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Dossier

Expériences et représentations de la frontière

Proscrits et exilés au milieu du XIXe siècle
Sylvie Aprile
p. 75-82

Résumé

Loin d’être de simples lignes de démarcations, figées entre des pays, les frontières s’incorporent au vécu de ceux qui les traversent. Ainsi, l’étude des textes que les exilés, célèbres comme anonymes, ont consacré à l’aventure que constitue le franchissement d’une frontière permet d’en découvrir l’épaisseur. Car la frontière peut être aussi fine que le papier d’un passeport, mais tout aussi vaste que le monde composé par ceux qui l’habitent. L’étude sémantique de la frontière dans les propos des exilés découvre ainsi les coordonnées d’une expérience humaine de l’espace qui construit ses propres représentations.

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Europe
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Texte intégral

1Les frontières et leur surveillance se sont hissées depuis quelques années au premier plan du débat public et des politiques nationales et internationales concernant les migrations. L’histoire des mobilités s’intéresse aujourd’hui logiquement à ces lieux et temps de passage longtemps négligés et devenus des objets d’étude majeurs, qui rendent compte à la fois de la trajectoire des acteurs, des moyens employés mais aussi du degré de contrainte dans lesquels les réfugiés sont amenés à quitter leur pays et à entrer dans un autre. L’obsession actuelle de la frontière, sa matérialisation par des murs et sa dramatisation semblent fort éloignées de notre période d’étude : il n’y a alors pas de barbelés installés aux confins de l’Europe pour dissuader les réfugiés, pas d’images qui traduisent comme aujourd’hui la difficulté du passage de la frontière. Pourtant, ce présent de la frontière n’est pas si éloigné de notre propos.

  • 1 L’exil est déjà au XIXe siècle une migration par étapes et mondialisée : Jean Antoine Rey, employé (...)
  • 2 Sabine Dullin, Étienne Forestier-Peyrat, Les frontières mondialisées, Paris, PUF, 2015, pp. 5-19.
  • 3 Rappelons que la langue française est assez pauvre pour écrire la frontière. La langue anglaise dis (...)

2Partir en exil, hier comme aujourd’hui est une expérience multiple, variée et ce moment du passage concerne tous les migrants. Il s’agit d’un événement concret mais aussi d’un processus dynamique qui implique tout à la fois, le départ, les étapes mais aussi le retour1. Cette frontière est « épaisse » selon la définition du géopoliticien Jean Gottmann, revivifiée par Sabine Dullin2. En effet, si elle n’a pas de caractère infranchissable, sa profondeur crée sa densité : elle lie à la fois une pré-frontière qui serait le lieu de départ et des villes de l’intérieur à rejoindre3. Cet espace indéterminé est, hier comme aujourd’hui, le lieu réel et imaginé des contrôles ou de la rétention, à franchir ou à transgresser. Si le dispositif étatique a changé, les lieux de passages clandestins restent fort similaires entre XIXe et le XXIe siècle : échappées par la mer, les massifs montagneux, les forêts. La nécessité du franchissement à pied et de nuit n’a guère changé. À la modernité des aéroports répond en écho, au mitan du XIXe siècle, celle des trains et des gares, nouveaux lieux de contrôle.

  • 4 Sabine Dullin, Étienne Forestier-Peyrat, op cit, p. 14.

3Quitter son pays peut se faire de multiples façons : sous le coup d’une condamnation policière, le départ peut être aussi le résultat d’une négociation, d’une fuite clandestine ou non. Ce passage peut être immédiat ou résulter d’un temps d’attente marqué par la prison, la clandestinité, l’incertitude de la sentence. Il peut être singulier ou collectif, incluant ou non des compagnons ou les proches. Pour citer à nouveau Sabine Dullin : « La frontière met en interaction des individus, des administrations et des idéologies, [elle] apparaît comme un lieu essentiel d’affirmation du politique sous toutes ses formes4. » La politique à la frontière n’est pas seulement celle des États mais aussi celle qui meut ceux qui la franchissent. Centrée pour l’essentiel sur les Français qui quittent la France entre 1849 et 1852, cette analyse limitera notre regard aux frontières terrestres, sans malgré tout perdre de vue que la Manche et les ports français, belges et britanniques font partie de cette expérience. Si les proscrits français font le plus souvent, durant cette période, la première expérience d’un passage clandestin ou d’une expulsion, celle-ci est plus courante pour d’autres Européens qui vivent dans un territoire encore morcelé ou qui font partie d’un Empire en proie aux aspirations des mouvements des nationalités. Quitter l’Allemagne ou la Hongrie aux lendemains des échecs révolutionnaires de 1848 et 1849 ne recouvre pas la même situation qu’en France : il s’agit ici de retraites d’armées en déroute plus encore que de départs contraints ou volontaires. Une grande partie des réfugiés, depuis les années 1820 et surtout après 1848, traversent la frontière comme membres vaincus de bataillons militaires.

