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La cosmopolitique de la dépression: Biosocialité dans une ethnographie multi-espèces

Résumé

Ce travail est le résultat d'une ethnographie réalisée dans des animaleries et cliniques vétérinaires. Il aborde les transformations récentes des pratiques vétérinaires, spécialement au travers des relations avec le marché des animaux de compagnie, en se concentrant sur l'apparition de diagnostics psychiatriques, notamment de dépression, chez les animaux de compagnies et de leur traitement biomédical. D'une manière générale, il s'inscrit directement dans le cadre de récentes recherches anthropologiques sur les relations homme-animal. Dans ce contexte, cette relation nous permet d'aborder des thèmes comme la santé, la maladie et la biosocialité, en particulier les transformations biopolitiques de la nature.

Mots-clés
Animaux de compagnies ; Dépression animale ; Médicalisation ; Biosocialité

Este trabalho resulta de uma etnografia em pet shops e clínicas veterinárias no sul do Brasil. Nele, são abordadas as transformações recentes nas práticas médico-veterinárias, em especial, por meio da sua relação com mercados do segmento pet. A reflexão se concentra sobre o aparecimento de diagnósticos psiquiátricos em animais de estimação, notadamente os de depressão e suas formas de tratamento biomédico. De um modo geral, a discussão se inscreve diretamente em um quadro de recentes pesquisas antropológicas sobre as relações homem-animal. Aqui, esse recente campo é tratado como um meio privilegiado para o diálogo com temas como saúde, doença e biossocialidade, especialmente no que se refere ao modo como a natureza tem sido sistematicamente modificada em favor de disposições biopolíticas.

Animais de Estimação ; Depressão Canina ; Medicalização ; Biossocialidade


This paper is the result of an ethnographic research in pet stores and veterinary clinics in southern Brazil. Besides, it broaches the recent changes in medical and veterinary practice, in particular through its relationship with the pet segment markets. This reflection focuses on the emergence of psychiatric diagnosis in pets, mainly the depression and its forms of medicalization treatment. In general, the discussion falls directly in a range of recent researches on human-animal relations in anthropology. Here, this new field is treated as a privileged mean for dialogue with topics such as health, disease and biosociality, especially with regard to how nature has been systematically modified in favor of biopolitics dispositions.

Pets; Dog Depression; Medicalization; Biosociality


"Le conflit politique décisif, qui gouverne tout autre conflit,

est, dans notre culture, le conflit entre l'animalité et l'humanité de l'homme."

Giorgio Agamben - L'Ouvert

Ce travail est le résultat d'une ethnographie dans une clinique vétérinaire dans le sud du Brésil. Il fait partie d'un ensemble d'études où je me suis notamment concentré sur les dispositifs et les démarches entourant le diagnostic et le traitement des maladies psychiatriques d'animaux de compagnie (Segata 2011SEGATA, Jean. 2011. "Tristes amis: la médicalisation chez les chiens de compagnie avec dépression dans le sud du Brésil". In: Connaissances no(s) limit(es). Annales du I Congrés d´Association Française d´Ethnologie et d´Anthropologie - AFEA. Paris: AFEA/ EHESS. pp. 56-56., 2012a______. 2012a. Nós e os outros humanos, os animais de estimação. Tese de Doutorado, Programa de Pós-Graduação em Antropologia Social. Florianópolis: UFSC., 2012b______. 2012b. "Tristes (psycho)tropiques: le monde des chiens dépressifs au sud du Brésil". In: Frédérick Keck ; Noëlie Vialles (orgs.), Des hommes malades des animaux. Paris: L´Herne. pp. 151-158., 2012c______. 2012c. "Os cães com depressão e os seus humanos de estimação". Anuário Antropológico, II: 177-204., 2014______. 2014. "A agência de um projeto, o paraíso vegetariano e outros inconvenientes com a humanidade dos animais de estimação na antropologia". Revista Anthropológicas, 24: 45-65.)1 1 Une partie des analyses présentées ici ont été publiés dans un article précédent: "Os Cães com Depressão e os seus Humanos de Estimação" (Segata 2012c). Je remercie Guilherme Sá (UnB), Carlos Sautchuk (UnB), Theophilos Rifiotis (UFSC) et Bernardo Lewgoy (UFRGS) pour leurs contributions lors de nos discussions sur ce champ de recherche. Je remercie également l'appui du CNPq à ma recherche actuelle: "Les Animaux et la Cité". . D'une manière générale, la discussion s'inscrit dans un cadre plus large de débats en anthropologie sur les relations homme-animal, en particulier dans les milieux urbains (Digard 1990DIGARD, Jean-Pierre. 1990. L'homme et les animaux domestiques: anthropologie d'une passion. Paris: Fayard., 1999 ______. 1999. Les français et leurs animaux: ethnologie d'un phénomène de société. Paris: Fayard.; Hodak 1999HODAK, Caroline. 1999. "Les animaux dans la Cité: pour une histoire urbaine de la nature". Genèses, 37: 156-169. ; Sabloff 2001SABLOFF, Annabelle. 2001. Reordering the natural world: humans and animals in the city. Toronto: The University of Toronto Press. ; Grandrie 2005GRANDRIE, Olivier. 2005. Animal miroir l'homme: le maître - l'animal trait d'union. Aubagne: Quintessence. ; Haraway 2008HARAWAY, Donna. 2008. When species meet. Minnesota: University of Minnesota Press. ; Vicart 2014VICART, Marion. 2014. Des chiens auprès des hommes: quand l'anthropologue observe aussi l'animal. Paris: Pétra.). Cependant, j'ai cherché à associer l'accent analytique de ce champ de recherches à la récente idée d'ethnographie multi-espèces, généralisée dans les travaux d'auteurs comme Helmreich (2008)HELMREICH, Stefan. 2008. "Species of biocapital".Science as Culture, 17(4): 463-478. et Kirksey (2014)KIRKSEY, Eben (ed.). 2014. The multispecies salon. Durham: Duke University Press.:

Creatures previously appearing on the margins of anthropology - as part of the landscape, as food for humans, as symbols - have been pressed into the foreground in recent ethnographies. Animals, plants, fungi, and microbes once confined in anthropological accounts to the realm of zoe or "bare life" - that which is killable - have started to appear alongside humans in the realm of bios, with legibly biographical and political lives (Kirksey & Helmreich 2010: 545)

Dans cette perspective, la relation homme-animal est considérée comme un devenir en référence à un terme qui traverse l'œuvre de Gilles Deleuze et Félix Guattari. Ainsi, l'ethnographie multi-espèces cherche à décrire "new kinds of relations emerging from nonhierarchical alliances, symbiotic attachments, and the mingling of creative agents." (id: 546)

Toutefois, face au constat de ce qu'un espace spécialisé dédié aux études sur les relations homme-animal en anthropologie est encore en devenir au Brésil, j'ai essayé de me rapprocher d'autres domaines de recherches anthropologiques. Ce travail est un effort pour contribuer aux études sur la maladie et la santé, en particulier dans le cadre de ce dossier sur les études de la biosocialité. Je n'utilise pas ici le terme biosocialité au sens strict de Paul Rabinow, auteur très cité dans ce champ au Brésil, même si je fais référence à ses études sur "les pratiques de la vie" et la gouvernementalité des gens à travers la connaissance et le contrôle de la biologie (Rabinow 1996RABINOW, Paul. 1996. "Toward biotechnology". In: Making PCR. A story of biotechnology. Chicago: The University of Chicago Press. pp. 19-45., 1999______. 1999. "Artificialidade e Iluminismo: da sociobiologia à biossocialidade". In: João Biehl (org.), Antropologia da razão: ensaios de Paul Rabinow. Rio de Janeiro: Relume-Dumará. pp. 135-158., 2011______. 2011. "Why there is no contemporary bioscience, only a modern one". In: The accompaniment: assembling the contemporary. Chicago: The University of Chicago Press. pp. 177-188.). Je partage avec lui deux idées générales. La première est la nécessaire dissolution de la catégorie du "social" pour surmonter la division entre nature et culture. La seconde, qui concerne la biosocialité, est que la nature est systématiquement modifiée pour répondre aux spécifications biopolitiques (Rabinow 1999______. 1999. "Artificialidade e Iluminismo: da sociobiologia à biossocialidade". In: João Biehl (org.), Antropologia da razão: ensaios de Paul Rabinow. Rio de Janeiro: Relume-Dumará. pp. 135-158.). C'est notamment le cas, à mes yeux, des animaux de compagnie, avec la sélection de leurs races, le développement de leur nourriture, les technologies médicales appliquées à leur santé et à leur esthétique et, en particulier, le surgissement de troubles psychiatriques chez les chiens, que j'aborderai ici.

Le "Magasin de Marcos" et le nouveau monde pet

Les circonstances composant le terrain de cette recherche portent des caractéristiques singulières, bien que non exclusives: l'apparition d'espaces proposant des services spécialisés en matière de santé et d'esthétique des animaux - les animaleries. 2 2 Tout au long du texte j'utiliserai les termes anglais "pet" et "pet shop" pour designer les animaux de compagnie et les magasins qui leur sont dédiés conformément à ce qui se fait au Brésil, où il est très commun d'entendre "mon pet" ou bien "marché pet", "produits pets", etc. Je présente ci-dessous les résultats d'un travail de terrain ayant duré environ quatorze mois dans un de ces établissements situé dans la ville de Rio do Sul, dans le sud du Brésil.

