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Du rapport entre la négation et l’impolitesse dans les Exchanges d’informations face a face en français1 1 This publication is based on a post doctorate research project (USP – Brazil – 2014) supported by the University of Cape Town’s Research Committee (URC).

Abstracts

Dans cette contribution, nous nous proposons d’aborder la question de l’impolitesse linguistique en français dans le cadre de la conversation ordinaire et plus précisément dans l’échange d’informations. De par son caractère éminemment fonctionnel, l’échange d’informations constitue un lieu privilégié d’observation des rapports entre langue et culture. À travers une étude de mécanismes interactionnels (i.e. question-réponse), notamment de la séquence/réponse négative récurrente je ne sais pas moi, nous nous demanderons ce qui distingue cette construction-là de celle-ci je ne sais pas ; pourquoi et dans quelles situations, ou à quel moment de l’interaction, le locuteur emploie celle-là plutôt que celle-ci ou vice-versa ? Quels sont les effets socio interactifs produits ? Qu’en ressort-il au niveau du profil du locuteur ? Les éléments de réponse que nous apporterons à ces questions s’appuient sur une approche théorique et méthodologique combinatoire des apports de la polyphonie linguistique, l’analyse conversationnelle, la grammaire des émotions et le concept d’impolitesse.

Français; Langue-culture; Interaction verbale; Polyphonie; Impolitesse linguistique


In this paper, I seek to analyze linguistic impoliteness in ordinary conversation in French and, more specifically, in the exchange of face-to-face information. Thanks to its functional structure (i.e. question-response), the exchange of information is a privileged type of interaction, in which we can observe the relationship between language and culture. Throughout a study of interactional mechanisms involving the recurring negative sequence (a) Je ne sais pas moi (literally : I don’t know, me), I interrogate what distinguishes (a) to the sequence (b) Moi je ne sais pas(literally : Me, I don’t know). Why and in which situations, or at which point in an interaction, does the speaker employ (a) rather than (b) or vice versa? What are the socio-interactive effects? What emerges from these comparisons in relation to the speaker’s style? My suggestion is to bring out some response elements throughout a theoretical and methodological combinatory approach inputs from the linguistic polyphony, conversational analysis, the grammar of the emotions and the concept of [im]politeness.

French; Language-culture; Verbal interaction; Polyphony; Linguistic impoliteness


Introduction

Dans le domaine de l’enseignement/apprentissage du français langue étrangère (Fle), les faits culturels sont presque invariablement liés aux rapports de politesse qu’entretiennent et que, de ce fait, prescrivent les locuteurs de cette langue. Ce rapport langue-culture émerge dès le début de son enseignement/apprentissage à travers la combinaison savoir-faire – savoir-vivre français. A titre d’illustration, il est bien connu l’importance accordée à la distinction vouvoiement/tutoiement et son réseau de titres et formules de salutations. On peut ainsi poser que la notion de politesse occupe une place centrale dans les manuels de Fle.

Par ailleurs, sa popularité n’a d’égale que l’impopularité de l’impolitesse, qui est pourtant, elle aussi, bien présente dans la langue, se manifestant quotidiennement par de bien divers et riches moyens linguistiques. En somme, on n’enseigne pas l’impolitesse mais il n’en reste pas moins qu’il s’agit-là d’un phénomène linguistique remarquable qui mérite, comme le souligne (KERBRAT-ORECCHIONI, 2010KERBRAT-ORECCHIONI, C. L’impolitesse en interaction: aperçus théoriques et étude de cas. Lexis Spécial 2, Lyon, p.35-60, 2010.) d’être considéré comme un objet d’investigation à part entière.

Dans cette contribution, nous nous proposons d’aborder la question de l’impolitesse en français dans le cadre de la conversation ordinaire et plus précisément dans l’échange d’informations. Or, de par son caractère éminemment fonctionnel, l’échange d’informations constitue un lieu privilégié d’observation des rapports entres langue et la culture à travers l’étude des mécanismes interactionnels (i.e. questions-réponses). Notre postulat est que à l’instar du dialogue de fiction, l’échange d’informations est «[...] le lieu où les lois conversationnelles sont en vedette, exposées pour être montrées, vues et entendues, et non pas comme dans la vie quotidienne, sous-entendues, subreptices ou inconscientes» (UBERSFELD, 1996UBERSFELD, A. Lire le théâtre III: le dialogue de théâtre. Paris: Belin, 1996., p. 79).

Dans ce cadre défini, notre point de départ est la séquence récurrente je ne sais pas moi. Du fait de sa forme disloquée et du caractère dialogique de la négation, on se demandera alors ce qui distingue cette construction-là de celle-ci je ne sais pas; pourquoi et dans quelles situations, ou à quel moment de l’interaction, le locuteur emploie celle-là plutôt que celle-ci ou vice-versa? Quels sont les effets socio interactifs produits? Qu’en ressort-il au niveau du profil du locuteur? Pour tenter de répondre à ces questions nous présentons tout d’abord le cadre théorique qui fonde nos propos autour de la négation en tant que marqueur dialogique (DUCROT, 1972DUCROT, O. Dire et ne pas dire: principes de sémantique linguistique. Paris: Hermann, 1972., 1984DUCROT, O. Le dire et le dit. Paris: Les Editions de minuit, 1984.). Deuxièmement, nous traitons les distinctions syntaxiques fondamentales des constructions en vedette, tout en tenant compte des principes théoriques décrits par la grammaire des émotions (PLANTIN, 1999PLANTIN, C. La construction rhétorique des émotions. In: RIGOTTI, E.Rhetoric and argumentation. Tubingen: Niemeyer, 1999. p.203-219., 2013PLANTIN, C. L’émotion signifiée: Recherche sur les émotions dans la parole. 2013. Disponible sur: http://icar.univ-lyon2.fr/membres/cplantin/recherche.htm. Date de lecture: 2 juin 2014.
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, 2014PLANTIN, C. Les bonnes raisons des émotions: Arguments, Fallacies, Affects. Disponible sur: http://icar.univ-lyon2.fr/membres/cplantin/documents/Raisons_Emotions.pdf. Date de lecture: 12 juin 2014.
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). La dernière partie examine ces séquences émotives à la lumière du principe de coopération (GRICE, 1975GRICE, H. P. Logic and Conversation. In: COLE, P.; MORGAN, J. L. (Ed.). Syntax and Semantics 3: Speech Acts. New York: Academic Press, 1975. p.41-58.), ce qui nous permettra de voir les manifestations de l’impolitesse et ses implications (KERBRAT-ORECCHIONI, 2005KERBRAT-ORECCHIONI, C. Le discours en interaction.Paris: Armand Colin, 2005., 2010KERBRAT-ORECCHIONI, C. L’impolitesse en interaction: aperçus théoriques et étude de cas. Lexis Spécial 2, Lyon, p.35-60, 2010.) dans les rapports langue-culture.

