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Le droit de la famille en (r)évolutions

Question prioritaire de constitutionnalité et droit de la famille

Amandine Cayol
p. 11-19

Résumés

L’instauration, par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, d’un contrôle a posteriori des dispositions législatives, a pu laisser espérer d’importantes évolutions en matière de droit de la famille. En réalité, les décisions rendues à la suite de questions prioritaires de constitutionnalité ont davantage permis des évolutions de la procédure de la QPC elle-même, qu’une “révolution” du droit de la famille.

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Texte intégral

  • 1 Aux termes du nouvel article 61-1 de la Constitution, « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cou (...)
  • 2 Décret nº 2010-148 du 16 février 2010 portant application de la loi organique nº 2009-1523 du 10 dé (...)
  • 3 Décret nº 2010-1216 du 15 octobre 2010 relatif à la procédure d’examen des questions prioritaires d (...)
  • 4 Il est également possible de saisir le Conseil d’une loi déjà examinée à condition qu’un changement (...)

1L’introduction, par la loi constitutionnelle nº 2008-724 du 23 juillet 2008, d’un contrôle a posteriori des lois permet désormais à tout justiciable de contester, lors d’une instance en cours, la constitutionnalité d’une disposition législative au regard des droits et libertés que la Constitution garantit1. Cette nouvelle procédure a été organisée plus précisément par la loi organique nº 2009-1523 du 10 décembre 2009, laquelle prévoit un système de double filtre. Le dispositif a été complété par le décret nº 2010-148 du 16 février 20102, modifié par le décret nº 2010-1216 du 15 octobre 20103. Depuis le 1er mars 2010, la « question prioritaire de constitutionnalité » – ou QPC – permet ainsi de soumettre au contrôle du Conseil les lois non déférées depuis 1958, mais également toutes les lois antérieures à cette date4. On aurait, dès lors, pu penser que le droit de la famille serait particulièrement affecté par un tel mécanisme.

  • 5 A. Bénabent, Droit civil. Droit de la famille, Paris, Montchrestien-Lextenso, 2010, p. 1.
  • 6 J. Hauser, « Le Conseil constitutionnel et le droit de la famille », Les cahiers du Conseil constit (...)
  • 7 En ce sens, voir L. Leveneur, Leçons de droit civil. Tome 1. 3e volume. La famille, H., L. et J. Ma (...)

2Le terme de « droit de la famille » ne figure pas en tant que tel dans le Code civil. Les dispositions relatives au droit familial sont en effet insérées dans le livre I « Des personnes ». Comment dès lors circonscrire le domaine du droit de la famille ? Celui-ci est traditionnellement présenté comme regroupant les règles relatives, d’une part, au couple et, d’autre part, à la filiation. « La famille […] se définit en droit comme un groupe de personnes qui sont reliées entre elles par des liens fondés sur l’alliance et la parenté »5. « La famille c’est d’abord un couple et ensuite des enfants »6. Le droit de la famille, au sens large, permet ainsi d’englober les règles régissant leurs rapports, tant d’un point de vue personnel que patrimonial. Bien qu’ayant pris leur autonomie, les droits des régimes matrimoniaux et des successions peuvent y être rattachés7.

  • 8 Loi nº 2000-596 du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce.
  • 9 Loi nº 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce.
  • 10 Loi nº 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adulté (...)
  • 11 Loi nº 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale.
  • 12 CC, déc. nº 93-325 DC du 13 août 1993, Loi relative à la maîtrise de l’immigration et aux condition (...)
  • 13 CC, déc. nº 99-419 DC du 9 novembre 1999, Loi relative au pacte civil de solidarité.
  • 14 Hormis concernant la PMA dans la décision nº 94-343/344 DC, Loi relative au respect du corps humain (...)

3Les dispositions législatives relatives au droit de la famille ont rarement été soumises au contrôle a priori du Conseil constitutionnel. Pour un grand nombre d’entre elles, leur date de promulgation ne le permettait pas, étant antérieure à la création du Conseil par la Constitution du 4 octobre 1958. Quant aux réformes réalisées depuis 1958, leur contrôle n’a pas été systématique. Jusqu’en 1974, les modalités de saisine du Conseil étaient très restrictives : seuls le président de la République, le Premier ministre, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat pouvaient le saisir, le Conseil n’ayant à l’époque pour fonction que d’empêcher le législateur d’empiéter sur le domaine réglementaire. La décision nº 71-44 DC du 16 juillet 1971, Liberté d’association, a considérablement accru le domaine d’intervention du Conseil par l’extension de son contrôle aux droits et libertés proclamés par le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. L’ouverture de sa saisine à soixante députés ou soixante sénateurs par la loi constitutionnelle du 29 octobre 1974 a, quant à elle, entraîné une forte augmentation des lois soumises à son contrôle. Pourtant, même après cette date, les lois relatives au droit de la famille n’ont généralement pas fait l’objet de recours devant le juge constitutionnel. Ni les lois du 30 juin 20008 et du 26 mai 20049 relatives au divorce, ni celle du 3 décembre 2001 sur les successions10, ni encore la loi du 4 mars 2002 sur l’autorité parentale11 n’ont été concernées par un contrôle de constitutionnalité. Quelques décisions du Conseil étaient, certes, relatives aux règles applicables aux couples. À trois reprises, le Conseil avait été amené à se prononcer sur la conformité à la Constitution de textes relatifs à la lutte contre les mariages fictifs12. Il avait par ailleurs dû juger de la constitutionnalité de la loi sur le pacte civil de solidarité (pacs) en 199913. Il n’existait en revanche, jusqu’à la création de la QPC, aucune décision du Conseil concernant le droit de la filiation14.

4Les espoirs suscités par la création de la QPC étaient donc importants concernant le droit de la famille. Ce mécanisme semblait promis à une application fréquente dans un domaine jusque-là quasiment préservé de tout contrôle de constitutionnalité. Une véritable « révolution » du droit de la famille n’allait-elle pas avoir lieu ?

  • 15 Sur ce sujet, voir aussi J.-F. de Montgolfier, « La QPC et le droit de la famille au Conseil consti (...)

5En réalité, l’étude des décisions rendues depuis 2010 sur le sujet révèle que, si les interactions entre QPC et droit de la famille existent15, elles ont davantage permis une évolution de la procédure de la QPC (I) qu’une « révolution » du droit de la famille (II).

I. Les décisions relatives au droit de la famille, sources d’importantes évolutions de la QPC

6C’est à l’occasion de décisions rendues en droit de la famille que d’importantes évolutions du mécanisme de la QPC ont pu avoir lieu. Certaines décisions sont ainsi devenues de « grandes décisions de la QPC », non pour le contrôle opéré sur le fond, mais pour les avancées réalisées sur un plan procédural. La possibilité de renvoyer une question nouvelle car source d’un débat de société a ainsi été admise pour la première fois dans la décision relative au mariage homosexuel (A). La décision nº 2010-39 QPC a, quant à elle, permis au Conseil d’affirmer clairement la soumission à son contrôle de l’interprétation donnée aux textes de loi par les cours suprêmes (B).

A. La possibilité de renvoyer une question nouvelle car source d’un débat de société

  • 16 Art. 23-4 de la loi organique.