Rio do Sul est la principale ville de la région de l'Alto Vale do Itajaí, située à la confluence des rivières Itajaí do Oeste et Itajaí do Sul, cette dernière formant une vallée qui s'étend jusqu'à la côte de l'état de Santa Catarina. Comme beaucoup d'autres villes de petite et moyenne importance au Brésil, sa population augmente fortement et ses caractéristiques politiques, économiques et géographiques se transforment. Fondée il y a à peine 80 ans, Rio do Sul est née de l'immigration allemande et italienne. Pendant plusieurs décennies, son économie s'est essentiellement basée sur l'agriculture et l'extraction et la transformation du bois. Néanmoins, dans le sillage de "l'esprit développeur" qui a caractérisé le pays pendant la seconde moitié du siècle dernier, auquel est venu s'ajouter la pénurie de ressources naturelles et la dévaluation de l'agriculture, cette ville a commencé à investir dans le domaine de la sidérurgie et de l'usinage de pièces mécaniques et dans la fabrication de jeans, une preuve que, en peu de temps, le Brésil est devenu un pays complètement différent. Aujourd'hui, la croissance de la ville résulte d'une petite immigration régionale attirée par les nombreuses offres d'emplois, de services et de places dans l'enseignement supérieur, ce qui a provoqué une urbanisation effrénée accompagnée d'une spéculation immobilière, puisque environ une douzaine de nouveaux bâtiments à plusieurs étages sont livrés par an. Quoi qu'il en soit, il ne s'agit pas d'une métropole, car, malgré sa croissance, la population de Rio do Sul est légèrement supérieure à soixante mille habitants. Compte tenu du fait que la population des villes des alentours ne dépasse pas, en moyenne, les dix mille habitants, il n'est pas difficile de comprendre pourquoi Rio do Sul s'est imposée comme capitale régionale. La "Rio do Sul urbanisée", qui a triplé sa population depuis les années 1980, a valorisé certains éléments symbolisant les nouvelles formes de consommation urbaine, comme les grands supermarchés, les galeries marchandes et les pet shops. De fait, les services vétérinaires dédiés auparavant aux animaux d'élevage tels que bovins, équidés et caprins, ont commencé à se réorienter vers les petits animaux comme les chiens et les chats (en particulier ceux de compagnie), dont beaucoup vivent dans des appartements récents. C'est le cas du "Magasin de Marcos", clinique vétérinaire à laquelle est associé le pet shop où j'ai réalisé la plus grande partie de mon travail de terrain.3 3 Franklin (1999) situe les années 60 comme le moment où les modes de relation entre humains et pets ont subi de profondes transformations. Pour lui, les animaux son devenus domestiques et des croquettes industrialisées ont commencé à être produites. Après les croquettes standards, la décennie suivante a vu surgir des services nutritionnels et médicaux spécialisés, outre une variété de jouets, de vêtements, de parfums et d'accessoires pour ces animaux. Comme il l'écrit, "the list of available services has grown considerably. Most involve extensions of human facilities to pets and cover every aspect of pet's life from cradle (literally) to grave" (Franklin 1999: 92).

Pour un observateur comme moi, peu familiarisé avec ces environnements, l'impression d'être entré dans un monde nouveau, peuplé d'entités de natures diverses, est saisissante. Sur le canapé de la petite salle d'accueil, j'observais les lieux où il était toujours possible d'entendre, par dessus les aboiements, le son strident d'une incessante sonnerie de téléphone, le moteur d'une tondeuse et les climatiseurs qui ne suffisaient pas à diminuer la chaleur de la pièce. Pendant que je patientais, j'ai entendu beaucoup de récits émouvants de ceux qui venaient faire soigner leurs pets. Juste en face de cette salle, un empilement de sacs formait un couloir menant à l'entrée du magasin. La plupart étaient de croquettes pour régimes spéciaux - certaines contenaient des protéines, d'autres étaient spécifiques pour chiens végétariens, allaitants, en ménopause, en sevrage ou en croissance. D'autres encore étaient spécialement mises au point pour différentes caractéristiques anatomiques canine, comme petite gueule, gueule plate, gueule longue, animaux de plus de trois ans, de moins de trois ans, ayant des poils lisses ou courts, etc. Des vêtements, des bijoux, des paniers, des tapis, des jouets, des huiles de massage, des médicaments, des remèdes naturels, des thés et des onguents formaient une mosaïque sur un présentoir à côté duquel, fixée au mur, une affiche jaunie montrait l'image d'un chien vêtu d'un foulard et d'un bonnet rouge portant des lunettes de soleil, assis dans les jardins du Champ-de-Mars, faisant la publicité une nouvelle fragrance de parfum.

Dans la partie du magasin réservée aux soins, où, en général, les propriétaires des animaux n'avaient pas accès, se trouvaient des salles spécialement aménagées. La première était le bureau de consultation avec une table en marbre sur laquelle les animaux étaient examinés. Plusieurs comptoirs et étagères contenaient différentes sortes d'instruments que Marcos et sa fille Paula, elle aussi vétérinaire, employaient pour des examens ou de petites procédures comme l'application de vaccins ou de sutures. Il y avait encore un bureau, sur lequel ils remplissaient les formulaires et rédigeaient les prescriptions, avec un ordinateur pour enregistrer l'historique des visites et une bibliothèque contenant des ouvrages que je consultais éventuellement. La pièce voisine, réservée aux chirurgies, était interdite aux propriétaires. J'ai fréquenté différentes cliniques vétérinaires pour mes recherches, mais je n'ai pu assister à des activités chirurgicales, y compris en tant qu'assistant, que chez Marcos. En plus de la table d'opération, il y avait aussi une chambre à rayons-X, des appareils d'échographie, des tensiomètres, des respirateurs artificiels et des équipements d'hémodialyse. Enfin, au bout du couloir se trouvait la chambre d'hospitalisation, où étaient réalisées les procédures cliniques, telles que l'application des médicaments ou solutés de réhydratation et la récupération. Cette pièce comptait plusieurs cages et chenils de différentes tailles, dans certain cas superposés, comme des étagères. Un grand nombre de chiens et de chats reçus souffraient de diarrhée ou de vomissements, ils urinaient ou perdaient du sang, de sorte que le matin, en général, l'odeur y était insupportable. Juste à côté se trouvait la partie du magasin dédiée au toilettage et autres soins de beauté pour animaux.4 4 Swabe (1999 affirme catégoriquement que la relation entre les humains et les animaux a radicalement changé au long du XXe siècle. C'est le cas des animaux d'élevage, avec l'utilisation de la science et de la technologie pour les confiner, dans le cas de l'agro-industrie, et, plus particulièrement, des pets et de tout ce qui touche à leur santé: " For many pet-owners, it has now become routine to pay an annual visit to the vet's to have their animals vaccinated, along with a general check-up. Consultations for vaccination and parasite control in fact account for a great proportion of the small-animal practitioner's daily activities and income. Animal disease control is, therefore, as large a part of the routine work of the small-animal practitioner as of the rural veterinarian" (Swade 1999: 126).

Actuellement, le domaine de la santé des animaux, notamment des pets, ressemble de plus en plus à celui des humains.5 5 Beaucoup de magazines publiés sur tout le territoire brésilien ont récemment abordé cette question, détaillant les dernières technologies pour le diagnostic et le traitement des animaux domestiques. Ils affirment que le Brésil occupe déjà la deuxième place en nombre de chiens et chats, derrière les États-Unis, où les familles dépensent environ 700 millions de dollars par an en consultations, médicaments et vaccins. Selon ces publications, il est de plus en plus fréquent d'avoir des pets, car les animaux de compagnie ont la vertu de combler les lacunes émotionnelles de leurs propriétaires (Veja, 12 mai 2010: 142-146). Ce travail insiste sur l'investissement en médicaments psychotropes: tranquillisants, antidépresseurs, ou coupe-faim. Entre 2003 et 2009, au Brésil et aux États-Unis, le nombre de chiens médicamentés a augmenté de 25% à 77%. Ce même article indique également que 42% des chiens ont des problèmes de comportement et, dans l'ensemble, une propension 9 fois plus importante que les humains à développer des troubles psychologiques. Certaines données utilisées par ces magazines sont publiées sur le site du Canine Inherited Disorders Database <www.upei.ca/cidd/intro.htm>. Dernier accès en mai 2011. Quelques exemples de ces nouveautés technologiques sont les holters glycémiques et l'insuline sans pics, qui contrôlent les niveaux d'insuline chez les chiens et chats diabétiques ; l'échocardiographie avec Doppler tissulaire couleur et le holter par télémétrie pour surveiller et évaluer le rythme cardiaque 24 heures sur 24 (contractions, musculature et circulation sanguine) pour détecter d'éventuelles arythmies chez les animaux atteints d'insuffisance cardiaque ; l'électrochimiothérapie, qui injecte le médicament directement sur la tumeur à l'aide d'une aiguille, la cryochirurgie, qui utilise de l'azote liquide pour nécroser et retirer des tumeurs -deux techniques utilisées chez les animaux atteints de cancer ; la tomographie par ordinateur qui permet d'observer en 3D les os et cartilages et le traitement par cellules souches employé pour régénérer des tissus articulaires ou comme anti-inflammatoire chez les chiens et les chats ayant des problèmes orthopédiques ; la gazométrie, permettant d'analyser les quantités de calcium et de sodium dans le sang et l'hémodialyse, utilisée dans des cas d'insuffisance rénale graves ; le tono-pen vétérinaire, appareil numérique mesurant la pression intraoculaire et le microscope chirurgical aidant à réaliser des microchirurgies de la cataracte, des paupières et de la cornée chez les animaux présentant des problèmes oculaires.6 6 Canine Inherited Disorders Database:<www.upei.ca/cidd/intro.htm>. Accès en mai 2011.

D'une manière générale, le "magasin de Marcos" était loin de cet univers de nouveautés et n'était même pas le plus sophistiqué de ceux que j'ai visités. Cependant, il recevait des nombreux clients par jour, et ce surtout en raison de l'expérience de son propriétaire:

"Alors que d'autres ne traitent que de vaches ou de chevaux, Marcos prend soin de nos animaux de compagnie depuis longtemps. Dans les années 80, je me souviens que des gens venaient de loin, de Lauretino, Aurora, Rio d'Oeste, Ibirama, Ituporanga et même de la ville de Lages [villes situées dans la région de l'Alto Vale (Haute-Vallée), cette dernière se trouvant à environ 150 km de Rio do Sul]. [...] Il a toujours été très attentif avec les chiens, il a toujours cherché à nous orienter sur leur alimentation et d'autres soins. Il a toujours été là quand on avait besoin de lui. [...] En fait, si vous regardez le nombre de cliniques existant ici aujourd'hui, c'était un révolutionnaire." (Carlos, propriétaire d'un Golden Retriever, Décembre 2008 - mes notes)

C'était une référence locale. Marcos travaillait dans ce secteur depuis trente ans et s'affirmait donc comme l'un des plus anciens de la ville. Ces mêmes personnes qui apportaient leurs animaux au magasin reconnaissaient que d'autres vétérinaires proposaient des technologies très avancées dans la ville. Cependant, Marcos effectuait des diagnostics et des procédures qui n'étaient pas si éloignées de celles pouvant être réalisées avec ces nouveaux équipements:

"Tout est question de pratique et d'expérience. Bien sûr, je ne peux pas nier que ces machines rendent notre travail bien plus aisé. Il est difficile de diagnostiquer quelque chose chez un animal - il ne peut pas nous dire ce qu'il ressent, où il a mal, etc. [...] Le temps se charge d'améliorer notre métier. Bien sûr, il faut travailler dur, lire ce que les gens étudient et découvrent. Mon père fait justement ça: il assiste à des conférences dans ce domaine, il prend des cours pendant toute l'année, mais je suis d'accord avec lui que certains équipements disponibles aujourd'hui sont absurdes - certains ne font que ce que fait déjà un vétérinaire expérimenté. Mais les plus jeunes, ceux de ma génération, ne sont pas intéressés à apprendre. D'autres équipements par contre sont beaucoup trop chers pour notre réalité." (Paula, parlant du travail de son père, février 2009)

Marcos était quelqu'un d'assez calme et, en fait, il se tenait au courant des nouveautés dans son domaine en lisant en même temps qu'il observait Paula travailler - peu à peu elle assumait ses fonctions dans le magasin. Par conséquent, moi aussi je me tenais informé de ces nouveautés, en lisant après lui les magazines auxquels il était abonné. Quand je faisais référence à des nouveautés, il rétorquait simplement qu'il pratiquait depuis déjà longtemps ce que font les "machines d'aujourd'hui" sauf que celles-ci rendent la vie plus facile. Néanmoins, dans le cadre de cette discussion, ce qui me paraît le plus intéressant est le fait que dans ce court laps de temps j'ai pu être le témoin d'un changement significatif des demandes de soins reçues dans sa clinique. Dans un premier temps, les procédures de vaccination et les chirurgies mineures prédominaient. Pour ce qui est des chirurgies, en particulier, il s'agissait de cas de désobstruction du canal de la vessie de chats, problèmes causés, selon Marcos, par l'excès d'aliments de mauvaise qualité disponibles à bas prix sur le marché. Des croquettes de mauvaise qualité, disait-il, entraînent la formation de "pierres aux reins", ce qui, toujours selon lui, était courant chez les chats. Venaient ensuite les problèmes gastro-intestinaux, généralement dus à des verminoses, puis des fractures dues à des accidents tels que des chutes ou des écrasements. Mais, peu à peu les cas traités ont changé, et ce qui était jusque-là une exception est devenu monnaie courante: les chiens dépressifs ou anxieux transformés en consommateurs de psychotropes. Un des premiers cas a été celui de Pink, une caniche qui avait été guérie deux ans plus tôt d'une tumeur au larynx et qui serait maintenant déprimée.