L’hétérogénéité énonciative de la négation

La conception du langage comme un phénomène dialogique est née des travaux du «cercle de Bakhtine»2 2 Par «cercle de Bakhtine» on entend un groupe d’amis qui, dans les années 1920-30, avaient l’habitude de se rencontrer et de travailler ensemble. Il s’agit, outre M.M. Bakhtine, de Matvej Isaevich Kagan (1889-1937); Pavel Nikolaevich Medvedev (1891-1938) ; Lev Vasil’evich Pumpjanskij (1891-1940); Ivan Ivanovich Sollertinskij (1902-1944); Valentin Nikolaevich Voloshinov (1895-1936). La question controversée de la paternité des textes a été traitée par Bronckart et Bota (2011). . Dès lors, l’appropriation de ces idées par divers chercheurs dans différentes disciplines entraîne d’importantes divergences théoriques autour de la notion de polyphonie3 3 Dans ce qui suit, le but est de faire apparaitre le cadre théorique qui fonde nos propos sur l’hétérogénéité énonciative de la négation. Pour cela, en plus des ouvrages de référence cités dans le corps du texte, nous avons consulté «La polyphonie linguistique» (LA POLYPHONIE..., 2009); la thèse de Gjerstad (2011); et celle de Roitman (2006). . Ces fluctuations sont dues aussi bien à l’incomplétude des travaux entrepris par le cercle bakhtinien4 4 «Chez Bakhtine, la polyphonie relève de toute une série de notions développées au travers de la globalité de son œuvre ; il s’agit d’une longue entreprise non terminée dont le début et l’apogée souvent sont attribuées à la première version de la Poétique de Dostoïevski, datant de 1929. Depuis la publication des derniers Carnets [Dans Estetika slovesnogo tvortchestva(Esthétique de la création verbale), Moscou 1979, Gallimard, Paris 1984 (...)] de Bakhtine ainsi que du grand essai du début des années 20, «L’auteur et le héros», probablement interrompu en 1922 [Texte d’archives (1920-1930), non repris par l’auteur et resté inachevé (...)], on peut cependant constater que le début de l’entreprise se situe, sinon avant, au moins à l’époque de la rédaction de ledit essai.» (HOLM, 2003, p. 95). qu’aux altérations et reformulations subies par l’œuvre bakhtinienne lors de son passage du russe vers les autres langues5 5 Voir entre autres: Regine (1987) et Seriot (2005). . Toujours est-il que les pensées de Bakhtine (1974BAKHTINE, M. Esthétique de la création verbale. Paris: Gallimard, 1974., 1978BAKHTINE, M. Esthétique et théorie du roman. Paris: Gallimard, 1978.) ne sont plus appliquées qu’au domaine littéraire, en effet, «[...] la polyphonie a [aussi] conquis la linguistique et depuis les vingt dernières années elle est devenue la notion centrale s’imposant dans plusieurs études linguistiques» (LA POLYPHONIE..., 2009LA POLYPHONIE... linguistique, Langue Française, v. 4, n. 164, p. 3-9, 2009. Préface., p.3). Malgré ou grâce au foisonnement de ces approches en sciences du langage – ni tout à fait compatibles ni tout à fait incompatibles – il est toutefois possible aujourd’hui d’y rendre opérationnel le principe bakhtinien grâce aux travaux théoriques et méthodologiques proposés par au moins trois grands courants. À savoir, le modèle d’analyse du discours développé par l’École de Genève (ROULET; FILLETTAZ; GROBET, 2001ROULET, E.; FILLETTAZ, L.; GROBET, A. Un modèle et un instrument d’analyse de l’organisation du discours. Frankfurt: Peter Lang, 2001.)6 6 Pour une présentation générale de ce courant consulter : Filliettaz et Roulet (2002). , la praxématique (BRES et al., 2005BRES, J. et al. Dialogisme et polyphonie: approches linguistiques. Bruxelles: Duculot, 2005.; BRES; NOWAKOWSKA, 2006BRES, J.; NOWAKOWSKA, A. Dialogisme: du principe à la matérialité discursive. In: PERRIN, L. (Éd.). Le sens et ses voix. Metz: Université de Metz, 2006. p.21-48. (Recherches linguistiques, 28). Disponible sur: http://asl.univ-montp3.fr/masterRECHERCHE/M2/j.bres/V32.pdf. Date de lecture: 10 mai. 2014.
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)7 7 Pour une discussion des approches énonciatives et dialogiques du langage et sur l’existence de convergences entre ces approches tant dans leurs fondements théoriques que dans leurs pratiques voir notamment Bres et al. (2012). et la théorie scandinave de la polyphonie linguistique (FLØTTUM, 2001FLØTTUM, K. Les liens énonciatifs: tentative d’une nouvelle typologie. Polyphonie: linguistique et littéraire, Samfundslitteratur, n.3, p.67-86, mai 2001. Disponible sur: http://akira.ruc.dk/~Michel/Publications/nummer-3-hel.pdf. Date de lecture: 5 juin 2014.
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; NØLKE, 2001NØLKE, H. La ScaPoLine: Version révisée de la théorie Scandinave de la Polyphonie Linguistique. Polyphonie: linguistique e littéraire, Samfundslitteratur, n.3, p.43-66, mai 2001. Disponible sur: http://akira.ruc.dk/~Michel/Publications/nummer-3-hel.pdf. Date de lecture: 5 juin 2014.
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)8 8 Pour une définition et une discussion approfondie, voir : Nølke (2001). . Ce courant-ci, la ScaPoLine, se développe aujourd’hui autour du modèle théorique proposé par Ducrot (1972DUCROT, O. Dire et ne pas dire: principes de sémantique linguistique. Paris: Hermann, 1972., 1984DUCROT, O. Le dire et le dit. Paris: Les Editions de minuit, 1984.)9 9 Alors que la ScaPoLine s’intéresse aussi à la polyphonie littéraire, à l’instar de Bakhtine, Ducrot s’inspire davantage des travaux de Bally, dans lesquels la polyphonie est perçue dans les structures plus restreintes que les textes que sont les énoncés. Par ailleurs, il est vrai aussi que Ducrot s’inspire de la théorie littéraire de G. Genette et de ses distinctions entre narrateur, auteur, personnage et locuteur. , c’est-à-dire, le modèle qui a entraîné la création d’une théorie polyphonique proprement linguistique. De plus, la théorie ducrotienne est à la base des études combinatoires avec les domaines tels que l’argumentation, la linguistique textuelle ou encore, l’analyse conversationnelle, comme la nôtre. Ces combinaisons permettent de mieux entendre et de faire ressortir des voix autres que celle du locuteur d’un discours donné, ce qui, du coup, permet aux participants de mieux ménager leurs rapports dans un échange verbal.

