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Dossier
Les apprentissages en situation de travail

Une perspective décentrée sur l’apprentissage en situation de travail : les conditions d’exercice des personnes formatrices en entreprise

Nadia Lamamra et Barbara Duc

Résumés

L’article s’intéresse à l’apprentissage en situation de travail à partir des conditions d’exercice des personnes formant en entreprise. Il s’agit d’interroger la faisabilité d’une formation en situation de travail dans une organisation productive. A partir d’entretiens semi-structurés menés en Suisse romande auprès de personnes chargées de la formation des apprenti-e-s, mais aussi d’observations in situ, l’article s’intéresse aux contraintes subies et à leur impact sur le quotidien de formation. Les résultats reviennent sur le prescrit de l’activité, mais également sur les différentes manifestations du réel. Ils soulignent le primat de la production dans les différents cadres organisationnels. En outre, ils font apparaître des modalités de la formation en situation de travail, qui pourraient être qualifiées de paradoxales. Enfin, la discussion interroge la tension produire/former sous l’angle de l’écart entre prescrit/réel.

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Texte intégral

1L’apprentissage en situation de travail, en particulier la formation professionnelle en entreprise (modèle dual ou en alternance), rencontre depuis quelques années un vif succès auprès des gouvernements et des organisations professionnelles de nombreux pays (Berger, Lamamra et Bonoli, 2018). Cet intérêt est principalement dû à la logique adéquationniste qui sous-tend de plus en plus l’appréhension de la formation (Tanguy, 2016), en particulier professionnelle, à savoir une attente de concordance entre les compétences des futur∙e∙s travailleurs et travailleuses et les besoins en qualification sur le marché du travail (Charles, 2014). Les acteurs susnommés tablent également sur la formation professionnelle pour résoudre les enjeux d’insertion professionnelle. En effet, nombre d’acteurs politiques considèrent que le faible taux de chômage juvénile – dans des pays tels que l’Allemagne ou la Suisse – est dû à la part importante de jeunes se formant dans la voie professionnelle initiale, notamment duale, et ayant, au terme de trois à quatre ans, appris un métier qu’elles et ils peuvent exercer immédiatement (Berger, Lamamra et Bonoli, 2018 ; Granato et Moreau, 2019).

2Malgré un intérêt renouvelé pour la voie professionnelle, peu de travaux portent sur les entreprises formatrices et encore moins sur les personnes qui y dispensent la formation au quotidien. Les rares études s’intéressent principalement à la motivation économique des entreprises à former (Müller et Schweri, 2012 ; Schweri et al., 2003). Les personnes formatrices ne font encore guère l’objet d’études, hormis les travaux soulignant leur rôle dans la transmission en situation de travail (Filliettaz, de Saint-Georges et Duc, 2008). Plus rares sont les travaux portant sur les conditions d’exercice de leur fonction (Bahl, 2008, 2019 ; Capdevielle-Mougnibas et al., 2013).

3Le présent article, fondé sur des données collectées en Suisse romande, s’intéresse à l’apprentissage en situation de travail, dans le contexte de la formation professionnelle initiale duale, qui occupe une place prépondérante dans la formation post-obligatoire suisse (SEFRI, 2021). L’originalité de l’approche retenue ici est d’interroger les conditions de réalisation de cet apprentissage à partir de l’expérience des formatrices et formateurs en entreprise (ci-après FEE). La perspective adoptée peut être qualifiée de doublement décentrée (Hooks, 2000) : d’une part, le regard se porte sur les personnes formatrices et non sur les apprenti∙e∙s, fréquemment au centre des travaux sur l’apprentissage ; d’autre part, il se focalise sur les conditions d’exercice de l’activité formatrice, plutôt que sur les modalités de transmission, la pédagogie ou la didactique professionnelle. Ce faisant, l’article questionne in fine la faisabilité de l’apprentissage en situation de travail, dans un contexte – celui des entreprises formatrices – largement dominé par les logiques de production (Moreau, 2003).

4Après une mise en contexte de la situation des personnes formant en entreprise, les éléments saillants de la littérature sur la transmission sur la place de travail seront proposés. La méthodologie mettra tout particulièrement l’accent sur l’articulation entre deux types de données : les entretiens semi-structurés (N=80) et les observations in situ (N=35). Les résultats seront ensuite organisés en deux sections : le prescrit et le réel, lui-même organisé entre production et formation. La discussion finale reviendra sur l’écart prescrit/réel, articulé avec la tension produire/former.

Penser la situation des formatrices et formateurs en entreprise

5Bien qu’occupant une position centrale en formation professionnelle duale, tant les entreprises formatrices que les FEE n’ont véritablement fait l’objet d’études.

Les entreprises formatrices sous la loupe

6Penser la formation en situation de travail nécessite une connaissance des contextes dans lesquels elle se déroule, déterminants pour saisir la « nature et la qualité de la formation » (Bahl, 2019). Or, très peu d’études portent sur les entreprises formatrices, en tant que cadre organisationnel de la transmission des savoirs et savoir-faire relatifs à un métier. Les études à disposition s’intéressent principalement à leur promptitude à former (Müller et Schweri, 2012 ; Schweri et al., 2003), mettant en évidence l’intérêt économique à avoir des apprenti∙e∙s. Elles renseignent indirectement sur le primat de la production, la motivation à former étant liée à des rapports de coûts/bénéfices, soit à des enjeux de rentabilité à relativement court terme.