7La réforme constitutionnelle de 2008 n’a pas créé de recours direct en inconstitutionnalité de la loi. Une question prioritaire de constitutionnalité ne peut être soumise au Conseil qu’après avoir franchi un double filtre. Les juges du fond doivent vérifier que la disposition contestée est applicable au litige, qu’elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans le dispositif et les motifs d’une décision du Conseil (sauf changement de circonstances) et, enfin, que « la question n’est pas dépourvue de caractère sérieux ». Le Conseil d’État ou la Cour de cassation sont ensuite tenus de vérifier que la question est « nouvelle ou présente un caractère sérieux »16 pour la renvoyer au Conseil constitutionnel.

  • 17 La notion de moyen sérieux n’a quant à elle été définie ni par la loi organique, ni par le Conseil (...)

8Le critère de nouveauté a été précisé par le Conseil lui-même dans sa décision nº 2009-595 DC du 3 décembre 200917. Il ne doit pas être apprécié au regard de la disposition législative contestée, mais par rapport à la disposition constitutionnelle dont la violation est invoquée. Le simple fait qu’une loi n’a jamais été examinée par ses soins ne suffit donc pas à rendre la question nouvelle. La nouveauté est au contraire nécessairement retenue quand la question met en jeu une règle constitutionnelle dont le Conseil n’a encore jamais fait application. Dans une telle situation, le Conseil est obligatoirement saisi. Comme le précise la décision nº 2009-595 DC,

  • 18 Ici, comme après, nous soulignons.

[…] le législateur organique a entendu […] imposer que le Conseil constitutionnel soit saisi de l’interprétation de toute disposition constitutionnelle dont il n’a pas encore eu l’occasion de faire application18.

9Là n’est toutefois pas la seule hypothèse de nouveauté de la question. La décision nº 2009-595 DC indique en effet que

[…] dans les autres cas, [le législateur organique] a entendu permettre au Conseil d’État et à la Cour de cassation d’apprécier l’intérêt de saisir le Conseil constitutionnel en fonction de ce critère alternatif.

  • 19 Commentaire de la décision nº 2009-595 DC du 3 décembre 2009, Les cahiers du Conseil constitutionne (...)

10Cette dernière formule reste assez obscure. Dans quels « autres cas », les cours suprêmes sont-elles ainsi autorisées à considérer que la question soulevée présente un « intérêt » particulier, en l’absence pourtant de caractère sérieux ? Le critère du « sérieux » de la demande est alternatif à celui de la nouveauté, et suffisant en lui-même. Le Conseil semble ici permettre la transmission de questions qui ne sont pourtant ni sérieuses ni relatives à une disposition constitutionnelle nouvelle. L’étude de la jurisprudence révèle qu’une telle utilisation du critère de nouveauté de la question peut avoir lieu lorsqu’« une disposition législative […] fait l’objet d’un recours massif à la QPC »19. Un moyen soulevé dans le cadre d’une série de questions est susceptible d’être considéré comme nouveau.

11De manière plus étonnante, lors du renvoi de la QPC relative au mariage homosexuel, la question a pu être considérée comme nouvelle car elle concernait un problème de société. Selon l’arrêt rendu par la première chambre civile le 16 novembre 2010,

  • 20 Cass., 1re civ., 16 novembre 2010, nº 10-40.042.

[…] les questions posées font aujourd’hui l’objet d’un large débat dans la société, en raison, notamment, de l’évolution des mœurs et de la reconnaissance du mariage entre personnes de même sexe dans les législations de plusieurs pays étrangers20 […].

  • 21 Commentaire de la décision nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H. [Interdi (...)
  • 22 Voir, encore récemment, CC, déc. nº 2012-268 QPC du 27 juillet 2012, Mme Annie M. [Recours contre l (...)
  • 23 Voir, sur ce point, la « Chronique de jurisprudence constitutionnelle française 2012 », dans ce num (...)
  • 24 « Cette formulation […] souligne a contrario, mais très clairement, que, pour la Cour de cassation, (...)

12Le renvoi est alors opéré au motif que les questions posées « présentent un caractère nouveau au sens que le Conseil constitutionnel donne à ce critère alternatif ». Aucune question sérielle n’était pourtant concernée et les règles constitutionnelles invoquées (liberté du mariage et article 66 de la Constitution) avaient déjà été soumises au Conseil. Comme le relève le commentaire aux Cahiers du Conseil constitutionnel, il s’agit ici « d’un véritable pouvoir d’une saisine en opportunité qui a été reconnu, même lorsque les critères légaux ne seraient pas remplis »21. Si la question est nouvelle, c’est seulement ici parce qu’elle reflète une évolution sociétale. Une telle analyse semble contestable. Le rôle du Conseil se limite à vérifier la conformité des lois à la Constitution. Il ne peut modifier la loi afin de prendre en compte les éventuelles évolutions de la société depuis sa promulgation. Seul le législateur dispose d’un tel pouvoir. Soumettre au Conseil une « question de société » a toutefois comme intérêt pratique de mettre celle-ci en lumière et d’insister sur la nécessité pour le législateur d’intervenir sur ce sujet. Tel fut sans conteste le cas concernant le mariage homosexuel, une loi étant désormais préparée en ce sens. Par le jeu des réserves d’interprétation ou de l’abrogation différée des lois22, le Conseil a également pris l’habitude d’inciter le Parlement à légiférer23. Ceci n’a toutefois en principe lieu que relativement à des questions à l’origine jugées sérieuses par les cours de renvoi. Entre reconnaître au Conseil un rôle incitatif vis-à-vis du pouvoir législatif et admettre qu’il soit saisi de tous les débats de société sans que la question juridique soulevée ne soit sérieuse24, il y a un pas qui, selon nous, n’aurait pas dû être franchi.

13Si une telle extension des cas de saisine du Conseil constitutionnel, réalisée à l’occasion de la QPC sur le mariage homosexuel, semble contestable, c’est au contraire avec raison que le Conseil a affirmé la soumission de l’interprétation jurisprudentielle des lois au contrôle de constitutionnalité dans sa décision relative à l’adoption de l’enfant du conjoint au sein des couples de même sexe.

B. La soumission de l’interprétation jurisprudentielle des lois au contrôle de constitutionnalité

  • 25 La Cour de cassation avait ainsi refusé de transmettre une QPC relative à la non-motivation des arr (...)
  • 26 CC, déc. nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B. [Adoption au sein d’un c (...)

14Aux termes de l’article 61-1 de la Constitution et de l’article 23-1 de la loi organique, les normes contrôlées dans le cadre d’une QPC ne sont que les « dispositions législatives ». Le sens exact de cette notion a donné lieu à une controverse. La Cour de cassation a en effet, dans un premier temps, refusé de renvoyer au Conseil toute question mettant en cause sa jurisprudence25. Le considérant de principe adopté par le Conseil dans sa décision nº 2010-39 QPC est dès lors particulièrement important. Il y affirme clairement qu’« en posant une question prioritaire de constitutionnalité, tout justiciable a le droit de contester la portée effective qu’une interprétation jurisprudentielle constante confère à cette disposition »26.

  • 27 Voir, en ce sens, la séance au Sénat du 13 octobre 2009 (compte rendu intégral des débats) : « M. l (...)
  • 28 N. Molfessis, « La jurisprudence supra-constitutionem », La semaine juridique, éd. G, nº 42, octobr (...)
  • 29 Voir P. Puig, « La question de constitutionnalité : prioritaire mais pas première… », Revue trimest (...)