Aussi Ducrot (1972DUCROT, O. Dire et ne pas dire: principes de sémantique linguistique. Paris: Hermann, 1972., 1984DUCROT, O. Le dire et le dit. Paris: Les Editions de minuit, 1984.), intègre la pragmatique sémantique à une conception énonciative de la langue. Dans cette optique, qui est fondamentalement celle des actes du langage10 10 En effet, la notion-clé des travaux de Ducrot est la performance dans la langue, ceci renvoie aux théories des actes du langage développées par J. L. Austin dansQuand dire c’est faire (1962) et ensuite par J. Searle. Succinctement, ces théories posent qu’un individu s’adresse à un autre dans l’idée de faire quelque chose (transformer des représentations de choses et/ou de buts) plutôt que de dire quelque chose. , on distingue «phrase» (objet théorique, porteur de signification, invention de la grammaire) et «énoncé» (phénomène empirique dont le sens se construit sur la base des consignes de la signification, tout en tenant compte de la situation de discours).

Son hypothèse est que tout énoncé constitue une image sémantique de sa propre énonciation. Autant dire que la sémantique ne se limite pas au contenu porteur de vérité d’une phrase car le contenu sémantique crée une image de l’énonciation et de son auteur, le locuteur (/informateur, dans le cas de l’échange d’informations). Pour rendre compte de la dualité énonciative, Ducrot (1972DUCROT, O. Dire et ne pas dire: principes de sémantique linguistique. Paris: Hermann, 1972., 1984DUCROT, O. Le dire et le dit. Paris: Les Editions de minuit, 1984.) se réfère à la pragmatique en tant que «ce que la parole, d’après l’énoncé lui-même, est censée faire» et propose d’y voir deux niveaux [pragmatiques], l’un primitif, ou virtuel, propre à la sémantique, l’autre réel, un fait d’interaction sociale, imprévisible à partir des seules instructions sémantiques.

À titre d’exemple, si la phrase (DUCROT, 1984DUCROT, O. Le dire et le dit. Paris: Les Editions de minuit, 1984., p.181) «il fait beau» donne les instructions pour trouver l’identité de l’endroit dont parle le locuteur, et d’admettre que celui-ci affirme le beau temps au moment de l’énonciation, l’énoncé «il fait beau» pourrait ensuite entraîner des effets pragmatiques secondaires. Par conséquent, la signification (d’une phrase) est composée d’un sens littéral et d’un sens dérivé.À partir de là, Ducrot distingue deux actes, l’acte de présupposer et l’acte de sous-entendre.

Du fait que la théorie ducrotienne ait permis d’identifier et de décrire des mécanismes linguistiques susceptibles d’engendrer des voix autres que celle du locuteur, cela a aussi permis à Ducrot de mettre en cause l’idée de «l’unicité du sujet parlant» (DUCROT, 1984DUCROT, O. Le dire et le dit. Paris: Les Editions de minuit, 1984., p.171). Ainsi, pour ce qui est de la négation en tant que marqueur polyphonique, l’hypothèse de Ducrot est que tout énoncé négatif renvoie à un énoncé positif, attribuable à un énonciateur dont le locuteur se distancie (DUCROT, 1984DUCROT, O. Le dire et le dit. Paris: Les Editions de minuit, 1984.).

En somme, pour Ducrot, c’est-à-dire d’après son modèle théorique de la polyphonie linguistique, la vériconditionnalité et la référence ne sont que des effets possibles et secondaires alors que le sens est fondamentalement argumentatif (ANSCOMBRE; DUCROT, 1983ANSCOMBRE, J.-C.; DUCROT, O. L’Argumentation dans la langue. Bruxelles: Mardaga, 1983.).

Ces positionnements-là constituent le point de départ de nos recherches sur les traces d’impolitesse linguistique dans l’échange d’informations. Tout en tenant compte du principe d’hétérogénéité énonciative des énoncés négatifs, nous posons que la séquence je ne sais pas renvoie à l’énoncé positif je sais. Notre postulat est alors que lorsque l’énoncé négatif se réalise sous une forme disloquée comportant un redoublement pronominal à droite, c’est-à-dire je ne sais pas moi, le locuteur se distancie de l’énonciateur qui dit je sais moi. Dans ce cas, l’énoncé je ne sais pas moi renvoie à autre chose qu’un contraste (positif-négatif) : il nous dit quelque chose sur le positionnement discursif du locuteur : son contentement11 11 L’expression du contentement comporte un certain nombre de nuances, à savoir, fierté, joie, bonheur, empressement, enthousiasme, euphorie, béatitude, bien-être, bonne humeur, aise, jouissance, volupté, délice, délectation, plaisir, régal, allégresse, liesse, jubilation, félicité, ravissement, complaisance (ATILF, 2014). , son agacement12 12 Soulignons que l’expression de l’agacement englobe des nuances telles que: «impatience, irritation, agitation, effervescence, excitation, nervosité, exaspération, surexcitation, tension, fébrilité.» (ATILF, 2014). .