Les personnes formatrices, personnes-clefs de la formation en entreprise

7Le faible intérêt porté aux entreprises formatrices se répercute sur les personnes qui y déploient leur activité. Cependant, quelques travaux portent sur leurs trajectoires et motivations à endosser la fonction (Bahl, 2008 ; Capdevielle-Mougnibas et al., 2013 ; Cohen‐Scali, 2012 ; Gérard et al., 1998).

Des personnes centrales, mais peu visibles

8La centralité des FEE a été mise en évidence à différents niveaux. Ont été soulignés la centralité de la dimension relationnelle de l’apprentissage, et donc leur importance en qualité de personnes de référence (Lamamra et Masdonati, 2009 ; Nägele et Neuenschwander, 2016). Ont également été identifiés les rôles qu’elles et ils jouent dans divers processus : la décision des apprenti∙e∙s d’interrompre ou de poursuivre la formation (Masdonati et Lamamra, 2009 ; Negrini, Forsblom et Schumann, 2013), la sélection des apprenti∙e∙s (Duc et Lamamra, sous presse ; Imdorf, 2007) ou encore la transmission en situation de travail (Filliettaz, de Saint-Georges et Duc, 2008 ; Pelé-Peycelon et Veillard, 2016).

Former en situation de travail

9Les travaux sur la didactique professionnelle et le workplace learning s’intéressent à l’entreprise comme cadre de formation, aux savoirs transmis et compétences développées en situation de travail (Billett, 2012 ; Pastré, Mayen et Vergnaud, 2006).

10Le modèle diachronique du tutorat (Kunégel, 2011) met ainsi en évidence l’évolution de l’accompagnement de l’apprenti∙e au fil du développement de ses compétences (de la familiarisation à la mise au travail). Pendant que l’apprenti∙e progresse vers davantage d’autonomie et de responsabilité, l’encadrement de la personne formatrice se distancie.

11Les travaux soulignent que la relation formatrice dépasse le binôme personne formatrice et apprenti∙e. Kunégel (2011) distingue le tuteur responsable (qui engage l’apprenti∙e) du tuteur (qui l’accompagne), Filliettaz (2011) parle d’accompagnement collectif (collective guidance), et Pelé-Peycelon et Veillard (2016) relèvent les différentes personnes impliquées dans les configurations tutorales. Enfin, Maurines (1997) rappelle les enjeux hiérarchiques propres à ce contexte particulier, les personnes formatrices y étant soumises au même titre que l’ensemble des travailleurs et travailleuses de l’entreprise. Dès lors, la configuration tutorale se compose a minima de l’apprenti∙e, de la personne formatrice et de la hiérarchie.

Les contraintes vécues par les formatrices et formateurs en entreprise

12L’analyse du quotidien en entreprise fait apparaître les contraintes liées au travail et à ses évolutions, variables selon la taille et le secteur d’activité de l’entreprise (Bahl, 2008 ; Lamamra, Duc et Besozzi, 2019). Elle souligne aussi les contraintes spécifiques, attachées à cette fonction hybride : entre professionnel∙le de métier et personne formatrice, pour laquelle les personnes formatrices ne disposent souvent ni de reconnaissance formelle (statut, rémunération, cahier des charges, décharge), ni de reconnaissance symbolique (Bahl, 2019 ; Lamamra, Duc et Besozzi, 2019).

Quand les changements du travail touchent la fonction formatrice

13Les changements majeurs intervenus dans le monde du travail, résumés par le triptyque « intensification, individualisation, flexibilisation » (Le Feuvre, 2014), ont un impact sur l’activité de formation des FEE. L’intensification du travail réduit le temps pour accompagner un∙e apprenti∙e ; la flexibilité demandée accroît le caractère fractionné de l’activité et certaines évolutions de métier obligent les personnes formatrices à se positionner par rapport au métier qu’elles ont appris et souhaitent transmettre (Lamamra et Besozzi, 2019 ; Lamamra, Besozzi et Duc, 2019).

Les personnes formatrices aux prises avec la tension produire/former

14La tension produire/former, constitutive du système dual (Moreau, 2003), s’exerce de manière particulièrement forte sur les FEE et prend la forme d’une injonction contradictoire, former dans un contexte de primat de la production (Bahl, 2019 ; Lamamra et Besozzi, 2019). Cette tension en fait apparaître d’autres : l’écart entre le cadre idéal (tel que décrit dans la Loi et envisagé durant la formation de FEE) et les conditions réelles d’exercice ; la tension entre la profession exercée et la fonction occupée (Bahl, 2008) ; le manque de temps.

Une activité morcelée et qui court après le temps

15L’activité des personnes formatrices se caractérisant par une grande variété de tâches et fonctions (Bahl, 2008 ; Capdevielle-Mougnibas et al., 2013 ; Lamamra, Duc et Besozzi, 2019), il en ressort un fractionnement et un morcellement des activités, les FEE devant sans cesse interrompre leurs tâches formatives. En découle un manque de temps récurrent auquel elles et ils doivent faire face (Lamamra, Duc et Besozzi, 2019), notamment en devant chercher des stratégies pour accomplir leur tâche (Baumeler et Lamamra, 2019).

