une filière générale. La moyenne d’âge de ces élèves est de 16 ans, avec un écart-type égal à 0,57.

Procédure

26Dans la procédure de notre recherche, les élèves ont répondu à ce questionnaire dans leur classe, au sein de leur établissement scolaire. Les établissements scolaires ont été sélectionnés par des conseillers d’orientation psychologues sur la base des taux d’attractivité connus de chaque établissement. Outre l’échelle de croyance en la justice scolaire, les élèves de lycée professionnel devaient répondre aux questions permettant de relever les informations nécessaires à l’évaluation des variables indépendantes : la filière dans laquelle ils sont scolarisés, les vœux d’orientation qu’ils avaient formulés à l’issue de la classe de troisième, et leur perspective d’avenir scolaire ou professionnel à l’issue de leur B.E.P.

Analyses

27Plusieurs analyses de variance ont permis de tester les effets des différentes variables indépendantes identifiées sur le niveau de croyance en la justice de l’école des adolescents.

  • Une analyse de variance à un facteur a pour but de mettre en évidence l’impact du positionnement scolaire des élèves (élèves de lycée général / élèves de filières attractives de L.P. / élèves de filières non attractives de L.P.).

    • 4  Dans les analyses de variance à deux facteurs, le facteur « Attractivité de la filière » est intro (...)

    Une analyse de variance à deux facteurs (facteurs « Attractivité de la filière LP » et « Satisfaction des vœux d’orientation post-troisième ») permet de tester les effets de la satisfaction des vœux d’orientation post-troisièmes des élèves de L.P.4

  • Enfin, une analyse de variance à deux facteurs (facteurs « Attractivité de la filière L.P. » et « souhait d’orientation post-troisième ») a été réalisée afin de mettre en évidence l’impact du souhait d’orientation post-B.E.P. des adolescents de L.P.

Résultats

Niveau de croyance en la justice de l’école selon le positionnement scolaire des élèves

28L’analyse de variance à un facteur met en évidence des différences de niveau de croyance en la justice scolaire selon le positionnement scolaire des élèves (F = 6,409 ; ddl = 3/810 ; p < .0001) : conformément à l’hypothèse posée, les élèves des filières non attractives de L.P. ont la moyenne de croyance en la justice scolaire la plus forte, devant les élèves de filières attractives de L.P., et enfin devant les élèves de lycée d’enseignement général (cf. tableau 2). Les comparaisons de moyennes deux à deux réalisées a posteriori sont toutes significatives.

Tableau 2/Table 2

Tableau 2/Table 2

Moyennes et écarts-types de croyance en la justice scolaire selon le positionnement scolaire des élèves
Means and deviation standards of the belief in a just school according to the student’s school position

29Les élèves de lycée professionnel estiment que l’école et ses procédures d’évaluation, de renforcements positifs et négatifs, et d’orientation sont plus justes que ne l’estiment les lycéens généraux. Et au sein du lycée professionnel, les élèves des filières non attractives croient davantage en un système scolaire juste que les élèves scolarisés dans des filières attractives. Concrètement, les élèves scolarisés dans des filières peu valorisées comme bioservices ou productique, voient plus que des élèves scolarisés dans des filières valorisées telles que l’hôtellerie ou l’électronique, une justice dans l’école et dans ses procédures d’orientation. En d’autres termes, les élèves des filières professionnelles les moins attractives et les moins valorisées ont le sentiment, plus que les autres, d’un système scolaire juste et donc de procédures d’évaluations et de sélections justes et « méritées ».

Niveau de croyance en la justice de l’école selon la satisfaction des vœux d’orientation post-troisième des élèves de L.P.

30L’analyse de variance réalisée a permis de mettre en évidence l’effet principal du rang du vœu d’orientation dans la filière de lycée professionnel sur le niveau de la croyance en la justice de l’école (F = 2,844 ; ddl = 3/634 ; p = .037).

