Prévention du cancer du col de l’utérus
Prise en charge des CIN1Management of CIN1

https://doi.org/10.1016/j.jgyn.2007.11.017Get rights and content

Résumé

Une néoplasie intraépithéliale cervicale de grade 1 (CIN1) correspond à une lésion dont les couches basales comportent une désorganisation de l’architecture et des atypies cytologiques qui remontent jusqu’au tiers inférieur de l’épithélium. Elle est considérée comme une lésion précurseur du cancer du col même si ces lésions régressent spontanément dans plus de 60 % des cas dans les deux ans. Les problèmes engendrés par la prise en charge des CIN1 telle qu’elle a été définie par les dernières recommandations établies en 2002 sont le sur-traitement et la grande diversité des pratiques. De plus, la pertinence de nouveaux tests a depuis été étudiée dans cette situation. Pour établir ces nouvelles recommandations, la base Medline a été consultée essentiellement sur les références parues entre 2001 et mai 2007. Les publications ont été sélectionnées et classées selon le niveau de preuve (NP) pour répondre aux questions posées pour établir des niveaux de recommandations. La recommandation proposée concerne les patientes asymptomatiques, ayant un frottis ASC-US/LSIL et un CIN1 sur une biopsie cervicale.

Un des problèmes en présence d’un CIN1 est de méconnaître une lésion plus sévère : de par la variabilité inter- et intraobservateur, d’une part, et de par le fait qu’une biopsie réalisée sous colposcopie n’est pas forcément représentative de la lésion la plus sévère du col utérin, d’autre part. Néanmoins, étant donné que la probabilité de cancer est extrêmement faible, une conisation n’est pas nécessaire chez une patiente asymptomatique ayant un frottis LSIL/ASC-US en cas de CIN1 sur la biopsie, que la jonction soit entièrement visualisée ou non (NP3). Les données de la littérature ne permettent pas de recommander la réalisation d’un curetage endocervical, car sa rentabilité est faible d’une manière générale et inconnue dans le cas d’un CIN1 prouvé. Concernant l’histoire naturelle des CIN1, les études récentes, dont une sur plus de 1200 femmes et l’autre sur plus de 700 femmes, confirment que le taux de progression des CIN1 vers une lésion de CIN3 ou plus est de moins de 9 % dans les deux ans (NP2). Avoir un CIN1 est associé à un risque évolutif à peine plus important que celui des femmes ayant un frottis ASC-US/LSIL avec une colposcopie normale ou une biopsie négative (entre 8 et 13 % quel que soit le résultat de la colposcopie initiale) (NP2/3). La recommandation en cas de CIN1 est un suivi rigoureux. Une nouvelle colposcopie et un traitement sont nécessaires si les anomalies s’aggravent ou persistent (NP2).

Les données des essais étudiant l’apport du test HPV en cas de CIN1 montrent que le test HPV a une sensibilité comparable aux frottis répétés avec une nécessité de nouvelle colposcopie moindre (NP3) pour détecter la survenue d’un CIN2 ou une lésion plus sévère. Elles permettent de définir les recommandations suivantes pour les modalités du suivi : si le contrôle à 12 mois (test HPV et/ou cytologie) est négatif, la patiente peut être suivie par un frottis annuel. En cas d’aggravation sur la cytologie, la colposcopie est nécessaire. En cas de test HPV positif et/ou de cytologie LSIL/ASC-US, un nouveau contrôle est nécessaire à 18 mois et un traitement adapté après colposcopie en cas de persistance ou aggravation.