Eléments méthodologiques

16La présente contribution s’appuie prioritairement sur les matériaux qualitatifs issus d’entretiens semi-structurés et d’observations in situ, ainsi que sur des analyses documentaires.

  • 1 Les secteurs ont été nommés selon la nomenclature générale des activités (NOGA) utilisée par l’O (...)
  • 2 La nomenclature retenue regroupe certains secteurs traditionnels de la formation duale (industrie, (...)

17Les entretiens semi-structurés (N=80) ont été conduits auprès de personnes formant (ou ayant une responsabilité formative auprès de) un∙e ou plusieurs apprenti∙e∙s dans des entreprises des divers cantons de Suisse romande. Afin de rendre compte de l’hétérogénéité de cette population, des FEE ont été sélectionné∙e∙s selon leur sexe, leur ancienneté dans la fonction, leurs statuts et leurs fonctions. Un certain nombre de critères concernant les entreprises dans lesquelles elles et ils exercent (taille, secteur) ont également été pris en compte. Ainsi, les personnes interviewées sont majoritairement des hommes (H : N=48 ; F : N=32), bénéficient de différents statuts au sein des entreprises formatrices (employé∙e∙s, cadres, gérant∙e∙s et employeur∙e∙s) et occupent des fonctions diverses en matière de suivi des apprenti∙e∙s (responsabilité administrative/formative ou ressources humaines, formation au quotidien). Elles travaillent dans des entreprises de tailles diverses (grandes : N=50 ; PME : N=21 ; micro-entreprises : N=9), ayant une tradition de formation plus ou moins longue. Ces entreprises sont actives dans les principaux secteurs d’activité1 : industrie et arts et métiers (N=21), commerce, transports et circulation (N=21), santé, enseignement, culture et professions scientifiques (N=11), management, administration, banque et assurances et professions judiciaires (N=9), hôtellerie, restauration et services personnels (N=7), technique et informatique (N=5), construction et exploitation minière (N=4) et enfin, agriculture, économie forestière et élevage (N=2)2.

18Les entretiens semi-directifs ont fait l’objet d’une analyse de contenu thématique (Bardin, 1986) dans une perspective déductive et inductive, afin d’identifier les éléments centraux de l’expérience d’une population peu étudiée jusqu’alors (trajectoire avant d’arriver à la fonction, motivations, ressources à disposition et contraintes rencontrées, tâches, rôles endossés, etc.).

19Des observations ont également été menées (N=35), la plupart auprès des personnes précédemment interviewées. Négociées à l’issue des entretiens, elles ont globalement été bien accueillies.

20Les observations, d’une durée d’une demi-journée à deux jours, ont consisté à suivre au plus près les personnes formatrices dans leur environnement habituel. Elles se sont déroulées sous la forme de shadowing (Gather Thurler et al., 2017) et ont porté sur l’entier de leur activité, qu’elle soit ou non liée à la transmission du métier. Les tâches liées à leur métier ou à leurs fonctions, les interactions avec les apprenti∙e∙s, mais également les moments dédiés aux tâches administratives de la formation ont retenu notre attention. Les observations étaient menées à une certaine distance pour limiter les interactions, mais des clarifications ont régulièrement dû être faites, les FEE ayant tendance à orienter notre regard vers les apprenti∙e∙s. Lors de moments consacrés aux tâches administratives, les FEE ont fréquemment explicité ce type d’activité.

21Pour réduire l’impact de notre présence et en lien avec une durée d’observation très brève, aucun moyen d’enregistrement n’a été utilisé. Les notes de terrain ont été rédigées a posteriori et ont fait l’objet d’un codage thématique similaire à celui des entretiens. L’analyse de contenu a permis d’identifier les contraintes quotidiennes et la complexité de l’activité de FEE (organisation et division du travail, tâches, fractionnement, écart prescrit/réel, tension produire/former).

22Bien que brèves et réalisées avec une focale assez large, les observations ont permis de saisir la complexité de la formation sur le lieu de travail à un niveau méso, là où d’autres observations plus micro (Filliettaz, de Saint-Georges et Duc, 2008 ; Veillard, 2013) saisissent les interactions et les modalités fines de transmission en situation de travail.

Différentes perspectives sur les conditions d’exercice des formatrices et formateurs en entreprise

23Les résultats seront présentés en deux temps. Tout d’abord seront exposés les différents cadres du prescrit de l’activité ; puis dans un second temps seront abordées les différentes manifestations du réel à partir des deux pôles production et formation.

Les prescriptions de l’activité formatrice et leurs usages en entreprise

24L’activité formatrice des FEE est faiblement prescrite que ce soit dans la Loi ou l’Ordonnance fédérale sur la formation professionnelle (LFPr, 13 décembre 2002 ; OFPr, 19 novembre 2003), les lois cantonales sur la formation professionnelle, les ordonnances de métiers ou les règlements d’entreprise (Lamamra, Duc et Besozzi, 2019). Les conditions d’accès à la fonction sont clairement réglementées (LFPr et OFPr), indiquant les diplômes et qualifications requis (Certification fédéral de capacité dans le métier ou le domaine), les années d’expériences professionnelles attendues (2 à 5 ans) et les formations nécessaires (40 ou 100h de pédagogie professionnelle). Les conditions d’exercice sont réglées au niveau des ordonnances de métiers, qui statuent sur les taux d’activité minimaux requis pour pouvoir former des apprenti∙e∙s. Dans certains règlements d’entreprise, les qualifications attendues sont doublées de compétences, principalement sociales : communication, enthousiasme, motivation, flexibilité, etc.