Tableau 3/Table 3

Tableau 3/Table 3

Moyennes et écart-types de la croyance en la justice de l’école selon la satisfaction des vœux d’orientation post-troisième des élèves de L.P.
Means and deviation standards of the belief in a just school according to the satisfaction of the vocational student’s post-eight grade vocational choice

31Dans le tableau 3, on observe que les élèves ayant obtenu leur troisième vœu d’orientation sont ceux qui croient le plus en la justice de l’école, devant ceux qui ont obtenu leur premier vœu, puis ceux ayant été orientés dans la filière correspondant à leur second vœu et ceux n’ayant obtenu aucun de leurs vœux. Notons ainsi que n’obtenir que son second vœu d’orientation ou n’obtenir aucun des vœux entraîne une perception moins forte de justice scolaire comparée aux deux autres situations scolaires (les comparaisons de moyenne a posteriori mettent en évidence que la moyenne des « second vœu » et celle de ceux n’ayant obtenu aucun vœu sont significativement différentes de celles des « premier » et « troisième » vœux).

Niveau de croyance en la justice de l’école selon le souhait d’orientation post-troisième des élèves de L.P.

32La troisième analyse de variance réalisée a mis en évidence des différences dans la croyance en la justice de l’école selon l’effet principal du souhait d’orientation post-B.E.P. (F = 3,115 ; ddl = 2/632 ; p = .045).

Tableau 4/Table 4

Tableau 4/Table 4

Moyennes et écarts-types de la croyance en la justice scolaire selon le souhait d’orientation post-B.E.P.
Means and deviation standards of Belief in a Just School according
to the vocational wishes after obtaining the diploma (B.E.P.)

33En observant le tableau 4 des moyennes, on peut distinguer les lycéens qui ont une idée précise de leur devenir post-B.E.P., qu’ils souhaitent poursuivre leurs études ou qu’ils préfèrent entrer dans la vie active, des lycéens indécis quant à leur avenir : les élèves les plus indécis croient plus que les autres en un système scolaire juste (les comparaisons de moyennes a posteriori mettent en évidence des différences significatives entre d’une part l’indécision post-B.E.P. et d’autre part les deux possibilités de choix post-B.E.P. : continuer les études ou entrer dans la vie active).

Discussion des résultats

  • 5  Cette orientation est choisie comparée aux élèves qui n’obtiennent aucun des vœux qu’ils avaient f (...)

34La transposition et l’application du cadre théorique de la croyance en la justice du monde à la sphère scolaire semblent ouvrir un large champ d’investigations et de réflexions. L’étude de la croyance en la justice de l’école des lycéens professionnels a mis ainsi en évidence que la croyance en une école juste est d’autant plus forte que le positionnement scolaire de l’élève est peu valorisé. Il semble donc qu’il y ait une acceptation de la situation scolaire, en ce sens qu’il y a moins de mise en cause du fonctionnement scolaire et du fonctionnement de l’orientation, chez des élèves qui ont pourtant été amenés à « s’orienter » vers des filières professionnelles dévalorisées. Ce premier résultat, comme le suivant, va dans le sens de notre première hypothèse. Cette étude a ainsi également montré que les adolescents qui n’ont obtenu que leur troisième vœu d’orientation post-troisième, croient plus que les autres à la justice de l’école. Et ceux qui n’ont obtenu que leur second vœu ou aucun de leurs vœux sont ceux qui questionnent le plus la justice du système scolaire. Le degré d’acceptation de l’orientation contrariée permettrait, nous semble t-il, de comprendre ces résultats. Ceux qui n’obtiennent que leur troisième vœu d’orientation accepteraient davantage une orientation fortement contrariée mais choisie5, leur premier vœu étant dans leur situation et à leurs yeux inaccessible. En revanche, les élèves qui ont obtenu leur deuxième vœu d’orientation semblent moins accepter leur situation actuelle et semblent avoir plus de difficultés finalement à accepter de n’avoir pas pu réaliser ce qu’ils avaient projeté : les perspectives d’orientation envisagées apparaissent plus contrariées aux yeux de ces adolescents. Et le mécanisme adaptatif de la croyance en la justice du système, qui va de pair avec l’acceptation de leur situation actuelle – en référence aux travaux de Dalbert et Katona-Sallay (1996) –, a plus de mal à s’affirmer. On pourrait donc faire l’hypothèse que la contrainte est perçue comme plus forte par les élèves qui obtiennent leur second vœu d’orientation que par ceux qui n’obtiennent que leur troisième vœu (situation pourtant objectivement plus contrainte). La façon dont l’adolescent perçoit son orientation (comme plus ou moins contrainte) mériterait d’être prise en compte dans l’étude des mécanismes de la croyance en la justice de l’école.