  • 5 Nancy Green a montré l’importance de toutes formes prises par le passage : « Pour comprendre le pas (...)

4Les récits de proscrits du XIXe siècle sont souvent peu diserts sur les aspects les plus matériels de ce passage qui, aujourd’hui en raison de ses conditions dramatiques, semble le plus renseigné et décrit5. Si peu de récits d’exil racontent de façon détaillée le moment du passage d’une frontière souvent encore peu matérialisée, la facilité avec laquelle les exilés traversent les frontières et circulent, déjouent les tentatives d’identification, est largement exposée. Cette frontière floue, parfois absente, est surtout une frontière humaine faite de passeurs, de contrebandiers, de gendarmes, d’inspecteurs de chemin de fer et une frontière de papier tant le passeport fait partie intégrante de ce passage. Elle est aussi au final en elle-même le lieu de la promesse de l’action, le lieu où le politique redevient pensable et possible. Territoire interstitiel, la frontière a toujours une face noire et une face rose, elle sépare et rassemble, c’est le lieu de l’émotion suscitant espoir ou déception. La frontière est tout à la fois un lieu commun d’expression de la nostalgie mais aussi de la capacité d’action des proscrits.

Une frontière floue

  • 6  Daniel Nordman, Frontières de France, de l’espace au territoire XVIe-XIXe siècle, Paris, 1998, pp. (...)
  • 7 Grand dictionnaire universel du XIXe siècle : « Français, historique, géographique, mythologique, b (...)

5Le départ est un moment à la fois ressassé et occulté car il reste bien souvent traumatique. Qu’il soit clandestin ou « arraché » aux autorités, il est précédé de jours passés dans l’anxiété et l’attente, où le futur exilé vit caché, souvent sans nouvelles de sa famille ou de ses amis. Ces moments d’incertitude pèsent lourd, même s’ils prennent ensuite souvent sous la plume des exilés la forme d’un récit d’évasion tragi-comique et parfois même rocambolesque. La frontière n’a pas alors, pour des hommes du XIXe siècle habitués au voyage d’élites, un caractère inquiétant ou tracassier6. Le Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle consacre au mot « frontière » une très courte notice et reprend tout d’abord la définition militaire de Littré : « L’ancien sens de “frontière”, dit M. Littré, est front d’une troupe et façade ; faire frontière signifie se mettre en bataille pour combattre, se défendre ; et comme on faisait frontière particulièrement sur les limites des pays, le mot a pris le sens de limites d’État à État. » Mais c’est surtout la définition nouvelle du Larousse qui étonne tant elle est lapidaire et volontiers provocatrice : « Au risque d’amoindrir une question à laquelle des querelles sanglantes et interminables, des compétitions éternelles de peuple à peuple, des déclamations éloquentes d’orateurs et de publicistes, des discussions ingénieuses de diplomates ont donné depuis l’origine des temps une importance factice, nous définirons simplement la question des frontières : une question internationale de mur mitoyen, querelle d’avocat et de procureur, voilà tout. Avec cette restriction toutefois que, autant le mur mitoyen est nécessaire pour délimiter la propriété respective et empêcher l’intrusion sur le bien d’autrui, autant la frontière est inutile pour arrêter les entreprises des conquérants ; elle est efficace seulement pour entraver l’échange des richesses entre les nations contiguës7. »

  • 8 Le mouvement révolutionnaire allemand est définitivement écrasé après la prise de la forteresse de (...)
  • 9 Carte de Harry Fenn, McClure's Magazine, avril 1906, p. 18.

6On perçoit là une vision fortement négative, diplomatique, militaire et économique mais rien qui concerne les hommes qui la franchissent. Les proscrits font eux-mêmes souvent un usage complexe du terme de « frontière » quand il est employé. Victor Hugo écrit en 1854 au colonel Charras : « Mon vaillant et cher collègue, il y a deux ans, presque à pareille époque, vous me conduisiez à la frontière belge, quelle joie c’eût été pour moi de venir vous recevoir à la frontière anglaise ! » Ici, la frontière est un seuil à franchir, une invitation sur le pas de la porte. On peut se demander d’ailleurs ce que Hugo nomme ici la « frontière anglaise » : un port, Londres, les îles anglo-normandes ? Lieu de séparation et de retrouvailles, la frontière n’est guère infranchissable. On ne peut donc qu’être frappé par l’absence de définition dans les textes du terme même de « frontière » autant que par l’absence du récit du passage de la frontière. Dans Réminiscences, titre sous lequel le révolutionnaire badois, Karl Schurz8, a publié ses souvenirs, c’est une étrange carte sans frontières qui illustre le voyage clandestin de Schurz et Kinkel de la forteresse Spandau à Berlin puis vers la Grande-Bretagne. On y suit leur trajet par terre et par mer, on y trouve des obstacles naturels mais pas de lignes séparant les pays traversés9.

