LA RÉVOLUTION FRANÇAISE
ET LE PROBLÈME COLONIAL
LE « CAS ROBESPIERRE »*
Le titre ici choisi reprend une interrogation formulée par Aimé Cesaire dans son livre iToussaint-Louverture ; La Révolution française et le problème colonial (1). Pourquoi, parce que jusqu'à A. Cesaire, l'historiographie de la Révolution française a ignoré le problème colonial, et explicitement admis que la Première République 1792-1794 ne s'en était pas occupée. Par voie de conséquence, il est implicitement admis que le Club des Jacobins, depuis la scission avec les Girondins, en octobre 1792, et ce jusqu'en 1794, ne s'en serait pas davantage soucié.
L'interprétation actuellement admise, en ce qui concerne la politique de la Convention montagnarde, est la suivante : le « jacobinisme » de l'an II aurait fondé l'État-nation, considéré comme moderne. Il aurait, si ce n'est crée du moins renforcé, à la fois le nationalisme français, et un État centralisé, et préservé l'intégrité territoriale, y compris sur les colonies et possessions françaises. Le terme « jacobinisme » est actuellement utilisé comme terme équivalent à celui de « centralisme étatique », et considéré comme le continuateur modernisateur de l'État louis-quatorzien, préparant l'État de Napoléon Bonaparte.
Il est assez curieux de noter que cette interprétation fait appel à l'autorité intellectuelle de Tocqueville. Or, Tocqueville a précisément dit l'inverse : « Les premiers efforts de la Révolution avaient détruit cette grande institution de la monarchie; elle fut restaurée en 1800.
♦Je tiens à remercier Michel Vovelle qui m'a donné l'occasion de présenter cette étude devant la Société des Études robespierristes, le 13 janvier 1991.
(1) A. Cesaire, Toussaint-Louverture. La Révolution française et le problème colonial, Présence 1961 : « Reste le cas Robespierre p. 185.
Annales Historiques de la Révolution Française — 1992 — N" 2