Dans le développement et l’extension de ce postulat – puisque Ducrot ne cherche pas à expliquer les interprétations réelles mais à cerner une pragmatique primitive, distincte des effets pragmatiques seconds (DUCROT, 1984DUCROT, O. Le dire et le dit. Paris: Les Editions de minuit, 1984.) – notre analyse combine l’approche ducrotienne

  1. aux apports théoriques du courant praxématique qu’on incorpore à ceux de la grammaire des émotions dans notre analyse des structures disloquées ;

  2. aux approches interactionnistes afin de préciser le cadre dans lequel ces structures se réalisent ;

  3. aux études sur l’[im]politesse linguistique dans le but de tenter de valider nos propos sur les effets et les implications socio discursifs produits par ces structures.

Syntaxe émotive et dialogisation

D’après Plantin «[...] au niveau de l’organisation (ou de la désorganisation) syntaxique, on attribue à l’émotion les réorganisations de la forme considérée comme basique de l’énoncé: emphase, ruptures de construction, inversions.» (UNIVERSITÉ LYON, 2014UNIVERSITÉ LYON. Christian Plantin. Disponible sur: http://icar.univ-lyon2.fr/membres/cplantin/recherche.htm. Date de lecture: 2 juin 2014.
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). En ce qui concerne la dislocation de la phrase, il s’agit d’un phénomène syntaxico-sémantique bien attesté et répertorié, qui a donné lieu à de nombreuses études (APOTHÉLOZ; COMBETTES; NEVEU, 2009APOTHÉLOZ, D.; COMBETTES, B.; NEVEU F. (Éd.). Les linguistiques du détachement. Berne: Peter Lang, 2009.; BLASCO-DUBELCCO, 1997BLASCO-DUBELCO, M. Pour une approche syntaxique des dislocations.Journal of French Language Atudies, Cambridge, n.7, p.1-21, 1997., 1999BLASCO-DUBELCO, M. Les dislocations en français contemporain: étude syntaxique. Paris: Champion, 1999.; BRES; NOWAKOWSKA, 2006BRES, J.; NOWAKOWSKA, A. Dialogisme: du principe à la matérialité discursive. In: PERRIN, L. (Éd.). Le sens et ses voix. Metz: Université de Metz, 2006. p.21-48. (Recherches linguistiques, 28). Disponible sur: http://asl.univ-montp3.fr/masterRECHERCHE/M2/j.bres/V32.pdf. Date de lecture: 10 mai. 2014.
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;OLIVEIRA, 2013OLIVEIRA, R. de Manifestations émotionnelles de la dislocation: le cas de l’agacement. In: BAIDER, F.; CISLARU, G. (Éd.). Cartographie des émotions: propositions linguistiques et sociolinguistiques. Paris: Presse de la Sorbonne, 2013. p.211-224.). Répertoriée aussi bien dans la langue courante que dans le discours soutenu, la dislocation donne à la syntaxe une grande liberté d’allure, affecte diverses catégories grammaticales dans leurs multiples fonctions et produit de nombreux effets de sens.

La notion qui est le plus souvent invoquée pour décrire la valeur sémantique de ces structures est sans conteste celle de thème, ainsi que ses variantes (topique, sujet thématique, ou encore sujet psychologique). Apothéloz (1997)APOTHÉLOZ, D. Dislocations à gauche et à droite dans la construction des schématisations. In: MIEVILLE, D.; BERREDONNER, A. Langue, discours et pensée: mélanges offerts à Jean-Blaise Gize. Berne: Peter Lang, 1997. p.183-217. et Riegel, Pellat et Rioul (1996)RIEGEL, M.; PELLAT, J. C.; RIOUL, R. Grammaire méthodique du français. Paris: Presses Universitaires de France, 1996. voient dans la dislocation un dispositif permettant d’assigner à un élément la valeur de thème, le reste de la phrase formant le propos. Lorsque c’est le sujet qui est détaché, l’effet produit est celui d’une «insistance marquée», d’une «mise en relief» dudit sujet. En français, parmi les éléments caractéristiques de ce procédé d’insistance marquée, sont employés les pronoms personnels en fonction de sujet verbal, dont l’emploi alterné des formes conjointes/disjointes13 13 Nous employons indistinctement : formes fortes/faibles, conjointes/disjointes, atones/toniques. dans une séquence donnée n’est jamais dénué de sens. Cela posé, notre hypothèse développée ci-dessous est qu’en français ces séquences représentent des lieux communs descriptifs des manifestations émotionnelles où elles constituent des énoncés relativement figés dans leur forme et jouissant d’une certaine plausibilité (PLANTIN, 1999PLANTIN, C. La construction rhétorique des émotions. In: RIGOTTI, E.Rhetoric and argumentation. Tubingen: Niemeyer, 1999. p.203-219.).

Pour procéder à l’analyse des mouvements d’émotions véhiculés par la dislocation afin de voir leurs implications socio interactives dans l’échange d’informations, le point de départ est le schéma suivant :

(1) – Vous savez où se trouve…. ?14 14 Ou encore : y a-t-il…? est-ce que … ? … etc.

1a – Je sais.

1b – Je ne sais pas.

1c – Moi je sais.

1d – Je sais moi

1e – Moi je ne sais pas.

1f – Je ne sais pas moi.

Le premier constat est que (1) admet des réponses aussi diverses que 1a, b, c, d, e et f.

