Elsevier

La Presse Médicale

Volume 39, Issue 10, October 2010, Pages 1042-1048
La Presse Médicale

Mise au point
Dermatite herpétiformeDermatitis herpetiformis

https://doi.org/10.1016/j.lpm.2010.07.006Get rights and content

Points essentiels

La dermatite herpétiforme est une maladie bulleuse auto-immune sous-épidermique acquise associée à l’entéropathie au gluten.

L’origine est multifactorielle avec une prédisposition génétique HLA de classe II (HLA DQ2 ET DQ8) dont l’absence a une forte valeur prédictive négative, mais aussi environnementale avec l’exposition au gluten. Il existe aussi une association avec d’autres maladies auto-immunes.

Les lésions cutanées associent un prurit avec des petites vésicules ou des bulles localisées à la face d’extension des épaules, des avant-bras et des fesses. Les manifestations digestives sont rares.

La biopsie en peau saine met en évidence en immunofluorescence directe des dépôts discontinus, granulaires d’IgA au sommet des papilles dermiques ou sur la zone de jonction dermo-épidermique et la biopsie de lésions, des micro-abcès de polynucléaires neutrophiles au sommet des papilles dermiques.

Le diagnostic différentiel est clinique avec les autres causes de prurit (eczéma chronique, prurigo strophulus, lichénification) et histologique avec la dermatose linéaire à IgA.

Le traitement initial est habituellement la dapsone qui permet d’accélérer la disparition des lésions cutanées et du prurit. Le régime sans gluten est proposé à chaque étape de la prise en charge car à lui seul il améliore le prurit mais aussi réduit le risque de survenue de complications dont les lymphomes.

Key points

Dermatitis herpetiformis is a subepidermal autoimmune acquired blistering skin disorder that is associated with intestinal gluten sensitivity.

The multifactorial pathogenesis associated genetic background with Major histocompatibility complex II molecules (HLA-DQ2 and HLA-DQ8), its absence has a great negative predictive value and environnemental factor with gluten consumption. There is also an increased incidence of autoimmune disorders.

Skin lesions are small vesicles and/or bullae, with pruritus, located at the extensor surface of the elbows, proximal forearms and the buttocks. Gastrointestinal manifestations are rare.

The biopsies from uninvolved skin establish the diagnostic with a deposition of IgA in the dermal papillae for direct immunofluorescence and in a representative lesion classically neutrophil micro-abcesses within the papillary dermis.

The differential diagnosis is clinical with other causes of pruritus and histological with the linear IgA bullous dermatosis.

Usually the treatment begin with dapsone for symptomatic skin lesions, it can be considered like a therapeutic test. A gluten-free diet is the treatment of choice and reduce the risk of lymphoma, the major complication.

Section snippets

Épidémiologie

La DH est une maladie rare : l’incidence annuelle est de 1 pour 100 000 habitants [2]. La prévalence en Europe varie de 12 pour 100 000 en Ecosse jusqu’à 20 à 39 pour 100 000 habitants en Suède [3]. La DH peut survenir à tous les âges (10 mois–90 ans) mais le plus souvent à l’âge adulte : au moment du diagnostic, l’âge médian est de 40 ans dans une série de 188 patients [2] et il existe une prédominance masculine (sex ratio : 3/2). Chez la femme, le début de la maladie est plus précoce

Génétique

La découverte d’une DH doit faire chercher à l’interrogatoire un antécédent familial de DH ou de MC : chez 1018 patients suivis pour une DH, on trouve dans 11 % des cas un antécédent familial au premier degré de DH ou de MC [5] et chez des jumeaux homozygotes le risque de développer la maladie pour le second jumeau est de 60 à 80 % si le premier est atteint [6].