"C'est la Même Chose": Des chiens psychotiques et la cosmopolitique de la dépression.

Bia et Pink sont arrivées au magasin de Marcos au milieu de l'année 2009. Son portable à l'oreille, Bia parlait d'un ton sec et quelques larmes coulaient de ses yeux, tandis que Pink était assise à côté d'elle sur le canapé de la salle d'attente. Dans sa conversation, elle disait que c'était sa dernière tentative pour trouver ce qu'avait sa caniche de neuf ans. Quand elle a raccroché, Marcos les a invitées à entrer dans son bureau et, comme d'habitude, je les ai suivis, j'ai mis mes gants et je me suis préparé pour l'examen physique qui est toujours pratiqué après l'anamnèse. La consultation avait à peine commencé quand Bia a fait part à Marcos de son habitude d'utiliser les services de la clinique du Dr Roberto, un autre vétérinaire de la ville te que ce dernier et un de ses confrères lui avaient dit que sa chienne était déprimée. Bia estimait que ce diagnostic était précipité. Pour elle, il y avait une erreur:

"Écoutez, une de mes collègues est dépressive et elle se comporte de façon bien différente de Pink. Vous êtes fous ! Cela n'existe pas, un chien souffrant de dépression. [...] Maintenant, ma petite va devenir accro aux "bandes noires". Je vais vouloir aller me promener avec elle, jouer et tout... mais elle sera shootée !" (Bia, propriétaire de la caniche Pink, octobre 2008)7

Selon Bia, sa chienne gémissait et parfois même hurlait pendant la nuit. Elle avait perdu quelques kilos au cours des dernières semaines et avait progressivement arrêté de faire sa toilette. De plus, elle se grattait et se mordait au point de se mutiler et donnait l'impression d'être plongée dans une tristesse permanente. Bia doutait du diagnostic de dépression et imaginait plutôt le retour d'un vieux problème qui avait déjà attaqué sa chienne quelques années plus tôt: une tumeur au larynx.

Marcos a écouté l'histoire en silence tout en prenant des notes résumant la conversation, à son habitude. À un moment donné, il s'est arrêté et a regardé Bia et Pink, avant de reprendre ses notes, puis il s'est levé et les a invitées à le suivre jusqu'à la table d'examen où je me trouvais. Là, il a caressé le cou de la chienne, a tiré sur ses paupières, regardé sa gorge, pratiqué des mouvements de massage de l'abdomen et utilisé son stéthoscope pour écouter le cœur et les poumons. Après quoi, il m'a demandé de l'aider en tenant la gueule du chien pendant qu'il manipulait l'abaisse-langue et la lumière pour examiner la gorge. Malgré toutes ces interventions, contrairement à d'autres chiens, Pink n'a pas réagi. Bia était penaude. Elle a fondu en larmes devant nous et nous a raconté ce qu'elles avaient passé ces dernières semaines. Son regard nuageux et sans direction, son refus de se lever et son envie de pleurer sans cesse, indiquaient que quelque chose n'allait pas. Elles ont souffert et certains jours ne sont pas nourries. Tout était encore compliqué: leur faiblesse physique, leur déshydratation et le dysfonctionnement de certains de leurs organes exigeaient un traitement urgent. Marcos a suggéré que Bia prenne un rendez avec un médecin, pendant qu'il préparait les documents pour l'hospitalisation de sa chienne dans la clinique. Elles avaient besoin de récupérer et le vétérinaire voulait prendre ce temps pour réaliser des examens plus approfondis sur la chienne, notamment une biopsie pour évaluer un éventuel retour de la tumeur. Face à son ordinateur où il allait rédiger ses notes finales, le vétérinaire a alors demandé si elles passaient beaucoup de temps loin l'une de l'autre. Comme Bia a répondu que oui, le médecin lui a dit que la solitude était un déclencheur de dépression. Pink devait suivre un traitement médicamenteux à base de psychotropes. Bia doutait encore que la dépression canine soit un mal de plus en plus courant de nos jours, jusqu'à ce que le vétérinaire ait déterminé la dose exacte, en milligrammes, des comprimés conformément au biotype de la chienne, recommandant la fabrication du médicament par les traditionnels Laboratoires Gemballa de Rio do Sul. Au Brésil, il existe encore des restrictions pour la vente de psychotropes et médicaments pour chiens. Or, si Gemballa, dont le travail est reconnu dans la région, produisait de la fluoxétine pour chiens, il ne faisait plus aucun doute que la dépression canine existe réellement. Très sceptique au départ, Bia s'était laissé convaincre et sa souffrance était expliquée.

Après le passage de Pink, j'ai commencé à faire attention à ces cas et pendant la période où j'ai réalisé mon travail de terrain dans ce magasin, en moyenne un chien par semaine était diagnostiqué dépressif, soit près de 60 fidèles compagnons par an. Même si mes préoccupations ne sont pas statistiques, deux faits ressortent de ces observations quantitatives - le premier est que Rio do Sul compte quelques dizaines de pet shops et des amis connaissant mes travaux m'ont fait savoir que ce phénomène est régulièrement observé dans toutes les cliniques, le second est qu'une majorité de chienne souffrent de cette affection. En effet, au moins deux tiers des cas que j'ai suivis ont été diagnostiqués chez des femelles.8 8 En plus de la boutique phare, j'ai visité d'autres cliniques moins souvent dont une, appartenant à Alice, où de nombreux cas de dépression avaient été confirmés. Cependant, le fait que l'espace a une importance particulière - c'était un pet shop spécialisé en gynécologie et obstétrique et la plupart des chiens déprimés étaient des femelles ayant reçu un diagnostic de grossesse psychologique. Selon Alice, "elles commencent à gagner le ventre avec des trayons sont gonflés et quand vient le temps de créer le nid d'avoir des chiots. Mais les chiots ne semblent pas. Ensuite, elles sont déprimées. La solution dans ce cas est l'utilisation de contraceptifs et l'administration de psychotropes à base de fluoxétine - un médicament miraculeux." (mai 2009)

Mais le diagnostic de dépression est complexe, dans la mesure où il est nécessaire d'éliminer d'abord les "problèmes physiques", pour pouvoir ensuite se concentrer sur les "problèmes psychologiques". Or, cette séparation n'est pas guidée par une méthode psychiatrique ou psychologique spécifique, comme la réflexologie pavlovienne ou la psychanalyse freudienne. Elle a été intuitivement fondée sur la conception occidentale de la scission corps-esprit. Comme l'expliquait Marcos, la dépression et la faiblesse physique résulteraient d'une mauvaise alimentation et d'autres pathologies, une combinaison pouvant donner l'impression que les chiens sont tristes, ce qui, pour les non-initiés, peut être considéré comme la même chose.

"Les gens repoussent leur visite chez le vétérinaire dans l'espoir qu'ils vont se réveiller le lendemain et constater que leur animal aura guéri tout seul. Cela complique la santé des chiens et des chats qui, malades, se nourrissent mal, se déshydratent, et développent d'autres maladies, ils souffrent des effets neurologiques, et peuvent finir par mourir... Il s'agit d'une réaction en chaîne. [...] En tant que vétérinaire, je sers plus à accomplir des miracles qu'à éviter un mal. Souvent les animaux arrivent ici à un pas de la mort." (Marcos, mars 2009)

C'était le cas de Pink, et d'environ la moitié des cas que j'ai suivis pendant ma recherche. Dans le cas de Pink, dès le départ de Bia, Marcos m'a demandé de faire attention aux symptômes: le menton posé sur le plancher entre les pattes, la difficulté à se tenir debout ou à se déplacer, le regard fixe, les hurlements tristes, les pattes et la queue présentant des plaies et des morsures. Ces symptômes l'ont conduit à diagnostiquer la chienne comme déprimée, mais Marcos cherchait encore à en être certain. Dans la mesure où elle était trop faible, elle devrait être hospitalisée quelques jours, ce qui permettrait de réaliser certains examens. Le fait est qu'il y avait encore une possibilité à ne pas négliger: deux ans auparavant, Pink avait développé une tumeur de petite taille à côté du larynx ; le vétérinaire a donc supposé qu'il pourrait s'agir d'une rechute. Paulo, un autre vétérinaire de la ville, avait réalisé la chirurgie à l'époque et soumis la chienne à des séances de chimiothérapie, éliminant complètement la tumeur. Mais c'était une hypothèse à considérer. Ainsi, Marcos a anesthésié Pink, rasé les poils de sa patte avec un rasoir, a fait une prise de sang et a prélevé un échantillon de tissu sous-cutané qu'il a envoyé à Belo Horizonte par courrier express. Je me suis chargé d'apporter son sang à pied dans un laboratoire d'analyses cliniques situé près de chez moi.

Tout était nouveau pour moi - la biopsie, l'examen du sang de Pink par le même laboratoire que j'utilisais pour réaliser mes examens annuels. Mais peu à peu, j'ai compris que cela devenait de plus en plus courant. En fait, le cas de Pink, le premier que j'ai suivi, a été aggravé par le fait qu'elle avait des antécédents d'autres maladies, comme sa tumeur au larynx. Cependant, dans la plupart des cas, le diagnostic est de plus en plus automatique, à partir de la caractérisation de certains symptômes comportementaux apparents, en particulier la tristesse. "Mon ami est triste" disait la majorité des gens, en parlant de leur pet avant d'ajouter "il fait une dépression".