  • 3 Il est proposé par le Centre suisse de services Formation professionnelle, orientation professionne (...)

25Les conditions concrètes d’exercice de la fonction au quotidien ou la fonction des personnes formant en entreprise restent peu explicitées. Il s’agit ainsi de « dispenser la formation à la pratique professionnelle », d’« instruire les apprenti∙e∙s » (LFPr, art. 45). Les ordonnances de métier insistent plus ou moins sur les tâches de suivi de l’évolution des compétences de l’apprenti∙e et d’évaluation des objectifs de formation précisés par le plan de formation. Par ailleurs, un manuel pour la formation en entreprise (appelé « classeur » par les personnes formatrices) est à disposition3. Il vise à donner des outils dans les principales étapes de la formation. Finalement, au niveau des entreprises, les prescriptions portent principalement sur l’organisation du travail productif, dont découle fréquemment celle de la formation (voir ci-après), et sur la double injonction d’assurer la production et en même temps une formation de qualité.

26L’analyse des entretiens fait surtout ressortir le plan de formation comme élément de prescrit. Il est central dans la définition des contenus de formation et sert de référence pour l’organisation de la formation :

« Dans chaque division, donc y’a un plan de formation et puis dans chaque division y’a un programme de formation […] Si je prends l’apprenti qui est chez moi en ce moment, et bien il aura son cahier des charges, tout ça, avec des dates jusqu’à quand il doit avoir appris telle tâche, et puis alors il coche au fur et à mesure qu’il a atteint la tâche. » (Richard, responsable de formation, grande entreprise de l’industrie alimentaire)

27On le voit ici, toute l’organisation de la formation (programme évolutif au fil des années, rotation dans les différents secteurs ou services, etc.) est orchestrée depuis le plan de formation. Il permet également l’évaluation de l’acquisition des compétences (annuelles, examens finaux).

  • 4 Afin de simplifier la lecture, les observations seront indiquées par un numéro similaire à l’entret (...)

28Dans les observations, le rapport au prescrit apparaît fréquemment au travers d’une attitude de rejet. En effet, les personnes formatrices, en particulier celles formant au quotidien, l’appréhendent comme une charge supplémentaire, une contrainte imposée par Berne, qui « complique leur travail ». Le « classeur » est jugé incompréhensible et inaccessible aux apprenti∙e∙s, car « traduit de l’allemand » (obs. 79) ou rédigé dans un style « presque universitaire » (obs. 69)4. Le prescrit est en outre jugé inutile, les FEE relevant que les conditions d’exercice ne seraient pas respectées (obs. 2, 66), en termes de nombre d’apprenti∙e∙s par personne ou encore de qualification pédagogique des personnes formant au quotidien.

29Ainsi, les entretiens permettent de relever un prescrit jugé utile en termes d’organisation et d’évaluation de la formation. Les observations soulignent davantage une mise à distance de ce prescrit, jugé inutile et rendant le quotidien malaisé. Cette apparente contradiction entre discours et pratique souligne le primat de la production, toute indication prescriptive relative au volet formation, même si elle est relevée positivement, doit, dans le réel du travail, être mise à distance.

Les manifestations de l’activité réelle des formatrices et formateurs en entreprise

Quand la production prime

30Face à la faiblesse de la prescription, le réel, tel qu’il est appréhendé à partir des entretiens et des observations, est marqué par le primat de la production. Ce dernier se donne à voir au travers de l’organisation du travail et de la formation, mais également au travers de l’évocation récurrente des coûts de production (prix de la pièce, vitesse d’exécution, facturation à la clientèle, obs. 1, 2, 13, 20, 21). Les changements du travail, qui ont affecté les différents métiers (rentabilité accrue, fin du service public ou intensification du travail, obs. 13, 49) et touchent également les personnes formatrices, apparaissent ici de façon marquée.

31Si l’organisation de la formation doit beaucoup aux cadres prescriptifs, les observations laissent apparaître que cette dernière semble principalement découler de l’organisation du travail et surtout du carnet de commande. Ainsi, les rotations dans les différentes unités ou l’attribution quotidienne des tâches aux apprenti∙e∙s sont fortement dépendantes des besoins de la production (obs. 1, 2, 21), à tel point que la logique de formation ne semble pas être au centre :

« Comment est organisée la formation des apprentis ? ça se fait un peu suivant les.. ah c’est difficile à expliquer ça. C'est pas complètement structuré, parce que nous on dépend beaucoup de la façon dont va se dérouler la journée, des commandes qui peuvent arriver » (Arnaud, formateur, petite boulangerie-pâtisserie)

