In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Histoire d'amour par Stéphane Audeguy
  • Vivan Steemers
Audeguy, Stéphane. Histoire d'amour. Seuil, 2020. ISBN 978-2-02-137051-5. Pp. 288.

L'histoire d'amour entre Vincent, critique d'art contemporain, et l'artiste plasticienne Alice fonctionne comme un récit enchâssant de multiples récits secondaires. [End Page 254] C'est une astuce narrative dont Audeguy s'est servi à plusieurs reprises depuis le succès de son premier roman, La théorie des nuages (Gallimard, 2005), et qui cette fois-ci substitue un assemblage thématique à l'ordre chronologique. Puisant amplement dans la mythologie grecque et latine (ovidienne), l'auteur opte pour la métamorphose en différents personnages du protagoniste Vincent pour raconter ces histoires enchâssées. Depuis l'attentat terroriste commis au coeur de Paris dont il a été témoin, ce quinquagénaire se sent parfois accablé de fatigues inexplicables. Malgré l'assurance des médecins que les radiations n'ont pu l'affecter sérieusement, Vincent s'évanouit devant la statue de la déesse Diane au musée du Louvre, dont une petite cicatrice au-dessus de l'aine gauche lui rappelle son amante. Successivement, Vincent se transforme en Actéon, chasseur dans la mythologie grecque, lui-même changé en cerf par la déesse Artémis; en jeune juif de New York débarqué en Italie pendant la Deuxième Guerre mondiale; en peintre florentin de la Renaissance, inspiré par la mythologie grecque et les scènes de chasse; et finalement en prisonnier exilé au Nouveau Monde parmi les indigènes au seizième siècle. Plus que par le thème de l'amour, ces chapitres enchâssés—alternant avec le récit de vie du critique d'art—ont en commun les motifs de la chasse (et des cerfs), de la mort violente et de la guerre. Dès sa prime jeunesse, Vincent a compris qu'on ne vit qu'une vie dont on se doit de soigneusement cultiver les choses (la littérature et l'art) et les êtres qui valent la peine. En effet, ses troubles mentaux lui permettent de vivre d'autres existences "comme des régions dispersées au sein de l'unique et vertigineux champ des possibles de l'existence humaine" (52). Dans sa multiplicité de pistes mémorielles (et narratives), il entend "inventer de nouvelles façons d'être, en somme: refaire l'amour" (143). Sa quête érotomane le mène finalement à Alice. Forgée non seulement par l'amour, mais aussi par la passion de l'art et le respect de la liberté de l'autre, leur union esquive justement toute allusion à la chasse. Sous la plume d'Audeguy, il y a une ironie caustique, exprimée entre autres dans sa description malicieuse du monde de l'art contemporain, du film américain Avatar "qui sert une soupe pseudo-écologique indigeste" (192), ou encore de l'industriel richissime Henry Clay Frick dont la prestigieuse collection de peintures bucoliques et intimistes s'est établie sur le dos d'ouvriers tués pendant des grèves réprimées par un excès de force policière. Comme dans ses ouvrages précédents, l'écrivain—et ancien monteur cinématographique—manie l'art du découpage d'un texte dénué de tout dialogue. De ce roman le lecteur retiendra le classicisme du style, la perfection du phrasé et l'attention aux détails narratifs malgré l'impression de discontinuité et de manque d'analyse psychologique solide. [End Page 255]

Vivan Steemers
Western Michigan University
...

pdf

Share