Lors de mes recherches sur internet, quand j'utilisais les mots-clés "dépression canine" ou "dépression - animaux de compagnie" sur des bases de données rassemblant les articles d'importantes revues spécialisées, nationales et internationales, je ne parvenais pas à trouver de travaux de médecine vétérinaire dédiés à ce thème. Ainsi, en raison du manque de littérature scientifique, à l'époque, j'ai commencé à m'interroger sur le statut médical de cette dépression canine. Cette recherche bibliographique m'a permis de découvrir que la médecine vétérinaire considère l'angoisse de séparation chez les animaux, dont l'acronyme anglais est SASA (Schwartz 2003SCHWARTZ, S. 2003. "Separation Anxiety Syndrome in dogs and cats". Journal of American Veterinary Medical Association, 222(11): 45-56.), comme un problème ayant augmenté lors de la dernière décennie. Le SASA peut être caractérisé comme un ensemble de comportements indésirables, en particulier chez les chiens qui sont laissés seuls ou quand ils sont éloignés de la figure à laquelle ils sont attachés (Soares et al. 2007SOARES, G. M et al. 2007. "Ansiedade de separação e suas implicações na qualidade de vida de cães domésticos (Canis familiaris)". Revista Clínica Médica Veterinária, 67: 76-82. ). Ces animaux hurlent et gémissent de excessivement et peuvent, dans certains cas, uriner et déféquer sur les lieux familiers de la relation à leur référant.

En pratique, les gens arrivaient au magasin à cause la dépression de leur chien. Ainsi, j'ai changé mon approche du sujet: j'ai arrêté de me demander si la dépression canine existait, je l'ai prise comme un fait et j'ai commencé à demander aux gens comment ils savaient que leurs animaux étaient atteints de dépression. Pour reprendre une expression de Strathern (2014)______. 2014. O efeito etnográfico. São Paulo: Cosac & Naify., ma recherche d'une explication scientifique pour la dépression canine était une façon de "couper le réseau". Les symptômes et leur diagnostic, ainsi que les traitements proposés par les clients de la clinique se construisaient à partir d'un mélange d'informations et de pratiques relatées dans des magazines spécialisés, des émissions de télévision ou des expériences individuelles partagées en groupe lors d'événement dédié aux pets. La science n'est alors qu'un mode explicatif, parmi d'autres, de la dépression canine. L'on retrouve dans les paroles de vétérinaires comme de propriétaires pets un mélange de discours scientifique et vulgarisé. J'ai commencé à comprendre comment se formait leur compréhension de cette maladie chez les chiens, au fur et à mesure que mes informateurs laissaient transparaître leurs sources d'information dans leur discours:

"Aujourd'hui, c'est facile. Il suffit de lancer une recherche sur Google. Il y a tellement de sites Web spécialisés dans ce domaine. Les gens savent pas quoi faire quand il y a un problème parce qu'ils trouvent pas, car y a de l'information partout. [...] Je m'inscris sur des sites Web pour recevoir des nouvelles sur les soins des animaux." (Carla, propriétaire d'un chien, JUIN 2009)

"Certains [sites Web] sont très complets, ils ont même des listes complètes de médicaments pouvant être utilisés sur nos animaux -y a des tableaux avec les races, tailles, âges et la quantité de chaque médicament pouvant être administrée sans danger pour la santé de l'animal." (Aline, propriétaire d'une Yorkshire Terrier, 2009)

Ce qui commençait à devenir clair pour moi c'était que, tandis que je cherchais des explications scientifiques à la dépression canine, les soupçons ou les diagnostics des gens se rendant au magasin provenaient souvent de blogs, de magazines généraliste, de programmes télévisés ou encore de recommandations d'amis. La vulgarisation d'outils d'information sur Internet et d'autres médias a fait surgir une sorte de proto-professionnalisme dans le secteur de la santé du récent monde pet. Comment l'écrit Swabe (1999)SWABE, Joanna. 1999. Animals, disease and human society: human-animal relations and the rise of veterinary medicine. London: Routledge.:

Essentially, proto-professionalisation means that animal owners have become increasingly familiar with the basic notions and practices of the veterinary profession. They will borrow professional veterinary vocabulary to articulate their animal's health or behavioural problems and will use their knowledge of animal conditions to determine whether or not they should solicit veterinary assistance. With this increased lay knowledge, animal owners may tend to view veterinary professionals more critically, which in turn places increased pressure on veterinarians to demonstrate their competence and medical expertise to their clients and to retain their medical authority (Swabe 1999: 136).

Cette même piste m'a poussé à consulter les blogs recommandés par les habitués du magasin. L'un d'eux, intitulé "Dog's Times" contenait des définitions assez complexes de la dépression canine.9 9 Voir http://www.dogtimes.com.br/depressao.htm. Accès en Octobre 2009. Selon lui, le fait que les chiens peuvent souffrir d'états dépressifs a été ignoré pendant trop longtemps par les propriétaires et les vétérinaires car leurs symptômes étaient attribués au vieillissement, qui engendrerait un ralentissement de l'activité chez ces animaux. Cependant, cela a changé avec l'étude des pathologies comportementales, qui entre autre, propose de comprendre la dépression chez les chiens comme:

Un état particulier du système émotionnel qui peut se manifester de diverses manières sur le plan clinique [...] le chien déprimé est un individu apathique, inactif, pas du tout intéressé par ce qui l'entoure et qui manifeste un état d'angoisse permanent. Cependant, cet état peut s'alterner avec d'autres d'agitation, caractéristiques d'une des formes cliniques (Blog "Dog's Times").

Ce blog caractérise trois formes cliniques de manifestation de la dépression canine. La dépression de réaction, "causée par le stress ou un choc émotionnel grave" où "le corps réagit à une surcharge de stimuli négatifs", comme une agression, par exemple, avec des états transitoires de dépression, pouvant durer entre huit et dix jours et qui n'ont pas besoin d'être traités par des médicaments. Qualifiée de très grave par Dog's Times, la dépression de régression serait "caractérisée par la perte des comportements acquis" (en particulier d'hygiène ou d'ordre appris pendant le dressage) et "par le retour à des comportements infantiles". Dans ce cas, "l'animal cesse presque entièrement de se déplacer, il pleure pendant des heures et avale tout ce qu'il rencontre au long de ses déplacements limités". C'est à ce moment qu'il faudrait intervenir avec des antidépresseurs. Apparaît enfin la dépression cyclique, considérée comme relativement courante, surtout chez les femelles dont les cycles durent entre deux semaines et deux mois et sont caractérisés par "l'indifférence, la tristesse, l'anorexie et la perte des comportements appris".

Sur un autre blog, les caractéristiques de la dépression canine sont associées à celles rencontrées dans la littérature scientifique sur le SASA: "le comportement d'attachement est essentiel pour la survie des animaux sociaux. Il s'agit d'un mécanisme de coalition sociale."10 10 Voir <http://www.saudeanimal.com.br/artig130.htm>. Accès en Mai 2009. Selon le vétérinaire Mauro Lantzan, auteur de ce texte, il faut faire attention à ce qu'il appelle la période de socialisation entre le chien et son propriétaire qui, selon lui, est cruciale pour la détermination des hiérarchies, de la communication et de la confiance entre eux. Si l'animal devient très dépendant de son propriétaire, des périodes de séparation, comme des déplacements professionnels, par exemple, peuvent déclencher ces comportements dépressifs chez le chien:

La dépression, ou état dépressif, peut être liée à l'angoisse et se produit lorsque l'animal est exposé à des situations de stress, de façon chronique ou traumatique, et commence à manifester des signes d'incapacité à accomplir ses fonctions biologiques, une apathie, un isolement social et un manque d'appétit. (Blog "Saúde Animal")

Selon les informations de Bia, Pink souffrait d'"incapacité à exercer ses fonctions biologiques" et était visiblement apathique. Par la suite, j'ai aussi trouvé une explication disant qu'il y aurait des races plus sujettes à la dépression, en particulier, celles "sélectionnées comme compagnie". Mais les changements brusques de routine et l'absence des proches, d'autres chiens ou des humains, sont les principaux facteurs déclenchant la dépression car ils rendent les animaux "vulnérables au stress". Cependant, et surtout, le lecteur devrait être conscient du fait que "tout animal est un être unique et doit être considéré comme un individu aux caractéristiques propres."

"Être unique", "individu aux caractéristiques propres", ces expressions, pour moi qui ai une formation en sciences humaines, étaient aussi familières qu'exotiques. En effet, elles étaient attribuées à des chiens. Mais j'ai poursuivi ma lecture:

La dépression doit être considérée comme un processus complexe. Une fois diagnostiqué le problème et définie la cause, le traitement peut comprendre des antidépresseurs tels que le Prozac. Les remèdes homéopathiques et les Fleurs de Bach contribuent au rétablissement émotionnel du chien déprimé et peuvent être prescrits par le thérapeute. Améliorer la qualité de vie de l'animal et prendre soin de son bien-être est aussi important. Ceci est la base de la thérapie comportementale (Blog "Saúde Animal").

Il me semblait trouver à chaque ligne un terme de plus à discuter: "complexe", "Prozac", "les remèdes homéopathiques et les Fleurs de Bach", "rétablissement émotionnel du chien déprimé", "prescrit par le thérapeute" ou "qualité de vie de l'animal" tous s'enchaînaient, faisant écho à l'ensemble des diagnostics cliniques. Ces blogs traduisaient des éléments typiques du SASA pour parler de la dépression canine dont ils proposaient un diagnostic en fonction des états présentés par les chiens et des intérêts de leur propriétaire. Soit un processus de déviation d'objectifs au cours de l'action, tel qu'Akrich (2006)AKRICH, Madeleine. 2006. "Les utilisateurs, acteurs de l'innovation". In: M. Akrich ; M. Callon ; B. Latour. Sociologie de la traduction: textes fondateurs. Paris: Mines Paris. pp. 257-265. l'a présentée pour ce qui est du rôle des utilisateurs dans le processus d'innovation, car son étude repense la linéarité du processus conception-usage pour se concentrer sur les transformations que les acteurs impliqués déploient au quotidien.

Ma recherche des définitions de la dépression canine sur ces blogs était une façon de me rapprocher de la logique partagée par Marcos et ses patients. Ce dernier n'a pas construit ses diagnostics de dépression sur des théories ou des méthodes de la science vétérinaire. Il a mélangé sa sensibilité, développée en trente ans de profession, aux procédures techniques et aux croyances valorisées par ses clients et par l'industrie pharmaceutique. L'on retrouve dans les discours de ces derniers des concepts, produits des univers scientifiques, tels que fluoxétine, stress ou synapses, côtoyant des termes non scientifiques comme solitude et tristesse. Il s'agit d'une sorte de "vie ensemble" constituée de différentes façons de penser et de vivre le monde que Stengers (1997)STENGERS, Isabelle. 1997. Cosmopolitiques VII: pour en finir avec la tolerance. Paris: La Découverte. définit comme le cosmopolitique:

Aucun savoir unificateur ne démontrera jamais que le neutrino des physiciens puisse coexister avec les mondes multiples mobilisés pour l'ethnopsychiatrie. Cette coexistence a pourtant un sens, et il ne relève ni de la tolérance ni d'un scepticisme: l'espace "cosmopolitique" où ces êtres peuvent être affirmés ensemble est celui de la rencontre entre les espoirs et les doutes, les effrois et les rêves qu'ils suscitent et qui les font exister (Stengers 1997: 06).