Pour ce qui est de 1a et 1b, le contrat de coopération (GRICE, 1975GRICE, H. P. Logic and Conversation. In: COLE, P.; MORGAN, J. L. (Ed.). Syntax and Semantics 3: Speech Acts. New York: Academic Press, 1975. p.41-58.) dans l’échange d’informations est respecté. Autrement dit, l’information donnée par (1a et 1b) est suffisante sans être excessive conformément aux «maximes de quantité»; on part du principe que ces réponses sont véridiques et faites à bon escient conformément aux «maximes de qualité»; la pertinence est évidente conformément à la «maxime de relation»; la formulation est claire et concise conformément aux «maximes de manière». On peut alors parler de «l’efficacité maximale de l’échange d’informations». Cela n’est toutefois pas le cas des structures disloquées 1c à 1f, lesquelles peuvent chacune être caractérisée comme réagissant à une interprétation différente de (1) et faisant écho à une certaine subjectivité interprétative de la part du locuteur.

Pour tenter de saisir le sens de ces énoncés, nous distinguons – avec Bakhtine (1974BAKHTINE, M. Esthétique de la création verbale. Paris: Gallimard, 1974., 1978BAKHTINE, M. Esthétique et théorie du roman. Paris: Gallimard, 1978.) − le dialogisme externe (dialogue au sens courant du terme) et la dialogisation intérieure du discours. Celle-ci nous intéresse particulièrement du fait que ses manifestations se situent au niveau microtextuel (BRES, 2005BRES, J. et al. Dialogisme et polyphonie: approches linguistiques. Bruxelles: Duculot, 2005.), c’est-à-dire au niveau de l’énoncé-phrase, dont l’approche fait appel à une prise en compte de la formation discursive du discours, située au niveau macrotextuel. Il s’agit en somme d’aller du global vers le local, où se manifeste la matérialité discursive du dialogisme (BRES, 2005BRES, J. et al. Dialogisme et polyphonie: approches linguistiques. Bruxelles: Duculot, 2005.). Nous verrons ainsi que la formation discursive du discours témoigne à la fois d’une reprise de (dialogisme constitutif) et d’une réponse à (dialogismes interdiscursif et interlocutif) d’autres discours (BRES, 2005BRES, J. et al. Dialogisme et polyphonie: approches linguistiques. Bruxelles: Duculot, 2005.). Dans l’interaction (reprise de / réponse à), on perçoit dans ces réponses le mode «dédoublé» du dire. Cela peut être décrit comme une sorte de dialogue interne – en deçà du dialogue avec autrui – mais ce dont il relève, c’est cette forme de dialogisme envisagée par Bakhtine (1974BAKHTINE, M. Esthétique de la création verbale. Paris: Gallimard, 1974., 1978BAKHTINE, M. Esthétique et théorie du roman. Paris: Gallimard, 1978.) «[...] entre le sujet parlant et sa propre parole». (AUTHIER-REVUZ, 2003AUTHIER-REVUZ, J. Le fait autonymique: langage, langue, discours – quelques repères. In: AUTHIER-REVUZ, J. et al. Parler des mots: le fait autonymique en discours. Paris: Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2003. p.67-95., p.87). Autant dire que tous ces énoncés (1) sont affectés par la dialogisation. L’observation de la matérialité discursive de la dialogisation permet de capter quelque chose des mouvements d’émotion dans l’organisation de la parole.

En somme, les assertions affirmatives/négatives 1a (je sais), 1b (je ne sais pas) ont une valeur objective neutre : il s’agit de dire oui ou nontandis que les structures 1c à 1f véhiculent chacune une information supplémentaire. Pour ce qui est de 1f, notre postulat, comme nous l’avons annoncé, est que lorsque le locuteur énoncé «je ne sais pas moi» il souhaite faire entendre son agacement, il s’éloigne du principe de politesse et rompt le contrat de coopération, ce qui peut entraîner une dégradation des rapports entre les participants de l’échange d’informations.

Dans ce qui suit, avant de procéder au développement de ce postulat, nous faisons le point sur quelques faits et concepts fondamentaux autour de la d’[im]politesse linguistique.

L’[im]politesse linguistique et culture

De la période de la rhétorique classique en passant par les dialogues de la Renaissance italienne (WAUTHION; SIMON, 2000WAUTHION, M.; SIMON, A.-C. Politesse et idéologie: rencontres de pragmatique et de rhétorique conversationnelles. Louvain: Peeters Publishers, 2000.), la politesse a traversé le dix-neuvième siècle romantique en tant que composant social du discours, un rituel, une norme et une compétence sociales valorisées et valorisantes. De nos jours, dans le cadre de l’approche interactionnelle, entendue dans une perspective dialogique, la politesse linguistique a obtenu un statut «d’objet scientifique pertinent» et est devenu «un composant à l’honneur dans l’analyse du discours» (KERBRAT-ORECCHIONI, 2005KERBRAT-ORECCHIONI, C. Le discours en interaction.Paris: Armand Colin, 2005.).

Parce que chaque période de l’histoire a ses normes de politesse, et que ces normes ont leurs spécificités dans chaque communauté, la notion de politesse est un champ d’investigation privilégié lorsqu’il s’agit d’établir des rapports entre langue(s) et culture(s). Afin d’y encadrer nos propos, nous soulignons, dans ce qui suit, quelques-uns de ses concepts fondamentaux. C’est à partir des années 70, grâce au domaine naissant de l’analyse de la conversation, que les recherches sur la politesse se sont étendues du cadre littéraire vers celui des interactions verbales (BROWN; LEVINSON, 1978BROW, P.; LEVINSON, S. Politeness. Cambridge: Cambridge University Press, 1978.; GOFFMAN, 1973GOFFMAN, E. La Mise en scène de la vie quotidienne.v.2. Paris: Ed. Minuit, 1973., 1974GOFFMAN, E. Les rites d’interaction. Paris: Ed. Minuit, 1974.; GRICE, 1975GRICE, H. P. Logic and Conversation. In: COLE, P.; MORGAN, J. L. (Ed.). Syntax and Semantics 3: Speech Acts. New York: Academic Press, 1975. p.41-58.; LAKOFF, 1973LAKOFF, R. The logic of politeness: or minding your P’s and Q’s. In: CORUM, C.; SMITH-STARK, T. C.; WEISER, A. (Ed.). Papers from the 9th Regional Meeting of the Chicago Linguistic Society. [S.l.]: [s.n.], 1973. p. 292-305.).