35La seconde hypothèse posée portait sur la relation entre indécision et niveau de croyance en la justice de l’école. Les résultats obtenus ont mis effectivement en évidence que les élèves de lycée professionnel indécis quant à leur avenir post-B.E.P. croient davantage en la justice de l’école que les autres élèves. Conformément au cadre théorique de référence, croire que l’école est juste c’est aussi penser que sa fonction de sélection et d’orientation est juste, et que finalement, chacun obtient la place qu’il mérite dans le système scolaire et social (pour les meilleurs, il pourrait s’agir de poursuivre leur formation, pour les autres, ils pourront entrer dans la vie active). On pourrait dire que les élèves indécis, plus que les autres élèves, font confiance à l’école en termes de justice scolaire et par extension aux conseils d’orientation qui peuvent leur être adressés. Croire plus que les autres que l’école est juste leur permettrait de ne pas préciser leurs perspectives d’avenir.

36L’ensemble des résultas obtenus va donc dans le sens des hypothèses posées et renforce l’idée que la transposition du cadre théorique de la croyance en la justice du monde au monde scolaire peut constituer une contribution significative à la compréhension du sentiment de justice des élèves vis-à-vis de l’école et de ces procédures d’orientation. Il convient cependant de souligner que la croyance en la justice de l’école semble moins forte et moins généralisée à l’adolescence qu’elle ne l’est au cours de l’enfance (comme l’a montré l’étude de Lecigne à paraître). Les différents niveaux de croyance en la justice de l’école qui émergent à l’adolescence semblent notamment liés aux situations scolaires des adolescents. La question différentielle des positionnements scolaires apparaît ici importante pour comprendre la façon dont les adolescents perçoivent la justice de l’école.

Conclusion

37Parce que le système scolaire est fortement hiérarchisé, marqué par des procédures d’évaluations et de sélections, par des inégalités objectives pointées par les sociologues, il est considéré comme plus juste par les lycéens professionnels que par des lycéens généraux, et notamment par des élèves ayant subi les contraintes scolaires et de l’orientation. Le système scolaire constitue un système d’emprise dans lequel les individus « les moins favorisés » perçoivent leur situation comme légitime. En référence au cadre théorique psychosocial dans lequel cette recherche s’inscrit, on peut penser que la croyance en la justice permet de considérer l’école et ses procédures d’orientation, de sélection et même d’affectation comme stables et ordonnées. Les élèves accepteraient ainsi leur place dans le système scolaire et, de cette manière, s’adapteraient à une situation contrainte. De plus, dans les cas d’indécision d’orientation future, les élèves croient plus que les autres que le système scolaire est juste, et par extension, semblent croire que dans l’éventail des possibilités post-B.E.P., les conseils et propositions émanant des adultes du système scolaire sont justes et mérités. La croyance en la justice de l’école permet donc aux élèves de reconstruire leur passé scolaire, dans le sens où ils sont scolarisés dans une filière qui semble finalement convenir à leur situation, et leur permettrait de maintenir ouvertes leurs perspectives futures.