32L’organisation est ici appréhendée comme faite « sur le tas », « au feeling » ou « à l’instinct ». Par ailleurs, si elle détermine les tâches attribuées aux apprenti∙e∙s, la production influence aussi le temps que les personnes formatrices peuvent consacrer à la formation, en particulier dans les micro et petites entreprises :

« J'ai pas de programme vraiment euh… particulier. Je peux pas en fait. Dans notre domaine en fait on est… on est constamment dérangés. Comme c'est un magasin les gens entrent… » (Alberto, responsable de formation, micro-entreprise de vente de produits informatiques)

33Dans les métiers où il faut gérer des « coups de feu » (l’hôtellerie ou la vente), les FEE ne peuvent pas planifier leurs activités d’accompagnement et les apprenti∙e∙s se voient relégué∙e∙s à des tâches simples et/ou répétitives, permettant aux personnes formatrices (et au reste du collectif de travail) de répondre aux urgences.

  • 5 Dans certaines entreprises (de moyenne ou grande taille), des locaux de formation offrent une répli (...)

34Les impératifs de rentabilité (coûts de production, qualité des pièces, rapidité d’exécution, limitation des déchets) participent à éloigner les apprenti∙e∙s, au moins temporairement, de la production. Elles et ils sont soit relégué∙e∙s à des tâches non formatives (« coups de feu »), soit passent un temps plus ou moins long dans des centres de formation détachés de la zone de production de l’entreprise (obs. 14, 20, 21)5.

35Ainsi, dans un système de formation fondé sur l’apprentissage en situation de travail et en entreprise, la logique productive crée le paradoxe d’écarter les apprenti∙e∙s des situations de travail réel en les envoyant provisoirement dans des centres de formation. Cependant, autre paradoxe, ces derniers, vantés comme des espaces prioritairement dédiés à la formation, voient la logique productive s’insinuer. Ainsi, des projets « économiquement rentables » sont ponctuellement réalisés dans les locaux (obs. 14) ou les centres de formation (obs. 20, 21), et les succursales gérées par les apprenti∙e∙s se voient soumises aux mêmes objectifs de rentabilité (obs. 13, 17) que les autres.

  • 6 Etudiées dans le cadre des micro-entreprises (Baumeler et Lamamra, 2019), ces stratégies, ainsi que (...)

36Un deuxième point à relever concerne la pluralité des modalités de formation qui coexistent au sein d’une même entreprise. Celle-ci fait écho à une formation tributaire de l’organisation du travail et des impératifs productifs. En effet, les moments dédiés à la formation étant rares, les personnes formatrices usent de différentes stratégies6 pour former malgré la pression à la production (Baumeler et Lamamra, 2019). Ainsi, les personnes formatrices forment dans les interstices, durant les pauses (obs. 13), lorsqu’une tâche avec des tiers est terminée (obs. 13, 55, 61) ; elles forment à chaque occasion (obs. 55, 58) ; elles donnent des « cours d’appuis » obligatoires (obs. 60), y compris hors du temps de travail ; enfin, et c’est la modalité la plus fréquemment observée, elles laissent l’apprenti∙e s’auto-former.

37L’auto-formation consiste à laisser les apprenti∙e∙s seul∙e∙s avec une tâche pour laquelle elles et ils ont reçu des consignes. Largement soutenue par un discours sur l’autonomie des apprenti∙e∙s (Duc, Perrenoud et Lamamra, 2018), cette modalité ne correspond pourtant guère à l’aboutissement d’une participation et d’un encadrement progressifs (Kunégel, 2011).

38Dans les contextes où il y a plusieurs apprenti∙e∙s (moyennes et grandes entreprises), l’auto-formation se transforme en une formation par les pairs, une collaboration entre apprenti∙e∙s ayant différentes expériences (obs. 2, 53, 62). Les personnes chargées de la formation délèguent les tâches formatives aux apprenti∙e∙s, qui font dès lors partie de la configuration tutorale (Pelé-Peycelon et Veillard, 2016).

39Une autre modalité fréquente est la monstration associée au travail en tandem. La personne formatrice exécute une tâche et dévoile les gestes du métier (Filliettaz, de Saint-Georges et Duc, 2008) à un∙e apprenti∙e en posture d’observation, qui par la suite les reproduira (obs. 27) :

« […] c'est vraiment ils travaillent avec nous, vous savez, moi j'ai pas une minute, non c'est pas vrai, j'ai très peu de temps pour leur dire… Mais comme on travaille à deux, je leur dis tu fais ça, comme ça, comme ça, vous voyez la première fois, et...après j'ai plus besoin de dire » (Clément, formateur, restaurant d’une grande entreprise de l’industrie alimentaire)

40La monstration, en particulier quand elle est associée au travail en tandem, permet de résoudre la tension produire/former. Elle est alors un moyen efficace de faire faire les bons gestes à l’apprenti∙e sans pour autant stopper sa propre activité productive.

Quand la formation s’impose

41Malgré le primat de la production, il est des cas, mis en évidence par les entretiens principalement, où la formation parvient à s’imposer. Certaines entreprises mettent un point d’honneur à offrir une formation de qualité. En outre, certains secteurs, à l’instar des métiers de la santé et du social (obs. 51, 55), semblent avoir importé dans les pratiques de la formation en entreprise leurs propres cultures professionnelles (séances de débriefing, supervisions) et le temps nécessaire à celles-ci.

