LES SIGNES DE RENVOIS DANS LE PRISCIEN DE SAINT-GALL
PAR
Pierre-Yves LAMBERT
Nous nous proposons d’étudier ici les divers aménagements employés par les glossateurs du Priscien de Saint-Gall (ms. n° 904 de la Stiftsbibliothek)1 pour renvoyer d’un endroit à l’autre du texte de Priscien. Il s’agit des différents moyens utilisés pour les références internes au texte, et en particulier des «signes de renvois» (Verweis¬ zeichen — reference marks2), qui constituent un système de références croisées palliant, dans une certaine mesure, l’absence d’index. Ces signes de renvois, ces références à d’autres passages étaient en effet destinés à faciliter l’utilisation d’un épais codex — les Institutiones Grammaticae étant le traité grammatical le plus long qui nous soit conservé de l’Antiquité.
On a déjà fait remarquer les lacunes de l’édition Stokes3 : absence des gloses latines, absence (et pour cause) des signes de construction syntaxique, etc. En attendant le jour où l’on éditera le fac-similé, qui seul pourrait livrer tous ces détails importants pour le paléographe, nous nous attacherons ici à combler l’une de ces lacunes de l’édition Stokes : le Thesaurus reproduit plusieurs gloses irl. marginales, sous la forme «ar chiunn» «en avant, plus loin», sans mentionner le signe de renvoi dont cette glose n’est que l’accompagnement (facultatif). Maartje Draak4 a fort bien commenté l’un de ces signes dans sa discussion de la col. 138 a (signe renvoyant à la col. 141 a où il est de nouveau question de for , fari) : c’est, d’après elle, «a cross-reference of quality».
1. Bibliographie : cf. James F. Kenney, The Sources for the Early History of Ireland, Ecclesiastical, Columbia Univ. Press 1929 (rééd. Dublin, 1979), p. 674-677. Nous remercions le Bibliothécaire de la Stiftsbibliothek de Saint-Gall, qui nous a reçu en janvier 1986.
2. Terminologie préconisée, par ex., par Michael Korhammer, «Mittelalterliche Konstruktionshilfen und altenglische Wortstellung», Scriptorium, XXXIV, 1980 (1), 18-58. L. Holtz a souligné que, la plupart du temps, les signes de renvoi en question fonctionnaient comme des appels de notes (voir étude citée n. 23 ci-dessous).
3. Whitley Stokes, John Strachan, Thesaurus Palaeohibernicus, Cambridge 1903 (rééd. Dublin, 1975), t. II xviii-xxiii, 49-224. — L’intérêt des gloses latines de ce manuscrit a été démontré par les études de Maartje Draak (voir notes 4 et 10 ci-dessous). Voir aussi mes «Notes on Saint-Gall Glosses», Celtica XVIII 1986, 77-86.
4. Maartje Draak, «The Higher Teaching of Latin Grammar in Ireland during the Ninth Century», Mededelingen der Koninklijke Nederlandse Akademie van Wetenschappen, afd. Letterkunde, N.R., 30, 4, 1967, p. 31.