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  • Entretien avec le réalisateur Wahid Chaïb
  • Jimia Boutouba (bio) and Wahid Chaïb
Jimia Boutouba:

D'où vient l'idée de ce documentaire ? Est-ce une commande de France 3 Rhône-Alpes ?

Wahid Chaïb:

J'ai été élevé durant toute mon adolescence par ma grand-mère maternelle, mère d'Azouz Begag. J'ai donc passé toute mon adolescence à ses côtés, lors de ses années universitaires. Il faut savoir, que j'ai assisté à la naissance du roman Le Gône du Chaâba. J'étais présent lorsque Azouz a pris un bloc-notes orange. Je me rappellerai toujours ses mots : « je vais écrire un livre, le livre de notre histoire, il faut que les gens sachent d'où l'on vient et ce que l'on a traversé. Je le dois à mon père ». Deux ans plus tard, nous étions tous réunis devant une émission littéraire, « Apostrophe » présentée par Bernard Pivot. Nous n'avions jamais regardé cette émission. Elle ne faisait pas partie de notre culture télévisuelle et pourtant, pour la première fois, autour de 22 heures, nous étions devant le poste de télévision à attendre le passage d'Azouz. Cette anecdote a marqué à tout jamais l'adolescent que j'étais. Elle a été très importante dans ma construction. Elle a permis et construit ma force de conviction. Les rêves devenaient possibles pour l'adolescent que j'étais. J'ai donc écrit tout d'abord dans le domaine de la musique puis le domaine du théâtre. Le monde de la musique m'a amené à rencontrer celui de l'audiovisuel. Dans le même temps, j'ai été sollicité pour un travail de mémoire sur la commune de Villeurbanne et le premier sujet qui m'est apparu comme important et non traité sur la commune était l'histoire de ce bidonville. À [End Page 133] l'endroit où il se situait se trouve aujourd'hui le parc naturel de la Feyssine et absolument rien n'a été écrit sur cette histoire qui pourtant a eu une résonnance mondiale à travers le roman qui a été traduit dans une quinzaine de pays. Il y a une sorte d'amnésie française autour de ces problématiques d'immigration et plus particulièrement celles qui sont liées à l'histoire franco-algérienne.

J'avais envie de donner la parole aux personnages du roman, aux primo-arrivants. Azouz en a donné sa version d'enfant, mais j'avais besoin que Messaouda, Zohra l'Aïd, Aicha et d'autres prennent la parole. Cela faisait tellement d'années qu'ils me disaient en aparté « c'iti pas koum ça… ». Je leur ai donc tendu la perche au propre comme au figuré. Dans un premier temps, sans les caméras pour en parler. Il a fallu les convaincre. Pour cela, j'ai tourné en condition minimale pour ne pas perdre de temps sur la technique et garder leur spontanéité et ne pas les impressionner par l'installation de trois ou quatre plans caméras. La lourdeur technique aurait été longue et astreignante notamment pour ces personnes du troisième âge. J'ai donc fait un premier montage de mes interviews que j'ai présenté à une boîte de production parisienne (Zaradoc) et l'aventure production a commencé. Pour être soutenu sur un tel projet, il faut un diffuseur. Nous avons donc rencontré France 3 et le directeur des programmes de l'époque a été emballé par le projet. Il m'a laissé carte blanche sur l'écriture et la réalisation, avec une condition : que le film porte sur l'histoire des primo- arrivants et non pas l'histoire d'Azouz car, comme il me l'avait dit avec raison, il la connaissait déjà.

Jimia Boutouba:

Pourrais-tu me parler un peu plus du processus de l'écriture du scénario ? Ou alors, est-ce que tu as tourné immédiatement, et le sujet t'est venu en écrivant/filmant ?

Wahid Chaïb:

Je dirais que l'écriture de ce documentaire s'est étalée sur trente années...

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