15La solution retenue par la Cour de cassation pouvait paraître justifiée au regard des travaux préparatoires de la loi organique27. Elle avait cependant pour conséquence une « sanctuarisation de la jurisprudence »28, insusceptible d’être soumise à un contrôle de constitutionnalité. Cette disjonction entre la disposition législative et son interprétation par les tribunaux était d’autant plus critiquable qu’elle niait toute la spécificité du contrôle a posteriori des lois. Tandis que le contrôle a priori ne peut porter que sur la loi abstraite, le contrôle a posteriori permet – impose même29 ! – au contraire de prendre en compte son application concrète par les juges. La loi organique ne précise-t-elle d’ailleurs pas que l’objet d’une QPC doit porter sur « une disposition législative applicable au litige » ? Ne faut-il pas comprendre que la question concernera la disposition « telle qu’applicable au litige », donc telle qu’interprétée par le juge ?

16Ainsi, dans sa décision nº 2010-39 QPC, afin de s’assurer de la conformité de l’article 365 du Code civil à la Constitution, le Conseil ne se contente pas d’analyser le texte nu. Il s’intéresse également à l’interprétation qui en a été donnée par la Cour de cassation, rappelant que :

  • 30 Cass., 1re civ., 20 février 2007 ; Cass., 1re civ., 19 décembre 2007 ; Cass., 1re civ., 9 mars 2011
  • 31 CC, déc. nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B., cons. 3.

[…] depuis l’arrêt du 20 février 200730 […] [celle-ci] juge de manière constante que, lorsque le père ou la mère biologique entend continuer à élever l’enfant, le transfert à l’adoptant des droits d’autorité parentale qui résulterait de l’adoption par le concubin ou le partenaire du parent biologique est contraire à l’intérêt de l’enfant et, par suite, fait obstacle au prononcé de l’adoption ; que, dès lors, la constitutionnalité de l’article 365 du code civil doit être examinée non pas en ce que cet article institue une distinction entre les enfants au regard de l’autorité parentale, selon qu’ils sont adoptés par le conjoint ou le concubin de leur parent biologique, mais en ce qu’il a pour effet d’interdire en principe l’adoption de l’enfant mineur du partenaire ou du concubin31.

  • 32 Ibid., cons. 4.

17En effet, c’est cette distinction entre les formes de couples qui était ici remise en cause par les requérants, lesquels invoquaient une rupture d’égalité32. Or le texte de l’article 365 du Code civil ne pose en lui-même aucune interdiction d’adopter l’enfant du conjoint dans un couple non marié. Celle-ci résulte uniquement de l’interprétation jurisprudentielle du texte.

  • 33 Cass., 1re civ., 13 mars 2007, Bulletin civil I, nº 511.

18De même, les articles 75 et 144 du Code civil, soumis au contrôle du Conseil dans sa décision nº 2010-92 QPC, n’interdisent pas directement le mariage homosexuel. L’article 75 se contente d’énoncer les formalités de célébration du mariage, tandis que l’article 144 précise l’âge nubile. C’est la jurisprudence qui a affirmé la prohibition du mariage entre personnes de même sexe aux motifs « que, selon la loi française, le mariage est l’union d’un homme et d’une femme », sans d’ailleurs viser aucune disposition législative précise en ce sens33. Le Conseil va pourtant accepter de vérifier la conformité d’une telle interprétation à la Constitution, précisant que les articles 75 et 144 du Code civil

  • 34 CC, déc. nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H., cons. 3.

[…] doivent être regard[és] comme figurant au nombre des dispositions législatives dont il résulte, comme la Cour de cassation l’a rappelé dans l’arrêt du 13 mars 2007 susvisé, « que, selon la loi française, le mariage est l’union d’un homme et d’une femme »34.

  • 35 Le commentaire aux Cahiers du Conseil constitutionnel de la décision nº 2010-39 QPC du 6 octobre 20 (...)
  • 36 Voir G. Zagrebelsky, « La doctrine du droit vivant et la question de constitutionnalité », Constitu (...)

19Ces décisions sont directement inspirées de la « doctrine du droit vivant » développée par la Cour constitutionnelle italienne35, selon laquelle le contrôle de constitutionnalité doit porter sur le texte tel qu’interprété par les juges de renvoi. Il s’agit de distinguer la disposition, c’est-à-dire le texte lui-même, de la norme issue de son interprétation par les tribunaux36. La Cour italienne est tenue, lorsqu’une question lui est soumise, de prendre en compte l’interprétation retenue par la pratique jurisprudentielle, sans pouvoir y substituer la sienne. Cette règle résulte de l’arrêt nº 3-1956 du 15 juin 1956 selon lequel la Cour doit tenir en « juste considération […] l’interprétation jurisprudentielle constante qui confère au précepte législatif sa valeur effective dans la vie juridique ».

  • 37 Au contraire, voir pour la Cour italienne l’arrêt nº 84 de 1963, dans lequel elle tient compte de l (...)
  • 38 CC, déc. nº 2010-101 QPC du 11 février 2011, Mme Monique P. et autre [Professionnels libéraux soumi (...)

20On peut toutefois noter deux différences entre la position du Conseil constitutionnel et celle de la Cour italienne. D’une part, contrairement à la « doctrine du droit vivant » italienne, le Conseil ne prend en compte que la jurisprudence constante des cours suprêmes, et non celle des juges du fond37. D’autre part, le Conseil s’autorise à substituer son interprétation à celle développée par le juge de renvoi lorsque cela lui permet de déclarer la loi conforme à la Constitution. Sans invalider le texte législatif, le Conseil utilise la technique de la réserve d’interprétation afin de neutraliser l’interprétation non conforme à la Constitution38.

  • 39 La solution a ensuite été constamment reprise. Voir, par exemple, CC, déc. nº 2010-52 QPC du 14 oct (...)
  • 40 Voir D. Rousseau, J. Bonnet, L’essentiel de la QPC, Paris, Gualino-Lextenso, 2011, p. 123.

21Affirmant pour la première fois la soumission de l’interprétation jurisprudentielle des lois au contrôle de constitutionnalité39, la décision nº 2010-39 QPC ouvre la voie à une transformation du rôle du Conseil vers celui d’une cour suprême40. L’analyse des décisions relatives au droit de la famille est d’autant plus décevante. Elles n’ont en effet aucunement conduit le Conseil à « révolutionner » cette branche du droit.

II. L’absence de « révolution » du droit de la famille par la QPC

22La création de la question prioritaire de constitutionnalité a permis de contester la conformité à la Constitution de nombreuses dispositions législatives relatives au droit de la famille. Toutefois, les décisions rendues par le Conseil n’entraînent pas de bouleversement de la matière en raison, d’une part, de la définition restrictive des droits et libertés invoqués (A) et, d’autre part, de l’absence de contrôle approfondi du Conseil sur ces questions (B).

A. La définition restrictive des droits et libertés invoqués

  • 41 Depuis la décision nº 2003-484 DC du 20 novembre 2003, Loi relative à la maîtrise de l’immigration, (...)

23Tandis que les requérants proposent, au soutien des QPC relatives au droit de la famille, une conception extensive des droits et libertés garantis par la Constitution, le Conseil opte au contraire pour une définition stricte de ces derniers. Le constat est général : les composantes de la liberté personnelle (liberté du mariage41 et droit au respect de la vie privée), le droit à une vie familiale normale, le principe d’égalité et le droit de propriété sont tous concernés.

  • 42 CC, déc. nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H., cons. 7 : « La liberté du (...)
  • 43 Elle s’oppose par exemple « à ce que le caractère irrégulier du séjour d’un étranger fasse obstacle (...)
  • 44 CC, déc. nº 2012-260 QPC du 29 juin 2012, M. Roger D. [Mariage d’une personne en curatelle], cons.  (...)
  • 45 CC, déc. nº 2012-261 QPC du 22 juin 2012, M. Thierry B. [Consentement au mariage et opposition à ma (...)