38Pour aller plus loin dans l’analyse du mécanisme de croyance en la justice de l’école étudié chez des adolescents plus ou moins contrariés dans leur trajectoire d’orientation scolaire, croisons la perspective psychosociale avec une perspective développementale : l’individu se construit dans des situations particulières et c’est à partir de situations précises que s’élaborent les représentations, les croyances, qui ensuite sont généralisées à d’autres situations similaires. La construction de l’individu suppose l’existence de mécanismes adaptatifs. Dans le cadre de cette recherche, les situations rencontrées prises en compte sont les situations d’orientation scolaire parce qu’elles constituent un événement majeur dans le développement adolescent : l’adolescent rencontre pour la première fois dans le système scolaire la situation de l’orientation contrainte et plus largement la sélection et la distribution des élèves selon des critères de mérite scolaire, à un moment du développement où il doit se positionner dans la société, dans l’école, à un moment où la problématique identitaire devient centrale. Soulignons ici que l’adolescence, comme période de développement, joue un rôle essentiel dans le développement de l’identité. Erikson (1972) parlait d’ailleurs de « travail d’identité » comme le processus central du développement à l’adolescence. À cette période, il y a concomitance de changements individuels et de changements contextuels qui tiennent aux demandes imposées à l’adolescent par la société, en termes notamment de détermination de choix. À l’adolescence, se font les « premiers choix pour la vie », qui excluent donc d’autres possibilités, et ont des implications à long terme (Bosma, 1994), ce qui est le cas pour les choix d’orientation scolaire. La croyance en la justice de l’école telle que nous l’avons mise au jour peut être une façon pour l’adolescent de trouver sa place dans l’école, en ce sens qu’elle suppose l’acceptation des conseils d’orientation et, dans certains cas, de la place dévalorisée qui lui est faite d’autorité et sur évaluation de ses performances scolaires : elle peut être conçue comme un mécanisme adaptatif d’acceptation de la place faite dans l’école, conduisant à un positionnement de soi dans le système scolaire, et plus largement dans le système social – ce qui renvoie à la question de la construction identitaire –. Elle permet également, comme l’a mis en évidence Dalbert, de maintenir un regard positif sur l’avenir, à un moment de l’adolescence où s’étendent les perspectives temporelles. Elle constitue donc un mécanisme adaptatif important qui s’articule à des étapes fondamentales du développement, comme celle ici de l’adolescence.

39Notons par ailleurs que, dans les situations d’orientation contrainte, il existe un autre mécanisme adaptatif mis en évidence dans d’autres travaux : il s’agit du processus de rationalisation des orientations qui permet aux lycéens professionnels de réhabiliter des orientations vers des filières professionnelles courtes, qui sont généralement peu valorisées par le système scolaire et peu choisies par les collégiens (Dumora, 1988, 1990 ; Dumora & Lannegrand-Willems, 1999 ; Lannegrand-Willems & Dumora, 1998). Ces recherches montrent que la rationalisation est d’autant plus opérante que la filière professionnelle est sélective et valorisée, c’est-à-dire lorsque le sujet peut transformer ses représentations et ses motivations pour la filière dans laquelle il est scolarisé en termes positifs, et lorsqu’il peut avoir le sentiment d’avoir été libre de choisir son orientation (le « sentiment de liberté » étant une condition préalable au processus de rationalisation – Beauvois, 1994). La rationalisation est en ce sens un processus d’appropriation d’une orientation scolaire. En revanche, elle trouve ses limites lorsque les élèves sont confrontés aux contraintes de l’orientation et sont « orientés » vers une filière professionnelle dévalorisée, non attractive, et non choisie : dans cette situation, les élèves ne parviennent pas à reconstruire une représentation positive d’une filière qu’ils n’ont pas le sentiment d’avoir librement choisi. La consistance de la rationalisation dépend donc fortement de la hiérarchie des filières professionnelles. Or, comme nous l’avons vu dans cette recherche, c’est dans un contexte d’orientation fortement contrainte, dans certaines situations d’affectation des élèves pourrait-on dire, que la croyance en la justice de l’école est la plus forte, ce qui leur facilite l’acceptation de la place qui leur est faite dans le système scolaire. Peut-être pourrions-nous envisager alors le processus de rationalisation et la croyance en la justice de l’école résultant d’une même fonction adaptative, mais intervenant dans des situations scolaires et de l’orientation différentes : le processus de rationalisation est possible lorsque l’orientation est plus qu’acceptable pour le sujet (lorsque, comme le dit Berthelot (1993), il peut lui « donner un sens en première personne », c’est-à-dire quand l’élève peut s’approprier son orientation), alors que le mécanisme de croyance en la justice scolaire interviendrait lorsque l’appropriation personnelle de l’orientation imposée est difficile voire impossible (lorsque l’orientation est considérée comme extérieure). Deux mécanismes qui permettent finalement aux élèves de se conformer aux décisions d’orientation, et aux adolescents qu’ils sont de se positionner dans le système scolaire et le système social. Deux mécanismes enfin dont il nous semble important d’étudier les relations et leurs implications : la croyance en la justice, bien qu’adaptative, ne contient-elle pas un risque d’acceptation résignée et passive de toute contrainte, ou peut-elle conduire à une appropriation de l’orientation ? Cette question devrait être abordée dans de futures recherches tant elle apparaît heuristique quant aux problèmes psychologiques et sociaux liés aux procédures d’affectation, d’une part, et quant aux implications développementales en termes de construction identitaire à l’adolescence, d’autre part.