À la fin des années 80, dans le développement de ses recherches pionnières, Lakoff (1989)LAKOFF, R. The limits of politeness: therapeutic and courtroom discourse. Multilingua, Berlin, v.8, n.2/3, p.102-140, 1989. fait le constat fondamental d’une théorie et description de la politesse s’articulant sur la forme et la fonction des actes de langage dans la conversation quotidienne.À partir de là, Lakoff élargit son domaine d’investigation de la politesse en s’intéressant à d’autres types de discours que celui de la conversation ordinaire. Les résultats de ses recherches montrent, entre autres, que si, par exemple, dans un débat le désaccord et le conflit sont des éléments intrinsèques, systématiques et normaux, ces mêmes éléments sont considérés comme un comportement menaçant dans la conversation ordinaire. Cela étant, l’étude des interactions verbales «[...] ne peut faire abstraction de ce qui est perçu comme poli/impoli socialement. Il s’agit, pour l’analyste, de s’intéresser aux stratégies discursives qui sont utilisées par les différents participants à une interaction à la lumière des codes sociaux en vigueur au moment où ces échanges ont lieu» (JOBERT, 2010JOBERT, M. L’impolitesse linguistique: vers un nouveau paradigme de recherche? Lexis Spécial 2, Lyon, p.5-20, 2010., p.8).

À ces facteurs variables (types d’interaction, profil des participants, moment de l’histoire, codes et lieux sociaux), il faudra ajouter, avec Grice, le facteur constant. Ce principe coopératif est développé en un ensemble de «maximes de la conversation» auxquelles tout locuteur est réputé se conformer. Nous avons illustré cela par le schéma:

(1) – Vous savez où se trouve…. ?

1a – Je sais.

1b – Je ne sais pas.

à travers lequel on a pu constater que le sens de la phrase énoncée (1a et 1b) témoigne directement de cette conformité. Ainsi les réponses (1a ou 1b) à la question (1) satisfont (dans des circonstances ordinaires). Nous avons également souligné que ces règles ont pour but «l’efficacité maximale de l’échange d’informations» et que de ce fait, elles priorisent la fonction informative du discours.

Aussi dans ce cadre, le locuteur est orienté par les choix langagiers [et comportementaux] dictés par le principe de politesse. Ceci ne se limite pas, en principe, au répertoire de formules mais doit englober «[...] tous les aspects du discours qui sont régis par des règles, et dont la fonction est de préserver le caractère harmonieux de la relation interpersonnelle» (KERBRAT-ORECCHIONI, 1996KERBRAT-ORECCHIONI, C. La conversation. Paris: Seuil, 1996., p.50).

Cependant, dans ce type d’interaction, comme dans d’autres, l’enjeu relationnel (ou «relation interpersonelle») comporte un enjeu identitaire. Cet enjeu-ci guide les participants, selon leurs besoins et/ou les besoins de la situation d’échange, dans les négociations et dans l’aménagement des places dans l’espace interactif. En cas de conflit – réel ou pressenti- les participants peuvent adopter un comportement langagier incompatible s’écartant alors du principe de coopération comme du principe de politesse, allant vers une dégradation des rapports. Notre analyse de l’énoncé négatif «je ne sais pas moi» permet d’illustrer ce type d’écart et ses implications sociales. Pour ce faire, nous nous appuyons sur le fait – souligné par Brown et Levinson – que tout membre adulte et compétent d’une société possède une image de lui-même qu’il essaie de faire valoir dans ses interactions.

Cette image, la face, comprend deux aspects complémentaires:

– la face négative, reliée au domaine du privé, aux sentiments d’indépendance et de liberté d’action ; et

– la face positive, recouvrant le besoin narcissique d’être socialement reconnu et valorisé.

Nous nous demanderons alors ce qu’il en ressort.

Soient :

1c – Moi je sais.

1d – Je sais moi

1e – Moi je ne sais pas.

1f – Je ne sais pas moi.

En ce qui concerne 1c et 1e, au-delà de leur rôle de reprise de / réponse à, ces énoncés ont souvent une valeur expressive de contraste. En effet, comme le montre Lambrecht (1994LAMBRECHT, K. Information Structure and Sentence Form: Topic, Focus, and the Mental Representations of Discourse Referents. Cambridge: CUP, 1994., p.183, traduit par nos soins)15 15 “The left dislocation construction is often used to mark a shift in attention from one to another of two or more already active topic referent. This explains the frequent occurrence of PRONOMINAL NPs in detached position (Me, I’m hungry, Moi, j’ai faim). Such detached lexical or pronominal NPs often have a ‘contrastive’ function, in which case they may be referred to as CONTRASTIVE topic NPs […]”. (LAMBRECHT, 1994, p.183). :

La dislocation à gauche signifie souvent un changement de l’attention de l’un des topiques de référence vers un autre des deux ou plus topiques de référence déjà activés. Cela explique l’occurrence fréquente des SN pronominaux en position détachée du type (Moi, j’ai faim). De tels SN lexicaux ou pronominaux détachés remplissent souvent une fonction «contrastive», dans ce cas-là ils peuvent être appelés SN de mise en relief […].

Cela dit, en énonçant (1c, e), le locuteur établit un contraste avec celui qui énonce (1a-b). De même 1c et 1e constituent elles-mêmes des réponses en écho car elles comportent l’idée que (1c) «les autres ne savent pas» ou «les autres pensent que je ne sais pas alors que MOI je sais» (1e) «les autres pensent que je sais mais MOI je ne sais pas». D’autre part, les redoublements à droite – 1d – Je sais moi. / 1f – Je ne sais pas moi – peuvent eux-aussi avoir une fonction de contraste vis-à-vis de (1a-c).

