Edouard Reuss

(ι 804-1891)

Notes et Souvenirs

Le nombre des élèves immédiats d'Edouard Reuss va dimi¬ nuant chaque jour, et ceux qui ont eu le privilège de travailler à ses côtés sont plus rares encore; si je ne me trompe, je suis, en France, le dernier survivant de ceux qui ont eu l'honneur d'être ses collègues. A ce titre, j'ose espérer qu'on lira avec quelque in¬ térêt les pages suivantes où je voudrais évoquer et fixer des sou¬ venirs qui ne me paraissent pas déplacés dans une Revue dont le premier numéro renfermait un savoureux article tiré des mémoires de l'illustre théologien de Strasbourg.

I

Le plus ancien souvenir que j'ai gardé d'Edouard Reuss 11e date pas des bancs de la Faculté de théologie; il remonte à un passé plus lointain, aux années pendant lesquelles j'étais élève du «gymnase protestant » de notre ville. Cet établissement jouissait, sous le régime français, d'une indépendance à peu près complète ; il ne rentrait pas dans le cadre de l'Université; il ne ressemblait guère aux lycées officiels, il ne connaissait pas les règlements qui rappelaient à la fois la caserne et le couvent; il était jaloux de conserver les traditions qui rattachaient ses origines à l'âge héroïque de la Réforme et qui en faisaient une école spécialement alsacienne. Issu de la renaissance religieuse du XVIe siècle, le gymnase était resté sous le contrôle des corps ecclésiastiques atta¬ chés à la Confession d'Augsbourg.

Membre du séminaire protestant et du chapitre de Saint-Thomas, Reuss fut, à plusieurs reprises «scolarque », c'est-à-dire directeur du gymnase protestant. Ces fonctions n'étaient pas pour lui une sinécure; il les transforma en un rude labeur. Il ne se