  • 10 « Ce que Henry appelait les “passages”, un autre eût appelé cela les obstacles. C’était une success (...)
  • 11 Maxime Vuillaume, Mes cahiers rouges au temps de la Commune, Paris, Cahiers de la quinzaine, 10 vol (...)

7Certes, les frontières que franchissent les proscrits français et allemands n’ont souvent guère de matérialité, qu’il s’agisse de zones de montagne ou, au contraire, de points de passage balisés par de nombreux réseaux de contrebande. La frontière, dans les rares représentations qui la lie à l’exil, s’enjambe ou n’est concrétisée que sous la forme d’un poteau. L’illustration d’Histoire d’un crime de Victor Hugo traduit un épisode du récit du passage de Frédéric Cournet et insiste sur la difficile progression de l’exilé. La frontière est ici matérialisée davantage par les marécages et la nuit, que par la séparation existant entre la France et la Belgique10. Pour bon nombre d’entre eux, la rupture créée par l’exil est plus urbaine que naturelle : « Toujours le même sujet de conversation » écrit Maxime Vuillaume. « Comment partir, quitter Paris, la France, gagner la frontière. Quelle frontière ? Londres ? Bruxelles ? Genève11 ? » Plus tardif, ce témoignage du communard Vuillaume, datant des années 1870, reste néanmoins identique à celui des proscrits de 1848. C’est à l’arrivée en ville que la frontière se met en place. Pour Frédéric Cournet, qui a inspiré à Hugo l’un des récits de la frontière, elle se situe à la première gare belge, puis à l’arrivée à Bruxelles. La frontière n’apparaît qu’au moment où l’on exige le passeport.

  • 12 Hugo écrit : « Yvan, Pelletier, Gindrier, Doutre rasèrent leurs moustaches et leur barbe. Versigny (...)
  • 13 Ibid. Barthélemy Terrier, ex-représentant du peuple et proscrit, a obtenu un passeport spécial pour (...)

8Le récit du passage de la frontière sert souvent à montrer son caractère peu opératoire comme lieu de contrôle. Faux nom, déguisement, forme de travestissement sont largement décrits pour moquer les autorités mais rarement pour héroïser ce moment. Victor Hugo – encore – a fréquemment rappelé après coup, son emprunt du passeport et de l’identité de l’ouvrier Lanvin. Au-delà de l’anecdote, Hugo aime à se souvenir qu’il a alors endossé la personnalité d’un homme du peuple. Il décrit dans Histoire d’un crime, dans le chapitre consacré à ceux qu’il nomme alors les expatriés, les divers stratagèmes employés : Victor Schœlcher traverse la frontière en soutane, grâce à l’aide d’un prêtre. D’autres se griment ou modifient leur aspect12. De Flotte se présente en domestique à Bruxelles, Edgar Quinet a un passeport d’étranger au nom de Grubesko, et voyage en compagnie d’une « compatriote » roumaine, Mme Cantacuzène. Il craint à chaque instant qu’on ne le soupçonne de ne pas savoir parler roumain. C’est le récit du passage de Préveraud qui met le mieux en scène la bêtise des gendarmes français qui paraît toujours plus grande que la ruse employée. Déguisé en femme, il doit, selon le récit qu’en donne Hugo, subir les assauts d’un gendarme qui tente d’attenter à sa vertu durant le voyage en train13. Le véritable héroïsme est ailleurs : il s’écrit dans l’évasion de Kinkel de Spandau, la prison dont on ne s’évade pas, dans les départs clandestins des bagnes de Lambessa ou de Guyane. Amédée Saint-Ferréol dans son ouvrage sur les proscrits traduit le même état d’esprit en montrant combien ceux-ci circulent aisément et échappent à la surveillance des frontières lorsqu’ils rentrent et sortent clandestinement de Belgique.

Une frontière de papier

9Demander un passeport est peut être la chose la plus nouvelle pour ces hommes, même s’ils ont déjà voyagé et ce document occupe une place majeure dans les récits de départ. Il s’agit en effet d’un mode de surveillance et d’assistance réservés aux plus démunis et auxquels n’ont pas eu recours communément ces voyageurs jusque-là. Il est incontestablement nécessaire, mais les passages frauduleux montrent qu’il est facile à falsifier. Amédée Saint Ferréol, dans ses Mémoires, montre que les critères physiques consignés restent très aléatoires. Il donne l’exemple d’un proscrit boiteux, Mathé, qui produit un passeport où le signe distinctif indiqué est une cicatrice sur la tempe gauche. Le passeport sert à « maintenir sous le regard », c’est une feuille de route avec itinéraire obligé, qui permet de suivre les déplacements. Ce n’est pas un élément probant de reconnaissance et celle-ci reste de l’ordre de la visibilité. Il faut donc reconnaître le proscrit pour le « confondre », ce qui n’est guère aisé dans la foule des voyageurs à Anvers ou Douvres.