24Le principe constitutionnel de liberté du mariage a été précisé dans la décision nº 2010-92 QPC relative au mariage homosexuel. Il y est rappelé qu’il ne saurait être compris comme octroyant un droit inconditionné au mariage42. Ladite liberté implique seulement que les personnes remplissant les conditions légales du mariage puissent se marier43. Elle ne peut en aucun cas être invoquée afin de s’affranchir des règles encadrant le mariage. L’exigence d’altérité sexuelle des époux ne serait pas, en soi, plus contestable que la fixation d’un âge minimum par exemple. Aucune avancée relative à l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe ne pouvait donc être espérée sur ce fondement. Il est même loisible au législateur d’apporter des limitations à la liberté du mariage de certaines personnes, dès lors que ceci est justifié par l’intérêt général et proportionné au regard de l’objectif poursuivi. Dans sa décision nº 2012-260 QPC, le Conseil a ainsi, sans surprise, considéré que, si l’article 460 du Code civil apporte des restrictions à la liberté matrimoniale, celles-ci sont proportionnées au but de protection des intérêts de la personne sous curatelle. Le mariage de cette dernière reste en effet possible, divers recours contre la décision du curateur étant prévus44. Enfin, la liberté du mariage ne fait, bien entendu, pas obstacle à ce que le législateur prenne des mesures de prévention ou de lutte contre les mariages contractés à des fins étrangères à l’union matrimoniale. La possibilité pour le procureur de la République de former opposition au mariage ou d’en poursuivre l’annulation en cas de contrainte a ainsi été jugée conforme à la Constitution. Il ne s’agit nullement d’un obstacle mais au contraire d’une garantie de la liberté du mariage45.

  • 46 Voir CC, déc. nº 2011-173 QPC du 30 septembre 2011, M. Louis C. et autres [Conditions de réalisatio (...)
  • 47 CC, déc. nº 2012-227 QPC du 30 mars 2012, M. Omar S. [Conditions de contestation par le procureur d (...)
  • 48 Voir le commentaire de la décision nº 2011-173 QPC du 30 septembre 2011, M. Louis C. et autres, Les (...)
  • 49 CC, déc. nº 2012-248 QPC du 16 mai 2012, M. Mathieu E. [Accès aux origines personnelles], cons. 6.
  • 50 CC, déc. nº 2011-173 QPC du 30 septembre 2011, M. Louis C. et autres, cons. 6.
  • 51 Cour EDH, Jäggi c. Suisse, 13 juillet 2006.
  • 52 P. Puig, « La question prioritaire de constitutionnalité : prioritaire mais pas première… », p. 71.

25Découlant également de la liberté personnelle prévue aux articles 2 et 4 de la Déclaration de 178946, le droit au respect de la vie privée a été invoqué à plusieurs reprises devant le Conseil, permettant d’apporter des précisions quant à son champ d’application. Les décisions rendues révèlent une volonté de ne pas trop étendre ce dernier. Le Conseil affirme ainsi, dans ses décisions nº 2012-227 QPC et nº 2012-264 QPC, que « ni le respect de la vie privée ni aucune autre exigence constitutionnelle n’impose que le conjoint d’une personne de nationalité française puisse acquérir la nationalité française à ce titre »47. Le Conseil semble en outre considérer que le droit au respect de la vie privée n’implique pas de droit d’accès à ses origines48. La décision nº 2012-248 QPC est ainsi l’occasion de valider l’accouchement sous X, le droit de demander l’anonymat de la mère répondant selon le Conseil à l’OVC (objectif de valeur constitutionnelle) de protection de la santé de l’enfant à naître49. Déjà, dans la décision nº 2011-173 QPC relative aux expertises génétiques post mortem, le Conseil avait fait primer le respect dû aux morts sur le droit d’établir sa filiation50. Pour la Cour EDH, au contraire, le refus opposé au requérant d’effectuer une analyse ADN sur une personne défunte dans le but de déterminer s’il s’agissait de son père viole le droit au respect de sa vie privée51. La France a, en conséquence, été condamnée sur le fondement de l’article 8 de la Convention EDH dans la décision Pascaud contre France du 16 juin 2011, selon laquelle l’intérêt de l’enfant à découvrir la vérité concernant l’identité de ses géniteurs est un aspect important de son identité personnelle. La décision nº 2010-173 QPC, rendue le 30 septembre 2011, surprend donc en ce qu’elle confirme la divergence de conception entre le Conseil constitutionnel et la Cour EDH sur ce point. Ceci n’aboutit-il pas à une « incohérence hiérarchique »52, une loi déclarée conforme à la Constitution étant jugée contraire à la Convention EDH, laquelle est pourtant une norme inférieure à la Constitution ?

  • 53 CC, déc. nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B., cons. 8.
  • 54 Ibid.
  • 55 Cass., 1re civ., 24 février 2006, Bulletin civil I, nº 101 ; Cass., 1re civ., 8 juillet 2010, Bulle (...)
  • 56 Voir, sur ce point, CA Paris, 16 juin 2011 et CA Paris, 20 octobre 2011, aux termes desquels lorsqu (...)
  • 57 CC, déc. nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H., cons. 8.
  • 58 Voir par exemple pour l’application de ce principe en matière de regroupement familial, CC, déc. nº (...)
  • 59 CC, déc. nº 2011-173 QPC du 30 septembre 2011, M. Louis C. et autres, cons. 6 ; CC, déc. nº 2012-24 (...)

26Le droit à une vie familiale normale est, lui aussi, entendu strictement par le Conseil. Ce droit ne concerne que la vie concrète des individus et ne comporte pas le droit d’obtenir une reconnaissance juridique du lien existant entre eux. Dès lors, « le droit à une vie familiale normale n’implique pas que la relation entre un enfant et la personne qui vit en couple avec son père ou sa mère ouvre droit à l’établissement d’un lien de filiation adoptive »53. Comme le relève le Conseil, l’interdiction de l’adoption de l’enfant du conjoint au sein des couples non mariés n’empêche pas le couple de vivre ensemble et d’élever conjointement l’enfant54. La Cour de cassation autorise même en pareille situation une délégation-partage de l’autorité parentale. S’il fut dans un premier temps requis que « les circonstances l’exigent et que la mesure [soit] conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant »55, on assiste aujourd’hui à une évolution, les juges du fond ne semblant plus exiger que soit rapportée la preuve matérielle d’une indisponibilité du parent délégant56. De même, « le droit de mener une vie familiale normale n’implique pas le droit de se marier pour les couples de même sexe »57, mais seulement la possibilité pour les membres d’une même famille de vivre ensemble58. Ce n’est que si la prohibition du mariage homosexuel faisait obstacle à une vie commune qu’il y aurait inconstitutionnalité. Or, les couples homosexuels peuvent vivre en concubinage et le pacs leur est ouvert. Les décisions nº 2011-173 QPC et nº 2012-248 QPC semblent quant à elles indiquer que le droit à une vie familiale normale n’instaure pas de droit à la connaissance de ses origines. Pour le Conseil, ni l’accouchement sous X, ni l’interdiction des expertises génétiques post mortem ne portent atteinte à ce droit59.