42Le premier point concerne l’organisation de la formation, et en particulier la division du travail entre les diverses personnes engagées dans la formation des apprenti∙e∙s : responsable de formation, formateur ou formatrice au quotidien, employé∙e∙s. Dans les micro-entreprises, une division du travail se fait également entre employé∙e(s) engagé∙e(s) dans la formation de l’apprenti∙e et patron-ne qui endosse le statut de responsable de formation :

« Et moi je suis un petit peu, je suis là pour organiser les plannings de formation, suivre, je suis un petit peu le… défendeur de ce qu’on a projeté. Quand on définit une formation et bah c’est moi qui vais regarder si ça joue » (Walther, responsable de formation, moyenne entreprise de l’horlogerie)

43L’organisation, telle qu’elle apparaît ici, semble mettre l’enjeu de la formation au centre, les responsables de formation apparaissant alors comme les garant∙e∙s du cadre prescriptif. La rotation de l’apprenti∙e entre les secteurs ou divisions de l’entreprise, est un élément important de l’organisation de la formation, qui répond de surcroît aux exigences du plan de formation :

« Et puis alors dans chaque division, donc y’a un plan de formation et puis dans chaque division y’a un programme de formation pour dire… tout ce qu’ils doivent apprendre pendant qu’ils sont dans cette division. » (Richard, responsable de formation, grande entreprise de l’industrie alimentaire)

44Lorsque l’organisation de l’apprentissage répond à un primat de la formation, elle se fait en tenant compte de la progression de la participation de l’apprenti∙e et de son encadrement. Elle a donc un impact majeur sur un deuxième aspect : les modalités de formation. Les débuts de la formation de l’apprenti∙e sont alors organisés en périphérie de l’activité (posture d’observation, petites tâches à effectuer, rangement, nettoyage) (Lave et Wenger, 1991) ou plus clairement hors de la production (ex : travail sur des têtes de coiffure, sur des vieilles voitures, dans le centre de formation) :

« C’est clair qu’au début… il regarde… il regarde pas mal parce que… casser des trucs ça devient vite cher. Et là, il regarde avec le mécano. » (Alain, formateur, grande entreprise de l’industrie automobile)

45Cet extrait met en évidence la nécessité de proposer aux novices une entrée progressive dans l’activité et l’équipe de travail. Cela permet de limiter les coûts liés aux erreurs commises par les apprenti∙e∙s.

46Dans une logique formative, la participation de l’apprenti∙e évolue progressivement vers des tâches productives et plus centrales (Lave et Wenger, 1991). L’encadrement suit lui aussi une évolution :

« Après l’apprenti est avec la personne et puis il travaille en même temps qu’il lui explique, en 1ère année, et puis après en 2ème l’apprenti il fait avec cette personne mais c’est l’apprenti qui fait et l’autre reste derrière, et en 3ème… il fait toujours avec l’autre qui reste derrière mais qui dit rien et il est autonome comme ça, à peu près. » (Benjamin, formateur, grande entreprise de l’industrie alimentaire)

47Au début, le suivi est serré, puis l’encadrement s’éloigne afin d’arriver à un travail autonome de l’apprenti∙e. On assiste alors à un passage de relais dans la prise en charge de l’activité (Kunégel, 2011).

48L’importance de la formation se manifeste aussi à travers des modalités de formation apparemment paradoxales dans ce contexte. Il est à relever tout d’abord que les prescriptions des entreprises en matière de performances de la formation (résultats aux examens finaux), participent à structurer la formation des apprenti∙e∙s et à l’éloigner du lieu de travail. Ainsi, pendant que les apprenti∙e∙s de première année sont parfois éloigné∙e∙s de l’outil de production, celles et ceux de dernière année y sont également régulièrement soustrait∙e∙s, ce afin de préparer leurs examens (obs. 13, 14, 49).

49Un autre aspect relativement inédit est le retour de la forme scolaire dans les espaces dédiés à la formation (obs. 17, 20, 21, 60). Certaines entreprises ont ainsi de véritables salles de classe, où les personnes formatrices dispensent un enseignement frontal. Ce dernier se structure autour de séquences théoriques, de cours d’appuis ou encore de « formations maisons » participant d’une importante socialisation à l’entreprise (obs. 17). Il est à relever que les personnes formatrices tendent à identifier ces périodes comme moments de formation, comme si la formation en situation de travail n’en était pas véritablement.

Discussion et conclusion

50Au terme de ces résultats, l’analyse de la formation en situation de travail à partir des conditions d’exercice des FEE se montre opérante.

51En analysant le quotidien de l’activité des personnes formatrices, la tension produire/former apparaît comme principale contrainte, non seulement dans les discours, mais aussi au travers des observations. Celles-ci laissent apparaître non plus une tension, mais véritablement le primat d’une logique sur l’autre (Bahl, 2008). Ainsi, l’organisation de la formation semble fréquemment découler de l’organisation du travail. La forte participation des collègues à l’encadrement des apprenti∙e∙s l’illustre bien. Si elle peut être lue en termes d’« accompagnement collectif » (collective guidance, voir Filliettaz, 2011) ou de configurations tutorales (Pelé-Peycelon et Veillard, 2016), cette implication collective semble répondre ici à une organisation de dernière minute. Les équipes, les tandems semblent alors constitués pour répondre aux impératifs productifs (Maurines, 1997), plutôt que d’être pensés comme de véritables dispositifs pédagogiques. Cela ne signifie pas que la transmission ne peut se faire ou qu’elle serait nécessairement défaillante, mais que la logique formative ne préside pas nécessairement aux choix effectués par l’entreprise.

