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Archives de Pédiatrie

Volume 20, Supplement 3, November 2013, Pages S99-S103
Archives de Pédiatrie

Antibioprophylaxie en pneumologie pédiatrique (hors mucoviscidose) : quelles indications pour l’antibiothérapie rotative ou alternée et pour l’antibiothérapie prolongée ?Antibiotic prophylaxis in pediatric pulmonology (excluding cystic fibrosis): which indications for rotating (or alternating) antibiotics and prolonged antibiotic therapy?

https://doi.org/10.1016/S0929-693X(13)71417-9Get rights and content

Résumé

Certaines pathologies pulmonaires chroniques de l’enfant ayant en commun une réduction de la clairance muco-ciliaire et un encombrement bronchique chronique sont associées au cours de leur évolution à une colonisation bactérienne bronchique et à des poussées récurrentes de surinfection. De ce fait, la prescription d’une antibioprophylaxie (ABP) est proposée chez certains malades par les équipes de pneumologie pédiatrique. Même si certains enfants semblent nettement améliorés par cette stratégie, il faut reconnaître qu’aucune étude pédiatrique (ni prospective, ni même rétrospective) ne valide clairement son efficacité, et qu’aucune recommandation de société savante n’encadre actuellement sa prescription. Les bénéfices cliniques démontrés d’une ABP concernent des pathologies très ciblées et rares. Ces enfants nécessitent une évaluation spécialisée avant toute décision d’ABP. La mucoviscidose est certainement une situation où l’intérêt de l’ABP est bien établi. Par extension des données obtenues

Summary

Some children with chronic lung disease associated with mucociliary clearance impairment and chronic bronchial congestion develop, during their evolution, bronchial bacterial colonization and recurrent infections. Therefore, antibioprophylaxis (ABP) is proposed by pediatric pulmonology specialists. Although some children seem improved by this strategy, it is worthy to note that no pediatric study supports its effectiveness, and no guidelines from society currently recommend its prescription. Demonstrated clinical benefits of ABP involve rare and highly targeted diseases. These children require a specialized assessment before any decision of ABP. Cystic fibrosis is definitely a situation where the interest of ABP is well established. By extension of the data obtained in adults, children with bronchiectasis (DDB) could potentially benefit from prolonged antibiotic therapy. In recurrent bacterial infections of the airways without DDB, ABP should be limited and restricted to most severe cases. In the absence of data on the benefit of alternate antibiotic treatment, we propose to focus on a single-molecule antibiotic prescribed for long periods. It may be amoxicillin, macrolides or cotrimoxazole. Furthermore, chez l’adulte, les enfants ayant des dilatations des bronches (DDB) peuvent potentiellement bénéficier d’une antibiothérapie prolongée. Pour les surinfections bactériennes récidivantes des voies aériennes sans DDB, l’ABP doit être limitée au maximum en la réservant aux formes les plus graves. En l’absence de données sur le bénéfice des antibiothérapies alternées, nous proposons de privilégier une antibiothérapie par une seule molécule prescrite au long cours. Il peut s’agir d’amoxicilline, de macrolides ou de cotrimoxazole. Par ailleurs, il n’y a pas actuellement de données justifiant la prescription de macrolides au long cours dans l’asthme de l’enfant.

Introduction

La prescription d’antibiotiques au long cours est souvent proposée par les équipes de pneumologie pédiatrique pour certaines maladies respiratoires rares et chroniques de l’enfant, associées avec des surinfections bactériennes. Il peut s’agir de plusieurs antibiotiques pris alternativement (antibiothérapie rotative ou alternée) ou d’un seul antibiotique pris sur une longue période. Même si certains enfants semblent nettement améliorés par cette stratégie thérapeutique, il faut reconnaître qu’aucune étude pédiatrique (ni prospective, ni même rétrospective) ne valide clairement son efficacité, et qu’aucune recommandation de société savante n’encadre actuellement sa prescription. La réunion du GPIP, qui a eu lieu à Nantes le 7 juin 2013, a permis de faire le point sur l’état des lieux des connaissances actuelles sur ce sujet, les bénéfices et les inconvénients de ces antibiotiques au long cours, et a permis d’élaborer quelques propositions.

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Quel est le concept qui sous-tend cette attitude ?