Summary

A cervical intraepithelial neoplasia grade 1 (CIN1) is a lesion of basal cells consisting in an architecture disorganization and cytological atypia limited to the lower third of the cervical epithelium. It is considered as a precancerous lesion uterine cervix carcinoma while they spontaneously regress in more than 60% of cases in two years. The problems related to the management of CIN1 as defined by the recommendations established in 2002 are the over-treatment and the great variability of clinical practices. Moreover, the potential of new tests has been investigated since 2002. To establish these new recommendations, the medline database has been consulted and the references essentially published between 2001 and May 2007 have been investigated. Publications were selected and classified according to their level of evidence (LE) in order to establish the grade of recommendations. One of the problems encountered when facing a CIN1 is to misdiagnose a more severe lesion firstly because of the intra- and interobserver variability and secondly because the colposcopy-directed biopsy is not mandatorily representative of the more severe lesion. Nevertheless, because the risk of cancer is extremely low, a conization is not necessary in an asymptomatic woman with a LSIL/ASC-US pap smear in case of CIN1 even if the squamocolumnar junction is not entirely visualized (LE 2/3). The endocervical curettage cannot be recommended in this case because its efficacy is globally poor and unknown in case of CIN1. Concerning the natural history of CIN1, the recent studies, which included more than 1200 women and more than 700 for two of them, confirm that the rate of progression of a CIN1 to a CIN3 or more severe lesion is less than 9% in the two years following the initial diagnosis (LE2). A CIN1 is associated with a risk of evolution to a CIN2 or more severe lesion that is not markedly more important than the risk associated with a LSIL/ASC-US pap smear while the colposcopy is normal or the biopsy is negative (between 8 and 13% whatever the results of the initial colposcopy) (LE 2/3). The recommendation in case of CIN1 is a strict follow-up. A colposcopy and a treatment are necessary in case of persistence or progression of the abnormalities (LE2). Data from trials studying the contribution of HPV testing in case of CIN1 show that its sensitivity is similar to repeat cytology with less referral to colposcopy to detect CIN2 or more severe lesion. These data have been considered to establish follow-up recommendations to manage CIN1: if the exams (cytology and/or HPV testing) at 12 months are negative, patients can be followed by an annual cytology. In case of aggravation of the cytology, a colposcopy is necessary. In case of positive HPV testing or persisting ASC-US/LSIL at 12 months, a repeat control is necessary at 18 months and a treatment is proposed according to colposcopy findings.

Section snippets

Position du problème

Cet état des lieux nous permet de définir les problèmes engendrés par un CIN1 découvert sur une biopsie :

  • le traitement des CIN1 tel qu’il a été défini en 2002 pose essentiellement le problème de sur-traitements : par exemple, des patientes ayant un CIN1 avec jonction non vue sont traitées par conisation ;

  • il existe une grande diversité des pratiques, qui est sans doute la conséquence des multiples options possibles ;

  • de nouveaux tests, tel que les tests HPV détectant la présence d’HPV à haut

Méthodologie de recherche

Les dernières recommandations datant de 2002 (Anaes), la recherche a surtout porté sur les références parues entre 2001 et mai 2007. La base Medline a été consultée. Les publications ont été sélectionnées pour répondre aux questions posées pour chacune des propositions de prise en charge.

Évolution naturelle des CIN1

Contrairement à l’évolution des cytologies relativement bien étudiée, en ce qui concerne l’évolution des CIN1 histologiques, nous disposons de très peu d’études récentes.

Pretorius et al. ont déterminé le risque de CIN3+ après diagnostic histologique de CIN1 lors de la colposcopie [12]. Les femmes étaient surveillées par frottis annuel et test HPV (Hybrid Capture II, Digene) et en cas d’anomalie, la colposcopie était répétée. Avec un suivi médian de 26,3 mois, 25 femmes sur 1239 (2 %) ayant une

Quelle est la réelle signification d’un CIN1 ?

Si l’étude ALTS a montré qu’avec deux ans de suivi les taux de progression des CIN1 vers un CIN2+ étaient d’environ 12 % avoir un CIN1 est associé à un risque évolutif à peine plus important que celui des femmes ayant un frottis ASC-US/LSIL avec une colposcopie normale ou une biopsie négative [2]. En effet, chez les patientes qui ont un frottis ASC-US ou LSIL, le taux de CIN2+ dans les deux ans est compris entre 8 et 13 % quel que soit le résultat de la colposcopie initiale : normale, anormale

Doit-on recommander un curetage endocervical ?

Le curetage endocervical est anormal dans 27 à 33 % des colposcopies non satisfaisantes et 10 % des colposcopies satisfaisantes [17], [18] (NP3). Mais ces études incluaient des patientes avec frottis LSIL et HSIL. Or la positivité du curetage est corrélée à la sévérité des lésions. La sensibilité du curetage endocervical en soi a peu de valeur, car elle vient toujours en complément des biopsies, en revanche il est intéressant de connaître l’apport du curetage endocervical : il permet de

Suivi des CIN1

Plusieurs méthodes de sélection initiale ou de suivi peuvent être envisagées : l’âge, la détection de la présence d’un HPV à haut risque sur la cytologie initiale ou bien de façon différée. Ces deux critères sont étudiés de façon conjointe dans les études publiées.