Entre prescrit et réel, l’activité de formation en situation de travail

52Les résultats ont cherché à rendre compte du prescrit et du réel de la formation en situation de travail.

53Dans un premier temps, le prescrit se joue principalement à un niveau macro – cadre législatif – et apparaît à la fois faible et pluriel. Ce dernier ne dit quasi rien sur la manière de former ou sur la place à donner à cette activité. Des éléments de prescription plus méso portant sur la performance des apprenti∙e∙s et dépendant des politiques d’entreprise viennent compléter ce cadre. Là aussi, rares sont les précisions sur le cahier des charges, le temps à disposition et la reconnaissance de la fonction. De ce prescrit, on retiendra la centralité donnée à la formation.

54Dans un deuxième temps, une partie du réel du quotidien de la formation en entreprise renvoie au primat de la production. Un certain nombre d’éléments ayant trait à cet aspect apparaissent tant dans les observations que dans les entretiens (intensification du travail, pression à la rentabilité, manque de temps). Les observations soulignent en outre l’intensité avec laquelle cette logique productive s’impose.

55Dans un troisième temps, les entretiens, surtout, révèlent un pôle formation qui parviendrait à s’imposer. Ce sont alors des situations où l’organisation et les modalités de la formation répondrait aux logiques des plans de formation et de l’apprentissage progressif.

56On assiste alors à un écart entre deux aspects du réel, l’un étant assez proche du prescrit et ressortant davantage des entretiens, et l’autre s’en éloignant fortement et issu prioritairement des observations. Faut-il en déduire que ce qui ressort des entretiens ne serait que de l’ordre du déclaratif, qu’il répondrait à une forme de désirabilité sociale, où les personnes formatrices feraient état d’un quotidien proche du « manuel du formateur » ?

57Derrière cet écart entre réel/formation et réel/production se devinent les difficultés que peuvent rencontrer les personnes formatrices et la souffrance éthique qui en découle (Dejours, 1998). En effet, elles se sont engagées pour former, mais n’en ont ni les conditions, ni la reconnaissance (Baumeler et Lamamra, 2019). En outre, le travail s’est intensifié (Le Feuvre, 2014). L’écart entre discours sur la formation et pratiques dictées par la production laisse apparaître la tension entre cadre idéal et conditions réelles d’exercice (Bahl, 2008). Cette fracture révèle que le discours autour de la formation pourrait être une stratégie défensive (Dejours, 1998), permettant de donner du sens à l’activité, dans un contexte d’exercice bien loin de l’« idéal ».

Des observations pour saisir les conditions d’exercice de la formation en situation de travail

58Pour appréhender les conditions d’exercice de la fonction de FEE et le contexte de la formation en situation de travail, la méthodologie choisie, et en particulier le type d’observations adopté s’est révélé heuristique. Proposant une focale assez large, l’observation courte et portant sur l’entier de l’activité quotidienne, et non uniquement sur les situations de transmission, a permis de saisir combien l’activité productive prime (Bahl, 2008) sur une activité formatrice secondaire, en particulier dans les PME ou les micro-entreprises. Ce niveau méso d’observations a pu saisir avec acuité le réel du travail des FEE, celui du métier premier et de la production, ce qui pourrait échapper à des observations plus micro. Seules les personnes ayant pour activité principale la formation semblent échapper aux contraintes du travail, même si les observations ont mis au jour que les espaces apparemment dédiés à la formation n’échappaient pas aux logiques dominantes. Elles ont également pu faire émerger des modalités qui s’éloignaient de la formation en situation de travail, en optant pour une forme scolaire. Est-ce à dire que ces espaces dédiés à la formation seraient confrontés à une double contradiction ?

59Si elles renseignent sur les conditions de l’exercice de la fonction formatrice et en partie sur les configurations tutorales (Pelé-Peycelon et Veillard, 2016), des observations aussi courtes et ponctuelles, ne permettent pas de saisir les interactions fines entre personnes formatrices et apprenti∙e∙s (Filliettaz, de Saint-Georges et Duc, 2008) ou encore le caractère évolutif de l’encadrement (Kunégel, 2011). Des observations de plus longues durées et échelonnées sur l’entier de la formation de certain∙e∙s apprenti∙e∙s (3 à 4 ans) permettraient de saisir ces éléments plus micro, ainsi que d’éventuelles variations dans les conditions d’exercice du métier (périodes de forte surcharge ou au contraire plus calmes) et de la fonction formatrice. La question serait la suivante : y a-t-il des moments où le primat de la production s’estomperait au profit de la formation ?

