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L'orthographe de la première moitié du XVIe siècle : variation et changement

[article]

Année 1997 74 pp. 24-31
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L'ORTHOGRAPHE DE LA PREMIERE MOITIE DU XVIe SIECLE : VARIATION ET CHANGEMENT

Susan BADDELEY

Il peut sembler contradictoire de parler d'orthographe au début du xvie siècle, alors que les pratiques que nous pouvons observer dans ce domaine sont extrêmement changeantes et variables. Si l'on s'en tient à la définition du Petit Robert de ce mot orthographe, « façon d'écrire un mot qui est considérée comme la seule correcte », il devient vite apparent qu'on ne peut pas parler de l'orthographe du xvie siècle. Non seulement chaque auteur semble avoir son propre système à lui, mais encore la graphie des textes change de manière assez spectaculaire d'une décennie à l'autre, de sorte qu'on peut arriver à dater certains textes en relevant certaines particularités orthographiques*1). En revanche, si on prend le terme dans un sens plus large, « façon d'écrire », on aura affaire non pas à une orthographe, mais à des orthographes.

L'évolution très rapide de la langue écrite à cette période est à mettre en rapport avec un vaste mouvement de réflexion et de débat concernant tous les aspects de la langue. La langue vulgaire, le français, commence à être traitée sur un pied d'égalité avec le latin ; de nouvelles écoles littéraires naissent, on traduit en français les Écritures saintes, le français est enseigné et doté pour la première fois d'une grammaire. Dans les ateliers de typographie, on adapte la langue écrite aux exigences et aux possibilités de cette nouvelle technologie. Enfin, aux alentours de l'année 1550, on assiste à un débat passionné sur l'orthographe qui prend des allures de bataille, ainsi qu'à des tentatives de mise en place d'une orthographe phonétique.

Nous voudrions, dans cet article, donner quelques éléments pour mieux comprendre les renseignements que peut fournir l'orthographe des textes de cette période, et montrer comment et pourquoi elle a évolué si rapidement au cours du siècle. Nous aimerions surtout souligner l'intérêt que peut présenter, pour l'étudiant, la lecture des textes de l'époque dans leur orthographe d'origine : loin d'être un aspect purement externe ou secondaire des textes, la graphie peut être un indicateur de l'âge du texte, de l'origine géographique ou sociale de son auteur, de son appartenance à tel ou tel courant de pensée ou école littéraire, etc.

1. Pour cette idée d'une « horloge graphique », voir l'article de N. Catach, « La graphie en tant qu'indice de bibliographie matérielle », La Bibliographie matérielle, Actes de la Table Ronde du CNRS, 1983, p. 115-123.

1. L'orthographe des textes du début du XVIe siècle

Pendant le premier tiers du XVIe siècle, jusqu'aux années 1530, la grande majorité des textes présente une orthographe qu'on peut appeler « ancienne » ou « traditionnelle ». Les imprimés de cette période présentent encore une orthographe qui s'inspire fortement des usages de l'écriture manuscrite du siècle précédent. Or, les conditions de production et de transmission de l'écrit au XVe siècle avaient été gouvernées par deux impératifs, apparemment contradictoires : la vitesse et la lisibilité. La vitesse était obtenue en levant le moins souvent possible la plume du papier, et en utilisant de nombreuses abréviations. Une telle écriture étant difficilement lisible, on eut recours à toute une série de procédés diacritiques (2) afin d'améliorer la lisibilité, pour l'essentiel à des lettres muettes adscrites, qui formaient des repères visuels, et empêchaient l'agglutination de lettres ambiguës ou facilement confondues, telles que ue\ n (3). On préférait souvent à la voyelle /', souvent perdue dans la masse, la variante calligraphique y (surtout en finale), souvent en dépit de l'étymologie. D'autres procédés permettaient de connaître, en l'absence d'accents et de signes auxiliaires, le timbre ou la longueur d'une voyelle. Ces lettres avaient aussi, pour la plupart, une valeur de rappel étymologique, utile dans des milieux où tout le monde connaissait le latin.

Théodore de Bèze décrit très bien, en 1550, la façon dont on lisait alors. D'après lui, le lecteur comprendra mieux un texte écrit :

Quand l'Ecriture aura afinité aueq celé de [...] quelque autre qu'il antandra <4), comme de la Latine, ou de la Greque. Car la ressam- blance des letres e silabes lui adrecera sa memoere, e lui fera prontemant souuenir que samblable composicion e proporcion deura auoèr même ou samblable sinificacion (5).

Comme le dit très bien ce témoignage, le lecteur cultivé d'alors cherchait, en lisant, les liens avec les langues anciennes : on lisait, en quelque sorte, le latin à travers le français. Cela ne devrait pas nous surprendre, puisque, à

2. Cf. Ch. Beaulieux, « Principes de l'orthographe des praticiens », dans Histoire de l'orthographe irançaise, vol. I (1927), p. 142-3.

3. À ce sujet, voir S. Baddeley, L'orthographe française au temps de la Réforme, 1993, p. 20-26.

4. C'est-à-dire, qu'il connaît.

5. Dans Jacques Peletier, Dialogue de l'ortografe, 1 550. Le système d'orthographe utilisé ici est celui de Peletier. Les citations sont tirées de la 2e édition, celle de Lyon, Jean de Tournes, 1555, édition plus fidèle aux consignes de Peletier.

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L'Info rmation grammaticale n° 74, juin 1997

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