  • 14 Les voyageurs anglais s’indignent des contrôles. Par décret du 22 février 1855, pour répondre aux r (...)
  • 15 Archives départementales du Nord, M140-22. Expulsés politiques.
  • 16 Archives Départementales du Nord, M 140-30.
  • 17 Gustave Lefrançais, Souvenirs d’un révolutionnaire, Paris, Futur Antérieur, 1972, p 161.

10Nous sommes en définitive en présence d’une frontière qui s’invente, à la fois frontière qui se matérialise par ses obstacles bien réels quand on la franchit, mais surtout frontière de papier indissociable du passeport. Comme pour les autres voyageurs des classes aisées, le passeport et surtout sa présentation sont ressentis comme des pratiques vexatoires14. Les individus expulsés doivent, pour quitter la France, suivre un itinéraire fixé et communiqué avec précision, surtout quand il y a secours de route : chaque municipalité de passage doit alors verser une partie des avances de route15. Certaines villes sont interdites aux expulsés : Léonard Rouchon, notaire à Bourganeuf, n’a pas le droit de passer par Paris pour se rendre en Belgique16. La même mesure est appliquée à Gustave Lefrançais qui brave l’interdiction pour aller embrasser ses parents. Il doit ensuite partir via le Havre pour Southampton : « On m’a conseillé cet itinéraire comme étant le moins surveillé et celui par lequel j’aurai le plus de chance d’échapper avec un faux passeport, celui que m’a délivré la police de Dijon étant annulé par le seul fait que je n’en ai pas suivi les prescriptions. Il ne pourrait plus servir qu’à me faire arrêter17» Plus redoutée encore, car plus humiliante, est l’arrivée à la frontière avec les menottes.

  • 18 Archives du ministère des Affaires étrangères belge, réfugiés, 5/4. Hubert Wouters, Documenten betr (...)
  • 19 Gérard Noiriel, « Surveiller les déplacements ou identifier les personnes ? Contribution à l’histoi (...)

11Les autorités sont parfois dans l’incertitude quant à l’application des sentences qu’elles ont elles-mêmes prononcées : le ministre de la Justice belge demande au ministre des Affaires étrangères en août 1854 de lui confirmer la présence à Glasgow d’Hippolyte Magen qu’il a récemment condamné à l’expulsion. Il écrit : « Je désire constater son séjour en Écosse et je vous prie de vouloir bien inviter notre consul à Glasgow de s’enquérir confidentiellement mais d’une manière précise si Magen habite réellement cette ville. Ci-joint, le signalement de ce réfugié18. » L’exil accélère assurément, la codification du signalement et les modalités juridiques et policières du contrôle moderne19.

  • 20 Andreas Fahrmeir, Citizens and Aliens , Foreigners and the Law in Britain and the German States, 17 (...)

12La frontière reste une affaire de classe sociale, les plus pauvres des proscrits ne savent pas qu’ils la franchissent. Gustave Lefrançais, dans ses souvenirs, raconte longuement l’histoire du père Badin, brave homme échoué par hasard dans le milieu de la proscription londonienne, dont le bateau qui le déportait vers la Guyane a fait naufrage aux larges des côtes britanniques et qui, ignorant tout de la géographie, part un jour à pied de Londres pour regagner la France. Le passeport est aussi marqué par la distinction sociale : les États allemands mettent en place un passeport réservé aux classes supérieures en 1850. Les paysans et les itinérants restent eux soumis à une suspicion plus grande, malgré la volonté d’accélérer la capacité de déplacements nécessaire au développement économique au sein de l’Allemagne en voie d’unification20.

Une frontière humaine

  • 21 Ernest Coeurderoy, Jours d’exil, Jours d’exil. Partie 1, Londres, J. Thomas, 1854-1855, p. 95.

13Si la frontière existe, elle est un monde peuplé des hommes des marges, ceux qui les habitent et qui les administrent. Gendarmes, douaniers, inspecteurs des chemins de fer et contrebandiers sont les acteurs majeurs que côtoient alors les proscrits. Quelques souvenirs d’exil échappent à l’imprécision. Ernest Coeurderoy y consacre même plusieurs chapitres et décrit minutieusement le trajet emprunté pour gagner la Suisse depuis le Jura : « Souvent nous longions de profonds ravins ; souvent, sur le granit glissant, nous pouvions à peine avancer. D’autres fois des pas se rapprochaient de nous dans les ténèbres, et nous forçaient d’abandonner le chemin battu. Mes guides couraient, comme des chamois, sur le flanc des montagnes ; moi je fatiguais ma voix et mes poumons à les suivre. Au point du jour, nous avions franchi les deux lignes de douanes françaises ; nous avions laissé sur notre gauche le fort des Rousses, avec ses fortifications, ses pont-levis et ses canons. » « Avant de me séparer des contrebandiers », écrit-il, « je voulus savoir d’eux les limites de la Suisse et de la France. Ils me montrèrent une ligne irrégulière, à peine indiquée ici par un ruisseau, là par un bouquet d’arbres, une vertèbre de pierre ; et dans les endroits plus nombreux où la nature n’avait pas posé son cachet, par des bornes, des bureaux de douanes, des forts et des postes, ouvrages des hommes21»

  • 22 Ibid., p. 89.