En somme, à travers 1d et 1f le locuteur dit autre chose que «oui» – «non»: de fait, tout en établissant un contraste le locuteur montre soit son contentement (1d) soit son agacement (1f). Du point de vue de l’approche dialogique, ces mouvements émotifs peuvent être motivés par les voix suivantes:

– ma réponse a été négative («je ne sais pas» suivie ou non de «moi je ne sais pas») mais mon interlocuteur insiste (par exemple: «– vous en êtes sûr ?») et je réponds alors que «je ne sais pas moi»;

– c’est la énième fois qu’on me pose la même question et je dis alors que «je ne sais pas moi»;

– on me pose la question pour la première fois – je connais peut-être la réponse – mais je dis que «je ne sais pas moi».

Dans ces trois cas de figure, le locuteur (1f) montre son souhait qu’on le laisse tranquille, tout en faisant part de son positionnement (opposition à) dans l’interaction; il prend alors ses distances. Les quatre cas de figure16 16 Ces exemples sont issus d’un corpus composé par nous sur le terrain, à partir de situations réelles. qui suivent illustrent notre positionnement:

Situation I. A la réception d’un office de tourisme.

−Bonjour. Vous savez où on peut trouver un bureau de tabac dans le quartier?

−Je ne sais pas.

−Et un bar-tabac ?

−Je ne sais pas moi ici on ne renseigne pas les gens sur ce genre de choses.

Situation II. Au comptoir d’une compagnie d’autobus. La passagère indique un autobus à la réceptionniste.

−Est-ce que ce bus s’arrête en ville, près du casino ?

−Je ne sais pas. Je ne connais pas les trajets des bus.

−Vous savez tout de même s’il fait des arrêts en ville ?

−Je ne sais pas moi c’est au chauffeur qu’il faut demander ou alors (la réceptionniste pointe vers un panneau d’affichage) regardez là, tout est là.

Situation III. Au guichet d’une station de train.

−Bonjour. Il vous reste encore des places dans le train de nuit ?

−Je ne sais pas. Le système [informatique] est en panne.

−Bon alors vous pensez qu’on peut y monter et puis voir ça avec le contrôleur ?

−Je ne sais pas moi. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. Si vous prenez le train sans votre billet c’est à vos risques et périls.

Situation IV. A l’accueil d’un hôtel de ville.

−Bonjour. Vous savez si Madame Untel de l’état civil est là ? Je suis venu chercher mon livret de famille.

−Je ne sais pas. Je ne l’ai pas encore vu ce matin.

−Vous pensez que sera là bientôt ? Je dois repartir au bureau.

−Je ne sais pas moi je ne suis pas sa secrétaire.

Quelques considérations finales

Le but de ce travail a été de démontrer des traces d’impolitesse linguistique dans l’échange d’informations en français afin de voir ses implications socio interactives et d’apporter ainsi une contribution aux études sur les rapports langue-culture. Pour ce faire, nous avons proposé d’étudier la séquence négative disloquée d’usage très fréquent en français, à savoir, je ne sais pas moiet avons placé l’étude dans le cadre d’une approche croisée

Cette démarche nous a permis d’arriver aux conclusions suivantes :

  1. Dans une interaction donnée (schéma 1), les dislocations à droite (1d et 1f :je… moi) – au même titre que les dislocations à gauche (1c et 1e : moi je) – marquent un contraste – réel ou potentiel – et constituent des reprises de / réponses à 1a et 1b, séquences canoniques de l’énoncé assertif négatif/positif.

  2. Les dislocations à droite se distinguent toutefois de celles à gauche : celles-ci thématisent le sujet et valident sa position de contraste (Moi Je…) tandis que les dislocations à droite disent autre chose qu’uneopposition à. Ces voix nous renseignent en effet sur le positionnement discursif du locuteur : son contentement, son agacement.

  3. En énonçant je ne sais pas moi, le locuteur/informateur montre son agacement, sa face négative (BROWN; LEVINSON, 1978BROW, P.; LEVINSON, S. Politeness. Cambridge: Cambridge University Press, 1978.), une image qui renvoie au domaine du privé, aux sentiments d’indépendance et de liberté d’action. C’est une trace linguistique de son souhait qu’on le laisse tranquille, ce qui est incompatible dans le cadre de l’échange d’information, un lieu qui reflète nos comportements sociaux au quotidien et où chacun doit, plus ici qu’ailleurs, se conformer au principe de coopération.

