Revue d'Archéométrie, 1$ 1994, p. 65-73.
QUELQUES EXPERIENCES SUR LA FIXATION DU PHOSPHORE PAR LES CERAMIQUES
Hamdallah BEARAT* et Daniel DUFOURNIER*
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Des teneurs élevées en phosphore ont souvent été observées dans les céramiques anciennes (Duma, 1972; Dufournier, 1976; Maggetti, 1980 et 1982; Lemoine et Picon, 1982; Freestone et al, 1985; Benghezal, 1989; Rottlânder, 1989; Walter et Besnus, 1989; Morzadec, 1991; Béarat, 1992a et b). Des taux supérieurs à 0,5 % sont, dans la plupart des cas, la conséquence de de contamination; on admet en effet que la teneur moyenne en P2OS de la plupart des argiles est inférieure à 0,5 % (voir par exemple Koritnig, 1978).
L'enrichissement des poteries en phosphore est attribué au milieu de conservation (Lemoine et Picon, 1982; Freestone et a/., 1985; Morzadec, 1991) et peu de travaux ont abordé le phénomène en le reliant à l'utilisation des poteries (Duma, 1972; Béarat, 1990). Ces domaines encore peu étudiés ont été ici explorés empiriquement en observant d'abord l'action sur le matériau céramique de trois produits bien connus, de nature très dissemblable - le lait, le vin et l'urine - puis en étudiant celle de trois solutions phosphatées, de pH différent.
Ces expériences ont été réalisées en faisant varier les paramètres susceptibles déjouer un rôle dans ce
- la nature minéralogique de l'argile et son état de cuisson;
- la température, le pH et la concentration en
phate du milieu;
- le temps de contact du matériau céramique avec le milieu.
Techniques expérimentales
A - Préparation des échantillons
Trois matières premières argileuses ont été choisies:
- une argile naturelle non calcaire (argile dite «de Noron»), référencée NN;
- la même argile à laquelle nous avons ajouté 20 % de calcite (environ 13 % en CaO pour l'argile cuite), référencée NC;
- une argile naturelle calcaire à 12 % de CaO, SC.
Leurs principaux caractères chimiques et minéralogi- ques sont donnés dans le tableau I.
Des échantillons de ces argiles ont été préparés sous forme de disques d'environ 30 mm de diamètre et 15 à 20 mm d'épaisseur. Les disques fabriqués pour chaque argile ont été séparés en trois groupes destinés à être cuitsà des températures différentes (700, 900 et 1100°C). Toutes les cuissons se sont déroulées au four électrique, en atmosphère oxydante, avec une montée en de l'ordre de 100°C/heure et un temps de maintien à la température maximale d'environ 15 heures.
• Institut de Minéralogie et Pétrographie, Université de Fribourg, 1700-FRIBOURG, Suisse.
•* Laboratoire de Céramologie, CRAM., C.N.R.S., Université de Caen, 14032 CAEN Cedex, France.