Des antigènes HLA de classe II DQ2 et DQ8 présents sur le chromosome 6 sont fortement associés à la MC (90–95 %). Il en est de même

Clinique

La DH débute fréquemment par des sensations de brûlures et surtout un prurit, souvent accompagné de lésions de grattage non spécifiques. Puis apparaissent des petites vésicules localisées préférentiellement sur les faces d’extension des membres, les coudes, les genoux, les épaules, les fesses et la nuque avec une disposition symétrique Figure 1, Figure 2, Figure 3. Des petites bulles peuvent apparaître isolées ou groupées. Les lésions sont prurigineuses et le grattage entraîne des excoriations,

Complications

Les personnes atteintes de DH ont, comme celles atteintes de MC, une augmentation du risque de lymphomes digestifs T (enteropathy-associated T cell lymphoma) ou B par rapport à la population générale (tableau I) [11], [12], [13], [14], [15], [16]. Une étude rétrospective récente de la Mayo Clinic a trouvé 7 cas (3 %) de lymphomes chez 263 patients atteints d’une DH [11]. Dans une autre étude monocentrique récente de 366 patients suivis pendant 30 ans, le risque relatif de lymphome est de 6

Histopathologie

Il est préférable de prélever une lésion récente et de pratiquer la biopsie pour immunofluorescence en périphérie d’une vésicule. L’examen histologique objective typiquement un infiltrat dermique superficiel de polynucléaires neutrophiles, prédominant au sommet des papilles dermiques, formant des micro-abcès Figure 4, Figure 5. D’autres aspects peu spécifiques sont observés : œdème dermique, dépôts de fibrine, polynucléaires éosinophiles au sein de l’infiltrat qui peut prendre une disposition

Biologie

La dermatite herpétiforme est associée à la MC. Outre les signes biologiques de malabsorption (hypo-albuminémie, anémie) il est indiqué de doser les anticorps antigliadine (anti-GL) et anti-endomysium représenté par les anticorps antitransglutaminases de classe IgA et IgG par méthode enzyme-linked immunosorbent assay (Elisa).

Les anti-GL ont une spécificité médiocre, notamment en cas d’inflammation intestinale. Leur utilisation n’est par recommandée par la Haute Autorité de santé (HAS) du fait du

Critères du diagnostic

La biopsie cutanée avec immunofluorescence reste l’examen de référence pour affirmer le diagnostic. Si l’immunofluorescence est négative, il peut être utile de la répéter. En cas de forte suspicion clinique mais de négativité de l’immunofluorescence directe et d’une histologie ne montrant pas les micro-abcès au sommet des papilles, on peut s’aider pour établir le diagnostic de 2 autres critères : une amélioration des lésions cutanées suite à un régime sans gluten et la positivité des tests

Diagnostic différentiel

Les diagnostics à évoquer dans les cas ou il n’existe cliniquement qu’un prurit ou des lésions de grattage non spécifiques sont la gale (chercher la notion de contage et des sillons), un eczéma chronique, un prurigo strophulus (recherche de piqûres d’insecte, zone découverte plutôt le printemps ou l’été), une lichénification ou un autre prurigo chronique, il faut chercher alors en premier lieu une cholestase, une insuffisance rénale chronique ou un lymphome.

La dermatose à IgA linéaire est un

Physiopathologie

Il existe une intrication avec la MC et par conséquent une interaction entre des facteurs génétiques et des facteurs environnementaux.

Traitement

Le traitement initial comporte des médicaments et le régime sans gluten. Puis le régime seul peut suffire.

Conflits d’intérêts

aucun.

Glossaire

Anti-eTG
anticorps anti-epidermal transglutaminase
Anti-GL
anticorps anti-gliadine
Anti-tTG
anticorps anti-tissue transglutaminase
DBAI
dermatose bulleuse auto-immune
DH
dermatite herpétiforme
ELISA
enzyme-linked immunosorbent assay
G6PD
Glucose-6-Phosphate Déshydrogénase
HAS
Haute Autorité de santé
IC
intervalle de confiance
MC
maladie cœliaque
PNN
polynucléaire neutrophile
RR
risque relatif
RSG
régime sans gluten
SIR
Standardised Incidence Ratio

Références (37)

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