Certaines pathologies pulmonaires chroniques de l’enfant ayant en commun une réduction de la clairance muco-ciliaire et un encombrement chronique bronchique sont associées au cours de leur évolution à une colonisation bactérienne bronchique et des poussées récurrentes de surinfections (dites « exacerbations »). Une antibiothérapie préventive pourrait réduire le nombre d’exacerbations respiratoires. Le processus infectieux bactérien s’accompagne in situ d’une réaction inflammatoire médiée

Quelles sont les pathologies concernées ?

Les pathologies respiratoires cibles qui pourraient bénéficier d’une telle antibiothérapie préventive sont celles qui associent un encombrement bronchique chronique et des poussées fréquentes d’exacerbations et de surinfections.

  • La première est la mucoviscidose (sujet qui ne sera pas traité ici).

  • En dehors de cette pathologie, les enfants atteints de DDB, ou bronchectasies ont, comme dans la mucoviscidose, des exacerbations bactériennes et une éventuelle colonisation de leurs voies aériennes. La

Quels sont les objectifs de cette antibiothérapie ?

Compte tenu de ces éléments, toute mesure préventive à visée antibactérienne devrait avoir 3 objectifs :

  • réduire la fréquence des exacerbations en relation avec une surinfection bactérienne ;

  • réduire, voire prévenir, le processus d’aggravation de la destruction inflammatoire des bronches et l’évolution vers les séquelles à type de bronchectasie ou DDB ;

  • améliorer l’état respiratoire des patients et leur qualité de vie.

Quels sont les germes cibles ?

Les agents bactériens principaux et les plus fréquemment retrouvés comme colonisateurs des bronches et surtout responsables d’exacerbations avec surinfection sont [2] :

  • avant tout, Haemophilus influenzae non typable ;

  • Moraxella catarrhalis fréquemment retrouvé, n’ayant probablement pas de caractère pathogène aussi marqué que H. influenzae ;

  • puis Streptococcus pneumoniae ;

  • et plus rarement et surtout plus tardivement (chez l’adulte), en cas de DDB non mucoviscidosique, Staphylococcus aureus et

Quelles sont les preuves du bénéfice clinique d’une antibiothérapie préventive ?

La réduction de la fréquence des exacerbations par une antibiothérapie continue est parfaitement démontrée dans la mucoviscidose [3]. Dans cette pathologie, l’antibiothérapie continue s’accompagne également d’une amélioration fonctionnelle respiratoire [4].

En dehors de la mucoviscidose, et à notre connaissance, il n’y a aucun essai évaluant les antibiothérapies rotatives (ou alternées) tant chez l’enfant que chez l’adulte.

En ce qui concerne les antibiothérapies dites « prolongées » sur

Quels sont les risques microbiologiques ?

Le principal risque est de favoriser l’émergence et la sélection de bactéries résistantes. Ce point est particulièrement important de nos jours où les taux de résistance bactérienne des germes hospitaliers mais aussi communautaires sont devenus très élevés et où, pour certains pathogènes, l’apparition de résistances multiples et de haut niveau conduit parfois à de véritables impasses thérapeutiques [10]. Le risque est majeur sur la flore digestive avec les céphalosporines, première classe

Quelles propositions pour l’antibioprophylaxie en pneumologie ?

En pathologie respiratoire, les bénéfices cliniques démontrés d’une antibiothérapie prolongée concernent des pathologies respiratoires très ciblées, et rares chez l’enfant. Ces enfants nécessitent une évaluation spécialisée avant toute décision d’antibiothérapie prolongée.

  • La mucoviscidose est certainement une situation où l’intérêt de l’antibioprophylaxie est bien établi.

  • Par extension des données obtenues chez l’adulte, les enfants avec DDB peuvent potentiellement bénéficier d’une

Quelles sont les questions prioritaires de recherche ?

Plusieurs essais sont actuellement en cours chez l’enfant, y compris en France [12,13]. Ils concernent la prise au long cours d’azithromycine ou de l’association amoxicilline-acide clavulanique dans des DDB ou certaines bronchopathies chroniques. Il n’est toutefois pas certain que ces études répondent à toutes les interrogations, mais elles sont un préalable avant toute recommandation par les sociétés savantes.

Il semble notamment indispensable:

  • de développer des outils permettant de mieux

Liens d’intérêts

Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts relatif à cet article.

Références (13)

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Cited by (0)

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