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  • UNIVERSITÉ LYON. Christian Plantin Disponible sur: http://icar.univ-lyon2.fr/membres/cplantin/recherche.htm. Date de lecture: 2 juin 2014.
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  • WAUTHION, M.; SIMON, A.-C. Politesse et idéologie: rencontres de pragmatique et de rhétorique conversationnelles. Louvain: Peeters Publishers, 2000.
  • 1
    This publication is based on a post doctorate research project (USP – Brazil – 2014) supported by the University of Cape Town’s Research Committee (URC).
  • 2
    Par «cercle de Bakhtine» on entend un groupe d’amis qui, dans les années 1920-30, avaient l’habitude de se rencontrer et de travailler ensemble. Il s’agit, outre M.M. Bakhtine, de Matvej Isaevich Kagan (1889-1937); Pavel Nikolaevich Medvedev (1891-1938) ; Lev Vasil’evich Pumpjanskij (1891-1940); Ivan Ivanovich Sollertinskij (1902-1944); Valentin Nikolaevich Voloshinov (1895-1936). La question controversée de la paternité des textes a été traitée par Bronckart et Bota (2011).
  • 3
    Dans ce qui suit, le but est de faire apparaitre le cadre théorique qui fonde nos propos sur l’hétérogénéité énonciative de la négation. Pour cela, en plus des ouvrages de référence cités dans le corps du texte, nous avons consulté «La polyphonie linguistique» (LA POLYPHONIE..., 2009LA POLYPHONIE... linguistique, Langue Française, v. 4, n. 164, p. 3-9, 2009. Préface.); la thèse de Gjerstad (2011)GJERSTAD, Ø. La polyphonie discursive : pour un dialogisme ancré dans la langue et dans l’interaction. 2011. 347 f. Thèse (Doctorat en Linguistique), Université de Bergen, Bergen, 2011.; et celle de Roitman (2006)ROITMAN, M. Polyphonie argumentative: étude de la négation dans des éditoriaux du Figaro, de Libération et du Monde. 2006. 228 f. Thèse (Doctorat) – Département de français, d’italien et de langues classiques, Université de Stockholm, Stockholm, 2006..
  • 4
    «Chez Bakhtine, la polyphonie relève de toute une série de notions développées au travers de la globalité de son œuvre ; il s’agit d’une longue entreprise non terminée dont le début et l’apogée souvent sont attribuées à la première version de la Poétique de Dostoïevski, datant de 1929. Depuis la publication des derniers Carnets [Dans Estetika slovesnogo tvortchestva(Esthétique de la création verbale), Moscou 1979, Gallimard, Paris 1984 (...)] de Bakhtine ainsi que du grand essai du début des années 20, «L’auteur et le héros», probablement interrompu en 1922 [Texte d’archives (1920-1930), non repris par l’auteur et resté inachevé (...)], on peut cependant constater que le début de l’entreprise se situe, sinon avant, au moins à l’époque de la rédaction de ledit essai.» (HOLM, 2003HOLM, H. V. Le concept de polyphonie chez Bakhtine. Polyphonie: linguistique et littéraire, Samfundslitteratur, n. 7, p. 95, juil. 2003., p. 95).
  • 5
    Voir entre autres: Regine (1987)REGINE, R. Contacts de langues: les problèmes de la traduction littéraire et les concepts de Bakhtine. Langage et société, Paris, v.41, n.1, p.81, 1987. Disponible sur: http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lsoc_0181-4095_1987_num_41_1_3085. Date de lecture: 13 févr. 2014.
    http://www.persee.fr/web/revues/home/pre...
    et Seriot (2005)SERIOT, P. Bakhtine en contexte: dialogue des voix et hybridation des langues (le problème des limites). In: ZBINDEN, K.; WEBER-HENKING, I. (Éd.). La quadrature du cercle de Bakhtine: Traductions, influences et remises en contexte. Lausanne: Centre de traduction littéraire, 2005. p.203-225. (Théorie/CTL, 45)..
  • 6
    Pour une présentation générale de ce courant consulter : Filliettaz et Roulet (2002).
  • 7
    Pour une discussion des approches énonciatives et dialogiques du langage et sur l’existence de convergences entre ces approches tant dans leurs fondements théoriques que dans leurs pratiques voir notamment Bres et al. (2012)BRES, J. et al. (Éd.). Dialogisme: langue, discours. Bruxelles: Peter Lang, 2012..
  • 8
    Pour une définition et une discussion approfondie, voir : Nølke (2001)NØLKE, H. La ScaPoLine: Version révisée de la théorie Scandinave de la Polyphonie Linguistique. Polyphonie: linguistique e littéraire, Samfundslitteratur, n.3, p.43-66, mai 2001. Disponible sur: http://akira.ruc.dk/~Michel/Publications/nummer-3-hel.pdf. Date de lecture: 5 juin 2014.
    http://akira.ruc.dk/~Michel/Publications...
    .
  • 9
    Alors que la ScaPoLine s’intéresse aussi à la polyphonie littéraire, à l’instar de Bakhtine, Ducrot s’inspire davantage des travaux de Bally, dans lesquels la polyphonie est perçue dans les structures plus restreintes que les textes que sont les énoncés. Par ailleurs, il est vrai aussi que Ducrot s’inspire de la théorie littéraire de G. Genette et de ses distinctions entre narrateur, auteur, personnage et locuteur.
  • 10
    En effet, la notion-clé des travaux de Ducrot est la performance dans la langue, ceci renvoie aux théories des actes du langage développées par J. L. Austin dansQuand dire c’est faire (1962) et ensuite par J. Searle. Succinctement, ces théories posent qu’un individu s’adresse à un autre dans l’idée de faire quelque chose (transformer des représentations de choses et/ou de buts) plutôt que de dire quelque chose.
  • 11
    L’expression du contentement comporte un certain nombre de nuances, à savoir, fierté, joie, bonheur, empressement, enthousiasme, euphorie, béatitude, bien-être, bonne humeur, aise, jouissance, volupté, délice, délectation, plaisir, régal, allégresse, liesse, jubilation, félicité, ravissement, complaisance (ATILF, 2014ANALYSE ET TRAITEMENT INFORMATIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE [ATILF].Le trésor de la langue française informatisé. Disponible sur: http://atilf.atilf.fr/. Date de lecture: 13 janv. 2014.
    http://atilf.atilf.fr/...
    ).
  • 12
    Soulignons que l’expression de l’agacement englobe des nuances telles que: «impatience, irritation, agitation, effervescence, excitation, nervosité, exaspération, surexcitation, tension, fébrilité.» (ATILF, 2014ANALYSE ET TRAITEMENT INFORMATIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE [ATILF].Le trésor de la langue française informatisé. Disponible sur: http://atilf.atilf.fr/. Date de lecture: 13 janv. 2014.
    http://atilf.atilf.fr/...
    ).
  • 13
    Nous employons indistinctement : formes fortes/faibles, conjointes/disjointes, atones/toniques.
  • 14
    Ou encore : y a-t-il…? est-ce que … ? … etc.
  • 15
    The left dislocation construction is often used to mark a shift in attention from one to another of two or more already active topic referent. This explains the frequent occurrence of PRONOMINAL NPs in detached position (Me, I’m hungry, Moi, j’ai faim). Such detached lexical or pronominal NPs often have a ‘contrastive’ function, in which case they may be referred to as CONTRASTIVE topic NPs […]”. (LAMBRECHT, 1994LAMBRECHT, K. Information Structure and Sentence Form: Topic, Focus, and the Mental Representations of Discourse Referents. Cambridge: CUP, 1994., p.183).
  • 16
    Ces exemples sont issus d’un corpus composé par nous sur le terrain, à partir de situations réelles.

Publication Dates

  • Publication in this collection
    Sep-Dec 2015

History

  • Received
    July 2014
  • Accepted
    Oct 2014
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