Le dialogue ou la réconciliation sont des expressions fréquemment liées au politique, surtout en cas de victoire électorale, lorsqu'un parti devient majoritaire. En termes généraux, il s'agit de la victoire de la science sur les croyances, de l'expérience sur l'intuition, de la culture sur la nature, etc. Quand Stengers (1997)STENGERS, Isabelle. 1997. Cosmopolitiques VII: pour en finir avec la tolerance. Paris: La Découverte. parle de cosmopolitique, il met sur le même plan d'existence la science et la magie, la religion et l'expérimentation de laboratoire, les psychotropes et les tisanes. Tous coexistent dans le même cosmos. Le politique est réestimé. Ce n'est plus l'idéal de la victoire de l'homme sur les choses. C'est une négociation de différentes façons de penser et de vivre le monde. Comme l'a expliqué Latour (2007)______. 2007. "Quel cosmos, quelles cosmopolitiques?: Commentaire sur les conditions de la paix selon Ulrich Beck". In: Jacques Lolive ; Olivier Soubeyran (dirs.), L'émergence des cosmopolitiques. Paris: La Découverte. pp. 69-84.:

Elle [Isabelle Stengers] a réinventé́ le terme en le présentant comme un composite de la signification la plus forte de cosmos et de celle de politique, précisément parce que le sens habituel du terme cosmopolite [selon Ulrich Bech] supposait une certaine théorie de la science qui est maintenant contestée. Selon elle, la force d'un élément se vérifie par sa capacité́ à atténuer les autres éléments. La présence du cosmos dans les cosmopolitiques résiste à la tendance du politique à concevoir les échanges dans un cercle exclusivement humain. La présence du politique dans les cosmopolitiques résiste à la tendance du cosmos à concevoir une liste finie d'entités qui doivent être prises en compte. Le cosmos prévient le repli prématuré du politique, et le politique celui du cosmos (Latour 2007: 71).

En apparence inconciliables pour l'analyse, des collectifs très distincts sont symétriquement liés, puisque, dans la pratique, les relations ne commencent ni par la distinction entre science et non-science, ni par la division moderne entre nature et culture. Le monde n'est pas strictement organisé ainsi, mais beaucoup de sciences qui l'étudient le sont.

Marcos prescrit des psychotropes à la chienne, mais il demande aussi de changer les comportements, les modes de vie. Il dit que Bia et Pink devraient manger des aliments sains et faire des exercices physiques. Selon lui, elles devaient trouver des choses pour égayer leur vie et passer plus de temps ensemble. Surtout, il reconnaissait les continuités entre les chiens et les humains.

Cette idée de "continuité" est très forte dans les récents travaux de Philippe Descola (2005DESCOLA, Philippe. 2005. Par-delà nature et culture. Paris: Gallimard., 2014a______. 2014a. "Modes of being and forms of predication".Hau: Journal of Etnographic Theory, 4(1): 271-280.), qui systématise quatre grands modèles ontologiques à partir de données empiriques provenant de différentes régions du monde.11 11 Il convient de noter que ces données proviennent de peuples que nous classons habituellement sous le label général de non-modernes, ce qui signifie de toute évidence qu'elles ne servent pas directement à élucider le problème du domaine de recherche sur lequel je travaille. Pourtant, elles peuvent illuminer ce débat. Sur cette procédure comparative, deux considérations sont importantes. La première est celle de Strathern (2006: 33), qui critique la façon dont certaines catégories empiriques de connaissance sont élevées au rang de catégories philosophiques ou analytiques, pour la compréhension d'autres contextes. Selon elle, "d'ordinaire, la procédure comparative, comme elle examine des variables traversant différentes sociétés, décontextualise les constructions locales pour travailler avec des constructions contextualisées analytiquement." La seconde apparaît dans l'idée générale de symétrie de la Théorie de l'Acteur-Réseau. De cette perspective, "les mêmes causes doivent expliquer les croyances vraies ou fausses" (Bloor 2009: 21). Dans les termes de Latour (2005), cela exige de l'anthropologie le même type de traitement pour les modernes et les non modernes. Le premier concerne l'idée générale animant la pensée occidentale moderne, selon laquelle il y a une nature commune entre humains et non-humains où les premiers se distinguent des autres par le privilège de la reconnaissance d'une intériorité distincte. Il l'appelle le naturalisme.

Apparaît ensuite l'idée d'animisme, dont l'élément central est une intériorité partagée entre humains et non-humains: les plantes, les humains et les animaux possèdent des matérialités distinctes, mais une intériorité commune, qui permet la communication. Cela implique que, dans ces systèmes, les non-humains disposent aussi de caractéristiques sociales telles qu'une hiérarchie des statuts sociaux, ses comportements basés sur des règles de parenté, des codes éthiques et des activités rituelles, c'est-à-dire qu'il y a une reconnaissance des qualités intérieures partagées entre les existants.

Une autre ontologie traitée par Descola (2005)DESCOLA, Philippe. 2005. Par-delà nature et culture. Paris: Gallimard. est le totémisme. Largement exploré dans les travaux de Lévi-Strauss, le point central de cette ontologie contraste avec l'animisme dans la mesure où êtres humains et non-humains possèdent des intériorités différentes, mais peuvent partager des habiletés corporelles - la vitesse du jaguar, la dextérité de l'anaconda, la capacité de camouflage du caméléon, le chant de l'Uirapuru, les couleurs du toucan. Il existe ainsi des matérialités similaires, mais des intériorités distinctes.

Enfin, ce qu'on pourrait considérer comme une nouveauté pour la discussion anthropologique inaugurée par Descola (2005)DESCOLA, Philippe. 2005. Par-delà nature et culture. Paris: Gallimard. et qui intéresse plus directement notre discussion (sous réserve des particularités de contextes ethnographiques) est l'analogisme. Pour cet auteur, il s'agit du mode d'identification dont la caractéristique centrale est la multiplicité des essences. Ici, l'identification se nourrit de similitudes, de sympathies, d'apparences. Les composants moraux et physiques des existants sont divers et fragmentés, leurs intériorités et physicalités sont discontinues et l'analogie consiste à établir une harmonie ou une continuité.12 12 Plus récemment, Descola (2014a) a exploité une critique de l'idée que ces modèles décrivent différents points de vue sur le monde. Pour lui, parler d'ontologie c'est désigner un niveau analytique, pour étudier "la mondiation", plus élémentaire que celui ordinairement adopté par l'anthropologie. Selon lui: "There can be no multiple worlds, in the sense of tightly sealed containers of human experience with their own specific properties and physical laws, because it is highly probable that the potential qualities and relations afforded to human cognition and enactment are uniformly distributed. But once the worlding process has been achieved, once some of these qualities and relations have been detected and systematized, the result is not a worldview, that is, one version among others of the same transcendental reality; the result is a world in its own right, a system of incompletely actualized properties, saturated with meaning and replete with agency, but partially overlapping with other similar configurations that have been differently actualized and instituted by different actants." (Descola 2014a: 277-278)

Un exemple empirique de cette continuité dans mon contexte de recherche était l'expression qui se prête à un ensemble de procédés autorisant et naturalisant l'utilisation des technologies médicales et de médicaments commune aux humains et aux pets: "c'est la même chose". Marcos et Paula me l'ont dit. Et ce qui m'intéresse plus particulièrement dans nos conversations est justement la facilité et la naturalité avec lesquelles se déployaient leurs longs récits sur leurs expériences de travail dans des pet shops et cliniques vétérinaires. Pour eux, l'avancement de la médecine vétérinaire et l'apparition de chiens dépressifs étaient considérés comme "très normaux".

C'est à cette époque que j'ai visité les Laboratoires Gemballa, vers où étaient dirigés de nombreux propriétaires de chiens souffrant de dépression pour commander de médicaments. Lucas, un des biochimistes du laboratoire, était un ami de longue date. J'ai commencé à l'impliquer dans ma recherche et je lui ai notamment posé certaines questions sur les prescriptions de fluoxétine pour chiens:

"Je vais être bien franc. Tu sais que maintenant je travaille plus là-dessus, je suis pharmacien titulaire chez Gemballa, je signe des papiers, j'aide à vendre, mais je travaille plus dans la production. C'est d'autres gens qui font les manipulations. Mais c'est simple: pour moi, en tant que pharmacien, le but ultime du médicament ne fait aucune différence."

[Et si ça fonctionne pas, du fait que ça se destine à un chien ?]

"Eh bien, quelqu'un avant moi s'est certainement déjà inquiété de ça, au labo, dans l'industrie ou dans une université - quelqu'un s'est consacré à savoir si ça marcherait ou pas: ils ont dû faire des études en double aveugle, des tests avec des placebos, réaliser des contre-épreuves - bref, ils ont dû suivre le protocole. Alors, maintenant pour quelqu'un comme moi, qui travaille au département commercial et pas dans la recherche, c'est pas ce qui est en jeu, l'affaire est plus directe et objective: je dois respecter la formule, ni plus ni moins, si la prescription dit X, je vais faire X. Ça m'intéresse pas de savoir à qui ou à quoi ça se destine. C'est triste, mon vieux, c'est ce qu'en sociologie vous appelez la division des tâches, de l'aliénation, enfin [...] Eh bien, Jean, tu sais, la prescription dit pas de quoi l'individu souffre, elle dit simplement ce qu'il doit prendre. Certes, nous savons à quoi ça sert, car nous connaissons les médicaments - la pratique fait qu'on finit par connaître par cœur les compositions et les dosages. Mais si la prescription dit "Alice", pas moyen de savoir si c'est une dame ou une chienne. C'est pareil - c'est la même chose: que ce soit un chien ou une personne, c'est pareil - le médicament doit marcher. Et c'est pour ça qu'on le fabrique et qu'on le vend." (Lucas, biochimiste et pharmacien, juillet et août 2009).

Le "c'est la même chose" qui apparaît dans ces discours est une des clés de la composition d'une cosmopolitique de la dépression. C'est à partir de la reconnaissance de certaines propriétés pouvant être partagées par les humains et les animaux que se mettent en place des modes d'identification et de relation tels que la cohabitation, l'utilisation de vêtements, le diagnostic et le traitement de certaines pathologies auparavant uniquement attribuées aux humains, et plus récemment, l'administration de médicaments sans distinction d'espèces.

