LES STRATEGES DE SICILE.
De la naissance du thème au règne de Léon V*
Mikaël NICHANIAN et Vivien PRIGENT
Dans le domaine des études prosopographiques, le temps semble venu, après la publication décisive de la PmbZ, de produire des synthèses qui mettent les informations fournies par les sources en rapport avec le contexte historique. Ces synthèses devraient permettre de proposer des identifications entre dignitaires mentionnés dans des sources différentes, de reconstituer des évolutions de carrière et d'étudier les principes du recrutement. Parfois, elles peuvent également éclairer les événements militaires et politiques, à la lumière de l'appartenance sociale ou administrative des dignitaires impliqués. Ces synthèses sont particulièrement nécessaires pour les 7e-9e siècles pour lesquels l'état des sources est lacunaire. En ce sens, les études prosopographiques permettent ainsi de proposer de nouvelles interprétations des évolutions sociales ou des crises politiques.
Au sein de la structure étatique originale qui se met en place vers la fin du 7e siècle, les stratèges occupent évidemment une place de choix ; leur charge est bien, à cette époque, la plus prestigieuse de l'empire. Ils jouent le rôle de gouverneurs régionaux qui concentrent progressivement en leurs mains, au cours du 8e siècle, l'ensemble des pouvoirs civils et militaires d'un thème. Ainsi, une meilleure compréhension de leur recrutement, de leur origine sociale et de l'évolution de leur carrière jette une lumière significative sur les soubresauts militaires et politiques de l'empire dans lesquels ils jouent toujours un rôle de premier plan.
À cet égard, la Sicile constitue, au sein de l'empire, un champ de recherche significatif par la richesse de ses sources, à la fois sigillographiques et textuelles. D'abord, le corpus des sceaux de Sicile retrouvés et étudiés est plus grande que pour d'autres régions de l'empire. Ils permettent une compréhension fine de la titu- lature et des structures de pouvoir thématiques. Ensuite, la Sicile est mentionnée non seulement par les sources textuelles byzantines, mais aussi par les sources
* La liste des abréviations est donnée à la fin de l'article.
Revue des Études Byzantines 61, 2003, p. 97-141
