Expériences

POUR UN RENOUVEAU DE LA MUSÉOGRAPHIE HOSPITALIÈRE

Réflexions de Jacques Poisat sur un domaine muséal peu connu.

L

dieu d'accueil, centre de soins, espace symbolique et contradictoire où se nouent des rapports sociaux fondamentaux, l'hôpital est aussi un lieu de mémoire. De fait, conséquence de leur longue histoire, nombre d'hôpitaux publics possèdent un riche patrimoine mobilier artistique et historique, qui constitue le reflet matériel du rôle évolutif de l'institution hospitalière dans nos sociétés, témoigne de la construction de son identité à travers le temps.

En dépit des difficultés, maintes expériences de conservation et de valorisation de ce patrimoine encore trop méconnu ont vu le jour, certaines remontant même au siècle dernier.

Dans le cadre d'une formation à l'École Nationale de la Santé Publique, nous avons tenté de dresser un premier bilan de ces actions tant sur les plans administratif et financier que d'un point de vue scientifique et culturel, et de proposer quelques perspectives de développement de la muséographie hospitalière1. Conduite de janvier 1989 à juillet 1990, cette recherche s'est appuyée sur l'analyse des actions de conservation et de mise en valeur menées par 67 établissements (hôpitaux et musées) et sur les réponses à un questionnaire adressé à 1 085 hôpitaux publics2. Actualisée et publiée en 1993 sous le titre Les hôpitaux français et leur patrimoine, elle a reçu un accueil très favorable dans le milieu hospitalier.

Quatre grandes conclusions se dégagent clairement, qui invitent à imaginer de nouveaux horizons pour la valorisation du patrimoine des hôpitaux.

État des lieux

Patrimoine, collections

Si le patrimoine mobilier des hôpitaux publics français s'avère riche, diversifié et porteur de multiples significations, la politique d'enrichissement de ces collections reste timide en règle générale.

1) Plus de 30% des hôpitaux qui ont répondu à notre enquête, soit 206 établissements, affirment posséder un patrimoine mobilier présentant un intérêt artistique ou historique. Ce dernier se caractérise surtout par une extraordinaire hétérogénéité : tableaux, sculptures, tapisseries, meubles, objets d'art sacré, faïences, argenterie, cuivres, étains, verreries, piluliers, mortiers, boîtes à plantes médicinales, herbiers, instruments et matériels médicaux, chirurgicaux, dentaires, costumes hospitaliers, médailles, souvenirs divers de médecins, d'administrateurs, de bienfaiteurs, de religieuses, photographies, archives, documents historiques, ouvrages... et cette liste est loin d'être exhaustive. Bien entendu, on rencontre aussi de véritables ensembles, comme en témoignent notamment les quelques 120 pharmacies hospitalières des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles que possède encore notre pays3.

Si la valeur marchande du patrimoine hospitalier est très variable et atteint parfois des sommes considérables, sa plus grande richesse réside certainement dans son caractère polysémique. La patrimoine des hôpitaux, en effet, ne vaut pas seulement pour son esthétique. Il est aussi, du moins pour une partie importante, patrimoine ethnologique, c'est-à-dire témoin objectif du quotidien hospitalier et de l'évolution des conceptions de l'assistance et de la santé. Fondamentalement, les collections hospitalières aident à comprendre les façons dont les hommes ont

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