Cette attention à ce qu'on pourrait appeler des problèmes de comportement chez les animaux de compagnie et leur médicalisation, selon Vlahos (2008: 451)VLAHOS, James. 2008. "Animais de estimação movidos a drogas". Revista Latinoamericana de Psicopatologia Fundamental, 11(3): 449-469., est devenue plus fréquente ces quinze dernières années. En effet, la prescription de médicaments pour ces animaux se base sur les traitements dédiés initialement aux humains, comme, par exemple la prescription de l'anticonvulsivant Gardénal (c) (phénobarbital, fabriqué par Bayer) aux animaux souffrant d'épilepsie, ou de l'anxiolytique Diazepam (c) (benzodiazépine, fabriqué par Roche), couramment employé en tant que sédatif avant des interventions chirurgicales mineures. Cependant, la stratégie adoptée par les grandes compagnies pharmaceutiques s'axe de plus en plus sur "la vente de médicaments modifiant le comportement et le style de vie spécifiques des animaux domestiques." (id.) C'est le cas de Slentrol(c) et Anipryl(c), de Pfizer, utilisés, respectivement, pour les chiens obèses et souffrant de déficits cognitifs comme la perte de mémoire due à l'âge avancé. Plus spécifiquement, dans le cadre du problème dont traite cette recherche, il existe Clomicalm(c) - une version canine d'Anafranil(c) de Novartis, et Reconcile(c), une version à mâcher, goût viande, du médicament qui a révolutionné le monde du traitement de la dépression: Prozac(c), d'Eli Lilly13 13 Voir l'intéressant travail de Fraser (2001): The nature of Prozac, où l'auteur aborde la révolution provoquée par cette drogue. Selon lui, les explications du fonctionnement du cerveau accompagnant ce médicament font apparaître de nouvelles compréhensions légitimant son utilisation. Voir aussi Lakoff (2008) et Azize (2008; 2010). . Ces deux médicaments sont prescrits en cas de SASA, mais aussi, en raison de leurs effets antidépresseurs, aux chiens diagnostiqués dépressifs.

Avec le temps, la plupart des examens de Marcos se résumaient à une simple confirmation: les gens arrivaient au magasin avec une sorte de diagnostic préétabli, facilité par les informations disponibles sur Internet, assuré par les "on-dit" et la confiance en la manipulation des médicaments des Laboratoires Gemballa. 14 14 Et ce parce que, au Brésil, il y avait, à l'époque, des restrictions à la commercialisation de psychotropes et médicaments spéciaux pour animaux de compagnie, comme ceux fabriqués par Novartis et Eli Lilly. En outre, dans ce contexte local, les chiens présentaient des symptômes suffisamment semblables à ceux que les humains présentent lorsqu'ils sont tristes ou déprimés. Et, si les humains s'autorisent certaines actions dans ces cas, tels que l'usage de psychotropes, pourquoi, par analogie, ne pas médicaliser les chiens eux aussi ? Après tout, "c'est la même chose".15 15 Je demandais parfois: "Comment ça, c'est la même chose: les chiens c'est aussi des gens ?". Les réponses étaient, en général, négatives: "Les chiens, c'est des chiens - on le sait tous, mais ils méritent d'avoir les mêmes privilèges que nous. Sur pas mal de choses, on est pareils" (Joana, propriétaire d'une caniche, Septembre 2009). Ainsi, si la littérature médico-vétérinaire définit le SASA, ses caractéristiques peuvent servir à décrire toute autre affection ou pathologie qui mettrait les chiens dans un état de tristesse et d'apathie apparente. En tant que modèle de vie contemporain (Roudinesco 2000ROUDINESCO, Elisabeth. 2000. Por que a psicanálise?Rio de Janeiro: Zahar.) et avec les facilités pour son traitement rendues disponibles par l'immense mobilisation de ressources pour financer les diverses formes de traitements médicamenteux, la dépression canine, à l'instar de la dépression humaine, est devenue une épidémie (Pignarre 2001PIGNARRE, Philippe. 2001. Comment la dépression est devenue une épidémie. Paris: La Découverte., 2006______. 2006. Les malheurs des psys: psychotropes et médicalisation du social. Paris: La Découverte.). Mais, en outre, dans mon contexte de recherche, la dépression était une forme de relation homme-animal. Dans ce cas, la dépression canine semblait pratique pour ceux qui étaient impliqués: elle simplifiait la compréhension des propriétaires, car elle constituait une sorte de terme commun pour une certaine tranche de la population qui fait de plus en plus usage de systèmes explicatifs du monde centrés sur le moi ou le subjectivisme, par la reconnaissance d'une intériorité (Duarte & Carvalho 2005DUARTE, Luiz Fernando Dias ; CARVALHO, Emilio. 2005. "Religião e psicanálise no Brasil contemporâneo: novas e velhas Weltanschauungen". Revista de Antropologia, 48(2): 473-500.). En même temps, ces personnes promeuvent les pet shops car ils les placent "sur la vague" de l'humanisation des animaux (Vlahos 2008VLAHOS, James. 2008. "Animais de estimação movidos a drogas". Revista Latinoamericana de Psicopatologia Fundamental, 11(3): 449-469. ; Kulick 2009KULICK, Don. 2009. "Animais gordos e a dissolução das fronteiras entre as espécies". Mana. Estudos de Antropologia Social, 15(2): 481-508.), un mouvement qui participe à la réorganisation de la psychothérapie comportementale par la généralisation de l'usage de psychotropes (Pignarre 2006______. 2006. Les malheurs des psys: psychotropes et médicalisation du social. Paris: La Découverte.).

Évidemment, d'un point de vue psychanalytique, par exemple, il faut considérer que la mélancolie est productive et que la tristesse peut faire partie de la vie de quelqu'un qui peut quand même vivre heureux. Si une personne n'est pas d'accord avec cela, il lui appartient d'agir pour se mettre dans un autre état d'esprit. Cependant, la dépression, concept que se disputent la psychologie, la psychiatrie et la neurologie, conserve l'aspect négatif d'une maladie. Mais dans le même temps, l'idée de la dépression donne au malade la possibilité d'échapper à la responsabilité de sa propre souffrance. La dépression est un trouble de nature neurochimique dans la logique biomédicale ; il ne s'agit pas de choisir, mais d'être "choisi", ce qui supprime la responsabilité que le sujet (dont il est le produit) a sur lui-même, au point que, entre autres choses, il se résigne à médicamenter sa propre vie. La dépression est une question qui ne doit pas être gérée par lui, mais par la fluoxétine. Comme l'a dit Roudinesco (2000)ROUDINESCO, Elisabeth. 2000. Por que a psicanálise?Rio de Janeiro: Zahar., la psychologie cognitive et la neurochimie ont produit une espèce de personne recherchant des traitements médicamenteux alors qu'un processus d'auto-analyse suffirait. Ce qui a été, par exemple, le choix de Bia, pour elle et sa caniche. Marcos les avait interrogés sur leurs routines - de longues heures de travail au bureau, l'isolement, leur mauvaise alimentation et leur manque d'exercice. Il leur a suggéré de changer radicalement de mode de vie avant de suivre une médication. Mais, comme cela est très courant de nos jours, elle a ignoré ses conseils et opté pour le médicament. Dans sa thèse de doctorat, l'anthropologue Rogério Azize (2010)______. 2010. A nova ordem cerebral: a concepção de "pessoa" na difusão neurocientífica. Tese de Doutorado. Programa de Pós-Graduação em Antropologia Social. Rio de Janeiro, Museu Nacional/UFRJ. nous aide à situer cette discussion au cœur des relations sur lesquelles se concentrent récemment les neurosciences et leurs effets, dans ce qu'il appelle "nouvel ordre du cerveau":

Un vocabulaire lié aux "nouvelles sciences du cerveau" - neurones, neurotransmetteurs, synapses, sérotonine, etc. - fait dorénavant partie de l'acquis sémantique que le grand public peut utiliser dans sa vie quotidienne pour parler de divers sujets concernant le comportement et les sentiments humains. Nous traversons un processus de vulgarisation de ce genre de connaissance, comme nous avons connu une vulgarisation des connaissances liées aux "psy", comme l'inconscient, le moi, etc. Les échos d'une "culture psy" s'unissent aujourd'hui de manière complexe à un discours où le cerveau prédomine sur l'esprit ; ou plutôt, où l'esprit est un épiphénomène du cerveau, conséquence directe de son activité chimique et électrique. Il s'agit de penser le rôle de diffusion scientifique dans ce processus. Mais aussi de réfléchir à un changement plus large dans la vision du monde, à partir de laquelle la notion de personne résidant dans le cerveau commence à prendre son sens. (Azize 2010: 03)

Mais le fait est que ce nouveau champ sémantique, dans mon contexte de recherche, a non seulement conduit à expliquer le comportement ou les sentiments humains, mais il a aussi donné un sens à ceux de l'animal - celui qui est le plus humanisé, le pet. En vérité, ce vocabulaire autorise à dire que Pink est un être humain, qualité que lui confère cette "technologie alien multifonctionnelle" qu'est le cerveau.16 16 L'expression est de Lende (2014): "Our Brains as Alien Technology". Disponible sur: http://blogs.plos.org/neuroanthropology/2014/07/19/brains-alien-technology/. Dernier accès en août 2014. Daniel Lende dirige une nouvelle génération d'anthropologues cherchant à discuter la relation entre cognition et culture, en particulier le dialogue entre anthropologie et neurosciences. Voir aussi Lende & Downey (2012). Lorsque le vétérinaire prescrit de la fluoxétine à un chien, il considère que sa souffrance s'explique par un dysfonctionnement du cerveau, ce qui élargit sa ressemblance avec Bia (dont il animalise le cerveau en le réduisant au même fonctionnement que celui du chien). Enfin, face à cette logique, nous pouvons même nous interroger sur la tristesse et l'apathie d'un chien et remettre en question une subjectivité qui transfère les affects d'une espèce à l'autre. Or, face à cette vague neuroscientifique, nous ne pouvons pas nier que ce sont à la fois le cerveau et les neurotransmetteurs avec les activités électriques fonctionnant, en théorie, à partir des mêmes principes. Suivant ces considérations, le cerveau et les médicaments ont réunis les humains et les animaux et "de nouvelles formes d'objectivité et de nouvelles formes de subjectivité sont confondues dans un discours associant le cerveau aux gens, les images techniques et les sentiments, la raison et l'émotion." (Azize 2010: 07______. 2010. A nova ordem cerebral: a concepção de "pessoa" na difusão neurocientífica. Tese de Doutorado. Programa de Pós-Graduação em Antropologia Social. Rio de Janeiro, Museu Nacional/UFRJ.) Alors, pourquoi pas une sorte de continuité entre l'homme et l'animal ?