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Notes

1  Selon Dalbert, les termes de « monde » juste sont à nuancer dans la mesure où l’individu ne croit pas – et n’a pas besoin de croire – que tout ce qui arrive dans le monde est juste. Si, comme le postule Dalbert, la fonction de la croyance en la justice du monde est adaptative, l’individu peut admettre des injustices dans des environnements qui ne le concernent pas, et donc qui ne menacent pas son propre environnement.

2  B.E.P. signifie Brevet d’Études Professionnelles.

3  La répartition des garçons et des filles est sensiblement différente chez les lycéens généraux comparés aux lycéens professionnels. Cependant, le niveau de croyance en la justice de l’école n’est pas significativement différent selon le sexe des élèves.

4  Dans les analyses de variance à deux facteurs, le facteur « Attractivité de la filière » est introduit dans le but d’en contrôler l’effet. Les effets d’interaction ne sont pas présentés dans la partie consacrée aux résultats parce que les effectifs sont très faibles pour certaines combinaisons de modalités.

5  Cette orientation est choisie comparée aux élèves qui n’obtiennent aucun des vœux qu’ils avaient formulés.

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Title Tableau 1/Table 1
Caption Caractéristiques de l’échantillon de lycéens professionnels : répartition selon l’obtention du vœu post-troisième, le projet post-B.E.P. et l’attractivité de la filière (effectifs et % en lignes pour les filières attractives et non attractives)Characteristics of the sample of the vocational students : distribution according to admission onto the chosen course, vocational project after obtaining diploma and the popularity of the course
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Title Tableau 2/Table 2
Caption Moyennes et écarts-types de croyance en la justice scolaire selon le positionnement scolaire des élèvesMeans and deviation standards of the belief in a just school according to the student’s school position
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Title Tableau 3/Table 3
Caption Moyennes et écart-types de la croyance en la justice de l’école selon la satisfaction des vœux d’orientation post-troisième des élèves de L.P.Means and deviation standards of the belief in a just school according to the satisfaction of the vocational student’s post-eight grade vocational choice
URL http://journals.openedition.org/osp/docannexe/image/2153/img-3.jpg
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Title Tableau 4/Table 4
Caption Moyennes et écarts-types de la croyance en la justice scolaire selon le souhait d’orientation post-B.E.P.Means and deviation standards of Belief in a Just School according to the vocational wishes after obtaining the diploma (B.E.P.)
URL http://journals.openedition.org/osp/docannexe/image/2153/img-4.jpg
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References

Bibliographical reference

Lyda Lannegrand-Willems, “Sentiment de justice et orientation : croyance en la justice de l’école chez les lycéens professionnels”L'orientation scolaire et professionnelle, 33/2 | 2004, 249-269.

Electronic reference

Lyda Lannegrand-Willems, “Sentiment de justice et orientation : croyance en la justice de l’école chez les lycéens professionnels”L'orientation scolaire et professionnelle [Online], 33/2 | 2004, Online since 15 December 2009, connection on 16 April 2024. URL: http://journals.openedition.org/osp/2153; DOI: https://doi.org/10.4000/osp.2153

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About the author

Lyda Lannegrand-Willems

Maître de conférences en psychologie du développement à l’Université Victor Segalen Bordeaux 2. Ses travaux portent sur les aspects psychosociaux du développement à l’adolescence. Membre du Laboratoire de Psychologie EA 3662 (Université Victor Segalen Bordeaux 2, 3 ter, place de la Victoire, 33076 Bordeaux Cedex). Courriel : lyda.lannegrand@u-bordeaux2.fr

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