14Lorsqu’il raconte les difficultés rencontrées par Cournet qui franchit une frontière pourtant moins impressionnante – la frontière franco-belge –, Victor Hugo met en scène cette expérience des contrebandiers. Plus que les gendarmes, ce sont les douaniers qui tiennent la frontière. Ernest Courderoy la décrit ainsi : « Dans ces temps de guerre civile, les frontières de France étaient hérissées de douaniers. Les plus habiles limiers avaient été envoyés dans toutes les directions pour traquer les proscrits. Il me fallait passer à travers les mailles serrées du filet. Tout petit poisson que j’étais, j’eusse été de bonne prise ; et la main crochue de la police ne m’aurait pas relâché pour me laisser grandir22. »

15Frédéric Cournet affronte aussi les douaniers. « À Neuvilloise, il était en Belgique, il se crut en sûreté, on lui demanda ses papiers, il se fit conduire chez le bourgmestre et lui dit : Je suis un réfugié politique. Le bourgmestre, belge, mais bonapartiste – cette variété existe, – le fit purement et simplement reconduire à la frontière par les gendarmes, avec ordre de le remettre aux autorités françaises. Cournet se vit perdu. Les gendarmes belges l’amenèrent à Armentières. S’ils avaient demandé le maire, c’en était fait de Cournet, mais ils demandèrent l’inspecteur des douanes. Cournet vit poindre une lueur d’espoir. Il aborda l’inspecteur des douanes la tête haute et lui toucha la main.

16– Les gendarmes belges ne l’avaient pas encore lâché.

17– Pardieu, monsieur, dit Cournet au douanier, vous êtes inspecteur des douanes, je suis inspecteur du chemin de fer. D’inspecteur à inspecteur on ne se mange pas, que diable ! De braves Belges se sont effarés et me dépêchent à vous entre quatre gendarmes, je ne sais pourquoi. Je suis envoyé par la compagnie du Nord pour refaire quelque part par ici le ballastage d’un pont qui n’est pas solide. Je viens vous prier de me laisser continuer mon chemin. Voici ma passe. Il présenta la passe au douanier. Le douanier la lut, la trouva fort en règle, et dit à Cournet :

  • 23 Victor Hugo, op cit, p. 342.

18– Monsieur l’inspecteur, vous êtes libre. Cournet, délivré des gendarmes belges par l’autorité française, courut au débarcadère du chemin de fer23. »

  • 24 Ernest Coeurderoy, op. cit., p. 91.

19S’il s’agit ici plutôt de montrer la crédulité voire la bêtise des autorités belges, cette scène montre combien sont décisives les relations qui s’instaurent sur la frontière : il faut vaincre la méfiance, activer des solidarités. Le proscrit Ernest Coeurderoy, recommandé par un conducteur de Paris au Jura qui le remet entre les mains d’un contrebandier à Pontarlier, évoque sa rencontre avec le monde des contrebandiers qu’il ne connaît pas en ces termes : « Au bout d’une heure de marche, Rémi, qui paraissait le chef de l’entreprise sous la raison sociale de laquelle on me transportait en Suisse, entama la conversation par cette apostrophe peu démocratique : “Quand donc, vous autres Parisiens, cesserez-vous de faire du bruit pour rien ? Chacune de vos révolutions manquées fait pleuvoir douaniers et gendarmes sur le Jura, et nos petites affaires en souffrent. Avec cela, tous tant que vous êtes, vous arrivez ici sans un sou vaillant, et c’est un triste commerce que de risquer sa peau pour sauver la vôtre”24. » La contrebande est selon lui organisée comme la douane : « L’une enfante l’autre, elles ne périront qu’ensemble. »

  • 25 Heléna Tóth, An Exiled Generation, German and Hungarian Refugees of Revolution , 1848-1871, Cambrid (...)

20Pourtant, de nouvelles solidarités se dessinent souvent à la frontière. L’historienne Heléna Tóth a rapporté le soutien que reçoit le proscrit allemand Holzschreiter, aubergiste et receveur des postes, élu à l’assemblée constitutionnelle de Karslruhe, de la part des paysans cultivant des pommes de terre à la frontière suisse et qui bombardent de pierres le soldat qui tente de l’empêcher de franchir la frontière25.

Une frontière politique

21La frontière devient pendant l’exil un espace politique à plusieurs titres. C’est à distance de la frontière que se construit souvent le lieu de résidence auquel le proscrit accède. Le cantonnement à la frontière est rare et correspond à un afflux massif lié aux défaites militaires des révolutionnaires.

  • 26 Éloigner de la frontière est aussi une politique qu’a mise en œuvre la France durant la Restauratio (...)