  • 60 CC, déc. nº 2011-151 QPC du 13 juillet 2011, M. Jean-Jacques C., cons. 5.
  • 61 CC, déc. nº 2011-212 QPC du 20 janvier 2012, Mme Khadija A., épouse M. [Procédure collective : réun (...)
  • 62 T. Revet, obs. sur CC, déc. nº 2011-215 QPC du 27 janvier 2012, Régime des valeurs mobilières non i (...)

27Les décisions rendues en droit de la famille confirment la définition très étroite de la privation de propriété retenue par le Conseil. Dans sa décision nº 2011-151 QPC, il considère ainsi que l’attribution d’un bien à titre de prestation compensatoire n’est pas une privation de propriété au sens de l’article 17, car cette attribution forcée « constitue une modalité de paiement d’une obligation judiciairement constatée »60. Dès lors qu’il existe une créance à éteindre, la cession forcée d’un bien ne constitue pas une privation de propriété. Cette qualification est également rejetée par le Conseil concernant la possibilité, en cas de procédure collective, de réunir à l’actif en nature les biens acquis par le conjoint, pendant la durée du mariage, avec les valeurs fournies par le débiteur61. Il y a pourtant, selon le droit privé, « privation de propriété en présence de toute extinction forcée du pouvoir exclusif établi relativement à un bien déterminé »62.

28Le principe d’égalité, fréquemment invoqué au soutien de QPC, n’a pas non plus permis de « révolutionner » le droit de la famille. Traditionnellement, le Conseil considère que

  • 63 CC, déc. nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B., cons. 6.

[…] le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit63.

  • 64 Voir CC, déc. nº 2012-276 QPC du 28 septembre 2012, Fondation Hans Hartung et Anna Eva Bergman [Tra (...)
  • 65 CC, déc. nº 2012-274 QPC du 28 septembre 2012, Consorts G. [Calcul de l’indemnité de réduction due (...)
  • 66 CC, déc. nº 2011-159 QPC du 5 août 2011, Mme Elke B. et autres [Droit de prélèvement dans la succes (...)
  • 67 Voir CC, déc. nº 2010-108 QPC du 25 mars 2011, Mme Marie-Christine D. [Pension de réversion des enf (...)

29L’égalité n’est requise qu’entre deux situations comparables. Ainsi, si le principe d’égalité impose que les héritiers placés dans une situation identique bénéficient de droits égaux dans la succession, il n’interdit pas de traiter de manière distincte les héritiers et les légataires64. Il ne fait pas non plus « obstacle à ce que la loi autorise le donateur ou le testateur à avantager l’un de ses héritiers par un acte de volonté »65. Au contraire, le droit de prélèvement sur la succession, issu de l’article 2 de la loi du 14 juillet 1819, étant réservé au seul héritier français, il crée une différence de traitement entre les héritiers venant à la succession d’après la loi française et qui ne sont pas privilégiés par la loi étrangère. Comme l’indique le Conseil, la distinction réalisée « n’est pas en rapport direct avec l’objet de la loi qui tend, notamment, à protéger la réserve héréditaire et l’égalité entre héritiers garanties par la loi française »66. Le même grief a été retenu à l’encontre de l’article L. 43 du Code des pensions civiles et militaires de retraite définissant les droits à la pension de réversion des enfants en présence d’une pluralité d’ayants cause de lits différents67.

  • 68 CC, déc. nº 2011-155 QPC du 29 juillet 2011, Mme Laurence L. [Pension de réversion et couples non m (...)
  • 69 Ibid., cons. 5.
  • 70 Voir P. Malaurie, « Le couple et le fisc », Droit de la famille, janvier 2011, étude nº 1, p. 8.
  • 71 Voir CC, déc. nº 2011-155 QPC du 29 juillet 2011, Mme Laurence L., Revue trimestrielle de droit civ (...)
  • 72 CC, déc. nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B., cons. 9.
  • 73 Au contraire, l’Autriche a été condamnée pour avoir refusé aux couples de même sexe l’accès à l’ado (...)
  • 74 Cour EDH, Gas et Dubois c. France, 15 mars 2012, § 68.
  • 75 J. Carbonnier, Essais sur les lois, 2e éd., Paris, Répertoire du notariat Defrénois, 1995, p. 181.

30Les décisions rendues depuis 2010 relativement au principe d’égalité ont surtout permis au Conseil d’insister sur la différence existant entre les couples. La décision nº 2011-155 QPC expose clairement la gradation entre le concubinage, le pacs et le mariage68. Les concubins « ne sont légalement tenus à aucune solidarité financière à l’égard des tiers ni à aucune obligation réciproque »69. La solution est différente pour les couples ayant choisi de conclure un pacs. Toutefois, leur contrat ne comporte aucun engagement dans la durée. Comme le note le Conseil, aucune compensation pour perte de revenu à la rupture du pacs, ni aucune vocation successorale ne sont prévues par le Code civil. Les effets patrimoniaux ne durent que le temps du pacs. Le mariage, enfin, est dominé par l’engagement70. Il s’inscrit dans le temps71, comme le socle d’une famille. Une protection est assurée en cas de dissolution du mariage. Le fait que la pension de réversion ne prenne en compte que les années écoulées à compter du mariage n’est donc pas contraire à la Constitution. C’est encore « la différence de situation entre les couples mariés et ceux qui ne le sont pas » qui justifie dans la décision nº 2010-39 QPC « une différence de traitement quant à l’établissement de la filiation adoptive à l’égard des enfants mineurs »72. La filiation exige une stabilité de l’état des personnes, précisément assurée par l’engagement durable pris par les couples mariés, contrairement aux autres formes de couples. De même, la Cour européenne des droits de l’homme, dans sa décision Gas et Dubois contre France du 15 mars 2012, a jugé non discriminatoire l’impossibilité pour une femme d’adopter l’enfant de sa partenaire. Celle-ci ne reflète aucune différence de traitement fondée sur l’orientation sexuelle puisque les couples homosexuels se trouvent dans la même situation que les couples hétérosexuels non mariés73. La Cour se fonde là encore sur la spécificité du mariage, lequel « confère un statut particulier à ceux qui s’engagent » et « emporte des conséquences sociales, personnelles et juridiques »74. Les couples non mariés ne sont pas dans une situation juridique comparable à celle des couples mariés. Pour reprendre la célèbre formule du doyen Carbonnier : « À chacun sa famille, à chacun son droit »75. Toutefois, si les couples hétérosexuels peuvent opter pour n’importe lequel des trois régimes, le mariage était fermé aux couples homosexuels jusqu’à la loi du 17 mai 2013. Cela n’entraînait-il pas, dès lors, une rupture d’égalité ? Attendue, la réponse à cette question dans la décision nº 2010-92 QPC est bien peu motivée, le Conseil refusant, comme dans la plupart de ses décisions relatives au droit de la famille, de procéder à un contrôle approfondi.

B. L’absence de contrôle approfondi du Conseil constitutionnel

  • 76 CC, déc. nº 2010-39 QPC, cons. 9 ; CC, déc. nº 2010-92 QPC, cons. 9 ; CC, déc. nº 2011-173 QPC, con (...)
  • 77 F. Chénedé, « Les conditions d’admission de l’expertise génétique post mortem ne sont pas contraire (...)
  • 78 Voir E. Millard, « Les premières QPC en droit civil : premiers bilans et perspectives », in Questio (...)
  • 79 CC, déc. nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H., cons. 9.