Conclusions: La biosocialité multi-espèce

La biosocialité est un effort "pour analyser les nouvelles technologies biologiques qui reconfigurent (ou non) la notion d'être humain ainsi que les implications socioculturelles, politiques et éthiques découlant de ces changements." (Santos, Gibbon & Beltrão 2012: 09SANTOS, Ricardo Ventura ; GIBBON, Sahra ; BELTRÃO, Jane. 2012. "Apresentação". In: ______. (orgs.), Identidades emergentes, genética e saúde: perspectivas antropológicas. Rio de Janeiro: Fiocruz/ Garamond. pp. 7-29.) Cependant, dans mon contexte de recherche, la mobilisation dans le discours des différents acteurs de leurs intuitions, de leur confiance en le laboratoire pharmaceutique, des informations trouvées sur Google ou des concepts scientifiques compose un mode de vie contemporain basé sur de nouvelles moralités où ces animaux urbains sont pensés comme une espèce d'être humain. Dans ce cadre, beaucoup de problèmes sont associés à la réorganisation de la psychothérapie comportementale, laquelle préconise maintenant la prise de médicaments psychotropes, ce qui a permis à Bia et Pink de partager le même médicament.

Cette relation née autour de la dépression résulte de nouvelles connaissances construites à partir du surgissement de nouveaux concepts, de nouvelles techniques et de nouveaux sujets de connaissance, comme le dit Foucault (2005)FOUCAULT, Michel. 2005. A verdade e as formas jurídicas. 3a. ed. Rio de Janeiro: Nau Editora.. L'attention ne doit pas être portée sur le chien souffrant de dépression, mais plutôt sur les conditions qui la font apparaître et les moyens mis en œuvre pour la soigner. Je pense ici à la généralisation d'une référence bien connue qui apparaît dans l'œuvre de Michel Foucault (2005)FOUCAULT, Michel. 2005. A verdade e as formas jurídicas. 3a. ed. Rio de Janeiro: Nau Editora.: les liens entre ce qu'il appelle les systèmes de vérité et les pratiques sociales et les politiques d'une époque donnée. Pour lui, les nouveaux objets de connaissance naissent des domaines de savoirs les ayant produits. Dans le même temps, cette production est responsable du surgissement de nouvelles formes de subjectivité. Dans ce cas, "les pratiques sociales peuvent en venir à engendrer des domaines de savoir qui non seulement font apparaître de nouveaux objets, de nouveaux concepts, de nouvelles techniques, mais aussi font naître des formes totalement nouvelles de sujets et de sujets de connaissance" (Foucault 2005: 08FOUCAULT, Michel. 2005. A verdade e as formas jurídicas. 3a. ed. Rio de Janeiro: Nau Editora.). Cette idée s'est éclairée lorsque j'ai choisi de suivre le cours des événements sur le terrain. En d'autres termes, mon intention initiale n'était pas de faire des recherches sur des chiens souffrant de dépression: j'ignorais complètement ce phénomène. L'incidence de la dépression commence à prendre forme, dans les mêmes proportions où un ensemble de pratiques se constitue comme de nouvelles routines médico-vétérinaires, lesquelles, par conséquent, stimulent des investissements dans de nouveaux services et produits. Dans une certaine mesure, la médicalisation et l'apparition d'un "marché pet" sont une manière de transformer certaines natures et de les placer sous d'autres contrôles.

Quand je parle de cosmopolitique et d'une biosocialité multi-espèces, j'entends que la tristesse, la mélancolie, la dépression ou la fluoxétine constituent un monde commun entre les pets et leurs propriétaires. Dans ce cas, leur statut ontologique est moins intéressant que les arrangements qui les produisent. Comme l'indiquent déjà Langdon (2003)LANGDON, Esther Jean. 2003. "Cultura e processos de saúde e doença". In: Leila Jeloás (org.), Anais do Seminário sobre Cultura, Saúde e Doença. Londrina: UEL. pp. 91-107. et Maluf (2007)MALUF, Sonia. 2007. "Des mythes collectifs et des récits personnels: guérison rituelle, travail thérapeutique et émergence du sujet dans les cultures du Nouvel Âge". Ethnographiques, 14: 5-35. dans le domaine de l'anthropologie de la santé, on constate dans certains modèles de vie une prédominance des explications cosmologiques permettant aux gens de comprendre comment ils ont été affectés ou envahis par quelque chose d'extérieur, comme un sortilège, un mauvais œil. Ces modèles coexistent avec ceux, biomédicaux, où le mal, trouble ou maladie, s'explique par des déséquilibres physiologiques, d'ordre congénital ou transmis par des bactéries ou virus. Le premier modèle est le monde d'une altérité produite par un dispositif nommé "croyance", selon Latour (2002)LATOUR, Bruno. 2002. Reflexão sobre o culto moderno dos deuses fe(i)tiches. Bauru: Edusc., et le second est celui de la preuve, de la science. Cela implique diverses formes d'agencement, puisque si les gens (ou animaux) sont attaqués par des micro-organismes ou par des sortilèges et si le récepteur est désigné par des gènes ou des divinités, cela implique différentes compositions du monde mobilisant chacune des acteurs et des actions spécifiques17 17 Suivant l'interprétation du monde du cosmopolitique, tous peuvent coexister transversalement. Aussi, comme le dit Descola (2014b: 60-61), le monde social n'est pas plat: il est tissé de conflits et de rapports de forces entre de nombreux modes d'exister où la politique est partagée par l'humain et le non-humain. . Pourtant, je pense que la dépression n'est pas une "maladie" qui a attaqué Bia et Pink, mais un mode de relation liant cette femme et sa caniche. L'animal et le composé chimique incarnent "une présence" (au sens d'une altérité étrangère, comme le dit Lestel 2011LESTEL, Dominique. 2011. "A animalidade, o humano e as 'comunidades híbridas'". In: Maria Esther Maciel (org.), Pensar/escrever o animal: ensaios de zoopoética e biopolítica. Florianópolis: Editora UFSC. pp. 23-53.). En considérant la manière dont Gell (2009)GELL, Alfred. 2009. L'art e ses agents: une théorie anthropologique. Paris: La Presse du Réel. pense l'art, Bia, Pink ou la fluoxétine sont des sortes de contrepartie relationnelle ou chacune affecte l'une, l'autre ou les deux parties. Ainsi, plutôt que de traiter de la relation entre un humain et un animal, j'ai essayé de déplacer mon attention pour saisir la dépression comme une forme de relation produisant des manières d'être au monde indépendamment de qui est humain ou qui est animal.18 18 Comme l'écrit Strathern (2014: 325) "il est impossible de fixer un hybride parce que ses caractéristiques ne résident pas en une partie isolée, mais dans la façon dont les parties travaillent ensemble". Penser qu'un pet est un chien et une autre chose en même temps est un malentendu. L'hybride est une relation. Dans cette manière, j'ai concentré mon attention sur la relation. Je rejoins méthodologiquement Strathern (2014), quand elle aborde l'idée que les entités existent à l'intérieur de la relation. Cette proposition déplace l'accent de la description de la relation entre des objets - comme entre l'humain et l'animal ou entre la personne et les médicaments, pour traiter les choses comme eux-mêmes une relation.

Selon une formule générale de Manceron & Roué (2009: 05)MANCERON, Vanessa ; ROUÉ, Marie. 2009. "Les animaux de la discorde". Ethnologie Française, 39(1): 1-39., "à travers et avec les animaux, les différences et singularités culturelles se proclament et se définissent ; les places et les systèmes de relations entre les êtres s'assignent et se discutent ; la légitimité des savoirs et des pouvoirs se défend." Mon intérêt pour cette question est lié au repositionnement des animaux dans l'ethnographie récente. Si les animaux ne sont pas une nouveauté dans cette discipline, la question essentielle est que les débats contemporains, surtout l'ethnographie multi-espèces, ont installé une critique de la passivité animale dans la composition des relations. Traditionnellement, a écrit Noske (2008)NOSKE, Barbara. 2008. "The animal question in anthropology". In: Clifton Flynn (ed.), Social creatures: a human and animal studies reader. New York: Lantern Books. pp. 22-28., les anthropologues ont défini leur discipline comme l'étude de l'humanité (humankind) ; ils naturalisent notre peu d'attention au non-humain ou à l'animalité (animalkind). Parmi les nombreuses conséquences de ce fait, l'auteur suggère la transformation des animaux en une ressource, puisqu'ils n'apparaissent que comme faisant partie des écosystèmes anthropiques. Ainsi, dans ce modèle contemporain, les sociétés occidentales ont habituellement confié la capacité d'agencement à l'humain:

[...] animals tend to be portrayed as passive objects that are dealt with and thought and felt about. Far from being considered agents or subjects in their own right, the animals themselves are virtually overlooked by anthropologists. They and their relations with humans tend to be considered unworthy of anthropological interest (Noske 2008: 22).

Enfin, je crois que les récentes études ethnographiques sur la relation homme-animal peuvent fournir de nouveaux horizons pour un débat courant sur des positions politiques, morales et épistémologiques. En d'autres termes, ces relations peuvent nous aider à comprendre les mouvements locaux et mondiaux, les transformations de certaines sociétés. Ainsi, les chiens déprimés du sud du Brésil ne sont pas importants ici pour leur valeur de vérité au sens de former de fait un phénomène pathologique reconnu par la littérature médico-vétérinaire constituant des nouveaux indices épidémiologiques. Ce qui les rend importants est leur rôle central dans la composition de certains processus permettant de comprendre des logiques locales ni définitives, ni exclusives: les politiques de développement, les nouveaux modèles de vie, les rapports à la science et la technologie. Mais surtout, une forme de biosocialité et des manières d'être au monde, comprenant l'homme et l'animal.

Traduction du portugais faite par Jean Segata et Clément Roux-Riou.