22La Suisse reçoit ainsi en 1849 10 000 combattants allemands, formés pour la plupart d’artisans et de paysans enrôlés dans les armées révolutionnaires, installés dans des baraquements provisoires. Leur arrivée pose des problèmes multiples aux cantons qui les accueillent et qui doivent subvenir à leur besoin même de façon très modérée. On comprend dés lors que la Suisse ait cherché à limiter leur arrivée, à expulser les leaders militaires et politiques, à favoriser les retours des moins dangereux, processus négocié mais délicat en raison de l’absence de papiers attestant leur identité. Craignant la pression voire l’invasion française, certains cantons imposent aux exilés de se tenir éloignés de la frontière par des règles strictes, mais celles-ci sont souvent difficiles à faire respecter26. Neuf lieux sont imposés par le canton de Genève.

  • 27 Heléna Tóth, op. cit., pp. 39-40.

23L’Empire ottoman offre une longue tradition d’asile aux réfugiés d’Europe orientale et méditerranéenne mais le passage de la frontière aux lendemains de la défaite est particulièrement humiliant pour les soldats qui doivent rendre leurs armes, avant d’être internés parfois avec leur famille au camp de Vidin. Ils sont ensuite de la même manière dispersés loin des frontières27. La frontière prend aussi d’autres formes, notamment linguistiques : la barrière de la langue est plus forte que l’éloignement en Belgique, où les proscrits qui ne disposent pas de moyens suffisants et risquent de concurrencer les travailleurs belges sont envoyés dans les régions flamandes. Nombreux sont ceux qui découvrent alors le bilinguisme local et sont immergés dans un espace qui les isole plus radicalement que s’ils se trouvaient loin de la France.

  • 28 Victor Hugo, Actes et paroles, vol. 2, Pendant l’exil, Paris, J. Hetzel et A Quantin, 1883, p. 464.
  • 29 Ernest Coeurderoy, op. cit., p. 100. Un autre exilé , Joseph Dejacque fait de la frontière l’expres (...)
  • 30 Victor Hugo, Actes et paroles, Pendant l’exil, Ce que c’est que l’exil, J. Hetzel, 1875, p. XV

24La frontière franchie est une promesse d’action politique, de retrouvailles. Elle n’en devient pas moins pour les proscrits en raison peut être de la conscience nouvelle qu’ils ont éprouvé à la franchir, un lieu à détruire pour construire la république universelle ou les États-Unis d’Europe. Hugo multiplie durant l’exil les proclamations contre les frontières. Au congrès de la paix de Lausanne en 1869, il déclare : « La concorde a un synonyme, simplification ; de même que la richesse et la vie ont un synonyme, circulation. La première des servitudes, c’est la frontière. Qui dit frontière, dit ligature. Coupez la ligature, effacez la frontière, ôtez le douanier, ôtez le soldat, en d’autres termes, soyez libres ; la paix suit (…). Qui a intérêt aux frontières ? Les rois. Diviser pour régner. Une frontière implique une guérite, une guérite implique un soldat. Il ne passe pas, mot de tous les privilèges, de toutes les prohibitions, de toutes les censures, de toutes les tyrannies. De cette frontière, de cette guérite, de ce soldat, sort toute la calamité humaine28. » On retrouve chez Ernest Coeurdeoy cette même dénonciation de la frontière et sa nécessaire suppression : « Qu’on n’étreigne plus les nations entre des lignes de douane. Cela les flétrit comme des membres comprimés ; cela ruine l’humanité et la fait mourir de faim. Ne craignons pas que les caractères nationaux disparaissent parce que nul obstacle ne s’opposera plus au bien être des peuples. Ces caractères sont aussi ineffaçables que les diversités imprimées partout sur le corps géant de l’univers29. » Néanmoins la frontière reste aussi positive lorsqu’elle est métaphorique. Hugo, dans Ce que c’est que l’exil, conclut ainsi : « Il ne finira pas ces pages, pourtant sans dire que, durant cette longue nuit faite par l’exil, il n’a pas perdu de vue Paris un seul instant. Il le constate, et, lui qui a été si longtemps l’habitant de l’obscurité, il a le droit de le constater, même dans l’assombrissement de l’Europe, même dans l’occultation de la France, Paris ne s’éclipse pas. Cela tient à ce que Paris est la frontière de l’avenir. Frontière visible de l’inconnu. Toute la quantité de Demain qui peut être entrevue dans Aujourd’hui30. »

  • 31 « Un cordon de proscrits ceint la France dans ses embrasses, la réchauffe de son contact. Contraire (...)