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Annexe

Annexe : références des observations

N

ID

Taille entreprise*

Secteur d’activité entreprise

Type d’entreprise

1

Obs 1

Grande

Industrie automobile

Garage

2

Obs 2

Grande

Industrie automobile

Garage

3

Obs 3

Grande

Industrie automobile

Garage

4

Obs 13

Grande

Distribution et logistique

Entreprise de distribution

5

Obs 14

Grande

Industrie alimentaire

Boucherie industrielle

6

Obs 17

Grande

Vente

Grande distribution

7

Obs 20

Grande

Industrie des machines

Entreprise industrielle

8

Obs 21

Grande

Industrie des machines

Entreprise industrielle

9

Obs 24

Grande

Santé, social, soins corporels

Crèche d’entreprise (industrie alimentaire)

10

Obs 26

Grande

Energies

Prestataire public d’énergie

11

Obs 27

Grande

Energies

Prestataire public d’énergie

12

Obs 29

Grande

Vente

Grande distribution

13

Obs 34

Grande

Transports

Transports publics

14

Obs 39

Grande

Assurance

Assurance

15

Obs 40

Grande

Industrie alimentaire

Boulangerie industrielle

16

Obs 44

Grande

Industrie alimentaire

Restaurant d’entreprise

17

Obs 45

Grande

Industrie alimentaire

Chocolaterie industrielle

18

Obs 48

Grande

Administration

Administration cantonale

19

Obs 49

Petite

Santé, social, soins à la personne

Pharmacie

20

Obs 50

Petite

Alimentation, hôtellerie, restauration

Boulangerie artisanale

21

Obs 51

Petite

Santé, social, soins corporels

Crèche

22

Obs 53

Moyenne

Industrie, mécanique, médical

Mécanique matériel dentaire

23

Obs 55

Grande

Santé

Hôpital universitaire

24

Obs 56

Petite

Santé, social, soins corporels

Crèche

25

Obs 57

Micro

Santé, social, soins corporels

Salon de coiffure

26

Obs 58

Petite

Alimentation, hôtellerie, restauration

Restaurant

27

Obs 59

Petite

Alimentation, hôtellerie, restauration

Boulangerie

28

Obs 60

Petite

Industrie pharmaceutique

Structure de formation laborantin-e-s

29

Obs 61

Petite

Industrie

Industrie métallurgique

30

Obs 62

Petite

Industrie alimentaire

Boucherie artisanale

31

Obs 66

Moyenne

Santé, social, soins corporels

Etablissement médico-social

32

Obs 69

Petite

Alimentation, hôtellerie, restauration

Restaurant

33

Obs 70

Petite

Industrie alimentaire

Produits alimentaires à base de fruits

34

Obs 78

Micro

Santé, social, soins corporels

Salon de coiffure

35

Obs 79

Moyenne

Santé, social, soins corporels

Etablissement médico-social

Micro-entreprises : 1-9 EPT Moyennes : 40 -249 EPT

Petites entreprises : 10-49 EPT Grandes : > 250 EPT

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Notes

1 Les secteurs ont été nommés selon la nomenclature générale des activités (NOGA) utilisée par l’Office fédéral des statistiques (OFS).

2 La nomenclature retenue regroupe certains secteurs traditionnels de la formation duale (industrie, arts et métiers), cela explique la surreprésentation de ces branches dans notre corpus. Le commerce est également très présent, ce qui correspond à l’importance de ce domaine dans les choix de formation. A contrario, la proportion du domaine administratif est faible, et ce malgré la prépondérance de la formation d’employé∙e de commerce en Suisse. Lors de la construction du corpus, le choix n’a pas visé une représentativité des différents secteurs, mais avant tout une forte variété des situations (domaine d’activité, taille d’entreprise, politique d’entreprise en matière de formation, expérience de la personne formatrice, etc.).

3 Il est proposé par le Centre suisse de services Formation professionnelle, orientation professionnelle, universitaire et de carrière (CSFO), agence spécialisée de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP).

4 Afin de simplifier la lecture, les observations seront indiquées par un numéro similaire à l’entretien correspondant (voir annexe).

5 Dans certaines entreprises (de moyenne ou grande taille), des locaux de formation offrent une réplique des lieux de production. Les apprenti∙e∙s peuvent s’exercer sans les contraintes de la production. Ces espaces accueillent les apprenti∙e∙s de quelques semaines à deux ans, soit la moitié de leur temps de formation. Après cette étape, elles et ils rejoindront la ligne de production ou le travail avec la clientèle. Certaines entreprises ont développé des succursales gérées entièrement par des apprenti∙e∙s ou des magasins-écoles.

6 Etudiées dans le cadre des micro-entreprises (Baumeler et Lamamra, 2019), ces stratégies, ainsi que d’autres, se retrouvent dans les PME et les grandes entreprises.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Nadia Lamamra et Barbara Duc, « Une perspective décentrée sur l’apprentissage en situation de travail : les conditions d’exercice des personnes formatrices en entreprise »Éducation et socialisation [En ligne], 62 | 2021, mis en ligne le 20 novembre 2021, consulté le 19 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/edso/17040 ; DOI : https://doi.org/10.4000/edso.17040

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Auteurs

Nadia Lamamra

Haute école fédérale en formation professionnelle – HEFP ; nadia.lamamra@hefp.swiss

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Barbara Duc

Haute école fédérale en formation professionnelle – HEFP ; barbara.duc@hefp.swiss

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