31Le contrôle du Conseil est généralement restreint concernant les questions relatives au droit de la famille. Le considérant de principe, aux termes duquel « il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur » est repris dans de nombreuses décisions76. Il est certain que le Conseil et le législateur ne sont pas dotés des mêmes pouvoirs, et qu’il n’appartient pas au premier de revenir sur des choix de politique législative. La « réserve démocratique du Conseil constitutionnel », respectueuse du principe de la séparation des pouvoirs, a ainsi pu être saluée par certains auteurs77. Toutefois, la « prudence » du Conseil s’apparente souvent à une absence de motivation de sa part. La décision nº 2010-92 QPC relative au mariage homosexuel est, sur ce point, particulièrement critiquable78. Le Conseil n’explique en rien le contenu de la « différence de situation »79 justifiant un traitement distinct selon que les membres du couple sont ou non de même sexe. Ne lui revient-il pas pourtant de démontrer l’existence d’une telle différence afin de vérifier la conformité au principe d’égalité ? Se retrancher derrière les choix du législateur risque sinon de le conduire à un contrôle si restreint qu’il en devient presque inexistant.

  • 80 CC, déc. nº 2012-227 QPC du 30 mars 2012, M. Omar S., cons. 13.

32Seul le droit à recours juridictionnel effectif semble, en définitive, faire l’objet d’un contrôle approfondi. Ceci est notable dans la décision nº 2012-227 QPC. Le Conseil juge que ni le report du délai dans lequel le ministère public peut contester l’enregistrement du mariage au jour de la découverte du mensonge ou de la fraude, ni la présomption de fraude prévue en cas de cessation de la communauté de vie dans les douze mois de l’enregistrement, ne sont en eux-mêmes contraires au respect des droits de la défense. Toutefois, par une réserve d’interprétation, il précise que l’application combinée de ces deux règles aurait pour effet de conférer un avantage sans limite de temps au ministère public, partie demanderesse, dans l’administration de la preuve, portant dès lors une atteinte excessive aux droits de la défense80. Le contrôle réalisé est ici normal. Il en est de même concernant la décision nº 2012-268 QPC sur le recours contre l’admission en qualité de pupille de l’État. Selon le Conseil, le législateur

  • 81 CC, déc. nº 2012-268 QPC du 27 juillet 2012, Mme Annie M., cons. 9.

[…] ne pouvait, sans priver de garanties légales le droit d’exercer un recours juridictionnel effectif, s’abstenir de définir les cas et conditions dans lesquels celles des personnes qui présentent un lien plus étroit avec l’enfant sont effectivement mises à même d’exercer ce recours81.

  • 82 F. Boulanger, « Droit de la famille et contrôle de la notion d’égalité », Dalloz, 2012, Chron., p.  (...)

33En conclusion, les décisions rendues à la suite d’une QPC en matière de droit de la famille peuvent être qualifiées d’importantes à deux titres : d’une part, car elles ont parfois traité de thématiques au cœur de l’évolution du droit de la famille actuellement, telles que le mariage homosexuel ; d’autre part, car elles ont permis des évolutions importantes de la procédure de la QPC, notamment concernant la soumission de l’interprétation jurisprudentielle des lois au contrôle de constitutionnalité. Toutefois, les décisions rendues depuis 2010 n’ont pas entraîné de réelle « révolution » du droit de la famille. Les droits et principes invoqués ont généralement été entendus strictement par le Conseil, lequel se refuse en outre à opérer un contrôle approfondi des textes régissant le droit de la famille. « C’est une grande déception pour ceux qui croyaient à une audace interprétative du Conseil qui serait à mettre en parallèle avec celle de la Cour EDH. L’intervention du Conseil n’a que peu ou pas apporté de changement »82.

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Notes

1 Aux termes du nouvel article 61-1 de la Constitution, « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ».

2 Décret nº 2010-148 du 16 février 2010 portant application de la loi organique nº 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution.

3 Décret nº 2010-1216 du 15 octobre 2010 relatif à la procédure d’examen des questions prioritaires de constitutionnalité devant la Cour de cassation.

4 Il est également possible de saisir le Conseil d’une loi déjà examinée à condition qu’un changement de circonstances se soit produit.

5 A. Bénabent, Droit civil. Droit de la famille, Paris, Montchrestien-Lextenso, 2010, p. 1.

6 J. Hauser, « Le Conseil constitutionnel et le droit de la famille », Les cahiers du Conseil constitutionnel, nº 16, juin 2004, p. 104.

7 En ce sens, voir L. Leveneur, Leçons de droit civil. Tome 1. 3e volume. La famille, H., L. et J. Mazeaud, F. Chabas (dir.), 7e éd., Paris, Montchrestien, 1995, p. 4 : « Il reste notamment à inclure dans ce droit familial les règles des régimes matrimoniaux, des successions et, pour une large part, des libéralités ».

8 Loi nº 2000-596 du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce.

9 Loi nº 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce.

10 Loi nº 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral.

11 Loi nº 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale.

12 CC, déc. nº 93-325 DC du 13 août 1993, Loi relative à la maîtrise de l’immigration et aux conditions d’entrée, d’accueil et de séjour des étrangers en France ; CC, déc. nº 2003-484 DC du 20 novembre 2003, Loi relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité ; CC, déc. nº 2006-542 DC du 9 novembre 2006, Loi relative au contrôle de la validité des mariages.

13 CC, déc. nº 99-419 DC du 9 novembre 1999, Loi relative au pacte civil de solidarité.

14 Hormis concernant la PMA dans la décision nº 94-343/344 DC, Loi relative au respect du corps humain et loi relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal.

15 Sur ce sujet, voir aussi J.-F. de Montgolfier, « La QPC et le droit de la famille au Conseil constitutionnel », L’actualité juridique. Famille, 2012, p. 578.

16 Art. 23-4 de la loi organique.

17 La notion de moyen sérieux n’a quant à elle été définie ni par la loi organique, ni par le Conseil constitutionnel. Pour la doctrine, « un moyen sérieux est tout bonnement celui qui a des chances d’être retenu après discussion et réflexion » ; M. Disant, Droit de la question prioritaire de constitutionnalité : cadre juridique, pratiques jurisprudentielles, Rueil-Malmaison, Lamy, 2011, nº 308, p. 233.

18 Ici, comme après, nous soulignons.

19 Commentaire de la décision nº 2009-595 DC du 3 décembre 2009, Les cahiers du Conseil constitutionnel, nº 28, juillet 2010, p. 10 ; disponible à l’adresse : https://www.conseil-constitutionnel.fr/sites/default/files/as/root/bank_mm/decisions/2009595dc/ccc_595dc.pdf. Voir, pour un exemple de cette utilisation du critère de nouveauté, Cass., crim., 19 janvier 2011, nº 10-85.305.

20 Cass., 1re civ., 16 novembre 2010, nº 10-40.042.

21 Commentaire de la décision nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H. [Interdiction du mariage entre personnes de même sexe], Les nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, nº 32, juillet 2011, p. 4 ; disponible à l’adresse : https://www.conseil-constitutionnel.fr/sites/default/files/as/root/bank_mm/decisions/201092qpc/ccc_92qpc.pdf.

22 Voir, encore récemment, CC, déc. nº 2012-268 QPC du 27 juillet 2012, Mme Annie M. [Recours contre l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État], cons. 11 : « Afin de permettre au législateur de remédier à l’inconstitutionnalité constatée, il y a lieu de reporter au 1er janvier 2014 la date de cette abrogation ». Ceci ne conduit-il pas à imposer au législateur un délai pour agir, le Conseil fixant ainsi le calendrier parlementaire ?