25Curieuse et paradoxale définition de la frontière tout à la fois géographiquement symbole du monde à détruire et temporellement promesse d’avenir. Pour le proscrit François Pardigon, qui se rend à Londres puis aux États-Unis, elle est le lieu métaphorique des liens qui unissent les proscrits : « Elle [la solidarité des peuples] résulte de ces rencontres multipliées de fugitifs, sur les grands chemins, sur les ponts des navires, sur toutes les frontières, boulevards de l’expatriation où nous débouchons par bandes, comme des sangliers traqués sur la lisière des bois31. »

26En comparaison, la Commune a produit beaucoup plus de témoignages et surtout de fictions qui évoquent la frontière. Les Cahiers rouges de Maxime Vuillaume sont l’une des matrices de la littérature sur la Commune et plus largement sur les oiseaux de passage que sont les exilés. Le chapitre intitulé « Ceux de l’exil » montre la présence forte de la frontière, à la fois infranchissable et franchie clandestinement : « La frontière, c’est la chaîne du ghetto, fermée aux exilés sur le chemin de la patrie. C’est là que le dimanche à la frontière du Mont-Blanc, ils viennent regarder la France. » Au mitan du siècle qui nous intéresse ici, la frontière commence à faire sens pour les exilés.

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Notes

1 L’exil est déjà au XIXe siècle une migration par étapes et mondialisée : Jean Antoine Rey, employé dans une entreprise de roulage qui assure des services entre Valence et Crest, s’est enfui en Suisse, puis en Grande-Bretagne pour échapper à la déportation en 1851. Il part ensuite pour New York, d’où il décide avec son compagnon Saint-Prix de partir faire fortune en Australie. Le bateau sur lequel ils s’embarquent en février 1853 fait naufrage, et ils échouent dix mois plus tard à l’île Maurice où ils se fixent. Après 1859, son camarade Saint Prix rentre, mais Rey reste avec femme et enfants. Il travaille alors dans une sucrerie puis s’installe à la Réunion où il meurt en 1880.

2 Sabine Dullin, Étienne Forestier-Peyrat, Les frontières mondialisées, Paris, PUF, 2015, pp. 5-19.

3 Rappelons que la langue française est assez pauvre pour écrire la frontière. La langue anglaise dispose en revanche de trois termes pour traduire cette notion. Le plus usité est celui de « border » qui désigne largement toute zone frontalière. « Boundary » est la ligne précise autour de laquelle s’étend la zone frontalière. « Frontier », d’un emploi plus rare, marque une ligne de confrontation ou d’affrontement là où les « borders » désignent plutôt des zones poreuses de contacts ou d’échanges. Sur la frontière, voir Lucien Febvre, « Frontière, le mot la notion », in Pour une histoire à part entière, Paris, éd. de l’Ehess, 1962, p. 23.

4 Sabine Dullin, Étienne Forestier-Peyrat, op cit, p. 14.

5 Nancy Green a montré l’importance de toutes formes prises par le passage : « Pour comprendre le passage métaphorique, je propose donc que l’on examine des représentations du passage plus prosaïques comme la traversée. Par une approche de la quotidienneté, de l’immédiat, dans les récits de passages, une socio-anthropologie historique du passage pourrait débusquer le moment où l’individu anthropologique croise les contraintes sociologiques dans l’acte même de la traversée de l’espace. » Nancy L. Green, « Trans-frontières : Pour une analyse des lieux de passage », in Socio-Anthropologie, n° 6, 1999. p. 2.

6  Daniel Nordman, Frontières de France, de l’espace au territoire XVIe-XIXe siècle, Paris, 1998, pp. 23-66.

7 Grand dictionnaire universel du XIXe siècle : « Français, historique, géographique, mythologique, bibliographique... », T. 8 F-G, par M. Pierre Larousse, Paris, 1866-1877, p. 853.

8 Le mouvement révolutionnaire allemand est définitivement écrasé après la prise de la forteresse de Rastatt le 23 juillet 1849. Schurz réussit à s’en échapper juste avant l’entrée des troupes prussiennes en se faufilant par une canalisation. Il s’enfuit en Alsace voisine puis en Suisse. Il revient cependant en Allemagne sous un faux nom et aide de façon rocambolesque Gottfried Kinkel en 1850 à s’évader de la prison de Spandau.

9 Carte de Harry Fenn, McClure's Magazine, avril 1906, p. 18.

10 « Ce que Henry appelait les “passages”, un autre eût appelé cela les obstacles. C’était une succession non interrompue de casse-cous et de fondrières. Il avait plu. Tous les trous étaient des flaques d’eau. Un sentier inouï serpentait à travers un dédale inextricable, tantôt épineux comme une bruyère, tantôt fangeux comme un marais. La nuit était noire. De temps en temps, loin dans l’obscurité, ils entendaient un chien aboyer. Le contrebandier faisait alors des coudes et des zigzags, coupait brusquement à droite ou à gauche, et quelquefois revenait sur ses pas. Cournet sautant les haies, enjambant les rigoles, buttant à chaque instant, glissant dans les bourbiers, se raccrochant aux ronces, les habits en lambeaux, les mains en sang, mourant de faim, cahoté, harassé, épuisé, exténué, suivait son guide joyeusement. À toute minute un faux pas ; il tombait dans un cloaque », Victor Hugo, Histoire d’un crime, partie IV : La Victoire, chapitre XII : Les expatriés, édition 1879, collection « Bouquins », p. 342.