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  • 19
    Revista Veja, n. 29, de 22 de julho de 2009 - "Cães e Gatos: a medicina deles é tão boa quanto a dos donos".
  • 20
    Revista Veja, n.19, 12 de maio de 2010 - "Cachorros: por que eles viraram gente?".
  • 21
    Revista Superinteressante, março de 2009 - "Fuga das Relações: pesquisa revela que 18% dos brasileiros preferem a companhia de seu pet no Dia dos Namorados".
  • 22
    Revista Psique, ano VI, n. 66, junho de 2011.
  • 1
    Une partie des analyses présentées ici ont été publiés dans un article précédent: "Os Cães com Depressão e os seus Humanos de Estimação" (Segata 2012c______. 2012c. "Os cães com depressão e os seus humanos de estimação". Anuário Antropológico, II: 177-204.). Je remercie Guilherme Sá (UnB), Carlos Sautchuk (UnB), Theophilos Rifiotis (UFSC) et Bernardo Lewgoy (UFRGS) pour leurs contributions lors de nos discussions sur ce champ de recherche. Je remercie également l'appui du CNPq à ma recherche actuelle: "Les Animaux et la Cité".
  • 2
    Tout au long du texte j'utiliserai les termes anglais "pet" et "pet shop" pour designer les animaux de compagnie et les magasins qui leur sont dédiés conformément à ce qui se fait au Brésil, où il est très commun d'entendre "mon pet" ou bien "marché pet", "produits pets", etc.
  • 3
    Franklin (1999)FRANKLIN, Adrian. 1999. Animals & modern cultures: a sociology of human-animal relations in modernity. London: Sage. situe les années 60 comme le moment où les modes de relation entre humains et pets ont subi de profondes transformations. Pour lui, les animaux son devenus domestiques et des croquettes industrialisées ont commencé à être produites. Après les croquettes standards, la décennie suivante a vu surgir des services nutritionnels et médicaux spécialisés, outre une variété de jouets, de vêtements, de parfums et d'accessoires pour ces animaux. Comme il l'écrit, "the list of available services has grown considerably. Most involve extensions of human facilities to pets and cover every aspect of pet's life from cradle (literally) to grave" (Franklin 1999: 92FRANKLIN, Adrian. 1999. Animals & modern cultures: a sociology of human-animal relations in modernity. London: Sage.).
  • 4
    Swabe (1999SWABE, Joanna. 1999. Animals, disease and human society: human-animal relations and the rise of veterinary medicine. London: Routledge. affirme catégoriquement que la relation entre les humains et les animaux a radicalement changé au long du XXe siècle. C'est le cas des animaux d'élevage, avec l'utilisation de la science et de la technologie pour les confiner, dans le cas de l'agro-industrie, et, plus particulièrement, des pets et de tout ce qui touche à leur santé: " For many pet-owners, it has now become routine to pay an annual visit to the vet's to have their animals vaccinated, along with a general check-up. Consultations for vaccination and parasite control in fact account for a great proportion of the small-animal practitioner's daily activities and income. Animal disease control is, therefore, as large a part of the routine work of the small-animal practitioner as of the rural veterinarian" (Swade 1999: 126SWABE, Joanna. 1999. Animals, disease and human society: human-animal relations and the rise of veterinary medicine. London: Routledge.).
  • 5
    Beaucoup de magazines publiés sur tout le territoire brésilien ont récemment abordé cette question, détaillant les dernières technologies pour le diagnostic et le traitement des animaux domestiques. Ils affirment que le Brésil occupe déjà la deuxième place en nombre de chiens et chats, derrière les États-Unis, où les familles dépensent environ 700 millions de dollars par an en consultations, médicaments et vaccins. Selon ces publications, il est de plus en plus fréquent d'avoir des pets, car les animaux de compagnie ont la vertu de combler les lacunes émotionnelles de leurs propriétaires (Veja, 12 mai 2010: 142-146). Ce travail insiste sur l'investissement en médicaments psychotropes: tranquillisants, antidépresseurs, ou coupe-faim. Entre 2003 et 2009, au Brésil et aux États-Unis, le nombre de chiens médicamentés a augmenté de 25% à 77%. Ce même article indique également que 42% des chiens ont des problèmes de comportement et, dans l'ensemble, une propension 9 fois plus importante que les humains à développer des troubles psychologiques. Certaines données utilisées par ces magazines sont publiées sur le site du Canine Inherited Disorders Database <www.upei.ca/cidd/intro.htm>. Dernier accès en mai 2011.
  • 6
    Canine Inherited Disorders Database:<www.upei.ca/cidd/intro.htm>. Accès en mai 2011.
  • 7
    Au Brésil, les médicaments prescrits sont identifiés par une bande en couleur sur leur boîte: bande rouge, plus courante, médicaments sous ordonnance, bande noire, médicaments sous prescription restreinte, généralement des psychotropes.
  • 8
    En plus de la boutique phare, j'ai visité d'autres cliniques moins souvent dont une, appartenant à Alice, où de nombreux cas de dépression avaient été confirmés. Cependant, le fait que l'espace a une importance particulière - c'était un pet shop spécialisé en gynécologie et obstétrique et la plupart des chiens déprimés étaient des femelles ayant reçu un diagnostic de grossesse psychologique. Selon Alice, "elles commencent à gagner le ventre avec des trayons sont gonflés et quand vient le temps de créer le nid d'avoir des chiots. Mais les chiots ne semblent pas. Ensuite, elles sont déprimées. La solution dans ce cas est l'utilisation de contraceptifs et l'administration de psychotropes à base de fluoxétine - un médicament miraculeux." (mai 2009)
  • 9
    Voir http://www.dogtimes.com.br/depressao.htm. Accès en Octobre 2009.
  • 10
    Voir <http://www.saudeanimal.com.br/artig130.htm>. Accès en Mai 2009.
  • 11
    Il convient de noter que ces données proviennent de peuples que nous classons habituellement sous le label général de non-modernes, ce qui signifie de toute évidence qu'elles ne servent pas directement à élucider le problème du domaine de recherche sur lequel je travaille. Pourtant, elles peuvent illuminer ce débat. Sur cette procédure comparative, deux considérations sont importantes. La première est celle de Strathern (2006: 33)STRATHERN, Marilyn. 2006. O gênero da dádiva: problemas com as mulheres e problemas com a sociedade na melanésia. Campinas: Unicamp., qui critique la façon dont certaines catégories empiriques de connaissance sont élevées au rang de catégories philosophiques ou analytiques, pour la compréhension d'autres contextes. Selon elle, "d'ordinaire, la procédure comparative, comme elle examine des variables traversant différentes sociétés, décontextualise les constructions locales pour travailler avec des constructions contextualisées analytiquement." La seconde apparaît dans l'idée générale de symétrie de la Théorie de l'Acteur-Réseau. De cette perspective, "les mêmes causes doivent expliquer les croyances vraies ou fausses" (Bloor 2009: 21BLOOR, David. 2009. Conhecimento e imaginário social. São Paulo: Unesp.). Dans les termes de Latour (2005)______. 2005. Jamais fomos modernos: ensaio de antropologia simétrica. São Paulo: Editora 34., cela exige de l'anthropologie le même type de traitement pour les modernes et les non modernes.
  • 12
    Plus récemment, Descola (2014a)______. 2014a. "Modes of being and forms of predication".Hau: Journal of Etnographic Theory, 4(1): 271-280. a exploité une critique de l'idée que ces modèles décrivent différents points de vue sur le monde. Pour lui, parler d'ontologie c'est désigner un niveau analytique, pour étudier "la mondiation", plus élémentaire que celui ordinairement adopté par l'anthropologie. Selon lui: "There can be no multiple worlds, in the sense of tightly sealed containers of human experience with their own specific properties and physical laws, because it is highly probable that the potential qualities and relations afforded to human cognition and enactment are uniformly distributed. But once the worlding process has been achieved, once some of these qualities and relations have been detected and systematized, the result is not a worldview, that is, one version among others of the same transcendental reality; the result is a world in its own right, a system of incompletely actualized properties, saturated with meaning and replete with agency, but partially overlapping with other similar configurations that have been differently actualized and instituted by different actants." (Descola 2014a: 277-278______. 2014a. "Modes of being and forms of predication".Hau: Journal of Etnographic Theory, 4(1): 271-280.)
  • 13
    Voir l'intéressant travail de Fraser (2001)FRASER, Marion. 2001. "The nature of Prozac".History of the Human Sciences, 14(3): 56-84.: The nature of Prozac, où l'auteur aborde la révolution provoquée par cette drogue. Selon lui, les explications du fonctionnement du cerveau accompagnant ce médicament font apparaître de nouvelles compréhensions légitimant son utilisation. Voir aussi Lakoff (2008)LAKOFF, Andrew. 2008. La raison pharmaceutique. Paris: Les Empêcheurs de Penser en Rond/ Seuil. et Azize (2008AZIZE, Rogério. 2008. "Uma Neuro-Weltanschauung?: fisicalismo e subjetividade na divulgação de doenças e médicamentos do cérebro". Mana. Estudos de Antropologia Social, 14(1): 7-30.; 2010______. 2010. A nova ordem cerebral: a concepção de "pessoa" na difusão neurocientífica. Tese de Doutorado. Programa de Pós-Graduação em Antropologia Social. Rio de Janeiro, Museu Nacional/UFRJ.).
  • 14
    Et ce parce que, au Brésil, il y avait, à l'époque, des restrictions à la commercialisation de psychotropes et médicaments spéciaux pour animaux de compagnie, comme ceux fabriqués par Novartis et Eli Lilly.
  • 15
    Je demandais parfois: "Comment ça, c'est la même chose: les chiens c'est aussi des gens ?". Les réponses étaient, en général, négatives: "Les chiens, c'est des chiens - on le sait tous, mais ils méritent d'avoir les mêmes privilèges que nous. Sur pas mal de choses, on est pareils" (Joana, propriétaire d'une caniche, Septembre 2009).
  • 16
    L'expression est de Lende (2014): "Our Brains as Alien Technology". Disponible sur: http://blogs.plos.org/neuroanthropology/2014/07/19/brains-alien-technology/. Dernier accès en août 2014. Daniel Lende dirige une nouvelle génération d'anthropologues cherchant à discuter la relation entre cognition et culture, en particulier le dialogue entre anthropologie et neurosciences. Voir aussi Lende & Downey (2012)LENDE, Daniel ; DOWNEY, Greg (eds.). 2012. The encultured brain: an introduction to neuroanthropology. Cambridge: The MIT Press..
  • 17
    Suivant l'interprétation du monde du cosmopolitique, tous peuvent coexister transversalement. Aussi, comme le dit Descola (2014b: 60-61)______. 2014b. "Le monde social est-il plat?: comment penser les conflits sociaux?". In: Tim Ingold ; Philippe Descola. Etre au monde: quelle expérience commune? Lyon: Presses Universitaires de Lyon. pp. 59-62., le monde social n'est pas plat: il est tissé de conflits et de rapports de forces entre de nombreux modes d'exister où la politique est partagée par l'humain et le non-humain.
  • 18
    Comme l'écrit Strathern (2014: 325)______. 2014. O efeito etnográfico. São Paulo: Cosac & Naify. "il est impossible de fixer un hybride parce que ses caractéristiques ne résident pas en une partie isolée, mais dans la façon dont les parties travaillent ensemble". Penser qu'un pet est un chien et une autre chose en même temps est un malentendu. L'hybride est une relation. Dans cette manière, j'ai concentré mon attention sur la relation. Je rejoins méthodologiquement Strathern (2014)______. 2014. O efeito etnográfico. São Paulo: Cosac & Naify., quand elle aborde l'idée que les entités existent à l'intérieur de la relation. Cette proposition déplace l'accent de la description de la relation entre des objets - comme entre l'humain et l'animal ou entre la personne et les médicaments, pour traiter les choses comme eux-mêmes une relation.

Publication Dates

  • Publication in this collection
    June 2015

History

  • Received
    27 May 2014
  • Accepted
    30 Jan 2015
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