Le tri initial par test HPV pourrait être utile dans cette indication. Néanmoins les résultats de l’étude ALTS ont montré que chez les femmes ayant une cytologie LSIL, le test HPV était positif dans 83 % des cas, limitant fortement

Une conisation est-elle sans risque ?

Parmi les arguments pour limiter l’interventionnisme devant un CIN1, une meilleure connaissance des effets à long terme des traitements permet de déterminer les risques. L’attitude consistant en une thérapeutique immédiate par conisation n’est pas sans effets secondaires et les conséquences obstétricales ont été mieux quantifiées dans une méta-analyse récente portant sur 27 études [28] (NP2). La conisation chirurgicale était associée de façon significative à un risque d’accouchement prématuré (<

Les inconvénients d’une prise en charge basée sur le suivi

Le traitement immédiat d’un CIN1 a deux intérêts : éviter les perdues de vue et répondre à l’angoisse des patientes. Si le taux de perdues de vue est quantifiable jusqu’à 40 % [12], [29], des mesures telles que l’organisation du suivi sont envisageables et semblent plus appropriées qu’un traitement immédiat. Quant à l’angoisse générée par l’annonce d’un CIN1, une information appropriée des patientes et de l’ensemble du corps médical peut permettre de faciliter l’expectative. La mesure de

Conclusion

Les données récentes confirment le faible taux de progression des CIN1 (NP2) et confortent une surveillance à un an plutôt qu’un traitement. La conisation a des conséquences obstétricales qui sont maintenant bien établies (NP2) et doit être limitée le plus possible. La répétition du frottis ou un test HPV à un an sont préférables à la conisation (NP4).

Références (29)

  • A.G. Ostor

    Natural history of cervical intraepithelial neoplasia: a critical review

    Int J Gynecol Pathol

    (1993)
  • M.J. Arends et al.

    Aetiology, pathogenesis, and pathology of cervical neoplasia

    J Clin Pathol

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  • D. Barres et al.

    Reproducibility of cytologic diagnosis: study of CRISAP Ile-de-France

    Gynecol Obstet Fertil

    (2000)
  • M.H. Stoler et al.

    Interobserver reproducibility of cervical cytologic and histologic interpretations: realistic estimates from the ASCUS-LSIL Triage Study

    JAMA

    (2001)
  • Cited by (21)

    • HPV test by Hybrid Capture II for the diagnosis of HR-HPV persistent infection

      2017, Medecine et Maladies Infectieuses
      Citation Excerpt :

      The management of diagnosed cervical lesions was crucial in our study. With regard to CIN1 lesions, offering a follow-up using a new cytology at 12 months and/or a HPV test, having both results negative leads to a cytology performed at 24 months while having one or both results positive requires a control test six months later using cytology and/or HPV [36]. A twice yearly cytological follow-up and a colposcopic follow-up for 6 to 12 months is, however, recommended in women presenting with CIN2 lesions [37].

    • Ultrasonographic evaluation of the uterine cervix length remaining after LOOP-excision

      2014, Journal de Gynecologie Obstetrique et Biologie de la Reproduction
    • Dynamin 2 expression as a biomarker in grading of cervical intraepithelial neoplasia

      2012, European Journal of Obstetrics and Gynecology and Reproductive Biology
      Citation Excerpt :

      In this study, we found that there was a negative correlation between the degree of dynamin 2 expression and the severity of CIN lesions; that is, high expression is associated with low-grade lesions (CIN I) of the cervix irrespective of HPV infection type. Clinically, classifying CIN lesions according to the degree of dysplasia (i.e., low-grade lesion (CIN I) or high-grade lesions (CIN II/III)) is important because it has been recognized that most CIN I lesions regress spontaneously even if left untreated [18–20]. Misdiagnosis of more severe lesions as CIN I lesions, however, may be a problem due to intra- and interobserver variability [3,4].

    • Regression of high-grade cervical intraepithelial neoplasia with TG4001 targeted immunotherapy

      2011, American Journal of Obstetrics and Gynecology
      Citation Excerpt :

      The protocol established that no conization has to be performed in patients when CIN 2/3 was neither suspected by colposcopy (≤ minor changes) ± biopsy and cytology LSIL or less at 6 months. This was assessed as clinically relevant because such patients do not qualify for conization, according to French as well as international guidelines.13 The clearance of HPV 16 DNA and messenger RNA (mRNA) was an additional argument to be confident that there was very low risk of an underlying lesion being untreated in these cases.

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