23 Voir, sur ce point, la « Chronique de jurisprudence constitutionnelle française 2012 », dans ce numéro.

24 « Cette formulation […] souligne a contrario, mais très clairement, que, pour la Cour de cassation, la question n’était pas juridiquement sérieuse » (commentaire de la décision nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H., p. 4).

25 La Cour de cassation avait ainsi refusé de transmettre une QPC relative à la non-motivation des arrêts des cours d’assises, au motif que la « question posée tend, en réalité, à contester non la constitutionnalité des dispositions qu’elle vise, mais l’interprétation qu’en a donnée la Cour de cassation au regard du caractère spécifique des arrêts des cours d’assises statuant sur l’action publique » ; Cass., QPC du 19 mai 2010.

26 CC, déc. nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B. [Adoption au sein d’un couple non marié], cons. 2.

27 Voir, en ce sens, la séance au Sénat du 13 octobre 2009 (compte rendu intégral des débats) : « M. le président. L’amendement nº 1 rectifié, présenté par MM. Collin, Mézard et Charasse et Mmes Escoffier et Laborde, est ainsi libellé : Alinéa 6, première phrase. Après les mots : “de ce qu’une disposition législative” insérer les mots : “, le cas échéant interprétée par la jurisprudence”. […] M. Hugues Portelli, rapporteur : Cet amendement nous a laissés quelque peu perplexes : une loi est constitutionnelle ou pas. Nous ne nous intéressons pas ici au contrôle de constitutionnalité de la jurisprudence, qui est indépendante du texte de la loi […] » ; disponible à l’adresse : http://www.senat.fr/seances/s200910/s20091013/s20091013022.html.

28 N. Molfessis, « La jurisprudence supra-constitutionem », La semaine juridique, éd. G, nº 42, octobre 2010, 1039, § 5.

29 Voir P. Puig, « La question de constitutionnalité : prioritaire mais pas première… », Revue trimestrielle de droit civil, 2010, p. 69 : « À peine créée la norme échappe à son créateur et s’enrichit de l’interprétation qu’en font les autorités chargées de la mettre en œuvre, si bien que sa constitutionnalité, envisagée a posteriori, impose de tenir compte de cet apport substantiel ». Dans le même sens, voir M. Disant, Droit de la question prioritaire de constitutionnalité…, nº 60, p. 52.

30 Cass., 1re civ., 20 février 2007 ; Cass., 1re civ., 19 décembre 2007 ; Cass., 1re civ., 9 mars 2011.

31 CC, déc. nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B., cons. 3.

32 Ibid., cons. 4.

33 Cass., 1re civ., 13 mars 2007, Bulletin civil I, nº 511.

34 CC, déc. nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H., cons. 3.

35 Le commentaire aux Cahiers du Conseil constitutionnel de la décision nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B. l’indique clairement (p. 6) : https://www.conseil-constitutionnel.fr/sites/default/files/as/root/bank_mm/decisions/201039qpc/ccc_39qpc.pdf.

36 Voir G. Zagrebelsky, « La doctrine du droit vivant et la question de constitutionnalité », Constitutions, nº 1, 2010, p. 9.

37 Au contraire, voir pour la Cour italienne l’arrêt nº 84 de 1963, dans lequel elle tient compte de l’interprétation fournie par les juges du fond tout en précisant qu’« il ne semble pas que la Cour de cassation se soit prononcée sur le sujet » ; Giur. Cost., 1963, p. 393, cité par C. Severino, La doctrine du droit vivant, Aix-en-Provence, Presses universitaires d’Aix-Marseille et Paris, Economica, 2003, p. 78.

38 CC, déc. nº 2010-101 QPC du 11 février 2011, Mme Monique P. et autre [Professionnels libéraux soumis à une procédure collective], cons. 5 et 6.

39 La solution a ensuite été constamment reprise. Voir, par exemple, CC, déc. nº 2010-52 QPC du 14 octobre 2010, Compagnie agricole de la Crau [Imposition due par une société agricole], où le Conseil déclare non conforme à la Constitution le texte dans son interprétation jurisprudentielle développée par le Conseil d’État (cons. 6 à 8) ; CC, déc. nº 2010-96 QPC du 4 février 2011, M. Jean-Louis L. [Zone des 50 pas géométriques], où le Conseil valide une disposition législative telle qu’interprétée par la Cour de cassation.

40 Voir D. Rousseau, J. Bonnet, L’essentiel de la QPC, Paris, Gualino-Lextenso, 2011, p. 123.

41 Depuis la décision nº 2003-484 DC du 20 novembre 2003, Loi relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, cons. 94, cette liberté découle pour le Conseil de la liberté personnelle, et non de la liberté individuelle dont le champ d’application a été circonscrit aux mesures privatives de liberté. Voir, en ce sens, CC, déc. nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H., cons. 6 : « La liberté du mariage, composante de la liberté personnelle, résulte des articles 2 et 4 de la DDHC de 1789 ».

42 CC, déc. nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H., cons. 7 : « La liberté du mariage ne restreint pas la compétence que le législateur tient de l’article 34 de la Constitution pour fixer les conditions du mariage dès lors que, dans l’exercice de cette compétence, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel ».

43 Elle s’oppose par exemple « à ce que le caractère irrégulier du séjour d’un étranger fasse obstacle, par lui-même, au mariage de l’intéressé » ; CC, déc. nº 2003-484 DC du 20 novembre 2003, Loi relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, cons. 94.

44 CC, déc. nº 2012-260 QPC du 29 juin 2012, M. Roger D. [Mariage d’une personne en curatelle], cons. 7 et 8.

45 CC, déc. nº 2012-261 QPC du 22 juin 2012, M. Thierry B. [Consentement au mariage et opposition à mariage], cons. 11.

46 Voir CC, déc. nº 2011-173 QPC du 30 septembre 2011, M. Louis C. et autres [Conditions de réalisation des expertises génétiques sur une personne décédée à des fins d’actions en matière de filiation], cons. 4 : « La liberté proclamée par cet article [2 de la DDHC] implique le respect de la vie privée ».

47 CC, déc. nº 2012-227 QPC du 30 mars 2012, M. Omar S. [Conditions de contestation par le procureur de la République de l’acquisition de la nationalité par mariage], cons. 8 ; CC, déc. nº 2012-264 QPC du 13 juillet 2012, M. Saïd K. [Conditions de contestation par le procureur de la République de l’acquisition de la nationalité par mariage II], cons. 6.

48 Voir le commentaire de la décision nº 2011-173 QPC du 30 septembre 2011, M. Louis C. et autres, Les cahiers du Conseil constitutionnel, nº 34, janvier 2012, p. 9. « Jamais […] le Conseil constitutionnel n’a eu l’occasion de rattacher le droit de connaître ses origines ou de faire établir sa filiation au droit au respect de la vie privée ».

49 CC, déc. nº 2012-248 QPC du 16 mai 2012, M. Mathieu E. [Accès aux origines personnelles], cons. 6.

50 CC, déc. nº 2011-173 QPC du 30 septembre 2011, M. Louis C. et autres, cons. 6.

51 Cour EDH, Jäggi c. Suisse, 13 juillet 2006.

52 P. Puig, « La question prioritaire de constitutionnalité : prioritaire mais pas première… », p. 71.

53 CC, déc. nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B., cons. 8.

54 Ibid.

55 Cass., 1re civ., 24 février 2006, Bulletin civil I, nº 101 ; Cass., 1re civ., 8 juillet 2010, Bulletin civil I, nº 158.