11 Maxime Vuillaume, Mes cahiers rouges au temps de la Commune, Paris, Cahiers de la quinzaine, 10 volumes, 1908-1914, Cahier VI, p. 292. Cité par Renaud Morieux, « La prison de l’exil, les réfugiés de la Commune entre les polices françaises et anglaises (1871-1880) », in Police et migrants, France 1667-1939, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2000.

12 Hugo écrit : « Yvan, Pelletier, Gindrier, Doutre rasèrent leurs moustaches et leur barbe. Versigny arriva à Bruxelles avec un passeport au nom de Morin. Schœlcher s’habilla en prêtre. » Victor Hugo, op. cit., p. 412.

13 Ibid. Barthélemy Terrier, ex-représentant du peuple et proscrit, a obtenu un passeport spécial pour sa femme et lui. Mais son épouse est en réalité… son beau-frère Préveraud.

14 Les voyageurs anglais s’indignent des contrôles. Par décret du 22 février 1855, pour répondre aux réclamations des voyageurs, le gouvernement crée un nouveau service de police spécialement consacré à la surveillance des chemins de fer.

15 Archives départementales du Nord, M140-22. Expulsés politiques.

16 Archives Départementales du Nord, M 140-30.

17 Gustave Lefrançais, Souvenirs d’un révolutionnaire, Paris, Futur Antérieur, 1972, p 161.

18 Archives du ministère des Affaires étrangères belge, réfugiés, 5/4. Hubert Wouters, Documenten betreffende de Geschiedenis der Arbeidersbeweging (1853-1865), Louvain-Paris, éd. Nauwelaerts, 1966 ; Amédée Saint Ferréol, Les proscrits français en Belgique, Bruxelles, Marquandt, 1870, p. 25.

19 Gérard Noiriel, « Surveiller les déplacements ou identifier les personnes ? Contribution à l’histoire du passeport en France de la Première à la Troisième République », in Genèses, vol 30, mars 1998, pp. 77-100.

20 Andreas Fahrmeir, Citizens and Aliens , Foreigners and the Law in Britain and the German States, 1789-1870, New-York-Oxford, Berghan Books, 2000, pp. 114-120 ; John Torpey, « Le contrôle des passeports et la liberté de circulation. Le cas de l’Allemagne au XIXe siècle », in Genèses, vol 30, 1998, pp. 53-76.

21 Ernest Coeurderoy, Jours d’exil, Jours d’exil. Partie 1, Londres, J. Thomas, 1854-1855, p. 95.

22 Ibid., p. 89.

23 Victor Hugo, op cit, p. 342.

24 Ernest Coeurderoy, op. cit., p. 91.

25 Heléna Tóth, An Exiled Generation, German and Hungarian Refugees of Revolution , 1848-1871, Cambridge, Cambridge University Press, 2014, p. 71.

26 Éloigner de la frontière est aussi une politique qu’a mise en œuvre la France durant la Restauration et la monarchie de Juillet. Delphine Diaz, Un asile pour tous les peuples ? Exilés et réfugiés étrangers en France au cours du premier XIXe siècle, Paris, Armand Colin, 2014.

27 Heléna Tóth, op. cit., pp. 39-40.

28 Victor Hugo, Actes et paroles, vol. 2, Pendant l’exil, Paris, J. Hetzel et A Quantin, 1883, p. 464.

29 Ernest Coeurderoy, op. cit., p. 100. Un autre exilé , Joseph Dejacque fait de la frontière l’expression de tous les carcans qu’il faut détruire. Il écrit : « Le Libertaire n’a de patrie que la patrie universelle. Il est l’ennemi des bornes : bornes-frontières des nations, propriété d’État ; bornes-frontières des champs, des maisons, des ateliers, propriété particulière ; bornes-frontières de la famille, propriété maritale et paternelle. » Le Libertaire, no 1, 9 juin 1858.

30 Victor Hugo, Actes et paroles, Pendant l’exil, Ce que c’est que l’exil, J. Hetzel, 1875, p. XV

31 « Un cordon de proscrits ceint la France dans ses embrasses, la réchauffe de son contact. Contrairement à l’habitude, la force vitale persiste aux extrémités et alimentent les centres exténués. » François Pardigon, Épisodes des journées de Juin 1848, Paris, La Fabrique, p. 103.

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Pour citer cet article

Référence papier

Sylvie Aprile, « Expériences et représentations de la frontière »Hommes & migrations, 1321 | 2018, 75-82.

Référence électronique

Sylvie Aprile, « Expériences et représentations de la frontière »Hommes & migrations [En ligne], 1321 | 2018, mis en ligne le 01 avril 2020, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/hommesmigrations/4284 ; DOI : https://doi.org/10.4000/hommesmigrations.4284

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Auteur

Sylvie Aprile

Professeure d’histoire contemporaine, université Paris-Nanterre.

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