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ESSAI SUR GARIN LE LOHERAIN. STRUCTURE ET SENS DU PROLOGUE

«... cette vaste toile aux lignes terribles et grandioses. »

Aucune formule ne saurait plus justement que cette image de P. Paris l, caractériser la Geste des Loherains, et rendre compte à la fois de la puissance évocatrice de cette œuvre et de ses gigantesques proportions. Le seul Garin qui constitue la branche la plus ancienne en même temps que la plus originale de ce cycle ne comprend pas moins de 16 617 vers (édition J. Val- lerie), soit cinq fois plus que Raoul de Cambrai (3555 vers) et quatre fois plus que le Roland (4002). Sans doute ces titanesques ne sont-elles pas étrangères à l'espèce voire d'oubli, où se trouvaient relégués naguère encore Les Loherains. Si l'on excepte le quarteron d'historiens et qui se perdit en conjectures sur les fondements historiques de la geste ou dépensa des trésors d'ingéniosité sur les traces de Jehan de Flâgy, il semblait en effet que ce « monstre des temps barbares » décourageât systématiquement tout essai de critique littéraire et que ce monde chaotique résistât à toute tentative d'organisation, supprimât toute velléité d'entrer dans le détail et jusqu'à l'idée même d'une recherche un peu minutieuse. Or dans un ouvrage récent et de plus fort captivant : Rückzug in epischer Parade, M. Adler consacre une étude littéraire d'une soixantaine de pages à Garin le Loherain 2. Cette étude, qui dans le propos plus vaste de l'ensemble du livre, possède

1. P. Paris, Garin le Loherain, chanson de geste... mise en nouveau langage, Paris, 1862, p. 2.

2. A. Adler, Rückzug in epischer Parade, Francfort/Main, Klosterman, 1963 (Anal. Románica, Beihefte zu den romanischen Forschungen, Heft 1 1), p. 120-189.

Romania, LXXXVIII. 19