56 Voir, sur ce point, CA Paris, 16 juin 2011 et CA Paris, 20 octobre 2011, aux termes desquels lorsqu’un enfant n’a de filiation établie qu’à l’égard de sa mère, cette situation constitue une circonstance en soi qui exige le partage de l’autorité parentale.

57 CC, déc. nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H., cons. 8.

58 Voir par exemple pour l’application de ce principe en matière de regroupement familial, CC, déc. nº 93-325 DC du 13 août 1993, Loi relative à la maîtrise de l’immigration et aux conditions d’entrée, d’accueil et de séjour des étrangers en France, cons. 70 : « Considérant qu’il résulte de cette disposition que les étrangers dont la résidence en France est stable et régulière ont, comme les nationaux, le droit de mener une vie familiale normale ; que ce droit comporte en particulier la faculté pour ces étrangers de faire venir auprès d’eux leurs conjoints et leurs enfants mineurs sous réserve de restrictions tenant à la sauvegarde de l’ordre public et à la protection de la santé publique lesquelles revêtent le caractère d’objectifs de valeur constitutionnelle ».

59 CC, déc. nº 2011-173 QPC du 30 septembre 2011, M. Louis C. et autres, cons. 6 ; CC, déc. nº 2012-248 QPC du 16 mai 2012, M. Mathieu E., cons. 8.

60 CC, déc. nº 2011-151 QPC du 13 juillet 2011, M. Jean-Jacques C., cons. 5.

61 CC, déc. nº 2011-212 QPC du 20 janvier 2012, Mme Khadija A., épouse M. [Procédure collective : réunion à l’actif des biens du conjoint], cons. 5.

62 T. Revet, obs. sur CC, déc. nº 2011-215 QPC du 27 janvier 2012, Régime des valeurs mobilières non inscrites en compte, Revue trimestrielle de droit civil, 2012, p. 340.

63 CC, déc. nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B., cons. 6.

64 Voir CC, déc. nº 2012-276 QPC du 28 septembre 2012, Fondation Hans Hartung et Anna Eva Bergman [Transmission du droit de suite sur les œuvres d’art graphiques et plastiques], cons. 7 : « Considérant qu’en réservant la transmission du droit de suite au décès de l’auteur aux héritiers et, pour l’usufruit, au conjoint à l’exclusion des légataires et autres ayants cause, le législateur a instauré une différence de traitement entre des personnes placées dans des situations différentes ; que cette différence de traitement est en rapport direct avec l’objectif poursuivi par la loi ».

65 CC, déc. nº 2012-274 QPC du 28 septembre 2012, Consorts G. [Calcul de l’indemnité de réduction due par le donataire ou le légataire d’une exploitation agricole en Alsace-Moselle], cons. 9.

66 CC, déc. nº 2011-159 QPC du 5 août 2011, Mme Elke B. et autres [Droit de prélèvement dans la succession d’un héritier français], cons. 6.

67 Voir CC, déc. nº 2010-108 QPC du 25 mars 2011, Mme Marie-Christine D. [Pension de réversion des enfants], cons. 4 : « […] que la différence de traitement qui en résulte entre les enfants de lits différents n’est pas justifiée au regard de l’objet de la loi qui vise à compenser, en cas de décès d’un fonctionnaire, la perte de revenus subie par chacun de ses ayants cause ».

68 CC, déc. nº 2011-155 QPC du 29 juillet 2011, Mme Laurence L. [Pension de réversion et couples non mariés], cons. 5 à 7.

69 Ibid., cons. 5.

70 Voir P. Malaurie, « Le couple et le fisc », Droit de la famille, janvier 2011, étude nº 1, p. 8.

71 Voir CC, déc. nº 2011-155 QPC du 29 juillet 2011, Mme Laurence L., Revue trimestrielle de droit civil, 2011, p. 748, obs. J. Hauser : « Le mariage est un acte juridique qui comporte une emprise sur le temps puisqu’il engage et ne peut être dissous par un simple mutuus dissensus ».

72 CC, déc. nº 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B., cons. 9.

73 Au contraire, l’Autriche a été condamnée pour avoir refusé aux couples de même sexe l’accès à l’adoption coparentale alors que celle-ci est ouverte aux autres couples non mariés : Cour EDH, X. et autres c. Autriche, 19 février 2013.

74 Cour EDH, Gas et Dubois c. France, 15 mars 2012, § 68.

75 J. Carbonnier, Essais sur les lois, 2e éd., Paris, Répertoire du notariat Defrénois, 1995, p. 181.

76 CC, déc. nº 2010-39 QPC, cons. 9 ; CC, déc. nº 2010-92 QPC, cons. 9 ; CC, déc. nº 2011-173 QPC, cons. 6 ; CC, déc. nº 2012-248 QPC, cons. 8 ; CC, déc. nº 2012-268 QPC, cons. 8.

77 F. Chénedé, « Les conditions d’admission de l’expertise génétique post mortem ne sont pas contraires aux droits et libertés que la Constitution garantit », obs. sur déc. nº 2011-173 QPC, L’actualité juridique. Famille, 2011, p. 549.

78 Voir E. Millard, « Les premières QPC en droit civil : premiers bilans et perspectives », in Question prioritaire de constitutionnalité : premiers bilans (Actes du colloque du 26 novembre 2010 organisé par l’Institut Louis Favoreu et la Communauté du Pays d’Aix), X. Philippe, M. Fatin-Rouge Stéfanini (dir.), Aix-en-Provence, Presses universitaires d’Aix-Marseille (Les cahiers de l’Institut Louis Favoreu), 2011, p. 43.

79 CC, déc. nº 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Mmes Corinne C. et Sophie H., cons. 9.

80 CC, déc. nº 2012-227 QPC du 30 mars 2012, M. Omar S., cons. 13.

81 CC, déc. nº 2012-268 QPC du 27 juillet 2012, Mme Annie M., cons. 9.

82 F. Boulanger, « Droit de la famille et contrôle de la notion d’égalité », Dalloz, 2012, Chron., p. 570.

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Pour citer cet article

Référence papier

Amandine Cayol, « Question prioritaire de constitutionnalité et droit de la famille »Cahiers de la recherche sur les droits fondamentaux, 11 | 2013, 11-19.

Référence électronique

Amandine Cayol, « Question prioritaire de constitutionnalité et droit de la famille »Cahiers de la recherche sur les droits fondamentaux [En ligne], 11 | 2013, mis en ligne le 01 décembre 2014, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/crdf/4615 ; DOI : https://doi.org/10.4000/crdf.4615

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Auteur

Amandine Cayol

Maître de conférences en droit privé à l’Université de Caen Basse-Normandie
Centre de recherches en droit privé (CRDP, EA 967)
Membre associée Laboratoire de recherche en droits fondamentaux, échanges internationaux et de la mer (LexFEIM, EA 1013)

Maître de conférences en droit privé à l’Université de Caen Basse-Normandie, elle est l’auteure d’une thèse sur Le contrat d’ouvrage (Université Paris I, 2009, prix Dupin Aîné de la Chancellerie des universités de Paris), publiée aux éditions IRJS en 2013. Elle est spécialiste de droit des contrats, droit de la responsabilité, droits et libertés fondamentaux et droit des biens. Parmi ses dernières publications : « La théorie de l’acceptation des risques du sport, ressuscitée », Les petites affiches, nº 129, 2012, p. 17-18 ; « Avant la naissance et après la mort : l’être humain, une chose digne de respect », Cahiers de la recherche sur les droits fondamentaux, nº 9, 2011, p. 117-126.

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